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 saison 1 saison 3 

X-Files (1993-2002) 

Saison 6

1. Le commencement (The Beginning)

2. Poursuite (Drive)

3. Triangle (Triangle)

4/5. Zone 51 (Dreamland)

6. Les amants maudits (How the Ghosts Stole Christmas)

7. Pauvre diable (Terms of Endearment)

8. Le roi de la pluie (The Rain King)

9. Compte à rebours (S.R. 819)

10. Photo mortelle (Tithonus)

11/12. Toute la vérité (Two Fathers/One Son)

 

13. Agua mala (Agua Mala)

14. Lundi (Monday)

15. Bienvenue en Arcadie (Arcadia)

16. Entre chien et loup (Alpha)

17. Trevor (Trevor)

18. À cœur perdu (Milagro)

19. Le grand jour (The Unnatural)

20. Brelan d'as (Three of a Kind)

21. Spores (Field Trip)

22. Biogenèse (Biogenesis)

Top 5 de la saison 6

 


1. LE COMMENCEMENT
(THE BEGINNING)


Épisode Mythologique

Scénario : Chris Carter
Réalisation :
Kim Manners

Résumé :

Une « chose » sort du corps d’un certain Sandy, l’éventrant totalement, puis tue sauvagement un des amis de Sandy et s’éclipse ! Mulder et Scully échouent à convaincre le FBI de leurs découvertes en Antarctique (voir X-Files : combattre le futur) et sont dessaisis des X-Files qui échoient à Jeffrey Spender et Diana Fowley. Skinner met toutefois Mulder au courant de l’affaire Sandy. Si lui et Scully retrouvent le « monstre », ils pourraient avoir une chance de retrouver les X-Files, d’autant que Gibson Praise a échappé au Fumeur et les a retrouvés. Mais le Syndicat a plus d’un tour dans son sac ; et d’ailleurs, Diana est-elle vraiment du côté de Mulder ?

Critique :

Et nous voici repartis pour la deuxième partie des X-Files, désormais sis sur les collines d'Hollywood. Cette saison 6 nous réserve de grands moments, notamment (mais pas seulement) avec une émergence des toujours excellents épisodes décalés, préfigurant une saison 7 très champagne, mais débute moderato cantabile avec Le Commencement.

En effet, l'épisode souffre des défauts inhérents aux épisodes de présentation, déjà observés dans La Fin. Celui-ci s'évertue à planter le décor de la nouvelle saison en cinquante minutes, tout en intégrant un changement de cap vis-à-vis de la situation présentée à l'issue de Fight The Future et en concluant l'arc Gibson, d'où une intrigue ne faisant pas dans la dentelle. C'est ainsi que Fowley « miraculée » et Spender récupèrent les Affaires Non Classées d'une manière assez mécanique et brutale, et que certaines facilités gênantes sont observées. Que Gibson, même doté de son pouvoir télépathique, passe d'une scène à l'autre de la voiture de l'Homme à la Cigarette à celle de Mulder demeure tout de même bien rapide. On reste assez stupéfait de constater qu'après Fight The Future Scully ne croit toujours pas aux extraterrestres, d'autant que les explications fournies ne convainquent guère ! Elle n'a pas bien vu... Subsiste l'impression d'un rétropédalage assez pénible. Scully apparaît d'ailleurs singulièrement transparente durant cette histoire où elle reste à la traîne, hormis la larmoyante scène hospitalière de rigueur. Il est d'ailleurs étonnant de la voir laisser Gibson sans surveillance, alors même qu'elle connaît les enjeux. Que les sbires de l'Homme à la Cigarette soient présents dans les chambres d'hôpital constitue pourtant une des grandes traditions des X-Files...

On ignorera tout de ces mystérieux techniciens au look de représentants de commerce. De même, Fowley passe outre la paranoïa de Mulder avec une facilité confondante, même s'il est vrai que notre héros manifeste souvent une certaine « empathie » avec les Dames, et particulièrement ses ex ! Qu'il n'ait pas l'idée de demander à Gibson, alors présent, ce que Diana a en réalité dans sa jolie tête, représente cependant le plus beau contresens de l'épisode ! D'autant que le gamin qui passe son temps à faire son numéro reste ici silencieux...

Enfin, pour une fois, on ne goûtera que modérément la prestation de notre ami amateur de tabac qui donne ici inutilement dans le grinçant et la rodomontade ; à croire qu'en passant aux USA, un méchant doit perdre en subtilité et gagner en roulage de mécanique. Cela se manifeste particulièrement durant le passage indigeste du Fumeur avec Spender ; décidément ces scènes père-fils ne présentent guère d'intérêt et pénalisent la série plus qu'autre chose.

L'épisode n'est pas dépourvu d'intérêt pour autant, on apprécie ainsi une mise en scène efficace qui, après une introduction sous un lumineux soleil californien annonçant explicitement les temps nouveaux (dixit Chris Carter), joue habilement des ténèbres et du confinement pour susciter une ambiance anxiogène à souhait, écrin idéal pour des scènes gores très réussies, notamment grâce au talent sans cesse renouvelé des artistes de la série et de Mark Snow. Le Monster of the week s'avère vraiment inquiétant, la scène finale dans la centrale nucléaire évoquant clairement les sombres coursives du Nostromo (avec des héros exceptionnellement résistants à la radio-activité). Le côté "Alien" de l'épisode était d'ailleurs annoncé par le monstre jaillissant de l'estomac de la malheureuse victime interprétée par Rick Millikan, directeur du casting pour toute la série.

Toutefois, mais c'était assez inévitable, après l'épopée flamboyante et les grands espaces de Fight The Future, on ressent devant ce huis clos et ce retour au format de la série comme une impression de resserrement. L'intrigue, malgré ses nombreuses facilités et son aspect utilitaire, se suit sans ennui, d'autant qu'elle demeure limpide dans son développement. Cependant, et c'est bien compréhensible, Chris Carter a voulu continuer à capter les nouveaux venus ayant découvert la série lors de Fight The Future, ce qui nous vaut une nouvelle session d'explication de l'univers, encore une fois lors de la commission d'enquête dont la présidente est, en l'occurence, incarnée par la toujours très tonique Wendie Malick (Dream On, Frasier...). Avouons que, pour le voyageur au long cours sur les mers agitées des X-Files, l'exercice devient un peu lourd.

On remarque également l'introduction du personnage de Kersh, qui se révèlera hélas bien moins dense que Skinner.

On s'amuse beaucoup avec la bonne vanne du technicien de centrale nucléaire fainéant et idiot prénommé Homer, un joli clin d'œil aux Simpsons qui ont d'ailleurs eu Mulder et Scully comme guests le temps d'un formidable épisode. Lors de l'intervention dans la centrale, l'épisode présente également comme mérite de nous offrir comme une fenêtre sur ce qu'auraient pu devenir les Affaires Non Classées si l'association de l'altière et martiale Fowley (superbe prestation de Mimi Rogers) et de Mulder s'était poursuivie. Relation d'un bien moindre intérêt, opérations commando cent fois vues ailleurs (notamment dans des téléfilms de série Z), ambiance stéréotypée... soit une série standard de plus. On s'ennuie, on déteste, et, grâce à cette glaçante vision, on célèbre d'autant plus la présence de Scully avec un solide frisson rétrospectif ! D'ailleurs, le match entre les deux continue puisque Scully met autant d'énergie à pourfendre les postures de Fowley que Mulder, totalement hypnotisé, à défendre celle-ci !

Au total, sans brio excessif, l'épisode remplit peu ou prou son cahier des charges, et permet à la saison de débuter réellement dès le suivant !

Anecdotes :

  • Mulder n’a jamais vu Men in black. Curieux !

  • Première apparition du Directeur adjoint Alvin Kersh, nouveau supérieur (pas commode) de Mulder et Scully. Il est interprété par James Pickens Jr. Son nom vient des deux personnages principaux (Dr.Kersh et Anton Kersh) du film Vampire circus (1971), un des films préférés de Chris Carter. A.D.Maslin tire son nom de A.D.Bart et Jane Maslin, deux critiques de cinéma/séries travaillant respectivement au New York magazine et à Variety.

  • Il est sensé être 17h46 quand le bus s’arrête dans l’introduction, mais vu la position des ombres sur le sol, on est plutôt proche de midi.

  • Mulder fait référence au chanteur RuPaul. C’est une drag queen très populaire dans les années 90. Il contribua à casser l’image négative donnée par ce mode de vie qui avait été jusque-là sa marque de fabrique.

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    2. POURSUITE
    (DRIVE)


    Scénario : Vince Gilligan
    Réalisation : Rob Bowman

    Résumé :

    Patrick Crump est pourchassé par des policiers après avoir volé une voiture et y avoir mis sa femme, Vicky. Interpellé quelques heures après, sa femme meurt subitement par explosion d’un organe interne ! Mulder et Scully apprennent l’événement qui excite la curiosité de Mulder, qui délaisse les tâches subalternes où ils ont été affectés. Ayant attrapé la maladie de sa femme, Crump parvient à s’enfuir et prend en otage Mulder qu’il contraint à rouler sans s’arrêter, très vite, car c’est le seul moyen de retarder l’avancée du mal fatal. Parallèlement, Scully enquête pour déterminer les causes de la mort de Vicky et trouver un remède pour Crump…

    Critique :

    Rétrospectivement, cet épisode a une qualité historique par la rencontre prophétique entre Vince Gilligan et Bryan Cranston. L'expérience avec l'acteur marquera durablement le scénariste qui n'hésitera pas une seconde au moment de choisir l'acteur qui portera sur ses épaules sa future série Breaking Bad, unanime succès critique et commercial aujourd'hui considérée comme une des plus grandes séries de tous les temps. Mais indépendemment de cela, cet épisode regorge des qualités narratives que l'on aime tant chez Gilligan. Très « speed », cet épisode débute de manière originale par une immersion dans une émission en direct décrivant l’action effrénée en cours, procédé qui se verra répété et amplifié dans X-Cops, un des épisodes OVNI de la saison 7.

    Le résultat apparaît d’ores et déjà spectaculaire avec un plongeon immédiat dans l’histoire joint à un effet décalé très réussi. Privé de ses repères coutumiers, le spectateur demeure aussi stupéfait que diverti. Ce brouillard donne un véritable intérêt à la partie enquête menée par Scully, à partir d'un postulat aussi insolite qu'intriguant, aux limites de la Quatrième Dimension, même si sa résolution se révèle par contre purement "X-Filienne" ! L'intrigue opère en fait un habile basculement, où cette partie backstage se révèle plus importante que l'épopée de Mulder, évitant ainsi une situation trop figée dans l'espace étroit d'une voiture. On échappe ainsi à des péripéties artificielles ou à des conversations plus ou moins mélo inintéressantes.

    Dans cette même veine, l'histoire évite de tracer un portrait lénifiant ou éploré de la victime, pour au contraire nous offrir un redneck raciste et parano, interprété avec une rare conviction par l'excellent Bryan Cranston (Seinfeld, How I Met Your Mother, Malcolm...), mais qui finit par révéler son humanité (la patte de Vince Gilligan) et par sympathiser avec Mulder. D'ailleurs, après l'issue tragique du voyage, Mulder se montre particulièrement ému et abattu ; l'image, filmée devant l'immensité du Pacifique, est magnifique, avec à la clef un grand numéro de Duchovny.

    La mise en scène de Rob Bowman se montre à la hauteur de cette superbe histoire, avec une exploitation fort aboutie de ces légendaires autoroutes américaines traversant des immensités désertiques sous un soleil implacable. Chris Carter parvient ainsi à justifier la migration au sud, en apportant des atmosphères nouvelles et en renforçant l'identité américaine de la série. Scully bénéficie, elle, d'une de ces autopsies si particulières (on ne s'en lassera jamais) et d'une scène stupéfiante d'esthétisme et de maîtrise technique où elle se rend au domicile des victimes, dans une zone frappée par le fléau. Les ténèbres, le savant emploi des lumières et les habiles travellings arrières, ces tenues de protection évoquant celles des astronautes, font irrésistiblement penser à ces abordages de vaisseau spatial renfermant de terribles dangers, du genre Event Horizon. L'effet ressort très réussi et la scène se suit avec une grande intensité, d'autant que Gillian Anderson (très en beauté) nous régale toujours par son jeu très inspiré. On lui doit ainsi la jolie pirouette finale après la confrontation avec le sinistre Kersh, nous rappelant que la belle n'a pas la langue dans sa poche quand la moutarde lui monte au nez, les amateurs de I Want To Believe s'en souviendront !

    Un épisode fort efficace, où l'on retrouve également Michael O'Neill (24h chrono, The Unit, À la Maison Blanche...) et Mindy Seeger, la terrible journaliste de West Wing. Après avoir rassuré dans Le Commencement sur le maintien du style et des fondamentaux de la série, Chris Carter n'hésite pas à user avec bonheur des nouvelles potentialités s'offrant à lui. L'écriture de la série reste bien toujours aussi maîtrisée ! Le projet de sonar évoqué existe réellement, sous le nom de... Project Sanguine ! Allez, bientôt Love Boat !

    Anecdotes :


    Gilligan déclara à propos de Drive : "J’ai eu l’idée de cet épisode en m’inspirant du film Speed et d’un épisode de la série Homicide, dans laquelle on suit un homme qui s’apprête à mourir après être tombé d’un quai de métro. Les flics restent à ses côtés et on s’aperçoit que c’est un sale type. Un sale type qui sait qu’il va mourir. Je voulais raconter l’histoire d’un gars comme ça, pour lequel on aurait de l’empathie."

  • Le nom de la station essence est « Holly’s ». Une nouvelle référence à la petite amie du scénariste, Holly Rice.

  • C’est le chanteur de country Junior Brown qui joue le fermier dans la première scène post-générique. Vince Gilligan étant un fan du musicien, il lui demanda de faire une apparition dans la série.

  • Erreurs : Quand Mulder descend la dernière colline, les vitres sont fermées ; quand il stoppe la voiture près de Scully, elles sont ouvertes. Quand Krump jete le téléphone de Mulder par la fenêtre, on peut voir les reflets de la caméra, tout comme pendant la transition de la scène à la suivante. Lors de la fouille de la pelouse des Krump, Gillian Anderson braque sa lampe sur un membre de l’équipe qui part aussitôt se mettre hors-champ. On peut voir également le canon qui projette du faux sang dans la voiture de police un peu avant l’explosion. Enfin, Scully ne porte pas de gants quand elle fait son autopsie alors qu’il y’a risque de contamination.

  • Le film que regarde la vieille voisine est La colline de l’adieu (1955), mélodrame d’Henry King avec William Holden et Jennifer Jones.

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    3. TRIANGLE
    (TRIANGLE)



    Scénario : Chris Carter
    Réalisation : Chris Carter

    - Hey, Scully.
    - Yes ?
    - I love you.
    - Oh, brother !

    - Use your head, Scully. It'll save your ass.
    - Save your own ass, Sir. You'll save your head along with it.

    Résumé :

    Mulder se retrouve sur le Queen Ann, vaisseau anglais qui disparut en 1939 dans le triangle des Bermudes, et qui n’avait jamais été retrouvé. A sa grande surprise, il est entré dans la faille spatio-temporelle du Triangle qui l’a projeté en 1939 alors que les nazis viennent de conquérir le navire ! Pire, il y découvre des personnes de son entourage (Scully, le Fumeur, Skinner…) dans la peau de personnes différentes ! Mulder, par sa présence, risque de changer l’Histoire de manière désastreuse ! Les Bandits Solitaires et Scully doivent à tout prix retrouver le vaisseau fantôme…

    Critique :

    Dans leur anthologie globale du Fantastique, les X-Files ne pouvaient faire l’économie d’un épisode sur le célébrissime Triangle des Bermudes. Avec Triangle (cinquième épisode dirigé par Chris Carter en personne), la saison 6 nous régale d’un épisode décalé aussi novateur et impressionnant dans le fond que dans la forme. La mise en scène réalise en effet l’exploit de filmer l’ensemble de l’épisode en quatre immenses plans-séquences (comme dans La corde) où la caméra virevolte sans fin, avec une dextérité sans failles, le long des immenses coursives du bateau. Écouter le passionnant commentaire audio de Chris Carter permet de mesurer à quel point cet exercice de style virtuose a nécessité des trésors d’imagination et d'inventivité de la part de l’équipe de tournage. L’ensemble donne une impression de cauchemar éveillé vraiment prégnante, ne laissant pas un seul instant de répit à un spectateur ayant vraiment l’impression de passer à travers l’écran et de suivre physiquement Mulder durant cette étrange odyssée. L’effet se voit renforcé par une superbe photographie et la toujours envoûtante musique de Mark Snow, enrichie de grands classiques de l’époque. La fusion de ces divers éléments s’avère parfaite, illustrant le savoir-faire et la maîtrise technique inouïs atteints par la série.

    Mais l’épisode ne se contente pas de constituer une démonstration de force, il nous raconte aussi une passionnante histoire d’univers parallèle, un thème de Science-Fiction toujours très riche et porteur (on songe à l’Univers Miroir de Star Trek ou au Miroir Quantique de Stargate SG1). En effet, Mulder ne se contente pas de voyager dans le temps mais semble bien pénétrer dans une Histoire alternative où les personnages de la série occupent les principaux rôles à bord du Queen Anne. Tiens, le Fumeur en SS, cela nous rappelle Le pré où je suis mort… Cela pourrait rester un gadget, mais contribue au contraire à développer une atmosphère d’étrangeté fort plaisante, d’autant que les acteurs s’amusent visiblement beaucoup, avec un entrain fort communicatif. Comme léger bémol, on pourra regretter l’absence de Nicholas Lea, et surtout le fait que le commandant anglais que le SS fait abattre ne soit pas interprété par John Neville, le rôle lui aurait convenu à merveille, et cela nous aurait permis de retrouver encore une fois ce très grand comédien. La sensation d’avoir pénétré dans un autre univers s’accentue par le ton frénétique des personnages (y compris Mulder), leurs déclarations et postures sans cesse outrées ou archi caricaturales, l’irréalisme des situations et des péripéties. Quelque chose ne colle pas du tout, impression sans cesse distillée par une intrigue n’hésitant pas à jouer la carte de l’humour, voire du burlesque. On se régale, d’autant que l’histoire se paie même le luxe de développer une thématique très X-Files, entre espions multiples et paranoïa généralisée. Trust no one ! Les décors sont de plus magnifiques, avec une évocation très aboutie des paquebots transatlantiques des années 30, tout est soigné avec une profusion de détails assez stupéfiante.

    Pour éviter toute lassitude, l’action est interrompue par un passage également enthousiasmant, prenant place sans hésitation aucune dans le top 5 des meilleures scènes de Scully pour toute la série. Cela débute très fort avec l’arrivée tonitruante des Bandits Solitaires très en forme et tout frétillants de se retrouver dans l’antre de l’ennemi. L’annonce de la disparition de Mulder provoque une hilarante crise de nerfs chez Scully, magnifiquement rendue par une Gillian particulièrement en verve. Celle-ci sait vraiment tout jouer à la perfection ! L’accompagner dans ce tourbillon s’avère un inoubliable moment de comédie, d’autant que Scully multiplie les bourdes désopilantes et les mimiques irrésistibles. On a aussi droit à ses jolis coups de gueule habituels (la VF édulcore, hélas), heureusement qu’elle ne croise pas Fowley… (Mimi Rogers devait à l’origine jouer la chanteuse, finalement il s’agit de la secrétaire de Kersh, une vipère blonde). On partage le soulagement de Scully lors de l’intervention finale d’un Skinner justement récompensé pour ses efforts (décidemment, ils lui auront tout fait !), et l’exubérance finale du personnage papier à la main (yeah !), tout en applaudissant franchement le superbe récital de l’actrice. Ce plan séquence constitue également un nouveau tour de force technique, car « l’ascenseur » ne monte évidemment pas, l’équipe de tournage doit alors s’adapter en quelques instants. On en profite également pour recevoir la confirmation que Fowley et Kersh travaillent bien pour le Fumeur (quel scoop !) et surtout pour entrapercevoir le van crasseux des Bandits Solitaires, que les amateurs d’Au cœur du complot apprendront à connaître !

    Enfin, Triangle représente également un épisode à forte valeur ajoutée pour la relation Mulder/Scully. En effet, Carter continue à supplicier gaiement nos ami(e)s shippers : après le baiser interrompu de Fight The Future et le faux Mulder de Small Potatoes, voici le baiser avec... la fausse Scully, agent secret très craquante et dotée d’un solide crochet du droit. Les deux versions se croisent dans un plan très amusant, mais l’Événement se voit une nouvelle fois reporté ! L’épisode se conclut d’ailleurs sur un gag irrésistible, Mulder passant aux aveux mais Scully mettant ceux-ci sur le compte du délire. On finit par se demander si la relation pourra bien se concrétiser dans cet univers-ci… La scène s’achève cependant sur une pure note d’émotion, quand Mulder passe la main sur sa joue endolorie, un sourire attendri aux lèvres. Allons, tout n’est pas perdu, mais Chris Carter n’a pas fini de jouer avec maestria sur le thème inépuisable de la tension amoureuse existant entre nos deux héros. Rendez-vous dans MillenniuM… Épisode époustouflant sur la forme et très abouti sur le fond, Triangle manifeste qu’en ce début de sixième saison, la série n’a rien perdu de sa maestria et de son envergure. Les X-Files savent à merveille endosser différentes tonalités et évoluent vers plus de fantaisie en ce début de saison 6 (ce qui lui fera perdre du public…). Les failles spatio-temporelles et leurs étranges conséquences vont d’ailleurs nous valoir un autre chef-d’œuvre dès l’épisode suivant !

    Anecdotes :

    • Premier des quatre baisers échangés entre les deux héros de la série. Mulder embrasse cependant une Scully alternative.
    • Les costumes d’époque furent récupérés sur le matériel du tournage de Titanic.

    • Pour la douzième fois de la série, l’indicatif du générique The Truth is out there est remplacé par Die Wahrheit ist irgendwo da draußen, traduction de l’indicatif en allemand. Deuxième fois que cela arrive sur un loner. Unique fois que L’Homme à la cigarette et Jeffrey Spender apparaissent dans un loner.

    • Episode tourné en quatre plans-séquences de 11 minutes. Les scènes du paquebot ont été tournées à l’intérieur du Queen Mary.

    • Première apparition de la secrétaire de Kersh, jouée par Laura Leigh Hughes.

    • L'épisode comporte de nombreuses références au Magicien d’oz (sorti en 1939, comme durant l’action sur le paquebot), un autre voyage merveilleux dans un univers parallèle : le capitaine du navire s’appelle Yip Harburg, parolier du film ; la chanteuse s’appelle Almira Gulch, comme le personnage de Margaret Hamilton ; le bateau de Mulder s’appelle Lady Garland en hommage à Judy Garland ; Triangle est par ailleurs une référence à la couverture de l’album des Pink Floyd : Dark side of the moon, qui leur fut inspiré par le film de Fleming. Enfin, Skinner mentionne le chien Toto, et Scully dit à Mulder la morale du film à la fin : There is no place like home.

    • Frohike évoque par ailleurs la série de 1964 L’île des naufragés (Gilligan’s island) en commentant par « Gilligan awakes ! » le réveil de Mulder. Mais Gilligan est également le nom d’un des scénaristes d’X-Files.

    • Dans l’épisode Turno di noche (saison 40) du soap opera Hospital central, un des personnages regarde cet épisode.

    • On entend dans l’épisode Jeepers Creepers de Johnny Mercer et Harry Warren, ainsi que Bei mir bist du schön, par The Andrews Sisters.

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    4/5. ZONE 51
    (DREAMLAND)
     
    xfiles 6 4

    Scénario : John Shiban, Vince Gilligan, & Frank Spotnitz

    Réalisation : Kim Manners (1re partie) et Michael W. Watkins (2e partie) (crédité comme "Michael Watkins")

    - Mulder, it's the dim hope of finding that proof that's kept us in this car or one very much like it for more nights than I care to remember. Driving hundreds, if not thousands of miles, through neighborhoods and cities and towns, where people are raising families and buying homes and playing with their kids and dogs and in short, living their lives. While we... we just keep driving.
    - What's your point?
    - Don't you ever want to stop? Get out of the damn car and live something approaching a normal life ?
    -
    This is a normal life.

    Résumé :

    Un indicateur travaillant dans la Zone 51, zone militaire ultrasecrète qui utiliserait de la technologie extraterrestre, est prêt à donner des informations à Mulder. Mais Morris Fletcher, employé haut-gradé, intercepte Mulder et Scully. C’est alors qu’un OVNI les survole, entraînant une faille spatio-temporelle : désormais, Mulder a l’apparence de Fletcher, et Fletcher celle de Mulder !! Personne d’autre n’a rien remarqué, tout le monde prenant l’un pour l’autre ! Si Mulder a l’occasion d’explorer la Zone, il songe surtout à rétablir l’ordre. Fletcher, soulagé de quitter sa vie ennuyeuse, est par contre beaucoup moins pressé... Tout ce dawa va se compliquer avec les interventions de Kersh et la suspicion qui règne à Dreamland…

    Critique :

    Après Triangle et avant Les amants maudits, Zone 51 constitue une nouvelle preuve de l’évolution de la série vers davantage de fantaisie. En effet, l’épisode s’autorise toutes les audaces et joue franchement la carte de la pure comédie. Cette histoire de faille spatio-temporelle propageant le chaos dans notre univers avant de se rétracter constitue une belle variation sur un des thèmes remontant à l’origine de la série (l’exploitation militaire de technologies aliens), de même qu’une source d’images spectaculaires où les moyens développés par la série autorisent de fabuleux et imaginatifs effets spéciaux. Néanmoins, il ne s’agit que d’un prétexte car le véritable sujet de l’épisode est ailleurs.

    En effet, dans un effet assez proche du Seigneur du magma, mais avec une narration plus classique, l’épisode entreprend une satire corrosive de la mythologie existant autour de la fameuse Zone 51 et de l’organisation Majestic, très différente ici de ce que nous laissait apercevoir Dark Skies. Loin de constituer la sombre menace habituelle, Majestic apparaît comme une caricature au vitriol d’une administration lambda, avec son lot d’agents démotivés, bourrins, ou arrivistes, ses ragots, ses combines, sa vie sociale. On ne peut s’empêcher de parfois songer à un Caméra Café un peu spécial… Ainsi, Howard, brillamment interprété par Michael B. Silver (Urgences, Les Experts…) incarne à la perfection le jeune loup intelligent et prêt à tout pour sa carrière, tandis qu'à l’autre extrémité le général est lui le cadre usé, marquant le pas à l’approche de la retraite, et passablement dépassé. Le voir s’adresser à Mulder pour tâcher de voir de quoi il en retourne à propos des extraterrestres reste un grand moment ; Majestic n’est plus le cœur du Complot, mais une périphérie peu reluisante. Cette satire d’un des pans les plus célèbres des théories conspirationnistes n’épargne pas ses jeunes fans, décrits une nouvelle fois comme de parfaits crétins.

    Le système proche de Code Quantum choisi pour filmer Mulder et Fletcher dans le corps de l’autre fonctionne à la perfection. Les très belles scènes du désert viennent nous rappeler que, décidément, nous sommes en Amérique. On regrettera que le cliffhanger coutumier des doubles épisodes se révèle ici assez convenu et déjà vu par ailleurs (Mulder capturé par des militaires…), mais cela est contrebalancé par une introduction de la seconde partie absolument irrésistible et pour le coup très originale ! Gamin, Mulder était déjà un fan de SF et de Star Trek, joli clin d’œil à cette autre très grande série…

    La désacralisation de l’Homme en Noir culmine avec le véritable héros de l’épisode, Morris Fletcher. Celui-ci a des problèmes d’argent, une famille des plus « charmantes » (mention spéciale à la fille, à se pendre), et s’ennuie copieusement dans son travail, soit un quotidien passablement minable dont on comprend qu’il veuille s’échapper. On se situe véritablement loin de l’effrayant archétype coutumier ! Au-delà du pastiche, Fletcher apporte beaucoup d’humour par lui-même. Bien loin des Génies du Mal et des monstres froids peuplant la Conspiration, l’ami Morris est une fripouille cynique et jouissive (et lâche), n’ayant d’autre but que de profiter de la vie. Son mauvais goût satisfait, sa fainéantise, sa ruse malicieuse, son cynisme goguenard, et sa veule crapulerie tranchent avec l’atmosphère habituelle des X-Files, et nous valent des scènes très amusantes. C’est notamment le cas lors d’une confrontation d’anthologie avec des Bandits Solitaires totalement en roue libre (grand moment de pure rigolade), ou de sa scène de séduction avec Scully virant au fiasco que l’on s’amusera à comparer à la tentative bien plus réussie de l’autrement plus attendrissant et sincère Eddie (Small potatoes). Décidemment, le crime ne paie pas !

    Michael McKean (Spinal Tap, Dream On, Saturday Night Live) apporte immensément à l’épisode, donnant une présence étonnante et une verve irrésistible à son héros, parmi les plus divertissants de la série. On finit par s’attacher à ce personnage picaresque et finalement non dénué d’humanité, comme le prouve la tendresse manifestée envers son épouse (impeccable et énergique Nora Dunn, autre grande figure du Saturday Night Live). C’est toujours avec un vif plaisir qu’on le retrouvera pour d’autres pétillantes apparitions, dans les X-Files comme dans Au cœur du complot.

    Mulder et Scully apportent efficacement leur contribution à la réussite humoristique de l’épisode. Après une introduction réussie mettant en scène le hiatus existant dans le duo, Scully se révèle très amusante par son scepticisme à tout crin. On aurait pu croire, après tout ce qu’elle a vécu, notamment avec le Bounty Hunter ou Eddie, qu’elle éprouverait l’ombre d’un commencement de doute face aux tentatives de communication de Mulder, mais non, rien à faire ! « C’est tout toi, ça !» finira par s’agacer le malheureux… L’effarement, l’agacement (toujours une bonne ambiance avec la secrétaire de Kersh), puis un franc dégoût devant les attitudes de Fletcher vaudront aussi le détour, avec au passage quelques-unes de ces colères irrésistibles dont Scully a décidemment le secret. Mais la palme revient à Mulder (toujours accro au porno) qui, parti pour découvrir les mythiques secrets de la Zone 51, se trouve en fait face à une version inversée et cauchemardesque du futur Arcadia.

    Comme souvent, on accordera une petite prime à Duchovny par rapport à Gillian dans le domaine de l’humour, non pas que cette dernière soit médiocre (tout à rebours), mais bien parce que celui-ci se révèle un acteur comique vraiment génial. Son talent éclate ici comme rarement tant ses scènes face à la famille Fletcher, ses agacements, jusqu’à ses crises de nerfs, font à chaque fois éclater franchement de rire. Cela culmine avec la fameuse scène du miroir, inspirée des Marx Brothers, définitivement l’un des plus grands moments de n’importe quoi de la série ! Il reste particulièrement amusant de voir Mulder totalement dépassé dans son rôle de père de famille, un exercice finalement bien plus compliqué que la chasse à l’Alien, ce n’est pas Hank Moody qui dira le contraire ! On assiste à une illustration parfaite de la problématique de la scène d’introduction : Mulder apparaît bien incapable de vivre une vie normale…

    C’est d’ailleurs sur un ultime gag irrésistible de Mulder, bénéficiant désormais d’un lit à eau du meilleur goût, que s’achève ce double épisode particulièrement divertissant et tonique, le seul non relié directement à la Mythologie. Les auteurs, voyant que leur inspiration nécessitait deux épisodes, durent demander l'autorisation de Carter d'en faire un double épisode.

    Anecdotes :

  • Première apparition de Morris Fletcher joué par Michael McKean, on le verra par ailleurs dans le dernier épisode du spin-off Au cœur du complot. Fletcher est en réalité le prénom du fils de McKean.

  •  Scully prend en ce moment des yaourts au pollen car elle est en plein trip pollen, ce dont Mulder se désole. De plus, Les Bandits Solitaires dégustent maintenant des œufs à la mexicaine. Le déménagement à Los Angeles a vraiment bousculé les esprits de tout le monde !

  •  Mulder a chez lui une salle servant de débarras (où il entrepose notamment ses magazines pornographiques). Nettoyée par Fletcher, elle deviendra la salle abritant l’alien de Spores.

  •  D’après Kim Manners, Zone 51 n’est que la troisième fois où le gag du miroir est réalisé. Le premier fut bien entendu la scène mythique de La soupe au canard des Marx Brothers (1933), ce sont Groucho et Harpo qui font ce sketch. La deuxième fois est dans Lucy and Harpo Marx, un épisode de la sitcom I love Lucy (1951). Le sketch est effectué avec de nouveau Harpo Marx, et avec Lucille Ball, l'héroïne, grimée en Harpo. En réalité, il n’y a évidemment pas de miroir entre Duchovny et McKean (la buée est un effet spécial), il s’agit d’un morceau de balsa. Kim Manners déclare qu’il fallut 12 prises pour tourner la scène !

  •  Dreamland est le surnom donné à la Zone 51. Il signifie Data Repository Establishment And Management Land.

  •  Dans l’épisode La traversée (saison 2) de la série Fringe, une des victimes du changeur de formes regarde cet épisode.

  •  Saddam Hussein serait selon Fletcher un acteur américain qui doit jouer le rôle de dictateur d’Irak du nom de John Gilnitz. Nouvelle apparition donc de ce nom-valise regroupant trois des quatre principaux scénaristes de la série : John Shiban, Vince Gilligan, Frank Spotnitz.

  •  Petit clin d’œil au Seigneur du magma (saison 3) avec le terme mandroid army que l’on peut lire dans le journal des Lone Gunmen.

  •  Mulder, en essayant un nouveau costume noir, se prend pour Johnny Cash, le chanteur surnommé « L’homme en noir ».

  •  Petite erreur : à la fin de la scène du miroir, quand Joanne entre dans la chambre, Mulder se retourne, et on peut remarquer que c’est bien le reflet de Mulder qu’on voit dans le miroir, et non celui de Fletcher comme cela devrait être.

  • Au FBI, Morris joue au jeu vidéo Tiger Woods PGA Tour 99 (1998).

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    6. LES AMANTS MAUDITS
    (HOW THE GHOSTS STOLE CHRISTMAS)



    Scénario : Chris Carter
    Réalisation :
    Chris Carter

    Résumé :

    1916, Maurice et Lydia, un couple d’amants maudits, fit un pacte et se donna la mort pour passer l’éternité ensemble, et chaque nuit de Noël dans leur manoir. Curieusement, chaque couple qui s’installa ensuite dans le manoir a connu la même fin tragique : l’un tira sur l’autre avant de se donner la mort ! Mulder, excité à l’idée de rencontrer des fantômes, demande à Scully de le rejoindre là-bas le soir de Noël. A peine entrés, la porte d’entrée se referme sur eux. Les voilà maintenant prisonniers du manoir hanté qui est maintenant la proie d’événements terrifiants, dont le moindre n’est pas la découverte de deux cadavres qui leur ressemblent étrangement…

    Critique :

    Eh oui, troisième "quatre étoiles" de suite, mais il faut dire que la sixième saison frappe très fort, avec un nombre plus que conséquent de loners particulièrement réussis. Toute série se doit de présenter au moins un épisode de Noël, et les X-Files ne dérogent certes pas à cette règle, une nouvelle fois après Emily.

    Mais ils sacrifient à la tradition à leur propre manière, offrant une relecture très personnelle du Christmas Carol de Dickens, auquel l’extrait du film Scrooge rend directement hommage. L’épisode parvient à concilier de manière étonnamment fluide et pertinente le merveilleux de Noël et l’épouvante propre aux histoires de maisons hantées. Cette remarquable performance doit beaucoup à la mise en scène aussi suggestive que volontairement archétypale, audacieusement en quasi temps réel, au très classieux décor reprenant scrupuleusement tous les poncifs du genre (on se croirait dans The Haunting), et au couple aussi fantaisiste que sanguinaire formé par ces fantômes très particuliers. Celui-ci, pétillant, machiavélique, et finalement si romantique, se voit porté par deux guest stars de luxe : Edward Asner (Lou Grant, Racines…) et Lily Tomlin (Laugh-In, Saturday Night Live, Desperate Housewives...). S’amusant visiblement beaucoup, les deux comédiens vétérans nous font profiter de tout leur talent et de leur enthousiasme particulièrement communicatif. Dans la meilleure tradition des épisodes décalés, ils apportent beaucoup d’humour au récit.

    Notre couple vedette s’avère aussi particulièrement amusant. Mulder divertit beaucoup dans son numéro coutumier de fondu du surnaturel, mais pour une fois c’est Scully qui se révèle prépondérante dans ce domaine. D’abord contrariée durant ses préparatifs de réveillon (et on imagine sans mal à quoi ressemble une veillée de Noël dans la famille Scully…), elle calme son début de nervosité par un laïus habituel singulièrement rallongé, avant de connaître sa plus hilarante panique de la série ! Le gag énorme du pseudo couple de cadavres vaut aussi le détour ! On appréciera également les références à Ghostbusters… Outre le passage de tension sanguinolente, le duo doit cependant faire face à un profil psychologique particulièrement acide de la part des spectres, mais loin d’être totalement erroné sur la nature de leur couple si particulier… Cela nous vaut une scène finale très émouvante, où nos héros réaffirment la solidité de leur relation, avec sa part d’ambiguïtés et de non-dits, avant de célébrer ensemble la magie de Noël…

    Un épisode totalement à part, aussi riche que divertissant, et somptueusement filmé en huis clos par Chris Carter en personne, avec la qualité des effets spéciaux propre à la série. Après les Avengers, Dickens et Noël ont vraiment le talent d’inspirer de grands épisodes !

    Anecdotes :

  • Épisode de la série comportant le moins de personnages, seulement 4 : Mulder, Scully, Maurice, et Lydia.

  • Le déménagement de la série à Los Angeles coûta cher à la FOX, qui pour amortir les dépenses demanda à Carter un épisode peu coûteux à produire (pratique connue sous le nom de « bottle épisode »). Ainsi, la quasi-totalité de l’intrigue se déroule dans une pièce, et avec seulement quatre comédiens en tout et pour tout. Ce fut en effet l'épisode le moins onéreux de la saison.

  • Le titre original de l’épisode est une allusion à un célèbre dessin animé de 26 minutes de 1966 How the Grinch stole Christmas ! Il s’agit d’un des contes de Noël au cinéma les plus aimés en Amérique.

  • Maurice dit à Mulder qu’il connaît du monde à l’ACLU (American Civil Liberties Union). Edward Asner, l’interprète de Maurice, a réellement milité au sein de cet organisme connu en France sous le titre Union Américaine pour les Libertés Civiles.

  • 1013 du jour : Mulder écoute la radio de sa voiture à la fréquence 101.3.

  • L’adresse du manoir est 1501 Larkspur Lane. C’est une référence à une histoire de Nancy Drew (Alice Roy en VF) Password to Larkspur Lane.

  • L’auteur du livre How the ghosts stole Christmas dans l’épisode est « R.Grimes ». Une allusion à un membre de l’équipe technique de la série : Marty Grimes.

  • On entend vers la fin la chanson Have yourself a Merry little Christmas, chantée par Bing Crosby.

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    7. PAUVRE DIABLE
    (TERMS OF ENDEARMENT)


    Scénario : David Amann
    Réalisation : Rob Bowman

    Résumé :

    Laura Weinsider apprend que le bébé qu’elle porte a des traces de difformité, ce qui accable profondément Wayne, son mari. La nuit même, Laura fait un cauchemar où un démon de l’enfer lui arrache son fœtus ! Elle se réveille, mais constate avec horreur qu’elle est couverte de sang et que le bébé n’est plus dans son ventre !! Mulder soupçonne que Wayne est un démon. Il ignore que Wayne vit une seconde vie, avec une autre épouse, également enceinte de lui. Mais les apparences sont trompeuses, et nos agents vont être les témoins d’un diabolique jeu de dupes…

    Critique :

    Vous les femmes, vous le charme, vos sourires nous attirent, nous désarment, vous les anges, adorables, et nous sommes nous les hommes pauvres diables… Après une étonnante succession de récits particulièrement marquants, la saison 6 marque le pas avec cet épisode très mineur.

    L'histoire se montre larmoyante à souhait, n'hésitant pas à user d'effets particulièrement appuyés qui ne dépareraient pas dans un culebrón. Pleurnicheries, musique très guimauve, conclusion des plus prévisibles et maintes fois vue ailleurs... On s'ennuie pas mal durant cet épisode essentiellement lacrymal.

    Demeurent un hommage marqué à Rosemary's Baby (auquel Scully fait explicitement allusion) et à Hitchcock (le lait offert de Soupçons), des effets spéciaux toujours spectaculaires, et quelques moments amusants en début d'épisode avec la nullité crapoteuse de Spender, ou Scully restant au bureau à se coltiner le travail ennuyeux tandis que Monsieur vadrouille comme de coutume dans le pays en quête d'aventures palpitantes. Ces coups de fil plus ou moins aigres-doux quand l'un des deux reste en retrait procurent toujours des scènes divertissantes, mais il n'en reste pas moins que l'on a déjà vu nettement plus percutant ailleurs (La guerre des coprophages, La poupée...).

    L'épisode comportait une grande attraction en la personne de Bruce Campbell, le Ash de Evil Dead, l'Autolycus de Xéna et Hercule, le facétieux cow-boy aux aventures si décalées de Brisco County Jr. (fabuleuse série !)... le perpétuel invité de Spiderman est devenu une vraie vedette dans le domaine du Fantastique, et c'est toujours avec grand plaisir que l'on suit son jeu vif et malicieux. Malheureusement, Pauvre Diable lui réserve un rôle aux antipodes de son plus grand potentiel basé sur l'humour et la dérision. Il s'y révèle certes convaincant, mais loin du récital humoristique espéré. On ne peut s'empêcher de demeurer avec l'impression d'un rendez-vous manqué entre Campbell et les X-Files. Une interrogation continue à nous titiller concernant cet acteur si plaisant que l'on apprécie vraiment beaucoup, quand on sait qu'il avait postulé pour le rôle de Doggett. Son humour et sa fantaisie auraient-il suscité un personnage plus proche de Mulder, heurtant moins certains fans de la série ? Quoiqu'il en soit, Carter a préféré opter pour une rupture, avec le sérieux et l'incrédulité du personnage de Robert Patrick, lui-même vraiment parfait dans ce rôle par ailleurs !

    Un épisode en dessous, qui aurait sans doute gagné à se situer dans MillenniuM et son ton si particulier. On remarquera que le rapprochement de la série avec Hollywood présente décidément comme conséquence de favoriser l'apparition de guests très relevés !

    Anecdotes :

  • On comprend que Wayne parvient à entendre la voix de Mulder en utilisant le moniteur du bébé laissé dans la chambre, mais comment fait-il pour entendre celle de Scully qui est à l’autre bout du téléphone ?

  • Le titre anglais de l’épisode fait référence au film Tendres passions (1983) dont c’est le titre original. Term of endearment est une expression signifiant un être aimé ou un objet, une passion, pour laquelle on ressent un attachement fort, amoureux. Mulder fait référence au manga Speed Racer quand il se demande où sont passés les enfants disparus.

  • On entend dans l’épisode Only happy when it rains de Garbage.

  • 1013 du jour : il est 22h13 quand Wayne brûle l’enfant.


  • 8. LE ROI DE LA PLUIE
    (THE RAIN KING)


    Scénario : Jeffrey Bell
    Réalisation : Kim Manners

    Well, it seems to me that the best relationships - the ones that last - are frequently the ones that are rooted in friendship. You know, one day you look at the person and you see something more than you did the night before. Like a switch has been flicked somewhere. And the person who was just a friend is... suddenly the only person you can ever imagine yourself with.

    Résumé :

    Daryl Mootz se dispute avec sa fiancée Sheila, et part en voiture. Mais alors qu’une sécheresse a sévi dans la province pendant six mois, une averse de grêlons en forme de coeurs se met à tomber soudainement ! Daryl a un accident et s’en sort avec une jambe amputée. Curieusement, il semble depuis être capable de contrôler le temps, faisant tomber la pluie sur commande contre de juteux honoraires. Mulder et Scully sont témoins du phénomène. Mais le lendemain, Daryl assiste à son premier échec, « sa » pluie s’arrêtant prématurément. Mulder pense que la belle Sheila serait peut-être la clé involontaire de l’histoire…

    Critique :

    Après la petite pause de Pauvre diable, la saison 6 (vraiment une des meilleures de la série) reprend son parcours d'une étonnante qualité, tout en continuant à mettre en avant la relation Mulder/Scully. En effet, après Triangle et davantage encore Les amants maudits, c'est de nouveau avec beaucoup d'humour que le Roi de la pluie en étudie les sinueux contours. De plus, c'est le formidable Jeffrey Bell, ici à l'aurore de sa brillante carrière de scénariste (et que les amateurs de Joss Whedon connaissent bien), qui est à l'oeuvre, et le résultat montre déjà son grand talent.

    L'épisode se situe dès le commencement dans l'humour, avec une vision certes attendrie mais néanmoins acidulée de l'Amérique profonde. Il en va de même avec l'irritation de Scully quand celle-ci s'agace que Mulder lui ait "monté un bateau" à propos d'une histoire qu'elle juge absurde. Cela donne à l'amicale joute habituelle un peu plus de piquant qu'à l'accoutumée, avec des rebondissements très pétillants. Comme le remarqueraient les Amants Maudits, ce n'est pas encore cette fois que Scully prouvera que Mulder avait tort ! On apprécie également vivement la mise en scène alerte, et en particulier les manifestations climatiques toutes plus absurdes ou poétiques les unes que les autres, les artistes de la série s'en donnent visiblement à cœur joie ! On s'amuse ainsi beaucoup avec un lancer de vache que n'auraient pas désavoué les Monty Python ! L'épisode bénéficie également de nombreux clins d'œil savoureux au Magicien d'Oz de 1939 - comme avec Triangle - renforçant ainsi son côté merveilleux et décalé.

    The Rain King s'enrichit également d'une étonnante galerie de portraits, avec deux couples de personnages secondaires, hauts en couleurs, et interprétés avec truculence. C'est ainsi que l'épatant Roi de la Pluie nous délivre une caricature assez jouissive du Redneck, avec un Clayton Rohner (Muder One, Day Break très inspiré de Monday) en faisant des tonnes avec à-propos. À ses côtés, l'aussi émouvante qu'écervelée Cindy se montre absolument charmante. L'amoureux transi Holman Hardt, très lycéen, vaut aussi le coup d'œil, mais c'est surtout l'épatante Sheila qui s'impose, grâce à la très belle prestation de Victoria Jackson. Le Saturday Night Live, dont elle fut une figure marquante, se révèle décidément un vivier pour les X-Files installés en Californie, d'autant que Victoria y a collaboré notamment en duo avec l'excellente Nora Dunn de Zone 51.
    Pour l'anecdote, contrairement au Saturday Night Live et à Tina Fey, Victoria Jackson a milité ardemment, parfois avec véhémence, contre Obama, le comparant notamment à l'Antéchrist...

    Mais l'épisode atteint toute sa véritable dimension quand il s'attaque avec une ironie aussi caustique que réjouissante à la relation Mulder/Scully. On se divertit beaucoup de voir les habitants du cru croire naturellement que nos héros forment un couple, au grand amusement de Mulder mais avec un certain embarras de Scully annonçant déjà Arcadia. Il n'y a pas jusqu'à la patronne de l'hôtel qui ne trouve désuet qu'ils fassent chambre à part... Dans la seconde partie de l'épisode, Mulder et Scully ont droit à un autre examen critique après celui des Amants maudits. Sans doute moins narquois et rugueux, celui-ci se révèle finalement encore plus redoutable car présentant un véritable miroir à nos héros (effet annoncé ironiquement par le gag des gagnants du concours). Le parallélisme entre ces deux couples figés dans le non-dit s'avère aussi bien trouvé que savoureusement exploité. C'est ainsi le cas quand notamment Scully explique à Sheila que les relations les plus fécondes sont celles basées sur l'amitié de longue date ou quand Mulder s'improvise professeur de drague auprès de Holman, au grand effarement téléphonique de Scully (gag en or massif). Mais le plus drôle reste de voir nos agents, si intelligents par ailleurs, demeurer de marbre face à cette histoire et à sa morale, y compris quand Sheila et Holman, la main dans la main, leur soufflent qu'ils devraient essayer... La scène finale voit le Triomphe de l'Amour et tous les couples s'enlacer, tous sauf... On passe un peu au désespéré, là ! Ainsi s'achève cet épisode aussi romantique qu'hilarant (lointain cousin de Groundhog Day) à la subtile écriture, montrant nos héros manifester une gentille condescendance envers les locaux, alors même que c'est avant tout sur eux que porte l'ironie !

    Toutefois, l'excellence de ce loner, comme de ceux qui l'ont précédé cette saison, n'empêche pas de ressentir un certain manque. La saison, avec talent et esprit, s'intéresse à la relation entre nos héros et donne la part belle à de délectables épisodes décalés, mais oublie quelque peu d'opposer de vrais adversaires à Mulder et Scully (même Daryl se montre finalement plus bête que méchant...). On commence à sentir l'absence des duels de haute volée connus par le passé entre les Affaires Non Classées et des adversaires de la dimension d'un Tooms ou d'un Pusher, ce qui explique peut-être le début de désaffection alors subie par la série. L’épisode obtint cependant la meilleure audience de la saison, avec plus de 21 millions de spectateurs !

    Fort heureusement, une vieille connaissance s'apprête à effectuer son retour dans les X-Files, même si dans le cadre d'un Mythic...

    Anecdotes :

  • Selon Sheila, Mulder embrasse très bien ! Décidément, Scully ne sait pas ce qu’elle s’interdit…

  • Scully a une grande-tante irlandaise.

  • Quand la voiture de Daryl s’encastre dans le poteau, le pare-brise se brise au point qu’il n’y reste rien. Au plan suivant, le pare-brise est encore visible sur la voiture.

  • Mulder et Scully passent devant un restaurant : le Vince’s dinner. Référence au scénariste Vince Gilligan ?

  • Kroner est baptisée selon le nom d’un ami d’université du scénariste de l'épisode Jeffrey Bell.

  • La chanson entendue lors de la fête est Over the rainbow, chanson-phare du Magicien d’Oz (1939).

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    9. COMPTE À REBOURS
    (S.R. 819)


    Épisode Mythologique

    Scénario : John Shiban
    Réalisation : Daniel Sackheim

    Résumé :

    Walter Skinner, horriblement défiguré, a un arrêt cardiaque et est déclaré cliniquement mort. 24 heures plus tôt, il a reçu un coup de téléphone lui annonçant sa mort prochaine et a commencé à souffrir à partir de ce moment. Mulder et Scully parviennent à retrouver « l’empoisonneur » mais ce dernier est kidnappé sous leurs yeux. Au cours de leur enquête, nos agents apprennent que le sénateur Matheson est malgré lui impliqué dans cette affaire concernant un projet de loi dit « S.R.819 »…

    Critique :

    Après une succession d'épisodes irrésistibles mais qui, plaisamment décalés et accordant une part importante à la relation entre Mulder et Scully, se traduisaient par un manque d'authentique adversaire, Compte à Rebours marque un efficace retour aux fondamentaux de la série. C'est avec un vif plaisir que l'on retrouve ces atmosphères ténébreuses, ces duels entre Mulder et un opposant insaisissable (Krycek en personne !), ces parkings déserts, ces conspirations bien tordues, le retour du sénateur Matheson et jusqu'à la figure de Skinner en tant que supérieur... l'épisode constitue un véritable revival Vancouver !

    Outre ces retrouvailles, l'intrigue se révèle captivante. Elle se centre avec bonheur sur Skinner (complétant une trilogie comportant également les déjà excellents Avatar et Zero sum) alors même que celui-ci demeurait des plus discrets depuis le début de la saison, et ne néglige pas la dimension psychologique des personnages : Mulder et Scully, tout comme le spectateur, apprécient visiblement de retrouver leur relation habituelle avec Skinner et leur complicité, tandis que le premier se montre des plus ardents dans sa quête de Vérité et la seconde très convaincante dans des scènes d'hôpital moins nunuches qu'à l'accoutumée.

    De par le mystère de ce qui arrive à Skinner et le savant usage des flashbacks (le lancement à la Memento Mori est une merveille), l'histoire développe une belle énigme et distille un fort beau suspense tout au long du récit. Après la quasi absence de la Mythologie lors du premier double épisode de la saison, celle-ci se voit réintroduite par Krycek, aussi cruel que de coutume (on adore !), tout en produisant un retournement forcé de Skinner riche en potentialités. Le thème habituel d'un Krycek encaissant un maximum se voit ici renversé au détriment de Skinner, mais tout cela se paiera un jour...

    La mise en scène de Daniel Sackheim retrouve également avec bonheur les figures coutumières de la série tout en bénéficiant de l'étonnant travail de maquillage opéré sur Mitch Pileggi (comme toujours impérial) et d'effets spéciaux fort goûteux. On observera aussi que les perspectives nanotech décrites par l'épisode, thème alors très en vogue notamment en littérature, apparaissent déjà nettement moins spéculatives aujourd'hui tant on a progressé en la matière.

    Deux petites réserves sont toutefois à noter. À plusieurs reprises, Scully énonce des tentatives de traitement (laser, filtrage intégral du sang) sans qu'on les voit se dérouler, ni que l'on entende parler des conséquences éventuelles. Face aux péripéties des enquêtes de Mulder, il est souvent difficile de trouver du contenu quand Scully reste en retrait dans un hôpital, et disons que ce genre de pratique facilite les choses... Et puis, la révélation de Krycek s'effectue avec force roulements de tambour alors que, bon, un tueur sadique au visage perpétuellement dissimulé, maquillé car craignant visiblement d'être reconnu par nos amis, travaillant en freelance tout en connaissant visiblement les rouages du Complot... il ne fallait pas nous faire un dessin non plus !

    Enfin, l'épisode révèle la solution du plus mystérieux et impénétrable des X-Files : la technique du planter de crayons d'un Mulder passant visiblement ses nuits au FBI malgré son beau lit tout neuf. La scène se montre très amusante et induit clairement ce retour aux sources donnant toute sa saveur à cet épisode certes classique, mais tonique et très relevé.

    Anecdotes :

  • La résolution sénatoriale S.R.819 existe réellement : en 1993, elle suspendit la production de Trifluoromethylaniline aux USA. Ce gaz étant soupçonné d’être nocif pour les hommes.

  • On peut voir un membre de l’équipe technique dans le reflet de la Mercedes quand le sénateur Matheson descend de voiture. Il y a également un problème de positionnement du pistolet de Skinner lors de la scène de parking.

  • La sœur de John Shiban s’appelle Katie. Ne cherchez plus pourquoi l’hôpital de l’épisode s’appelle St Katherine’s hospital ! Par ailleurs, le Dr.Katrina Cabrera tire son nom d’un membre du staff de la production.

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    10. PHOTO MORTELLE
    (TITHONUS)

     



    Scénario : Vince Gilligan
    Réalisation : Michael Watkins

    Résumé :

    Un homme âgé, Alfred Fellig, voit subitement les occupants d’un ascenseur en noir et blanc. Il quitte l’ascenseur et se précipite au rez-de-chaussée tandis que les câbles de l’ascenseur cèdent, entraînant dans la mort tous les malheureux. Fellig prend une photo du désastre et s’éclipse. Kersh ordonne à Scully de mener une enquête avec Peyton Ritter, un autre agent, sur Fellig car ce dernier a pris une photo d’une victime d’overdose une heure avant l’arrivée de la police, laissant penser qu’il est le meurtrier. Pendant ce temps, Fellig continue de suivre des personnes sur le point de mourir et les photographie au moment de leur mort. Scully va tâcher de découvrir les raisons de ses actes, au risque d’être son prochain cliché…

    Critique :

    Cet épisode à la pénétrante poésie reprend le thème de la photo déjà utilisé avec succès dans Les hurleurs, mais aussi dans la Quatrième Dimension et de nombreux autres récits fantastiques.

    Cette version se montre particulièrement aboutie grâce à une mise en scène judicieusement funèbre (on ne se situe absolument pas dans l’humoristique), portée par la musique de Mark Snow et l’étonnante qualité de l’image de la caméra de Watkins. Le noir et blanc annonciateur de mort se révèle particulièrement somptueux, le granulé et la lumière situent avec réussite les personnages comme déjà hors de ce monde. L’effet est absolument saisissant. Les nombreuses photos de décès restituent également à merveille la fascination de Fellig pour la mort et contribuent à donner à l’épisode une ambiance très particulière, presque aussi fascinante qu’a pu l’être Le pré où je suis mort, autre épisode où la photographie (sans mauvais jeu de mots) se montre primordiale.

    Le personnage de Fellig lui-même se montre aussi original que passionnant. Son immortalité et la lassitude de la vie en résultant constituent un contrepoint intéressant à ce qui semblerait communément un don du ciel. L’immense talent de Geoffrey Lewis (une guest star prestigieuse de plus cette saison) rend absolument convaincant la dimension décalée du personnage en marge de la vie et manifestant un détachement très troublant (hormis envers la beauté de Scully avec l’unique photo qu’il prend avec plaisir…). Fellig nous parle depuis très loin, son désespoir quasi palpable et les magnifiques dialogues confèrent un cachet très littéraire à cette histoire. Gilligan développe comme toujours admirablement la psychologie et l’humanité de ses personnages, mais n’oublie pas néanmoins de nous offrir des moments de pure tension comme quand retentit la note stridente de l’appareil photo fatidique, ou quand c’est au tour de Scully d’être dépouillée des couleurs de la vie.

    Cette même Scully représente l’autre grande attraction de Photo mortelle. Privée de Mulder, on pourrait s’attendre à la voir demeurer figée dans son scepticisme scientifique, mais le temps passé produit son effet et nous assistons avec beaucoup de plaisir à un spectacle nouveau : Scully accepter à son corps défendant la nature paranormale d’une affaire. Ce difficile combat est parfaitement rendu par le jeu de Gillian Anderson, se traduisant par des expressions faciales et corporelles inusitées jusqu’ici : Scully perd son assurance proverbiale, et la comédienne nous fait partager son trouble et ses hésitations avec un immense talent. Ses scènes particulièrement émouvantes avec Lewis constituent le pinacle de l’épisode, où l’on ressent le pur plaisir du beau jeu, de la rencontre féconde de deux grands comédiens au service d’une histoire tellement plus subtile que ce que nous offre ordinairement la télévision.

    Le scénario, dans un premier temps, a l’habileté de ne pas faire de Ritter un jeune arriviste comme la série en a déjà connu, voire un Spender bis. Son astuce et son grand professionnalisme de policier joints à un solide cartésianisme préfigurent avec intérêt les discussions entre Doggett et une Scully ayant alors basculé du côté des « croyants ». Malheureusement, le récit ne prolonge pas cet aspect jusqu’au bout, une déception somme toute mineure.

    Mulder reste lui très en retrait, les coups de fil avec Scully demeurant essentiellement fonctionnels et ne développant qu’à peine l’humour coutumier, même si Vince Gilligan ne peut bien entendu s’empêcher de placer quelques plaisanteries... Mais qui trop embrasse mal étreint, l’épisode bénéficie déjà d’une thématique très riche et a raison de ne pas vouloir se disperser ! La conclusion montre une Scully très troublée… la question se pose en effet de savoir si elle connaît désormais la même immortalité maudite que Fellig ! Après tout, Clyde Bruckman lui avait dit qu’il ne la voyait pas mourir…

    Fellig et ses noms successifs sont autant d’hommages à des photographes célèbres. Tithonus reprend un mythe grec entremêlant immortalité vécue comme une malédiction et divinité solaire, d’où une application dans le domaine de la photographie basée sur le rayonnement solaire. Un titre plus riche que le sensationnalisme outrancier de la traduction française !

    Anecdotes :

  • Un des pseudonymes de Fellig est L.H.Rice, référence à Lucy « Holly » Hartwell Rice, petite amie de Vince Gilligan. Par ailleurs, on peut voir sur sa carte de presse la date du 4 avril, date de naissance d’Holly. Le nom Alfred Fellig est par ailleurs un mélange d’Alfred Stieglitz et Arthur Fellig, deux photographes qu’admirait beaucoup Gilligan.

  • Erreurs : L’ambulance qui amène Scully est de Boston bien que nous soyons à New York. Le couteau qui frappe Fellig a un cran d’arrêt qu’on entend distinctement, mais lors du plan sur le couteau, on voit qu'il n'en a pas. De plus, Fellig développe ses photos sous une lumière orange alors que seule l’obscurité complète pourrait les développer, car il n’utilise pas de papier photographique.

  • Précision : Mulder dit que Fellig a 150 ans. Mais il est plus probable qu’il en ait 250 si l’on se réfère à l’histoire de son immortalité qui a commencé lors de l’épidémie de fièvre jaune à New York, certainement celle de 1798. Fellig ayant 50 ou 60 ans d’âge apparent, il est donc plus proche de 250 ans que de 150 ans.

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    11/12. TOUTE LA VÉRITE
    (TWO FATHERS/ONE SON)

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    Épisode Mythologique

    Scénario : Chris Carter & Frank Spotnitz
    Réalisation : Kim Manners (1re partie) et Rob Bowman (2e partie)

    Résumé :

    Des docteurs pratiquent des opérations sur un patient hybride mais sont assassinés par des aliens rebelles qui les brûlent au lance-flammes ! Seuls le patient et le chef des médecins, le Dr.Openshaw, survivent. Cassandra Spender, un an après son enlèvement, vient d’être retrouvée mais ne souhaite parler qu'à Mulder. Mais lui et Scully sont filés de près par le FBI et le Fumeur. Le Syndicat apprend par Openshaw que leur « projet » a enfin abouti, mais leurs membres sont maintenant menacés par les aliens rebelles. Marita Covarrubias révèle à Mulder ce que trame le Syndicat, tandis que Spender est acculé dans ses retranchements par Krycek. La Conspiration prend fin dans une base militaire, mais pas de la manière attendue...

    Critique :

    En dépit de sa qualité, cet épisode particulièrement crucial pour la Mythologie laisse comme une impression de précipitation. En effet, il met en scène purement et simplement l'effondrement de la Conspiration telle que nous l'avions connue jusqu'ici. Le long et sinueux chemin parsemé de savantes révélations débouche ainsi sur une conclusion aussi brusque que spectaculaire. Si on ajoute à cela le soin apporté aux prodigieux loners décalés (drôles ou romantiques) commençant à proliférer cette saison, on peut sérieusement se demander si Carter n'en avait pas tout simplement assez de cette histoire au long cours - Spotnitz aura des déclarations tendant en ce sens, assurant que la Mythologie avait atteint une telle complexité que tout dénouer leur semblait la meilleure solution. La Mythologie contribua certes puissamment à l'identité et au retentissement de la série, mais se révèle contraignante et malaisée à poursuivre indéfiniment. La migration de Vancouver à L.A. aurait dès lors coïncidé avec une aspiration à davantage de fantaisie, qu'elle accompagne et soutient d'ailleurs idéalement.

    Quoiqu'il en soit, c'est bien avec professionnalisme et un talent intact que Carter préside à cette inflexion majeure. Après une efficace scène de pré-générique situant d'emblée les enjeux, le lancement de l'épisode s'avère des plus saisissants. En effet, le spectateur, médusé, découvre l'Homme à la Cigarette (enfin, C.G.B. Spender désormais...) s'adresser directement à lui pour annoncer l'échec final de la Conspiration. L'impact du procédé résulte des plus considérables ! De fait C.G.B. s'affirme comme un narrateur fort talentueux, ses révélations restituant avec une grande clarté les méandres du complot. Grâce également à l'apport de Cassandra (toujours épatante Véronica Cartwright, justement récompensée d’une nomination à l’Emmy award), cette première partie nous offre une vision explicite fort cohérente de la Conspiration, un exploit contribuant puissamment à son succès. Ce procédé se poursuivant jusqu'à la toute fin du premier segment s'avère également l'occasion d'un nouveau numéro étincelant de William B. Davis. Celui-ci entremêle amertume, ironie, et lucidité désenchantée avec un talent faisant de ces apparitions de C.G.B. de grands moments captant instantanément l'attention du spectateur, et justifiant à eux seuls la découverte de l'épisode. On ne soulignera jamais assez l'importance de la contribution de cet immense comédien à la série.

    Par ailleurs, cette première partie sait maintenir une véritable tension dramatique grâce au lot coutumier de révélations tonitruantes et à un récit resserré, évitant tout temps mort. L'ensemble se suit donc avec un réel plaisir, même si certaines réserves sont à noter. On s'étonne tout de même de l'impuissance et de l'immobilisme du Syndicat face à l'évolution de la situation. Cette toute puissante organisation dévoile de surprenants pieds d'argile qui, conjointement avec le flou persistant sur la victoire des rebelles, renforcent cette impression désagréable d'abandon. Fort heureusement, la partie adverse s'enrichit d'un Alex Krycek très en verve et machiavélique à souhait. Sa manière de monter le fils contre le père sans en avoir l'air se révèle un fort joli coup de poignard. Spender se montre de plus davantage complexe et intéressant que de coutume. Le tempo général ressort également plus lent que lors d'épisodes du même genre, mais cela correspond finalement au ton funèbre du récit de C.G.B.. On pourrait aussi déplorer le rôle essentiellement statique de Mulder et Scully que l'on aura rarement vus aussi inopérants sur l'action. Toutefois, un épisode essentiellement centré sur le Syndicat constitue une agréable originalité. De plus, les scènes de basket restent amusantes, comme lorsque Mulder se fige quand Scully apparaît... Cependant, voir Scully sortir du chapeau autant d'éléments sur C.G.B. constitue bien une facilité assez déplorable. Aurait-elle cherché sur Google ?

    Le cliffhanger traditionnel se montre également assez faible (personne n'imagine que Mulder puisse tirer), mais la véritable conclusion demeure bien entendu la découverte du véritable interlocuteur de C.G.B. : rien de moins que la toujours très classieuse Diana Fowley ! Celle-ci se révèle une collaboratrice particulièrement proche du Fumeur et se déclare apte à renverser une situation désormais bien compromise. De quoi présenter la seconde partie sous les meilleurs auspices !

    Et après une grandiose introduction, cet ultime tronçon enregistre en effet la véritable entrée en scène de nos héros, apportant un surplus de vie et de tonicité à l'épisode. On s'amuse ainsi beaucoup de voir Scully, après une scène de douche assez pétillante, employer le plus clair de son énergie au procès de Fowley, tandis que Mulder s'acharne à lui trouver des circonstances atténuantes. Cette confrontation se déroulant sous le regard de Bandits Solitaires passablement éberlués conduit d'ailleurs à une de ces colères froides dont notre amie rousse a le secret. Mimi Rogers continue à donner beaucoup de présence à son personnage, tandis qu'avec le spectaculaire retour d'une Marita très éprouvée (comment avons-nous pu vivre si longtemps sans Laurie Holden ?), c'est la totalité des personnages récurrents de la série qui participe à l'action, confirmant la stature particulière de l'épisode. Le sommet de celui-ci, outre la scène choc de la crémation in vivo du Syndicat (au revoir au First Elder et consorts…), demeure bien entendu la confrontation Mulder /C.G.B., une scène toujours formidable dont la série a su ne pas abuser et ici se montrant particulièrement relevée.

    Ces éléments se voient une nouvelle fois gâchés par nombre de raccourcis et de facilités scénaristiques voyantes. Il y a bien trop de rencontres miraculeuses, en particulier dans ce centre de rétention sanitaire ressemblant davantage à un hall de gare qu’à autre chose. De nombreuses situations ne sont absolument pas conclues, la scène du bureau de Kersh servant de bouche-trou vraiment trop simpliste. Le summum est atteint avec la succession effrénée d’évènements hautement improbables, filmés selon une absurde accélération uniquement pour obtenir l’image assez pitoyable de Mulder et Scully vidant leurs révolvers sur un train blindé pour tenter de l’arrêter. Cette péripétie inutile et si maladroitement amenée conduit les X-Files a se caricaturer eux-mêmes, dans un effet particulièrement malheureux.

    Ainsi en est-il de l’ensemble de l’épisode, où les bonnes idées de mises en scène et les fulgurances du récit perdent pour partie de leur impact par une trop grande précipitation et manque de soins apportés aux détails. C’est d’autant plus frustrant que l’on se dit que le résultat aurait pu être tellement formidable si Carter et Spotnitz avaient laissé le temps au temps, ne serait-ce qu’en consacrant à ce moment essentiel un arc triple, et non un double épisode trop étriqué. Toute la vérité demeure un excellent épisode, mais non pas le chef-d’œuvre qu’il aurait pu, qu’il aurait dû, représenter. La priorité était sans doute ailleurs…

    Après une conclusion ouvrant un nouvel abîme dans la psychologie de C.G.B., plus que jamais le méchant ultime de l’univers des séries télé, les Affaires Non Classées s’offrent de nouveau à nos héros. Tant mieux, car Samantha demeure insaisissable ! Surtout, cela va permettre à Carter de faire de nouveau se succéder les loners décalés exceptionnels, dans un cadre plus familier et solide que dans la première partie de saison (tout en renouvelant il est vrai la Mythologie à partir de Biogenèse). Le but caché de tout ceci ?

    Anecdotes :

  • Mort présumée de Jeffrey Spender. Toutefois, le personnage et son interprète reviendront dans deux épisodes de la saison 9 : William et le finale La vérité est ici.

  • Disparition du Syndicat et fin de la première Conspiration. La Mythologie sera réenclenchée par une deuxième Conspiration dans le final de cette saison : Biogénèse.

  • Erreurs :

    • Two fathers : Krycek et Spender ne sont pas incommodés par le sang vert toxique de l’alien qu’ils viennent de tuer. On peut brièvement voir l’opérateur des effets spéciaux pendant l'assassinat du First Elder.

    • One Son : un membre de l’équipe technique ajuste une lampe de hall quand Mulder marche dans le corridor menant à l’appartement de Diana Fowley.

  • 1013 du jour : la scène de flash-back se situe le 10/13/1973 (notation anglo-saxonne), de plus, à 10h56 (Carter est né en octobre 1956 !). Il est 10h13 quand Jeffrey Spender cherche sa mère.

  • 1121 du jour : la réunion dans la base militaire a lieu à 11h21.

  • L’infirmière-assassin est jouée par Jo Black-David, la professeur d’art dramatique de Rick Millikan, le directeur du casting de la série.

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    13. AGUA MALA
    (AGUA MALA)


     

    Scénario : David Amann
    Réalisation : Rob Bowman

    Résumé :

    Floride, Arthur Dales appelle l’agent Mulder pour lui dire qu’un monstre sous-marin serait en train de ravager plusieurs habitations. Il profite d’un formidable ouragan et d’inondations diluviennes qui dévastent l’État en ce moment pour se déplacer. Scully et Mulder partent à la « chasse au monstre » qui semble se déplacer à travers la plomberie. Bientôt, nos agents se retrouvent piégés dans un immeuble avec quelques-uns de ses occupants. Ensemble, ils devront exterminer le monstre…

    Critique :

    Après le très excitant Compagnons de route (et en attendant le fabuleux The Unnatural), on attendait beaucoup du retour de l’excellent Arthur Dales, le Mulder des années 50.

    Hélas, force est de constater que l’épisode ne tient pas totalement ses promesses. Tout d’abord avec l’énorme contresens consistant à laisser Dales en dehors de l’action, le bornant à ouvrir et conclure le récit, alors que c’est bien évidemment une enquête menée en commun avec Mulder qui nous intéressait. Toujours portées avec malice et talent par le vétéran McGavin (ici dans son ultime rôle), les apparitions de Dales demeurent constamment aussi savoureuses mais ne font ainsi qu’accentuer notre frustration… On se demande vraiment quand la télévision va se décider à rediffuser Kolchak, The night stalker ! Ces scènes présentent aussi le mérite de nous laisser entrevoir ce qu’aurait pu devenir la vieillesse de Mulder sans Scully : le whisky pour aider à supporter la solitude, et une veille toujours maintenue sur les mystères du vaste monde via la cibi. Guère enthousiasmant…

    Pour le reste, l’épisode nous offre une resucée du huis clos horrifique, genre déjà expérimenté avec bonheur par le passé (Quand vient la nuit, Projet arctique…) mais se déroulant ici sur un ton clairement mineur. Le décor parait bien long à se mettre en place, et l’auteur, dans la lignée de cette saison, s’essaie à l’humour avec peu d’à-propos (n’est pas Gilligan qui veut). En effet, cela sape la tension dramatique faisant le sel de ce genre de situation tout en n’apportant pas grand-chose en contrepartie.

    Cette galerie de portraits demeure convenue et tient du cliché, avec notamment une caricature d’hispaniques assez pesante. On devine que l’auteur a voulu dresser un portrait satirique de la Floride, mais l’ensemble manque de tonus, de mordant. Sur le même thème, LesSimpson nous ont d’ailleurs offert un récit bien plus caustique et iconoclaste !

    La conclusion ressort également quelque peu précipitée alors même que la mise en situation s’était trop prolongée.

    Restent une reconstitution de tempête en studio réussie, un monstre croquignolet, la musique bien adaptée de Mark Snow, et une exaspération de Scully assez amusante devant ces chasses au dahu qui l’agacent toujours. On remarque que nos héros découvrent chacun la clé de l’énigme au même moment, décidément ils s’accordent à la perfection… Après cette éprouvante et humide enquête, le duo aura bien mérité des vacances au soleil !

    Anecdotes :

  • Agua Mala (Eau mauvaise en espagnol) est en fait le nom d’une méduse carnivore et venimeuse des eaux tropicales.

  • Deuxième et dernière apparition d’Arthur Dales. Son frère, qui a le même nom, apparaîtra dans Le grand jour de cette même saison.

  • On voit un membre de l’équipe technique fermer une porte quand le shérif marche dans l’immeuble.

  • On peut voir un poster du film La grande évasion (1963) dans la chambre de Vincent. Il y a également une référence à Forrest Gump (1994).

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    14. LUNDI
    (MONDAY)


    Scénario : Vince Gilligan & John Shiban
    Réalisation :
    Kim Manners

    Résumé : 

    Pam, une jeune femme, dissuade vainement la police d’intervenir dans une banque où sévit un braqueur isolé. Quelques secondes plus tard, le braqueur actionne une bombe qui détruit la banque et tue tous ses occupants y compris Mulder et Scully qui s’y trouvaient !! En réalité, nous sommes dans un verrou temporel : ce n’est pas la première fois que les événements se produisent, et tant que Mulder et Scully n’auront pas réussi à maîtriser le braqueur, ils seront condamnés à revivre sans fin le même jour. Seule Pam, compagne de l’infortuné braqueur, a conscience de ce qui se passe. Comment trouver une porte de sortie à ce piège temporel infernal ?

    Critique :

    Les X-Files (tout comme Garfield…) ont une manière bien à eux d’illustrer l’expression « comme un lundi ». L’intrigue de Vince Gilligan et John Shiban, s’inspirant avec bonheur du classique Un jour sans fin, décrit avec une habileté consommée le piège diabolique du Verrou Temporel.

    L’épisode débute ainsi avec rien de moins que la mort de nos héros filmée avec une totale conviction… effet garanti ! Ce n’est que peu à peu que nous comprenons l’horreur de la situation tout comme le fait lui-même Mulder, avec une intensité progressive fort bien rendue par la mise en scène impeccable de Kim Manners. La caméra adopte très habilement le point de vue des différents protagonistes afin de nous offrir un panorama très fluide de la situation. Dans Un jour sans fin, on ne disposait que du seul point de vue du témoin du phénomène alors que l’épisode introduit avec succès davantage de complexité en incorporant celui d’une victime (temporairement) passive, Mulder.

    Tout comme son modèle, Monday introduit une solide dose d’humour dans le récit avec plusieurs scènes désopilantes renforcées par un humour de répétition toujours très efficace. La réunion organisée par un Skinner très tatillon sur les horaires s’avère un modèle d’inanité et d’ennui bureaucratiques tandis que Scully apparaît tétanisée par le retard - quelle horreur ! - de Mulder. Les petits malheurs successifs de ce dernier sont également divertissants d’autant qu’ils nous permettent de retrouver le monstrueux waterbed de Fletcher. Son origine toujours perdue dans le néant embarrasse Mulder, mais que celui-ci le détienne semble fasciner Scully… Et si l’explication de tout cela résidait dans une ultime résonance de la faille dimensionnelle de Zone 51 ?

    Toutefois, à l’inverse de David Amann dans Agua mala, Gilligan montre l’habileté de ne pas noyer l’histoire dans l’humour en n’accordant pas un espace excessif à son péché mignon. Les scènes amusantes enrichissent l’épisode mais n’en constituent pas le cœur, ce qui le dénaturerait. En effet, le parallèle avec Un jour sans fin touche rapidement à son épilogue car, dans les X-Files, la tonalité du Verrou s’avère bien entendu très sombre. Magistralement interprétée par Carrie Hamilton (grande figure du théâtre américain, prématurément disparue en 2002), Pam n’est certes pas Phil Connors pour qui on ne ressent jamais vraiment d’inquiétude. Comme elle le dit elle-même : « Nous sommes tous en Enfer et je suis la seule à le savoir ». L’épisode sait nous laisser entrapercevoir la réalité de son si long cauchemar, et l’actrice restitue admirablement l’usure que le piège produit sur la personnalité d’une femme partant littéralement en lambeaux sous nos yeux, dans une totale déréliction. Malgré l’ouverture d’esprit et la vive intelligence de la situation manifestées par Mulder, c’est bien grâce à son sacrifice résonnant terriblement comme la découverte tant espérée d’une porte de sortie que l’on quitte l’impasse. Là où Phil s’échappait du Groundhog day par l’amour et la rédemption, pour Pam il n’y a que la mort. Il demeure parfaitement glaçant de la voir mourir si heureuse tout simplement parce que quelque chose de nouveau survient... Si on rajoute à cela le désespoir homicide de Bernard (Darren Burrows, fils de Billy Drago, également parfait), Monday reste bien l’un des épisodes les plus sombres et véritablement effrayants d’une série s’épanouissant plus que jamais dans les ténèbres.

    Après l’échec d'Aux frontières du jamais (saison 4), Monday et sa belle perspective sur la confrontation entre destin et libre-arbitre représentent l’occasion d’heureuses retrouvailles entre les X-Files et ce sujet majeur de la Science-Fiction qu’est le voyage temporel. Après le classique retour dans le passé et le thème du Verrou, c’est la déstructuration temporelle qui à son tour suscitera le très réussi ultime volet de cette trilogie dans Redrum (saison 8).

    Enfin, on notera que l’épisode est censé se dérouler à Washington, alors que l’écusson de Los Angeles apparaît clairement dans la banque !

    Ah, et merci Oméga, cela nous fait un point commun avec 007…

    Anecdotes :

  • Aka. Mobius. Le mobius est une surface ne comportant qu’une seule face, généralement en forme de boucle, tout comme ce lundi ne cessant de se répéter.

  • Warren Meers (du Trio) mentionne cet épisode (The one where the bank kept exploding) dans l’épisode Tous contre Buffy (saison 6) de la série Buffy contre les vampires.

  • La référence à Holly, petite amie de Vince Gilligan, est cette fois plus discrète : la Cradock Marine Bank est ainsi nommée d’après un quartier de Portsmouth où grandirent les jeunes amoureux. Bernard, le prénom du braqueur, est par ailleurs le nom de jeune fille de la mère d’Holly.

  • Le lit à eau de Mulder continue de fuir lorsqu’il se lève (ce qui est impossible), et la quantité d’eau perdue est assez excessive car il semble en rester encore pas mal dedans.

  • L’épisode semble s'inspirer d’Un jour sans fin (1993) où un homme misanthrope et amer revit sans cesse le même jour jusqu'à ce qu'il apprenne à être un homme meilleur, mais aussi du film Cours, Lola, cours (1998) où quatre situations différentes se produisent à partir d’un même événement ; à chaque fois, un petit détail change l’ordre des choses. Toutefois, Vince Gilligan et John Shiban revendiquent comme influence l’épisode Peine Capitale de la série La Quatrième Dimension, mettant pareillement en place un verrou temporel. L'épisode Mystery spot de la série Supernatural, héritière des X-Files, mettra aussi en scène un verrou temporel où Dean Winchester ne cesse de se faire tuer.

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    15. BIENVENUE EN ARCADIE
    (ARCADIA)


    Scénario : Daniel Arkin
    Réalisation : Michael Watkins

    Woman ! Get back in here and make me a sandwich !

    - So, how was your first night ? Peaceful ?
    - It was wonderful. We just spooned up and fell asleep like little baby cats. Isn't that right, honey bunch ?
    - That's right, poopy head !

    Résumé :

    Arcadia est une communauté paradisiaque et tranquille où tout le monde vit en harmonie. Pourtant, depuis sa création, plusieurs couples ont mystérieusement disparu. Mulder et Scully s’y rendent en se faisant passer pour un jeune couple marié ! Là, ils découvrent que la vie en Arcadia est régie par des règles très strictes et parfois absurdes. Bientôt, Big Mike, un des habitants, est attaqué et enlevé par « quelque chose » de souterrain. Pour pousser les habitants et particulièrement le dirigeant du village à se dévoiler, Mulder multiplie les infractions au code…

    Critique :

    Mulder et Scully à Wisteria Lane !

    C'est en effet dans le décor lumineux et implacablement lisse d'une suburbia de grand standing, évoquant irrésistiblement le futur Desperate Housewives et somptueusement filmée par Michael Watkins, que va se dérouler cette nouvelle étonnante aventure du duo.

    Cependant, comme nous nous situons dans l'univers paranoïaque des X-Files, les chutes d'Arcadie prennent, dès une scène d'introduction constituant un paroxysme de l'épouvante, les allures d'un Village - celui du Prisonnier - bien plus sombre, où un impitoyable Rôdeur traque puis élimine atrocement les déviants la nuit venue. Cette dimension purement fantastique de cet épisode s'avère des plus réussies grâce à un Monster of the week particulièrement effrayant et le thème toujours si porteur de l'étrange petite ville retranchée de la réalité consensuelle, tant de fois employé avec succès dans, entre bien d'autres, LaQuatrième Dimension. Toutefois, si abouti et efficace que paraisse cet aspect de l'épisode, il n'en demeure pas moins secondaire...

    En effet, le grand intérêt d'Arcadia réside bien entendu dans la situation insolite où se trouvent plongés nos héros devant former un couple de façade du fait d'une idée d'un Skinner visiblement en grande forme. Le piquant de ce simulacre ravira nos ami(e)s shippers, mais ravira également tous les amateurs de fine comédie de mœurs tant il s'avère impossible de ne pas visionner l'épisode sans éclater de rire. On rappellera que les « Petrie » sont d'ailleurs des noms tirés d'une fameuse série humoristique des années 60 (The Dick Van Dyke Show), une nouvelle présence des séries oldies dans les X-Files. Comme toujours quand il ne prend pas une affaire au sérieux, Mulder est totalement en roue libre, s'amusant visiblement beaucoup de la situation, multipliant les petites piques facétieuses envers une Scully nettement plus rétive, ou exprimant sa nature rebelle en violant les interdits du Code avec malice et entrain. La scène du dîner demeure un sommet d'humour où Mulder martyrise sa partenaire atrocement embarrassée et ses voisins coincés en multipliant les élucubrations démentes.

    Ce moment de pure comédie rappelle irrésistiblement une scène culte de Californication - série réputée pour ses dîners virant au jeu de massacre - où un Hank Moody passablement défoncé à la coke dynamite pareillement un repas familial chez ce pauvre Bill (et lui pas uniquement en paroles...). Dans les deux cas, Duchovny manifeste la même vis comica jubilatoire et communicative, confirmant si besoin en était son statut de très grand comédien.

    Gillian Anderson ne demeure pas en reste et dessine fort joliment une Scully finalement bien moins rétive à l'ambiance apparemment feutrée d'Arcadia, comme le souligne très justement son partenaire. Qui se souvient de l'atmosphère des repas familiaux chez les Scully jugera que du moins elle n'est pas dépaysée... Scully prend très au sérieux son image de maîtresse de maison modèle, et il est bien évident que ce n'est pas uniquement pour les besoins de l'enquête ! De même, elle manifeste un souci très féminin pour l'ordre et la propreté nous faisant subodorer une fois de plus qu'il y en a un qui ne doit pas rigoler tous les jours en 2008... on n’oubliera pas le verdâtre masque de beauté, gravé au fer rouge dans la mémoire des spectateurs comme l'un des passages les plus insoutenables d'horreur frémissante de la série… c'est le mythe qui se lézarde sous nos yeux ! L'humour distillé par Scully apparaît davantage mezzo voce que le numéro électrique de Mulder, mais n'en apporte pas moins une contribution décisive à l'éclatant succès de l'épisode. C'est bien la confrontation de ces deux caractères si dissemblables qui en fait d'ailleurs tout le prix, mais n'est-ce pas souvent le cas dans la vie en couple ?

    Enfin, ce quartier si délicieusement clean où l'ordure et l'épouvante sourdent du sol évoque également le Blue Velvet de Lynch, tant les références abondent dans cet épisode à la quintessence purement américaine. Les X-Files en profitent pour manifester plus que jamais leur attachement à une certaine gauche américaine par une féroce dénonciation des dérives de la société contemporaine : ce genre de cité forteresse aseptisée connaît depuis quelques années un développement faramineux aux États-Unis ce qui en dit long sur la déliquescence du lien social et l'accumulation des tensions. À travers la résurrection de cette simili Arcadie mythique où l'on ne voit aucun noir, hispanique, ou asiatique, où les femmes quittent la table quand les hommes parlent politique, l'épisode lance une charge aussi féroce que pertinente sur le repli fantasmé par certains sur une Amérique blanche et ultra conservatrice, avec notamment un joli clin d'œil aux similitudes avec les mœurs sauvages des tribus ancestrales.

    C'est avec une étonnante présence que Peter White (Dallas, All my children...) campe un dictateur au petit pied désirant figer la société selon un code rigide confinant à l'absurde, et s'opposant au sympathique Big Mike interprété avec sa bonhomie coutumière par Abraham Benrubi (Urgences, Parker Lewis...). Par cette parabole, les X-Files s'ancrent ainsi dans ce courant qui, au travers d'un détour par le paranormal ou le futur, s'attache en fait à dépeindre et analyser les errances de notre réalité présente, ce qui constitue toujours la marque de la grande Science-Fiction, mature et ambitieuse.

    Enfin, tout ceci ne nous empêchera pas de remercier pour leur contribution à l'épisode : Sony, Oméga (encore une fois), Tropicana, voire Lacoste. C'est d'un goût, après le martyr du malheureux Queequeg...

    Anecdotes :

  • Mulder ne sait pas se servir d’un tube de dentifrice et ne referme pas la cuvette des toilettes. C’est effectivement plus difficile que de partir à la chasse aux OVNI.

  • Arcadia désigne un coin tranquille, idyllique, et rural de la Grèce antique. La Treizième Dimension, dans l’épisode Une vie tranquille, reprendra ce même terme pour désigner le lieu où finissent les réfractaires au règlement d’Evergreen, une communauté faussement paradisiaque ressemblant beaucoup à cet épisode. Par ailleurs, l'épisode Le Village de la série Alias (saison 4) a une histoire similaire à celle-ci (un duo d'agents à la relation ambiguë se fait passer pour un couple pour infiltrer un village paradisiaque qui ne l'est pas tant que ça), et pareillement s'attaque à une dérive de la société moderne : la société de consommation dans tous ses excès.

  • La montre Oméga de Mulder semble s’être améliorée : alors qu’elle indiquait l’heure et le jour dans Lundi, ici elle indique l’heure et la date complète ! Scully dit à la caméra que nous sommes le 24 du mois mais la montre de Mulder indique que nous sommes le 7. Scully parle à la caméra 14 secondes après l’avoir allumée alors qu’il y a marqué 1 minute 17 sur l’objectif. Le petit drapeau de la boîte aux lettres apparaît et disparaît lors de la scène où Mulder l’endommage. Lors du dîner avec Mulder et Scully, un des convives se sert un verre de vin, mais on revoit ce même plan quelques secondes plus tard. La nuit tombe très vite à Arcadie car lorsque Scully quitte la table, il fait jour, mais quand elle sort, il fait nuit ! L’inscription « China » sur la boîte a une autre écriture lorsqu’on la voit pour la deuxième fois. On voit également l’attirail de l’ingénieur du son quand Mulder déchire la pelouse.

  • Un des voisins de Mulder serait la famille Polizzi. Clin d’œil à Lauren Polizzi, du département artistique de la série.

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    16. ENTRE CHIEN ET LOUP
    (ALPHA)


     

    Scénario : Jeffrey Bell
    Réalisation : Peter Markle

    Résumé :

    Le Dr.Detwiller a capturé un Wanshang Dhole, une race de chien chinoise présumée disparue depuis 150 ans ! Mais pendant le voyage de retour, deux chinois ouvrent sa cage et se font tuer par l’animal qui s’échappe. Par la suite, il commet plusieurs meurtres. Mulder est mis au courant de l’affaire par Karin Berquist, une spécialiste des canidés. Scully soupçonne cependant Karin d’être attirée par son collègue et de profiter de la situation. Mulder et Karin ont cependant des doutes : comment Detwiller a-t-il pu capturer une bête réputée plus rusée et intelligente que l’homme ?...

    Critique :

    Après la succession sans failles d’étincelants loners que connaît cette saison 6 (et ce n’est pas fini…), cet épisode constitue une bien cruelle déception. En effet, l’œil peine à y découvrir un quelconque intérêt. Cette histoire terriblement basique de lycanthrope se distingue par une totale vacuité malgré la dimension orientale se révélant de la vulgaire poudre aux yeux. Le contraste avec le très riche Métamorphoses (saison 1) s'avère particulièrement destructeur pour Alpha. Rarement les impénétrables forêts canadiennes auront paru si lointaines… Cette mauvaise exploitation d’une grande figure du Fantastique évoque de fait bien plutôt l’exécrable Les Vampires, l’un des nanars de la série.

    La faiblesse de l’intrigue se traduit par une succession de scènes d’attaques du loup démoniaque séparées par des passages d’un rare immobilisme. Ces agressions, certes tournées avec efficacité, à quelques variations près, se déroulent selon le même modus operandi. Leur répétitivité ainsi que leur prévisibilité engendrent l’ennui, d’autant que l’histoire passablement statique les enrobant ne fait qu’y contribuer.

    L’épisode échoue également à prendre vie grâce à ses seconds rôles. Les réparties et l’action attribuées à Detwiller demeurent bien trop plates pour permettre au grand comédien Andrew J. Robinson (Star Trek Deep Space Nine, Hellraiser, Inspecteur Harry…) de déployer réellement son talent, hormis quelques brefs instantanés. L’histoire s’acharne à rendre mystérieuse la « femme-loup », comme l’appelle affectueusement Scully, mais, malgré la belle prestation de Melinda Culea (Agence Tous Risques, Star Trek Next Gen…), ne parvient qu’à la rendre opaque, voire terne. Dépourvue du piquant anglais d’une Phoebe Green, de la candeur spectaculaire d’une Bambi, ou de la fascinante froideur de glace d’une Diana Fowley, sa fascination pour les chiens demeure impénétrable pour un spectateur qui ne peut dès lors que se désintéresser du personnage et de sa relation particulièrement morne avec Mulder. Même l’inévitable accès de jalousie ou de défiance éprouvé par Scully ne pétille pas ici (quelle différence par rapport à Fowley !), se manifestant par quelques déclarations sentencieuses voire mélodramatiques, et tendant au roman feuilleton. La scène de conclusion se montre de ce point de vue d’une insigne lourdeur !

    La seule bonne nouvelle d'Entre chien et loup demeure la réapparition du fameux poster I Want To Believe. Avouons que l’absence de cet authentique oriflamme de la série se faisait cruellement ressentir chez le fan qu’il avait fait rêver durant tant d’années…

    Au total, même au clair de lune, Alpha demeure un épisode bien basique !

    Anecdotes :

  • Mulder a déjà eu un chien.

  • Il existe une fin alternative à cet épisode.

  • Melinda Culea (Karen Berquist) est la femme de Peter Markle, le réalisateur de l’épisode.

  • Une partie de l’épisode se déroule à Bellflower, ville natale de Chris Carter, et où eut lieu la première enquête de Mulder et Scully.

  • Les noms de Detweiler et Berquist sont ceux d’amis de Jeffrey Bell, le scénariste (la femme s’appelle en fait Bergquist), par ailleurs mariés. Cette même Karin Bergquist est par ailleurs membre du groupe Over the rhine dont l’album de 1996 s’intitule Good dog/Bad dog !

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    17. TREVOR
    (TREVOR)


     

    Scénario : James H. Guttridge & Kenneth H. Hawryliw (crédités comme "Jim Guttridge" et "Ken Hawryliw")

    Réalisation : Rob Bowman

    - Dear diary, today my heart lept when Agent Scully said "spontaneous human combustion".
    - Oh shut up, Mulder !

    Résumé :

    Wilson Pinker Rawls, prisonnier violent, est emfermé dans une cabane non loin du camp où il est détenu alors qu’une tornade fait rage. A la fin de la tempête, la cabane n’est plus que poussière, Rawls a disparu… et le chef du camp est retrouvé sectionné en deux dans sa pièce fermée de l’intérieur ! Scully et Mulder pensent que Rawls peut changer la composition des objets, pouvoir acquis lors de l’orage : il peut traverser les murs, arrêter des balles de révolver, etc. Pour arrêter Rawls, ils doivent trouver le point faible de son pouvoir et ce qu’il cherche : est-ce le magot d’un braquage, ou son ancienne fiancée ? En fait, la vérité est tout autre…

    Critique :

    D’un thème archi rebattu du polar (un évadé de prison règle ses comptes), les X-Files parviennent à tirer un épisode de bonne facture. Le scénario, fort astucieux, sait en effet jongler avec toutes les potentialités offertes par cette vision assombrie du Passe-muraille de Marcel Aymé : solution originale à la traditionnelle énigme de la chambre close, assassinat gore à souhait (encore bravo aux artistes de la série), confrontation directe avec Mulder, infiltrations diverses et variées… Vraiment, on ne s’ennuie jamais dans ce récit au tempo élevé et à l’action très soutenue.

    Il n’y a pas jusqu’à la limitation du pouvoir de Pinker qui ne donne lieu à des effets très ludiques dans la grande tradition des Super Héros ! On observe ainsi Scully et Trévor se réfugier dans une cabine téléphonique isolante, ce qui n’est pas sans joyeusement nous remémorer un certain Docteur originaire de Gallifrey (Constellation de Kasterborous). La présence de Tuesday Knight (la sœur) et certaines apparitions de Pinker rappellent également Elm Street !

    La mise en scène très vive et alerte de Rob Bowman épouse idéalement cette histoire bondissante, et pousse l’audace jusqu’à nous offrir un pastiche de la poursuite dans le labyrinthe de Shining (même recours à la Steadicam), tandis que Pinker fracassant la cabine avec une pierre fait irrésistiblement penser à la hache de Jack. Un clin d’œil bien trouvé !

    L’autre mérite de l’épisode réside dans l’éloquente composition du talentueux John Diehl (le Zito de Miami Vice !) qui interprète avec sensibilité la personnalité complexe de Pinker. En effet, la bonhomie matoise qu’il manifeste à l’occasion recouvre de profondes pulsions de violence extrême, mais aussi une sincère volonté de rédemption et d'un nouveau départ avec son fils. Il reste très touchant de le voir se découvrir à travers les yeux épouvantés de Trévor, puis, effondré, s’en aller vers une mort ressemblant beaucoup à un suicide. Sans doute ne voulait-il qu’une seconde chance, commente fort justement Mulder lors d’une conclusion particulièrement amère.

    Si ce même Mulder, visiblement toujours ravi d’avoir enfin récupéré ses chères Affaires Non Classées, se montre au début particulièrement hilare jusqu’à irriter copieusement une Scully en ayant visiblement ras la coupe, nos héros se livrent à une enquête aussi rigoureuse que passionnante, jusqu’à un final électrique particulièrement haletant. Si le brio de la forme de cet épisode n’en fait pas oublier le classicisme du fond, cela n’en constitue pas pour autant un handicap car la présence d’une histoire solide et efficacement agencée aide à lutter contre le sentiment de dispersion et le tournis que pourrait finir par susciter la succession effrénée de loners aussi brillants que totalement divers et décalés. Tiens, on en arrive à Milagro

    Anecdotes :

  • Mulder n’aime pas David Copperfield.

  • Rawls est sensé passer à travers ses vêtements quand il passe à travers les murs. Mais lors de la scène finale, alors qu’il s’éloigne de la cabine téléphonique, on peut voir qu’il porte un boxer.

  • Référence à Mitch Pileggi ? L’interprète de Skinner a joué dans un film « électrique » Shocker un personnage du nom d’Horace « Pinker » !

  • Trévor est le prénom d’un neveu de John Shiban.

  • Jim Guttridge est en fait un compositeur, et Ken Hawryliw le chef accessoiriste de la série quand elle était tournée à Vancouver. Pendant l'écriture de cet épisode, il officiait dans MillenniuM, l'autre grande série de Chris Carter. Il s'agit de l'unique scénario qu'ils ont écrit de leur carrière.

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    18. À CŒUR PERDU
    (MILAGRO)


    Scénario : Chris Carter, d’après une histoire de John Shiban & Frank Spotnitz
    Réalisation : Kim Manners

    I'd written that Agent Scully falls in love but that's obviously impossible. Agent Scully is already in love.

    Résumé :

    Un assassin arrache le cœur de ses victimes, toujours des amoureux, de ses propres mains ! Scully croise le voisin de Mulder, Phillip Padgett, romancier malchanceux éperdument amoureux d’elle. Padgett semble curieusement la connaître mieux qu’elle-même. Troublée par cet homme, Scully apprend que son dernier roman parle d’elle, ainsi que de cœurs arrachés ! Mulder voit un lien entre les deux événements mais n’a pas de preuve. Jusqu’où mènera l’amour passionné que Padgett éprouve pour Scully ?

    Critique :

    Cet épisode une nouvelle fois très particulier débute par une succession de scènes très étranges où l'on découvre Padgett plongé dans les affres de la création, fouillant en lui jusqu'à s'en extirper le cœur. Cet admirable passage constitue un témoignage éclatant du grand talent de Kim Manners. Il s'avère passionnant d'admirer tout au long de l'épisode comment ce grand metteur en scène parvenait chaque fois à trouver la parfaite image, tout comme Padgett accède à l'épure en littérature. Son commentaire audio de l'épisode s'écoute également avec beaucoup d'émotion, comme un testament.

    Dans la première partie de l'épisode, la plus relevée, Manners parvient à susciter un climat évoquant avec brio David Lynch : scènes énigmatiques et silencieuses, imprégnées par la musique omniprésente et envoûtante de Mark Snow et filmées avec un art consommé de l'Étrange, fulguration fantastique du cœur ardent, et jusqu'à la présence d'une rocade surplombant la ville évoquant furieusement Mulholland Drive. La magie s'installe et baigne la majeure partie de l'épisode dans une atmosphère onirique particulièrement fascinante. Manners n'en développe pas moins sa propre personnalité, notamment dans l'admirable scène de la rencontre à l'église où champs-contrechamps et travellings experts, photographie inspirée et ralenti parfaitement inséré concourent admirablement à nous faire ressentir les sentiments des personnages. Et il fallait tout le talent et la subtilité d'un Kim Manners pour traiter d'une figure aussi hors normes que celle de Padgett !

    Étrange et fascinante figure en effet que cet écrivain, sans doute le personnage de la série le plus personnel de Spotnitz et Shiban, où les trois auteurs en comptant Carter ont insufflé le plus d'eux-mêmes. Le spectateur se perd en conjonctures sur sa nature : n'est-il qu'un amoureux transi et particulièrement observateur de Scully ayant pénétré les territoires obscurs du paranormal, ou n'est-il pas plutôt un démiurge façonnant la réalité par la seule puissance de son verbe ? Le récit interroge avec subtilité et pertinence sur le mystère de la création artistique ou littéraire, et sur les rapports complexes entre l'écrivain et ses personnages.

    Ce thème troublant a depuis toujours inspiré brillamment le Fantastique, depuis Pygmalion jusqu'à un des épisodes les plus fameux de la Quatrième Dimension où un auteur s'entoure des personnages qu'il a créés. Cette énigme habite l'épisode en même temps que Padgett, qui finit par franchir le miroir en suscitant une relation aussi passionnante que destabilisatrice avec Scully. Par-dessus son épaule, on distingue en abîme les auteurs interrogeant la nature profonde de Scully et les potentialités s'offrant à elle.

    L'exercice de style s'avère enthousiasmant à suivre, d'autant que John Hawkes (Deadwood, En pleine tempête...) confère à son personnage une flamme et une conviction pénétrantes. Ses scènes avec Gillian Anderson, les meilleures de l'épisode, se montrent de fait véritablement troublantes tant ces deux grands comédiens s'identifient à leurs personnages. Les X-Files narrés par Padgett se montrent vraiment ensorcelants et on regrette vivement de ne pas disposer de son roman, cela nous changerait de la transposition particulièrement insipide de I Want To Believe...

    L'on retrouve une Scully plongée dans un spleen et une apesanteur similaires à ce qu'elle éprouvait dans Never again, déjà frustrée par la dureté parfois rebutante de son travail, et surtout sa relation non aboutie avec Mulder, ce qu'elle s'interdit toujours d'énoncer. Milagro évoque ainsi superbement la féminité de l'héroïne, sollicitée d'une manière des plus troublantes au moment où le « couple » formé avec un Mulder, tout à ses chères Affaires Non Classées retrouvées, semble bien enfoncé dans un perpétuel statu quo.

    La caméra de Manners rend un magnifique hommage à l'irrésistible beauté de Gillian Anderson (ah, ces close-ups...), tandis que celle-ci fait admirablement corps avec le désarroi des sentiments vécus par son personnage. Padgett reconnaît cependant son échec final malgré tous ses efforts et les promesses entrevues : le cœur de Scully est bien pris, et le silence de nos héros accompagnant cette déclaration se révèle des plus éloquents sur la poursuite du désert sur la carte du tendre (encore que le prochain épisode...).

    L'épisode me semble imprégné d'une colère à peine latente dirigée contre Fox Mulder. En effet, autant la féminité de Scully se voit magnifiée et célébrée, autant la virilité de Mulder est réduite à ses éléments les moins reluisants : violence menaçant d'exploser en cours d'interrogatoire, hostilité envers un rival potentiel l'entraînant à user de méthodes peu orthodoxes, et allant jusqu'à obscurcir ses facultés par un scepticisme bien peu coutumier chez lui. On pourrait pratiquement parler d'instinct de possession contrarié... Tout se passe comme si, tel Padgett devant le tueur, Spotnitz, Shiban, et Carter demeuraient impuissants devant l'inéluctable solitude de Scully et en rendaient Mulder responsable, lui qui conserve un silence passablement lâche quand Padgett évoque l'amour de Scully, et qui continue comme toujours à se réfugier dans l'action et les froids délices de l'intellect. En filigrane, Milagro se montre bien un épisode terriblement à charge contre Mulder, et une certaine fuite très masculine devant l'engagement amoureux.

    Par définition, la grâce ne saurait demeurer qu'un sentiment passager, et force nous est de mettre un bémol à l'éclatant succès de l'épisode. En effet, dans une seconde partie débutant à l'arrestation de Padgett, l'épisode perd de sa sublime apesanteur pour tomber dans un registre policier plus terre à terre, une confrontation un peu laborieuse entre l'auteur et sa créature, et une résolution de l'affaire assez platement expédiée. On se rend compte en fait que l'épisode paie mécaniquement le prix de la superbe exposition des sentiments de Padgett et Scully par un sacrifice inévitable du développement de l'intrigue, tout simplement par manque d'espace.

    C'est d'ailleurs un reproche que l'on pourrait adresser à cette brillantissime saison 6 qui, par le choix de récits décalés, drôles ou si émouvants, abandonne quelque peu ces enquêtes aussi vibrantes que rigoureuses, ces époustouflants duels ayant fait le succès de la période Vancouver, et pouvant laisser l'admirateur des premières saisons sur sa faim (hormis quelques belles réussites comme Trevor).

    Ce reproche reste cependant tout relatif tant Milagro stupéfie et émerveille par son essence et sa qualité purement littéraires, le passage à vide évoqué débouchant d'ailleurs sur une magnifique conclusion (la mort de Padgett tenant un cœur encore battant), propice à toutes les interprétations, et encore une fois d'un total esthétisme grâce au si beau talent de Kim Manners.

    Pour ceux que le thème de l'auteur confronté à sa créature échappant à son contrôle intéresse, je recommande le roman La part des ténèbres, un grand Stephen King.

    Anecdotes :

  • On apprend que Scully a une constitution robuste, des mollets musclés, qu’elle fait de la course notamment sur les passages cloutés. Sa voiture porte une vignette du parking de Georgetown datée de 1993 et a un autocollant du ministère l’autorisant à se garer n’importe où.

  • Mulder habite au 2630 Hegal Place, Alexandria. VA23242.

  • Milagro est un mot espagnol qui signifie « miracle ».

  • Le milagro de Scully n’est pas le même selon les plans : tantôt il est vierge des deux côtés, tantôt on voit un cœur brûlant sur une des faces.

  • Philip Padgett est le nom d’un personnage incarné par Nicholas Lea (Krycek) dans un épisode de la série SF The Burning zone. Il jouait un chirurgien démoniaque comme le personnage crée par Padgett !

  • Dans le cimetière se trouve une pierre tombale sous laquelle reposent « Diana et Nicholas Salinger » morts en 1994. Il s’agit d’une référence aux parents décédés de la famille Salinger, sujet de la populaire sitcom de la FOX (chaîne des X-Files) La vie à cinq, qui avait débuté en 1994.

  • Les X-Files sont à la pointe de l’actualité : le journal qu’ouvre Mulder est le DC Muse, clin d’œil au groupe Muse qui venait de sortir son premier album.

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    19. LE GRAND JOUR
    (THE UNNATURAL)


    Épisode Semi-Mythologique

    Scénario : David Duchovny
    Réalisation : David Duchovny

    Résumé :

    Roswell, 2 juillet 1947. L’équipe de baseball The Roswell Grays dispute une partie où brille leur meneur : le joueur noir Josh Exley. Mais bientôt, des hommes du KKK arrivent pour faire la peau à Exley. Lors de la bataille qui s’ensuit, un des hommes du KKK est touché et se révèle être… un alien ! 1999 : Mulder tombe sur une photo de l’événement et reconnaît un visage : le Bounty Hunter ! Il va voir Arthur Dales, et tombe sur son frère qui fut dans le temps flic à Roswell, et fut impliqué dans cette affaire. Il lui raconte l’histoire d’amitié qu’il eut avec Josh Exley qu’il était chargé de surveiller, ainsi que l’incroyable découverte de son secret…

    Critique :

    Lui-même déjà très souffrant, Darren McGavin apprit le décès de son épouse au commencement du tournage de l'épisode, et renonça donc à incarner pour la troisième fois Arthur Dales, le précurseur des Affaires Non Classées durant les années 40/50, non sans avoir tourné deux formidables scènes présentes dans les bonus du DVD.

    Pour contourner la difficulté, Chris Carter fit appel à un autre acteur vétéran et talentueux, Emmet Walsh (Blade Runner, Sang pour sang...), et lui fit incarner un Arthur Dales qui n'est autre que le frère de celui que nous connaissons ! Walsh s’en sort avec les honneurs mais… ce n’est en aucun cas comparable ! McGavin manque beaucoup à l’épisode, c’est certain. Quoiqu'il en soit, c'est avec le plus grand plaisir que nous retrouvons le toujours sensible et pertinent Fredric Lehne pour cette nouvelle plongée dans le passé des États-Unis et du FBI présentant la particularité, grande première, d'être écrite et réalisée par David Duchovny.

    On assiste à un total changement d'ambiance par rapport aux tortueuses intrigues et à l'atmosphère parano-maccarthyste de Travelers (où régnait encore l’esprit Vancouver), car cette fois la fenêtre temporelle nous projette dans un radieux road movie se déroulant dans les États du Vieux Sud ; la nostalgie n'est cependant pas davantage de mise que précédemment, et la suavité du pays, sa douceur de vivre, se voient plus que nuancées par une violence et un racisme prégnants, comme le symbolise la spectaculaire apparition initiale du KKK.

    Le récit apparaît cependant moins désespéré que celui de Travelers car The Unnatural nous raconte aussi l’histoire de la belle amitié naissant entre Dales et Josh (très expressif Jesse L. Martin : Ally McBeal, Law & Order…), malgré les préventions du temps et le terrible secret de ce dernier. Le Fantastique ne demeure pas cependant en reste avec une nouvelle originale variation autour de Roswell (Roswell ! Roswell !), de toujours surprenants effets spéciaux à l’impact renouvelé dans ce décor très humain, et jusqu’à l’entrée en scène du légendaire Bounty Hunter déjà implacable des décennies avant de croiser la route de Mulder. La balade, gorgée d’humour, de sentiment, et de vitalité, se révèle donc des plus agréables. Elle jouit en effet d’une authentique saveur américaine très appréciable avec une reconstitution d’époque bénéficiant du savoir-faire unique de la série, de superbes blues (on pense à O'Brother), et une mystique du baseball apparaissant bien opaque à un européen (ou à Scully)… dans un premier temps !

    En effet, si, avec une somptueuse qualité d’image, David Duchovny se montre aussi doué pour la mise en scène que pour l’écriture (je me mords toujours les doigts d’avoir raté son épisode de l’excellent Bones), on se doit aussi de lui tirer notre chapeau pour ne pas avoir cédé au vieux démon des comédiens de tirer la couverture à soi en laissant un vaste espace à sa partenaire. Il faut bien dire que Gillian Anderson se montrera plus égocentrique et narcissique dans All things

    La nouveauté venant agrémenter le face-à-face maître/élève de Dales/Mulder réside bien dans l’apparition d’une Scully très malicieuse et très féminine qui vient apporter comme un souffle de vie supplémentaire au récit. Gillian se montre une fois de plus parfaite dans ce personnage qu’elle maîtrise à la perfection. On remarque qu’elle fait (à sa manière !) le coup du cornet de glace qu’expérimentera plus tard Hanky…

    Le parachèvement de l’épisode réside bien évidemment dans la démonstration très fusionnelle de baseball que Mulder effectue avec Scully ; l’image se révèle d’une grande poésie, mais aussi d’un magnifique romantisme sous les étoiles. On comprend d’un coup beaucoup mieux la magie du baseball… On observe qu’après un Milagro finalement très pessimiste quant à la relation Mulder/Scully, Duchovny se montre beaucoup plus optimiste et entreprenant, poussant ici la complicité de nos héros jusqu’à l’extrême limite de ce qu’autorise la vision de Spotnitz et Carter. C’est à croire que les interprètes auront toujours une perception plus confiante et volontariste de leurs personnages que leurs auteurs eux-mêmes… Allez, pour une fois, je vais utiliser le terme : Duchovny est très, très shipper… et qui s’en plaindra ?

    À noter que le fameux « The Truth is out there » est remplacé par « The Big Inning ».

    On observe aussi une nouvelle référence à Star Trek (mais aussi à MacGyver) dans une série décidément fascinée par ses aînées ! L’équipe de baseball se nomme avec à-propos The Roswell Grays… Le frère de David, Daniel, joue le rôle de Piney. Chris Carter, immense fan de baseball, avait donné le nom de Scully en hommage à Vin Scully, célèbre commentateur de match apparaissant dans l’épisode. L’épisode comporte d’ailleurs de nombreuses références à de grandes stars de ce sport, y compris Josh Gibson (et non Exley).

    Anecdotes :

  • Pour la treizième fois de la série, l’indicatif du générique The Truth is out there est remplacé par In the Big Inning. Troisième fois que cela arrive sur un loner.

  • Premier épisode réalisé par David Duchovny (pour la série mais aussi de sa carrière), c’est également sa cinquième contribution à l’écriture d’un épisode de la série, mais son premier scénario (y compris de sa carrière) à être écrit entièrement par lui-même.

  • Le commentateur (Vin Scully) mentionne la ville de Bellflower, la ville natale du créateur de la série.

  • Mulder aime le baseball, Scully pas vraiment, quoique la fin de l’épisode semble la voir changer d’avis.

  • Unique fois où l’on voit le vrai visage du Bounty Hunter.

  • Le titre de l’épisode est certainement une référence à The Natural, film de Robert Redford également sur le baseball.

  • Dans Agua Mala, Arthur Dales (le premier !) a déménagé en Floride. Dans ce cas, pourquoi Mulder va-t-il dans son ancienne maison ? On peut voir des cactus Saguaro lors de la scène de baseball à Roswell alors que cette espèce de cactus n’existe pas dans le Nouveau-Mexique. En VF, Georges Caudron fait une erreur en disant que Mickey Mantle a fait 536 coups de circuit : 163 à droite et 173 à gauche… ce qui fait 336 ; en fait, il aurait dû dire 373 à gauche. Les sous-titres rectifient l’erreur.

  • Le pull-over du coach nous dit que son nom est Shiban, allusion au scénariste John Shiban.

  • My best friend’s martians ? s’interroge Arthur Dales. Clin d’œil peut-être au film My best friend’s wedding, film où figure Emmet Walsh, l’interprète. E.T. steals home, E.T steals home, fait Mulder en plaisantant, détournant la fameuse citation d’E.T. l’extra-terrestre (1982) : E.T. phone home.
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    20. BRELAN D'AS
    (THREE OF A KIND)


    Scénario : Vince Gilligan & John Shiban
    Réalisation :
    Bryan Spicer

    Oh, man, I am going to kick their asses !

    Résumé :

    Les Bandits Solitaires espionnent tant bien que mal des réunions dans un casino de Las Vegas entre les milieux gouvernementaux et des marchands d’armes scientifiques toujours plus sophistiquées. Byers croise brièvement Susanne Modeski qu’il n’a jamais cessé d’aimer. Il tente de la retrouver et de savoir quel rôle elle joue dans cette nouvelle conspiration. Pour les aider, Le trio fait appel à Dana Scully. Mais un de leurs contacts se suicide sous un bus. Ils sont persuadés qu’il a en fait été assassiné car il avait découvert quelque chose. Bientôt, le trio lui-même est menacé…

    Critique :

    À son crépuscule, la sixième saison a l’excellente idée de nous offrir une suite au particulièrement relevé Unusual Suspects en célébrant les retrouvailles, hélas passagères, de Susanne et Byers. Les liens entre les épisodes paraissent d'ailleurs savamment tissés, avec la même atmosphère si particulière des congrès, de nombreux clins d'œil (Langly, des années plus tard, est toujours fan de Donjons & Dragons), et surtout de nouveau la présence d'un unique représentant du duo vedette de la série, en l'occurrence Scully. Et, tout comme son modèle, le succès de l'épisode se bâtit sur trois piliers, distincts, mais si harmonieusement entremêlés.

    Tout d'abord, Three of a kind (quel titre !) se montre imprégné de l'humour et de la sympathie que dégagent toujours notre brelan d'As ; pour une fois, le titre français est d'ailleurs bien trouvé ! On s'amuse toujours autant à les suivre dans leurs frasques, tout au long de leurs retentissants fiascos finissant invariablement par déboucher sur d'improbables victoires à force d'enthousiasme toujours renouvelé et de solidarité sans faille. Nos éternels adolescents (et leurs jouissifs interprètes) nous divertissent toujours autant ; à ce titre, la partie de poker initiale est une vraie perle, se situant très loin des tunnels sentencieux de Casino Royale.

    De plus, ils bénéficient d'une guest star de luxe en la personne de Dana Scully, qui manifeste d'entrée le plus vif enthousiasme d'être réveillée en pleine nuit et de traverser tout le pays pour s'embarquer dans une des galères coutumières des Bandits Solitaires. À cette exaspération froide propre à notre héroïne (l'exécution de Langly durant l'autopsie reste un délice), s'ajoute bien entendu le passage délirant la voyant transformée en nympho totalement dingue, avec en point d'orgue la fulgurante réapparition d'un Fletcher égal à lui-même. Quand c'est à son tour de recevoir une main au panier fort appréciée, on ne peut s'empêcher d'éclater de rire !

    Certes, on objectera que la présence de Scully ne se justifie pas dans une action où elle ne prend finalement aucune part réelle. Qu'importe, sa présence pimente cet épisode, et qui s'en plaindra ? Tout au plus regrettera-t-on de ne pas assister à la fameuse engueulade prophétisée par un Frohike hilare puis par une Scully nettement plus furibonde. Mais gageons qu'elle ne sera pas très méchante, car on s'aperçoit bien que, malgré un agacement de façade, Scully les aime bien nos trois loustics !

    Par ailleurs, l'épisode manifeste avec éclat le positionnement des X-Files dans une mouvance d'opinion proche de la gauche américaine et des démocrates, sans qu'il ne soit jamais bien entendu question d'engagement militant. La remarquable séquence d'introduction évoque avec beaucoup d'éloquence la nostalgie qu'inspire toujours, à tort ou à raison, la présidence inachevée de Kennedy non seulement chez Byers, mais aussi auprès d'un large pan de l'opinion américaine. L’évocation vibrante des principes fondateurs de la démocratie américaine pourrait sonner creux ou emphatique, tel n'est cependant pas le cas tant l'on ressent la sincérité des auteurs de la série faisant ici très clairement de Byers leur porte-parole.

    Le contraste apparaît particulièrement flagrant avec l'indécence de ces marchands de canons cyniques et avides poussant la vulgarité jusqu'à organiser leur congrès au sein d'un casino de Las Vegas (il est vrai somptueusement filmé par Bryan Spicer). L'intégration de ces entrepreneurs avec la science de pointe et les milieux gouvernementaux au sein de ce que l'on a appelé le "complexe militaro-industriel" fait ici l'objet d'une satire aussi corrosive que pugnace. Que le Syndicat ait été annihilé n'empêche bien entendu pas ce petit commerce de perdurer...

    Three of a kind, c'est aussi bien sûr la poursuite de la relation contrariée unissant Byers et Susanne Modeski. Signy Coleman, si belle et si talentueuse, se montre aussi émouvante que dans Les Bandits Solitaires, tandis que le couple formé avec Bruce Harwood fonctionne toujours à la perfection. On peut trouver bien rapide son revirement en défaveur de son fiancé, mais cela correspond bien à la parano inhérente au Trio, et demeure de toute manière accessoire. Son impressionnante force morale et sa totale fidélité à ses convictions font véritablement d'elle un des personnages les plus admirables de la série, et on ne peut que se féliciter pour Scully qu'elle n'ait jamais véritablement croisé la route de Mulder... Susanne conserve sa part de mystère ce qui lui va à merveille, mais on ne peut s'empêcher de regretter de ne pas la connaître davantage... La scène d'adieux avec Byers se suit avec beaucoup d'émotion, les effets sonnent avec justesse et sans pathos inutile.

    La résolution de Byers illustre le profond engagement des Bandits Solitaires dans leur combat pour la Vérité et pointe les sacrifices accomplis, bien réels derrière la dimension humoristique de leurs aventures. Les deux amoureux se quittent sur un au revoir laissant entrouverte la possibilité d'un avenir commun, mais l'on sait désormais qu'il n'y aura jamais d'autres retrouvailles, ce qui accroît encore l'aspect douloureux de cette séparation...

    Au total, même si l'effet de surprise joue moins que lors des Bandits Solitaires et qu'il n'atteint pas la dimension émotionnelle propre à la première rencontre de Mulder et des "Lone Gunmen", Three of a kind demeure un excellent épisode riche en péripéties, humour, et sentiments, où l'on retrouve tout le talent de Vince Gilligan, ici bien assisté par John Shiban décidément extrêmement investi cette saison ! Il présente également le grand attrait d'ouvrir une fenêtre sur ce qu'aurait pu devenir Au cœur du Complot si elle avait pu disposer des moyens techniques plus que conséquents des X-Files (on s'habitue si bien au luxe...) et d'une implication un peu plus marquée des figures de la série mère. Cela aurait si bien accompagné l’audace et la vitalité de cette série qu'une deuxième saison aurait certainement été au rendez-vous...

    En tout cas, les Bandits Solitaires frappent encore très fort puisque cet épisode représente la plus basse audience de la saison ! On ne change pas une équipe qui perd !

    Anecdotes :

  • 2e épisode sans Mulder (on entend toutefois la voix de David Duchovny quand les Bandits Solitaires synthétisent la voix de Mulder).

  • Byers aime le homard.

  • Sequel de l’épisode Les Bandits Solitaires (saison 5). 2e et dernière apparition de Susanne Modeski. 2e apparition également de Morris Fletcher.

  • L’unité défectueuse AE-135 mentionnée dans la scène du poker est peut-être un clin d’œil au 2001 de Stanley Kubrick, HAL-9000 avertissant Bowman que l’unité AE-35 est défaillante. Il y a par ailleurs une référence à Mad Max 3 (1985) dans le dialogue.

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    21. SPORES
    (FIELD TRIP)

     

    Scénario : Vince Gilligan & John Shiban, d’après une histoire de Frank Spotnitz
    Réalisation : Kim Manners

    Résumé :

    Wallace et Angéla Schiff reviennent d’une balade en forêt. Sous la douche, Angéla a la vision d’une substance jaunâtre suintant autour d’elle. Le couple va se coucher mais ce n’est qu’une illusion : en fait, leurs squelettes reposent dans la forêt ! Mulder et Scully sont intrigués par la décomposition fulgurante de leurs cadavres. Mulder va dans la forêt et voit avec stupéfaction Wallace Schiff courir vers une grotte !! Il le rattrape et apprend que lui et sa femme ont été enlevés par des aliens et relâchés : les squelettes ne sont qu’un leurre. Quand nos agents ont à leur tour la vision du liquide jaune, ils commencent à soupçonner une autre vérité, bien plus horrible…

    Critique :

    Pour cette nouvelle confrontation avec un péril végétal, bien après l'inoubliable Quand vient la nuit, les X-Files empruntent une voie évoquant clairement les simulacres et autres univers truqués constituant la plus conséquente partie de l'œuvre de Philip K. Dick (lui même amateur de LSD...). On trouve en effet ici comme de savoureuses résonances avec des chefs-d'œuvre de l'envergure de Ubik, Au bout du Labyrinthe ou La Vérité avant-dernière, et tant d'autres encore (on pense aussi à un brillantissime épisode des Envahisseurs, L’innocent). L'idée apparaît certes aussi ambitieuse que prometteuse, mais reste encore à savoir si l'intrigue et sa mise en scène vont bien déployer la finesse et le savoir-faire nécessaires à la subtile alchimie de tels effets.

    Une scène d'introduction parfaitement glaçante et à la chute vertigineuse met d'emblée la barre très haut, tandis que le récit sait à merveille passer imperceptiblement du réel au virtuel, semant délicatement un trouble des plus jouissifs dans l'esprit du spectateur. Celui-ci, s'il a un tant soit peu pratiqué les chemins si libératoires de l'imagination de la Science-Fiction, pressent graduellement l'atroce vérité, mais cela n'en diminue pas pour autant l'impact de la découverte de celle-ci, conduite avec une belle efficacité et survenant à point nommé. Les transitions si étranges et elliptiques d'un décor à l'autre demeurent un pur délice.

    La caméra du regretté Kim Manners s'entend également à exploiter les situations cocasses ou hallucinées autorisées par la dimension onirique de l'histoire, avec notamment la spectaculaire apparition de l'Alien, et surtout la scène avec Skinner où, dans une vertigineuse révélation, Mulder arrache les voiles de l'illusion. Le lecteur au long cours de Dick regrettera toutefois le manque d'ambiguïté d'une conclusion précipitée établissant sans doute aucun, mais avec quelque frustration, un retour au réel sonnant comme la fin d'une odyssée aussi enchantée qu'horrifique. Mais il est vrai que semer le trouble quant à la nature des évènements à venir s'avèrerait particulièrement risqué dans le cadre d'une série, quoique dans une tonalité proche, le Normal again de Buffy contre les vampires aura l'audace d'un final ambigu sur la réalité même de son univers ! Et nos ami(e)s shippers apprécieront sans nul doute la vision de Scully et Mulder la main dans la main...

    Pour les besoins du tournage, les acteurs ont dû être recouverts durant huit heures d'un produit servant à solidifier les préparations lactées.

    Le petit extraterrestre est joué par le fils du coordonnateur des cascades de la série, Danny Weselis.

    Anecdotes :

  • Scully et le coroner disent que le fungus est une plante alors qu’il est davantage considéré par les biologistes comme un être animal. Il est visible lors de la scène où Angela prend sa douche que Robyn Lively porte un costume couleur chair. Quand Mulder et Scully parlent de la montagne brune de Caroline du Nord, on voit derrière eux une carte de la Caroline du Sud. De plus, Asheville se trouve à Buncombe County, et non à Boone County, territoire fictif.

  • On entend dans l’épisode des effets sonores provenant du jeu vidéo StarCraft.

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    22. BIOGENÈSE
    (BIOGENESIS)

     

    Épisode Mythologique 

    Scénario : Chris Carter & Frank Spotnitz
    Réalisation : Rob Bowman

    Résumé :

    Le Dr.Merkmallen, détenteur d’un étrange artefact, découvre sur une plage de Côte d’Ivoire un autre artefact similaire sur lequel sont gravés des inscriptions navajos. Mais il est assassiné par le Dr.Barnes, allié à Alex Krycek, qui lui dérobe l’artefact. Scully et Mulder sont chargés de l’affaire, mais la présence du frottis de l’artefact perdu a un effet dévastateur sur Mulder qui sombre dans la folie. Scully, seule désormais, voit l’enquête se compliquer quand Diana Fowley réapparaît, et quand elle apprend que l’artefact extraterrestre contient des informations remettant fondamentalement en cause les origines des hommes…

    Critique :

    Après avoir paru clore la Mythologie lors de Toute la vérité, Carter s’efforce de lui redonner vie lors de l’ultime épisode d’une saison où la priorité fut clairement accordée aux loners. Force est de constater que ce redémarrage s’avère des plus poussifs et laborieux, au point de s’interroger sur sa réelle motivation, la satisfaction d’un besoin quasi mécanique de prolongation d’un constituant majeur de la série semblant l’emporter sur un véritable souffle créatif.

    En effet, l’ensemble de l’épisode paraît singulièrement dépourvu de rythme et d’intensité dramatique, l’ébullition des épisodes similaires du passé se voyant ici remplacée par une prose passablement sentencieuse et pesante sur la destinée humaine, et une dimension biblique assez indigeste. La préciosité et l’emphase du discours ne dissimulent que bien maladroitement l’absence de rebondissements frémissants, d’atmosphère électrique, mais s’accompagnent de plusieurs maladresses narratives assez stupéfiantes. La perturbation psychique de Mulder, sensée pimenter l’intrigue, se traduit par des effets minimalistes et répétitifs, et sert essentiellement de ficelle bien trop voyante pour faire progresser une intrigue amorphe. Voir Duchovny s’époumoner face à la caméra en singeant la folie s’avère plus pénible qu’autre chose. On reste confondu devant la lourdeur du procédé consistant à faire interroger explicitement Mulder par Scully sur ce qui peut bien désormais l’inciter à poursuivre sa quête. Comme s’il n’était pas évident pour elle comme pour nous que l’absence de Samantha demeurât insupportable pour Mulder ?

    On assiste aussi à une répétition exacerbée de figures imposées de la série comme ses sempiternelles poursuites dans un hôpital qui resteraient acceptables dans un épisode standard, mais qui agacent dans une fin de saison sensée constituer un feu d’artifice. Au beau milieu du marasme d’une action désespérément verbeuse, on nous assassine en nous infligeant un second monologue de Scully particulièrement emprunté, après celui de l’ouverture. Ce dernier apparaissait un tantinet plus relevé et gagnait un intérêt en ressemblant à plusieurs introductions oniriques de Medium débouchant sur une chute étonnante. Rien de cela ici, et le second pensum prend lui des airs de goutte d’eau débordant d’un vase… Étonnant de voir Scully laisser là Mulder pour tenter la chance en Afrique alors même qu’elle passe l’épisode à douter de l’histoire…

    Ce long voyage immobile au sein d’un épisode tenant plus d’un prologue à une action future que d’un final de grande classe débouche sur l’un des cliffhangers les plus faibles de la série, la découverte d’une arche alienne (pile au moment où Scully arrive…). Ho, un vaisseau extraterrestre, quelle nouveauté des plus imprévisibles dans les X-Files ! Et quelle manière décevante de conclure une saison aussi imaginative et festive…

    Fort heureusement, Biogenèse dispose de ses personnages secondaires pour éviter le naufrage complet car, même en petite forme, Carter et Spotnitz conservent du savoir-faire. Skinner, dans les griffes d’Alex, joue un jeu complexe et intéressant à suivre grâce également au talent jamais pris en défaut de Mitch Pileggi. Connaissant l’intelligence et la méticulosité proverbiale du Directeur Adjoint, on ne m’enlèvera pas de l’idée que sa bévue révélant le pot aux roses à Scully n’est en fait qu’un message discret à cette dernière…

    Outre de sympathiques retrouvailles avec Albert Hosteen et Charles Burks, c’est toutefois bien chez les adversaires du jour que l’épisode va rechercher son intérêt. Notre très cher Krycek se cantonne à trois apparitions fugitives et essentiellement silencieuses (et létales, mais c’est un pléonasme chez notre Alex), mais on aime tellement le personnage et son interprète, Nicholas Lea, le diable à figure d’ange, que cela suffit à nous enthousiasmer, et manque de peu d’enflammer l’étoupe humide de l’épisode, d’autant que ces quelques scènes sont filmées avec l’intensité et l’efficacité qui conviennent.

    Toutefois, la partition la plus relevée de l’épisode se voit interprétée par nulle autre que Diana Fowley, qui gagne décidemment en noirceur à chaque nouvelle intervention. Ici campant une véritable Messaline, elle n’hésite pas à vamper un Mulder sans défense tout en en référant servilement à C.G.B., toujours de la partie lui aussi. À ce niveau de félonie, c’est simple, on se délecte. Mimi Rogers confère toujours son charme ténébreux, son abattage certain, et sa grande classe à cette mante religieuse que vous adorerez détester. On observe au passage qu’après l’anéantissement du Syndicat, les routes de Krycek et de C.G.B. apparaissent de nouveau totalement distinctes, ce qui ne concrétise rien pour l’heure, mais demeure riche en potentialités. En attendant, les sinistres et tortueux « briefings » de l’Organisation nous manquent déjà terriblement… Les retrouvailles de Fowley et Scully se révèlent aussi polaires qu’on peut l’imaginer, la seconde s’intéressant en premier lieu à ce que pouvait bien faire la première le soir chez Mulder !

    Après cette laborieuse tentative, Chris Carter parviendra-t-il à véritablement redonner vie à sa Mythologie ? La réponse la saison prochaine, lors de la suite et fin de cet arc de trois épisodes !

    Ainsi s’achève cette saison 6, marquée par une profusion de loners d’un niveau exceptionnel, imaginatifs, décalés, drôles ou émouvants, s’attachant comme rarement auparavant à la relation Mulder/Scully. Individuellement, ils se montrent absolument prodigieux, mais mis bout à bout au fil de la saison, on ne peut s’empêcher de regretter la relative absence de véritables adversaires et d’éprouver une certaine nostalgie pour les duels vibrants et les enquêtes si performantes et rigoureuses de la période canadienne.

    Les X-Files ont changé, tout en demeurant d’une époustouflante qualité, mais les nouvelles voies pétillantes et ensoleillées ouvertes à profusion par Hollywood ne nous feront point oublier la pénombre sans prix et l’atmosphère unique de Vancouver.

    Anecdotes :

  •  La biogenèse désigne la doctrine selon laquelle toute forme de vie se développe à partir d’autres formes de vie et non à partir d’une matière inerte en mutation. En latin, le terme signifie « création de vie ».

  •  Dans l’introduction, le bref passage où l’on voit deux hommes des cavernes marcher dans une tempête de neige est extrait du début du film The X-Files : Combattre le futur.

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    TOP 5 SAISON 6

    1) Zone 51

    2) Les amants maudits

    3) Bienvenue en Arcadie

    4)À cœur perdu

    5) Lundi

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    Crédits photo : FPE.

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     saison 1 saison 3

    X Files (1993-2002)

    Le Film


    X FILES : LE FILM / COMBATTRE LE FUTUR
    (THE X-FILES : FIGHT THE FUTURE)


    Épisode Mythologique

    Scénario : Chris Carter, d'après une histoire de Chris Carter et Frank Spotnitz
    Réalisation : Rob Bowman

    One man alone cannot fight the future.

    Survival is the ultimate ideology.

    Résumé :

    Un enfant texan tombe dans un trou et y trouve un crâne humain. Il est alors infecté par l'Huile Noire ! Des hommes mystérieux arrivent sur scène... Après la fermeture des Affaires Non Classées, Mulder et Scully ont été réassignés à d'autres postes. Un soir, un docteur paranoïaque s'approche de Mulder, et lui révèle que l'explosion d'un building à Dallas dont lui et Scully ont été témoins le matin même était un plan du gouvernement pour cacher des preuves compromettantes de la Conspiration extraterrestre ! En autopsiant plus avant un cadavre de l'attentat, Scully découvre un virus alien. Malgré le veto de leurs supérieurs, Mulder et Scully enquêtent pour retrouver des preuves de la Conspiration dans l'espoir de faire réouvrir leur service. Leur enquête les mènera jusqu'en Antarctique...

    Critique :

    L’année cinématographique 1998 vit apparaître deux adaptations de séries cultes, Godzilla et Saving the World with Style, qui se révélèrent des désastres passablement absolus. Jamais deux sans trois ? Fight The Future allait-il parachever la malédiction de cette année, alors même qu’il avait suscité les plus frénétiques espérances parmi la communauté désormais mondiale des innombrables fans de la série majeure des années 90 ?

    Une première mauvaise surprise nous est rapidement assénée avec l’incompréhensible absence du célébrissime et si envoûtant générique. Comme plus tard I Want To Believe, Fight The Future se contente d’un bref indicatif, mettant certes en scène le fléau du jour avec grande beauté. On se perd réellement en conjonctures sur ce choix : les fans auraient apprécié de retrouver cet élément si identifiant des X-Files, éventuellement légèrement réorchestré pour l’occasion, tandis que la série se prive de l’une de ses plus belles cartes de visite auprès des nouveaux arrivants.

    Après une sublime introduction claustrophobique et horrifique à souhait, illuminée par le ténébreux éclat de l’Huile Noire, nous faisons face à ce qui constituera la plus grande faiblesse du film. Nous sommes en effet soufflés par un déferlement d'effets pyrotechniques, de voitures hurlantes, et d'hélicoptères vrombissants particulièrement criard, où l'on ne reconnaît absolument pas la patte X-Files. Si Carter avait voulu graver dans le marbre que désormais la série se tournait à Hollywood et non plus à Vancouver, il ne s'y serait pas pris autrement, avec de plus ce satané soleil achevant de détruire l'atmosphère à laquelle nous étions si attachés. Il est humainement compréhensible que Carter, nanti d'un budget inédit (66 millions de dollars pour la production, contre 2,5 millions en moyenne par épisode durant la saison 5), ait voulu s'amuser avec ses jouets tout neufs, d'autant plus qu'il lui fallait justifier le portage cinéma de la série. Le résultat s'avère négatif car les X-Files y perdent beaucoup de leur spécificité, de leur raffiné du Fantastique de haut niveau, pour tendre vers le blockbuster classique du film d'action.

    Outre son aspect artistique intrinsèque discutable, cette évolution s'avère peu judicieuse pour l'accueil réservé au film par le public. Les nouveaux arrivants ne connaissant pas ou peu la série vont naturellement comparer aux blockbusters à succès, avec lesquels Fight The Future n'a tout de même pas les moyens financiers de soutenir la comparaison, et qui va, par ailleurs fort heureusement, par la suite évoluer dans une autre direction. Ils s'attendent à voir du Die Hard, se positionnent en terrain connu, et sont pratiquement fatalement déçus par la suite (je parle en connaissance de cause, car c'est la réflexion que m'ont faite les amis néophytes que j'avais traînés quasiment de force voir le film). Les amateurs vont eux ressentir une première bouffée de nostalgie pour les brumes canadiennes.

    C'est d'autant plus frustrant que le film utilise bien plus finement par la suite ces moyens en les centrant sur son cœur de métier, la Science-Fiction, avec notamment des reconstitutions d'Aliens très réussies et parfaitement effrayantes, les cadavres décomposés où s’illustrent une nouvelle fois les artistes de la série, ou les étonnants décors des silos à abeilles comme du vaisseau spatial. Il reste préférable de mobiliser ses ressources sur ce que l'on sait faire de mieux, plutôt que de tenter des aventures incertaines. On retrouve en fait le défaut décelé dans Les nouveaux spartiates, et cet excellent film que demeure Fight The Future se voit pénalisé par ces scènes d'action très pompier et hors sujet. Tout comme ultérieurement I Want To Believe avec ses passages hospitaliers si sirupeux, il y perd sa quatrième étoile : les X-Files c'est de la SF, et ils n'ont pas à aller braconner sur d'autres territoires.

    Ce n'est qu'après cet intermède que le film débute réellement, tout en nous rassurant très rapidement. En effet, Carter a convoqué le ban et l’arrière-ban, et a réuni la fine fleur de l’équipe sur le Grand Projet, avec lui et son vieux compère Spotnitz à l’écriture, et l’un des plus importants et talentueux réalisateurs de la série, Rob Bowman (au total 33 épisodes réalisés à son actif), qui s'était montré déjà comme le réalisateur le plus à l'aise avec les épisodes aux budgets les plus importants de la série. Mark Snow nous régale une nouvelle fois de mélodies merveilleusement évocatrices. Que l’adaptation de la série soit effectuée par l’équipe originelle au lieu d’un tâcheron n’ayant rien compris à son esprit, s’impose bien entendu comme un avantage majeur, jouant ici à plein.

    L’histoire se révèle constituer une parfaite harmonie entre sens du mystère (incroyable décor des champs de maïs entourant d’étranges silos à abeilles) et maîtrise de l’action. Le rythme ne faiblit jamais et le spectateur ne s’ennuie pas un seul instant, mais le film sait prendre le temps de s’arrêter pour nous faire pleinement goûter le merveilleux qui l’anime, fut-il macabre à l’occasion. Le tempo varie très efficacement pour éviter toute sensation de monotonie entre enquête parfaitement agencée et final haut en couleurs où l’on voit l’action culminer dans un vaisseau spatial peuplé de monstruosités évoquant furieusement le Huitième Passager ! Les fautes de goût paraissent évitées avec brio comme lors de la scène pharaonique finale qui aurait pu être ridicule mais qui ressort au contraire d’un magnifique esthétisme. Cette fois-ci l’argent est judicieusement dépensé ! Rob Bowman utilise très efficacement sa caméra, jouant avec virtuosité sur une très large palette, des gros plans intimistes sur les visages aux grands angles très hollywoodiens. À chaque fois il tombe juste, sa technicité n’entravant en rien sa vive imagination.

    Certains fans ont parfois reproché au film de ne représenter qu’un double épisode mythologique de plus. Tel n’est pas mon avis. Non seulement Fight The Future s’élève jusqu’à des sommets de tension dramatique et de qualité d’écriture jusqu’à pouvoir espérer rivaliser avec le triptyque Anasazi, ce que l’on avait pas vu depuis longtemps, mais surtout il compose avec un brio étincelant une somme de ce que la série peut nous offrir à travers une Mythologie atteignant ici son zénith, avant de débuter l’hasardeuse descente conduisant jusqu’à cette histoire définitivement ridicule de Super Soldats. C’est ainsi que l’ensemble des différents aspects de ce roman complexe, agité, et captivant nous est offert, comme les stimulants « briefings » de la Conspiration, les interventions si marquantes de l'Homme à la Cigarette, le compte à rebours fatidique, la dimension mondiale du complot et son enracinement dans le temps (référence parfaitement jouissive de cet épisode inouï qu’est Compagnons de route), pouvoirs fascinants de l’Huile Noire, Source au fatal destin, etc. Soit un compendium portant l’ensemble de cet univers à son incandescence, dans l’orchestration symphonique que permet une dimension cinématographique parfaitement exploitée.

    Nous retrouvons même une de ces fameuses autopsies menées par Scully sans lesquelles les X-Files ne seraient pas tout à fait eux-mêmes ! Le scénario demeure certes linéaire et moins ambitieux ou original que lors de certains épisodes, il n’en ressort pas moins captivant et nerveux à souhait, sans temps morts. Alors on peut toujours avoir l’espérance très romantique d’une totale originalité du récit, de cet « autre chose » dont on ne nous précise jamais clairement ce qu’il pourrait bien recouvrir, mais contempler un double épisode aussi riche que somptueux, saisissant à la perfection les opportunités offertes par le grand écran (hormis la faute de goût initiale), suffit largement à mon bonheur. Et puis, la série s’étant si souvent hissée au niveau de qualité du cinéma explique également que la différence sur grand écran puisse paraître atténuée…

    L’autre question souvent débattue demeure celle de l’ouverture du film aux nouveaux venus. Là, force est de constater que Chris Carter ne réussit pas tout à fait son pari de concilier ce public à celui des fans de la première heure, voire plus récents. Exploiter aussi brillamment la Mythologie dans sa plénitude ne pouvait que se révéler segmentant, malgré les efforts d’explication entrepris deci-delà. Ces derniers nous valent toutefois une scène très amusante où l’on voit Mulder, confronté à un blocage professionnel majeur et au spectre de l’éloignement de son âme sœur (Scully vient déjà de parler de démission), entreprendre de s’enivrer consciencieusement dans son bar coutumier. Comme de plus nous nous situons en Californie et qu’il est abordé par une accorte serveuse, on tremble en songeant à ce qui pourrait se produire si nous nous trouvions dans une certaine autre série !

    Mais nous sommes dans les X-Files, et la scène débouche sur un Mulder réalisant une brillante synthèse de son personnage devant une demoiselle des plus sceptiques. La scène évoque quelque peu le mythique passage de la tarte du Seigneur du magma et l'on s’amuse beaucoup avec ce moment très pétillant. Quoiqu’il en soit, Carter ne parvient pas à dépasser cet antagonisme entre les deux publics, ce qui expliquera en grande partie le choix d’un loner pour I Want To Believe. Mais, baste ! Après tout, les fans de la série sont alors légion, et à tout prendre, il semble plus naturel que ce soit eux qui se voient privilégiés.

    Ils auront également le plaisir de retrouver leurs personnages préférés, dont la qualité des interprètes représente un nouvel atout majeur pour Fight The Future. Si la présence de Skinner et des Bandits Solitaires demeure minimaliste, les comédiens démontrent néanmoins leur brio coutumier, et voir Mulder exiger de Byers un strip-tease express reste un grand moment ! Ce que les les Bandits Solitaires n’auront dû consentir pour la cause… Et puis, disons-le, notre plaisir n’aurait pas été le même sans eux, tout simplement ! Si Skinner ne prend guère la parole, le connaisseur n’aura guère de peine à imaginer son lobbying permanent au sein de la commission en faveur de ses agents, ainsi que son rôle actif dans la décision de réouverture des X-Files. Skinner reste un soutien important de Mulder et Scully, mais aussi de la série elle-même. Mitch Pileggi est parfait, comme toujours.

    Si William B. Davis demeure toujours éloquent dans les nombreuses interventions parfaitement calibrées de l'Homme à la Cigarette (son visage lors de la scène finale est à voir), le film, comme il se doit, laisse surtout un magnifique espace à l’Homme bien Manucuré pour son ultime apparition. Si les auteurs donnent trop d’importance à l’accident de son petit-fils, sa résistance acharnée face aux autres membres de la Conspiration, et surtout sa confrontation si révélatrice et intense avec Mulder, comptent parmi les scènes les plus réussies et palpitantes du film. Dans la lignée de L’incendiaire, il apporte également une saveur très anglaise au récit que les amateurs des Avengers ne pourront qu’apprécier, d’autant qu’ils auront la joie d’assister à une réunion de la Conspiration se tenant à Londres ! Jusqu’au bout, John Neville, l'Homme bien Manucuré, aura apporté tout son talent de grand comédien des théâtres canadien et britanniques, ancien de la RADA, à son personnage déjà très relevé. Il lui donne une classe et une présence vraiment insurpassables, et sa disparition, sans doute inévitable compte tenu de l’évolution du récit général, portera un coup terrible à la Mythologie dont elle ne se remettra jamais réellement. Le film lui offre néanmoins un final spectaculaire, après que son personnage ait finalement accédé à la rédemption.

    Grâce à ses révélations, la Mythologie aura progressé d’un grand pas, Fight The Future ne se contente pas d’en composer un saisissant tableau mais la fait également avancer. Le seul véritable regret concernant les personnages récurrents consiste en l’absence du débonnaire Krycek, alors même que son association avec l’Homme bien Manucuré fonctionnait si bien. Mais, qui trop embrasse mal étreint, on comprend que Carter veuille ne pas trop multiplier les personnages, d’autant que Nicholas Lea connaissait parallèlement d’autres engagements.

    À côté des figures récurrentes de la série, comme il est naturel dans le cadre spécial d’un film, Fight The Future bénéficie de l’apport de guest stars de luxe. Au premier rang de ces invités de prestige, la visite de Martin Landau s’effectue avec une émotion particulière, car après Roy Thinnes et David Vincent, c’est au tour du Commandant Koenig de faire un détour par les X-Files. Il compose un Dr Kurtzweil qui n’a pas réellement le temps de prendre de la profondeur et qui se cantonne à un rôle très classique de Source (on est loin des scènes intenses entre Scully et le Père Joseph), mais le courant passe visiblement entre Duchovny et Landau, tandis que ce dernier réalise une savoureuse prestation. Sa présence apporte un attrait supplémentaire indéniable au film.

    Après son numéro très réussi dans Aubrey, Fight The Future nous vaut également le plaisir sans cesse renouvelé de retrouver Terry O’Quinn. Celui-ci manifeste une nouvelle fois la marque des plus grands : avec à peine quelques phrases à prononcer et une scène qui n’est certes pas la plus passionnante du film, il parvient à composer une prestation si intense qu’elle impressionne et se grave indélébilement dans la mémoire. De plus, alors que MillenniuM a débuté en 1996, il est amusant de le voir avec la moustache de Peter Watts finalement assez proche de Darius Michaud. À ses côtés, on remarque brièvement Ted King, le futur Inspecteur Andy Trudeau de Charmed. Le grand acteur allemand Armin Mueller-Stahl crée un charismatique Conrad Strughold que l’on regrettera de ne plus revoir par la suite. Son quartier général de Foum Tataouine est un lieu réel où furent effectivement filmées les scènes du Tatooine de Star Wars ! Jane Cassidy (mère de Gwyneth Paltrow) compose une redoutable présidente de commission d‘enquête, cassante et de parti pris, à qui Scully, minérale, parviendra néanmoins à faire entendre raison.

    Enfin, l’ultime atout de Fight The Future réside dans son couple vedette, où chacun réalise une fort mémorable prestation. Mulder apparaît ici guéri de son incompréhensible crise de scepticisme, et c’est avec son humour et son esprit pénétrant habituels qu’il dénoue les fils de cette ténébreuse conspiration. Durant la scène finale, il se transforme en homme d’action au sein de la version "X-Filienne" du Nostromo, et là pour le coup, le film apporte de l’inédit. L’efficacité de la mise en scène et le jeu très convaincant de Duchovny parviennent à rendre l’ensemble très crédible.

    Le film fournit également l’occasion d’enrichir encore la psychologie de Scully, personnage d’une grande profondeur. Bien avant I Want To Believe, elle évoque déjà sa lassitude devant les méthodes du FBI et suggère une probable démission, alors que la crise existentielle apparue dans Never Again refait surface. Gillian Anderson donne toute la sensibilité à ce personnage se réfugiant moins dans l’action que Mulder et exprimant plus franchement ses angoisses profondes. La fameuse relation entre Mulder et Scully nous offre de nombreux moments particulièrement savoureux tout au long de ce film où leur complicité s’affiche comme rarement (scène très amusante autour du distributeur de boissons, petit jeu sur le toit), de même que leur totale solidarité face au péril. Ce sentiment n’est nullement entaché par les colères cinglantes que pique parfois Scully (il y en a un qui ne doit pas rigoler tous les jours en 2008), car on sent bien qu’elles ne sont que de surface. Chacun, malgré ses propres fêlures, sait soutenir l’autre quand celui-ci est au plus bas, et c’est alors une véritable émotion qui saisit le spectateur.

    Le paroxysme surgit bien entendu quand Scully, en pleine déprime, semble prendre définitivement le départ et que Mulder lui exprime alors très clairement tout ce qu’elle représente pour lui et sa mission. La scène, déjà particulièrement intense et sensible, franchit un nouveau palier quand s’affaissent les murailles invisibles derrière lesquelles chacun se cantonnait, et que semble enfin survenir la scène tant attendue du baiser… C’est alors que retentit un unanime cri de rage et de frustration à travers les salles obscures du monde entier ! La désormais plus célèbre et exécrée abeille de l’histoire du cinéma venait de passer à l’action… Si le nouveau public reste bien entendu pour l’essentiel en dehors de cela, la série continue d'exercer le supplice de Tantale envers ses fans… qui en redemandent ! La relation si particulière entre Mulder et Scully se poursuivra encore pour notre plus grand bonheur, avec un Carter continuant à jouer avec un sadisme assumé autour de la concrétisation sans cesse repoussée de ce baiser (Triangle très bientôt). Alors que les Affaires Non Classées viennent de rouvrir (revanche de La Fin laissant le Fumeur passablement troublé), Mulder et Scully nous quittent temporairement sur une image particulièrement émouvante, leur alliance réaffirmée, et sortant de l’épreuve plus forts que jamais. L’aventure continue !

    Pour un budget de production de 66 millions de dollars, auquel se rajoute la somme faramineuse de 60 millions pour la communication (autrement réussie que le désastre d'I Want To Believe), Fight The Future rapporta 189 millions (hors DVD) dont 105 à l’international, soit un succès, mais pas un triomphe. De sordides disputes juridiques nous firent attendre 2008, toute une décennie, pour un deuxième (pas second…) opus. Fight The Future (63% indice Rotten Tomatoes contre 32 pour I Want To Believe) reste l’un des sommets de la série, et une talentueuse prouesse, d’un rare professionnalisme de la part de Carter et de toute l’équipe. Il manifeste avec éclat le succès unique de la série, la seule adaptée au cinéma durant son déroulement (bientôt Doctor Who ?). Il marque l’apogée de cette popularité : l’inutile étirement de la Mythologie, le départ de Duchovny, l’usure naturelle, et quelques erreurs entraînant une désaffection progressive du public. Plusieurs fans furent d’ailleurs quelque peu déçus par le film, mais il faut surtout y voir une exaspération des espérances, parfois proches de l’irrationnel ! Certaines rumeurs totalement folles circulèrent alors, comme le remplacement pour l’occasion de Duchovny et Gillian par des stars du calibre de Richard Gere et Jodie Foster ! Hollywood…

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    X Files (1993-2002)

    Saison 5

    1/2. Le complot / La voie de la vérité (Redux)

    3. Les Bandits Solitaires (Unusual Suspects)

    4. Détour (Detour)

    5. Prométhée post-moderne (Post-Modern Prometheus)

    6/7. Emily (Christmas Carol/Emily)

    8. Kitsunegari (Kitsunegari)

    9. Schizogonie (Schizogeny)

    10. La poupée (Chinga)

    11. Clic mortel (Kill Switch)

    12. Le shérif a les dents longues (Bad Blood)

    13/14. Patient X (Patient X /The Red and the Black)

    15. Compagnons de route (Travelers)

    16. L'Œil de l'esprit (Mind's Eye)

    17. L'âme en peine (All Souls)

    18. Les nouveaux Spartiates (The Pine-Bluff Variant)

    19. Folie à deux (Folie à deux)

    20. La fin (The End)

    Top 5 de la saison 5

     


    1/2. LE COMPLOT / LA VOIE DE LA VERITÉ
    (REDUX)


    Épisode Mythologique

    Scénario : Chris Carter
    Réalisation :
    R.W. Goodwin (1re partie), et Kim Manners (2e partie)

    Résumé :

    Mulder persuade Scully de le faire passer pour mort pour duper leurs ennemis. Mulder revoit Kritschgau à la Défense, qui lui raconte en détails toute la gigantesque Conspiration gouvernementale depuis 1945. Mulder n’a que quelques heures pour démasquer la vraie taupe du FBI et tenter de guérir sa coéquipière. L’Homme à la Cigarette vient le voir et lui propose un étonnant marché. Scully fait des expériences sur son ADN et découvre une stupéfiante vérité. Le First Elder, inquiet des initiatives bizarres du Fumeur, prend des mesures drastiques…

    Critique :

    Cette cinquième saison, qui verra la série atteindre des sommets absolus de popularité tout en achevant la période Vancouver, ne comporte que vingt épisodes. En effet, la réalisation de Fight The Future, majoritairement effectuée entre Gethsemane et Redux (et déjà en Californie...), a pris beaucoup de temps, d'autant que certaines scènes doivent être retournées ultérieurement. Cette priorité donnée au film fait également que la saison bénéficie d'une moindre structuration que la précédente, de nombreux amateurs lui reprochant d'ailleurs un certain côté patchwork et une moindre qualité d’écriture. Nous allons cependant voir que, loin d'apparaître phagocytée par FTF, la saison comporte de sacrés morceaux de bravoure et de magnifiques originalités ! Adonc, Redux !

    Le triptyque engagé par Le baiser de Judas se conclut ici par un élargissement de l'intrigue tenant globalement ses promesses. La première partie emporte très largement l'adhésion, avec une brillante astuce scénaristique parfaitement assumée et bien valorisée par la mise en scène : nous remontons le temps en découvrant, en parallèle avec l'histoire racontée précédemment par Scully, ce qui s'est réellement déroulé, tant de son point de vue que de celui de Mulder. L'exercice de style s'effectue avec une parfaite maîtrise, voire une vraie maestria d'écriture. Le suspense est à son comble, tandis que le rythme s'accélère nettement et que la succession de scènes choc se rapproche des cimes d'Anasazi. La forte présence d’effets de narration me semble provoquer comme un témoignage entrecroisé entre Scully et Mulder, un effet intéressant et qui ne ralentit que faiblement l’action. Le paroxysme se voit atteint quand Mulder parvient enfin à pénétrer dans le saint des saints : l'antre du Fumeur au Pentagone, aperçue dès le pilote. On peut bien le dire : on exulte !

    Les seconds rôles sont au diapason, avec un Homme à la Cigarette toujours aussi magistralement interprété par William B. Davis et qui se risque sur des stratégies aussi novatrices que périlleuses, apportant ainsi une nouveauté bienvenue quoique parfois déconcertante. Kritschgau bénéficie d’un passage peuplé d’inserts historiques absolument splendides. Jusqu'ici en retrait face à l'affrontement Homme à la Cigarette/Homme bien manucuré, le First Elder avait néanmoins déjà eu l'occasion de manifester une grande habileté face à Scully. Il accomplit ici un foudroyant bond au premier plan lors d'une passionnante lutte de pouvoir avec le Fumeur (les scènes du champ de courses sont somptueuses). Don S. Williams crée avec une étonnante présence ce personnage demeurant une véritable énigme, entre intellect froid et sanguine colère. Un bien joli monstre, dont la Conspiration ne cesse de nous offrir de superbes exemples pour notre plus grand ravissement !

    Skinner paraît toujours contesté par ses troupes (en particulier Scully). Successivement menacé par une arme (à plusieurs reprises), frappé, défié, insulté, il aura eu bien du mérite à continuer à les aider de son mieux, envers et contre tout. Mitch Pileggi est formidable et parvient véritablement à faire de son personnage un des plus riches et attachants de la série. Sa réconciliation silencieuse finale avec Scully reste un beau moment d'émotion... la seule ombre au tableau demeure la participation minimaliste des Bandits Solitaires à l'action, mais le Trio aura largement l'occasion de se rattraper lors de l'épisode suivant !

    La deuxième partie permet de reprendre la marche en avant de l’action. Toutefois le récit se caractérise par une surabondance de scènes psychologiques entre les personnages. Certes émotionnellement intenses, leur accumulation finit par plomber l’action, et on aurait pu faire judicieusement l’économie de certaines d’entre elles comme l’apparition de la pseudo Samantha. Mulder paraît décidemment troublé, lui qui ne conçoit même pas qu’il puisse s’agir d’un clone et semble bien perméable à l’argumentaire de Kritschgau. En fait, le double épisode résulte mal dosé, un meilleur équilibre entre ressenti et action aurait pu être recherché entre ses deux parties. On demeure également dubitatif après une aussi longue histoire voir Mulder démasquer Blevins sur une simple intuition ! Certes, il s’agit de Mulder, et Blevins, pris à la gorge, se montre singulièrement maladroit sur la fin, mais un indice aurait tout de même été moins frustrant… On ne peut s’empêcher de penser que l’intrigue a été partiellement sacrifiée à une surabondance d’effets lacrymaux. On regrette aussi certaines petites facilités (la capsule non découverte…).

    Restent de magnifiques scènes, comme ce feu d’artifice final de moments forts posant avec efficacité le décor de la nouvelle saison. Redux (ou retour à la vie) mène avec succès sa mission principale : clôturer la saison 4 (exit le cancer !) et lancer la 5 sur de nouvelles bases. Alors que Le Baiser de Judas s’achevait sur la pseudo mort de Mulder, Redux se conclut sur l’assassinat de l'Homme à la Cigarette ! Mais comme Mulder, nous ricanons devant l’absence de cadavre… Allons, le bougre a la vie dure, et ce n’est pas fini !

    La série est désormais diffusée en format widescreen plutôt qu’en 4:3, ce qui déconcerte dans un premier temps (surtout après avoir revu les quatre premières saisons), mais qui se révèle très positif sur grand écran.

    Anecdotes :

    • Pour la neuvième fois, l’indicatif The truth is out there est remplacé par All lies lead to the truth. C'est la réplique de Scully quand Skinner la met en garde sur les conséquences de son mensonge.

    • Dana Scully est née le 23 février 1964. Michael Lee Kritschgau est né le 12 novembre 1955.

    • Redux désigne un retour actif après une période de maladie, d’absence, etc. Pour le premier épisode, il s’applique donc à la mission de Mulder après sa « résurrection », et pour le deuxième épisode, à la « résurrection » de Scully.

    • La discussion entre Mulder et Kritschgau sur la Conspiration s'inspire d'une scène similaire du film JFK (1991) d’Oliver Stone.

    • 1013 du jour : Mulder rencontre « Samantha » à 10h13.

    • 1121 du jour : un des numéros vérifiés par Scully a été appellé à 11h21. Plus subtilement, il est 12h11 (1121 à l’envers) quand le Fumeur va voir le First Elder aux courses. Kritschgau est par ailleurs né un 12/11.

    • Le mystérieux groupe Roush tire son nom de John Roush, journaliste de USA Today qui a écrit beaucoup d’articles positifs sur la série.

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    3. LES BANDITS SOLITAIRES
    (UNUSUAL SUSPECTS)


    Épisode Mythologique

    Scénario : Vince Gilligan
    Réalisation :
    Kim Manners

    I heard it was a lone gunman.

    No matter how paranoid you are, you're not paranoid enough.

    Résumé :

    1989. John Fitzgerald Byers raconte au sergent-détective John Munch sa rencontre avec Holly Modeski, une jeune femme qui recherchait son ex-compagnon qui avait kidnappé sa fille. Or, sa fille était fichée dans un document secret du site du Ministère de la Défense ! Malgré leurs rivalités, Byers appella deux connaissances, Melvin Frohike et Ringo Langly, pour pirater le site. Ils lui donnèrent le document, et la protégèrent de son némésis : l’agent Fox Mulder !! Le même soir, Holly de son vrai nom Suzanne fit irruption chez eux et changea à jamais leur vie mais aussi celle de Mulder…

    Critique :

    Débutons en saluant l'excellence du titre original (justifié par le savoureux gag du sucre et la structure narrative globale), bien plus amusant que sa très appliquée traduction. Il explicite parfaitement la double nature parfaitement assumée et maîtrisée de bout en bout de l'épisode, entre humour pétillant et redoutable intrigue policière. Situé en 1989, le récit a l'originalité de se centrer sur le Trio, laissant Mulder en marge tandis que Scully reste encore bien loin d'imaginer ce qui l'attend... Le tournage de Fight The Future explique le retrait de Duchovny et Anderson, mais l'épisode ne se contente pas de former un interlude, bien au contraire.

    Au-delà de l'aspect mythologique absolument captivant pour le fan, l'intrigue bâtit un véritable suspense, captant l'intérêt du public alors qu'une vérité des plus troublantes se révèle peu à peu. Difficile de détourner le regard ne serait-ce qu'un seul instant tant le suspense reste au plus haut niveau jusqu'au terme de l'histoire. Mais chacun des effets chocs se voit ponctué d'une note d'humour caustique ou de dérision, venant agrémenter mais non édulcorer le thriller. Cela constitue le véritable tour de force de l'épisode, comme lors cette succession d'arrivées fracassantes dans l'entrepôt (les Bandits Solitaires, puis Mulder, puis les tueurs, puis les nettoyeurs, puis le SWAT !). On se situe dans le pastiche de haut vol, qui divertit sans altérer les qualités essentielles d'un genre.

    Mais l'épisode présente bien d'autres richesses comme la description très fine des caractères des différents membres du Trio : Byers, romantique et idéaliste, Frohike l'homme d'action si viril, et Langly le Geek absolu. Chacun jouit d'une personnalité bien affirmée, dont l'association constitue un mélange des plus explosifs ! La différence de regard de Byers et Frohike envers Susanne reste très significative... La rencontre du trio (et celle avec Mulder) s'effectue d'une manière très fluide, sans effet emphatique déplacé. On apprécie de découvrir les trois plus grands paranos des séries télé encore naïfs et sans méfiance. On partage leur stupeur quand s'effondre la rassurante réalité consensuelle et qu'apparaît tout un univers aussi sombre que délirant. Cette mue de trois honnêtes citoyens en résistants acharnés s'effectue avec émotion et véracité, et, sans avoir l'air d'y toucher, nous titille sur la question de la responsabilité. Dès leur apparition, les Bandits Solitaires se révèlent tels qu'en eux-mêmes : certes des perdants magnifiques, drôles et dont on aime à se moquer affectueusement, mais aussi des combattants de la Vérité, non dénués de courage et d'une certaine grandeur. Dean Haglund, Bruce Harwood, et Tom Braidwood paraissent merveilleux de naturel et s'identifient pleinement à leurs personnages.

    Aussi étincelant et central que demeure le Trio, la qualité d'écriture du récit permet de faire également exister les autres personnages. Mulder, avant même d'intégrer les Affaires Non Classées, est déjà le Martien, et son délire hallucinogène sur les Petits Gris s'avère aussi amusant que prophétique. Le scellement de son alliance avec les Bandits Solitaires lors de la scène finale reste un magnifique moment. Et l'épisode apporte une mine d'informations sur le personnage (né un 10-13…) !

    La fabuleuse Signy Coleman, qui bénéficie déjà de pas mal de métier en ayant participé à nombre de séries des années 80, donne une vraie humanité et un étonnant charisme à son personnage. Cible émouvante, animée d'une flamme pure, capable d'une audace incroyable et d'un vrai courage physique, Susanne Modeski demeure l'un des plus beaux personnages féminins d'une série pourtant peu chiche en la matière. L'histoire la laisse en mauvaise posture, mais nous aurons la joie de la revoir dès la saison prochaine !

    L'épisode nous permet également de retrouver X égal à lui-même, avec à la clef une nouvelle très solide prestation de Steven Williams. Les Bandits Solitaires lui doivent la paternité de leur nom (en référence à Dallas), mais la traduction désamorce totalement l'effet, parlant de « bandit solitaire » au lieu de « Tireur isolé » ! On remarque que tout comme son patron dans Musings, ou plus tard Fletcher, X les épargne, sans doute du fait de la faible dangerosité perçue...

    La cerise sur le gâteau est apportée par le très étonnant cross-over dû à l'apparition de Richard Belzer dans son personnage fétiche de John Munch (Près de 450 épisodes de Law and Order et Homicide, mais aussi The Wire, Arrested Development, etc.). Outre son numéro de sceptique narquois et blasé très divertissant, sa présence comporte le mérite de mesurer le fossé existant désormais entre les X-Files à l'orée de leur cinquième saison et les séries policières classiques. Alors qu'à ses débuts la série pouvait apparaître composée d'enquêtes avec une simple connotation paranormale, ce sont bien deux univers qui se font face désormais dans une totale incommunicabilité, alors même qu'il s'agit d'un des épisodes contenant le moins de surnaturel. La Vérité est désormais totalement ailleurs ! Dommage que Munch et Mulder n'aient pas de scène en commun...

    Enfin, Les Bandits Solitaires se pare d'un ultime attrait : une évocation particulièrement divertissante et ludique des années 80 à leur crépuscule (30 ans déjà...). Plusieurs symboles passent ainsi à la moulinette des très inspirés Kim Manners et Vince Gilligan : les monstrueux téléphones portables de l'époque avec un joli clin d'œil à ce qui deviendra l'une des images récurrentes de la série, les débuts très austères de l'Internet avec tout le frémissement existant autour, les jeux vidéos primitifs de ce temps-là mais, oh combien jouissifs et imaginatifs (rien de moins que... Digger !), Donjons et Dragons alors au sommet de sa popularité, bien avant la barbarie des jeux en ligne (et que j'ai pratiqués comme Langly, les fumées d'origines diverses en moins, les petits gâteaux en plus)... On se régale !

    Les Bandits Solitaires restera un hommage au Trio particulièrement vibrant et superbement écrit, aussi enthousiasmant qu’a pu l'être Musings of a Cigarette Smoking Man la saison précédente. Un authentique régal pour le fan, très prometteur pour Au cœur du complot !

    Anecdotes :

    • 100e épisode de la série.

    • Quatrième épisode sans Scully.

    • Suzanne Modeski se fait appeler Holly au début du film, une nouvelle référence à la petite amie du scénariste Vince Gilligan. Le dentiste de Suzanne s’appelle Michael Kilbourne, qui est en fait le nom du dentiste de Vince Gilligan ! Suzanne reviendra dans Brelan d’as (saison 6).

    • John Fitzgerald Byers est né le 22 novembre 1963. Il devait s’appeler Bertram mais ses parents changèrent d’avis en apprenant l’assassinat de JFK. En 1989, il travaillait comme agent de la Commission Fédérale des Communications ; c’est un bon hacker.

      Melvin Frohike (prononcer Frohiké) est le fondateur de la Frohike Electronics Corp. Il est aussi spécialisé en piratage informatique, à un niveau plus élevé que Byers. N.B. Tom Braidwood, l'acteur, détestait ce prénom !

      Ringo Langly a des acouphènes, et est le meilleur du Trio en piratage. La référence à cette pratique sous le terme « kung-fu » est un clin d’œil au hacker Kevin Mitnick qui mystifiait la police informatique en leur envoyant le message « My kung-fu is best ».

    • Fox Mulder mesure 6 pieds (1m83) et pèse 170 livres (environ 77 kilos) du moins en 1989. On apprend qu’il est adepte du Yin et Yang. Son numéro de téléphone est (222) 555-9355. Bien qu'il est dit qu'il soit célibataire, il porte une alliance qu'il portera toujours l'année suivante quand il interrogera Arthur Dales (Compagnons de route). L'épisode La Fin nous suggéra qui a pu être sa femme. En réalité, l'alliance est un clin d'oeil au fait que Duchovny allait se marier avec Téa Léoni.

    • Vince Gilligan bloquait sur un point important : comment justifier que l’assassin épargne les Lone Gunmen ? John Shiban eut l’idée que l’assassin fut Mr.X. : son attitude ambiguë rendait crédible sa grâce envers le Trio.

    • Présence du sergent-détective John Munch. Richard Belzer reprend son rôle de la série Homicide. Il sera ensuite de l’équipe de New York unité spéciale. Son personnage apparaît dans pas moins de 9 séries différentes, un cas quasi unique dans l’histoire des séries !

    • Quand Holly frappe à la porte des Lone Gunmen, ces derniers se rangent en file indienne comme dans Le Magicien d’Oz (1939) lors de l’apparition de Dorothée déclenchant la même réaction de ses trois futurs compagnons.

    • Extrait du CV de Mulder:

     

    1983-1986 : études à l’Université d'Oxford, il en sort diplômé en Psychologie.
    1986 : intègre l’Académie de Quantico, en sort premier de sa promotion.

    1988 : entre à la Brigade Criminelle.

     

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    4. DÉTOUR
    (DETOUR)


     

    Scénario : Frank Spotnitz
    Réalisation :
    Brett Dowler

    - If we become blinded by the beauty of nature, we may fail to see its cruelty and violence.
    - Walt Whitman ?
    - No, "When Animals Attack." On the FOX Network
    .

    Résumé :

    Dans une immense forêt de Floride, deux géomètres puis un chasseur sont agressés par des monstres invisibles. Les traces laissés par les agresseurs ne sont ni humaines ni animales, et démontrent une inattendue intelligence ! Accompagnés d’une shérif et d’un scientifique, Mulder et Scully se mettent en quête des corps et des deux monstres qui semblent avoir la capacité de se fondre dans le décor, rendant leur capture quasi impossible. Bientôt, ils sont perdus dans le forêt et à la merci des monstres…

    Critique :

    Après un début original et amusant nous rappelant que quelle que soit la série, les aventures naissent littéralement sous les pas des héros, on constate rapidement que cet épisode souffre de plusieurs faiblesses. La principale demeure la faiblesse des personnages secondaires certes plaisants (les amusants fonctionnaires moyens mais pas si inefficaces que cela, la shérif Sylvaine, la famille victime idéale) mais demeurant tous trop rapidement esquissés pour bénéficier d’une authentique profondeur et développer d’intéressantes interactions avec le couple vedette. La série nous a habitués à des personnages mieux croqués et le regret se ressent d’autant plus fortement qu’on pouvait y trouver du potentiel, notamment dans la confrontation de Mulder et de l’absurdité administrative. Une enquête commune avec Stonecypher et Kinsley aurait constitué un superbe sujet d’épisode !

    L’intrigue reste également assez sommaire, de surcroît répétitive, avec pour conclusion une arrivée de cavalerie particulièrement providentielle. On pourrait aller jusqu’à se demander si cette relative vacuité n’a pas suscité cette volonté de lancement sortant de l’ordinaire, histoire de dissimuler quelque peu la misère… Parallèlement on peut regretter le caractère un peu ridicule de ces yeux rouges surgissant de nulle part ; les artistes de la série nous régalent habituellement d’effets autrement saisissants. Il en va de même pour ces disparitions qui ressemblent plus à une prise de pied dans un tapis qu’autre chose. Une exception notable vient partiellement contrebalancer ce jugement : la saisissante image où l’on aperçoit le monstre en mimétisme. Dommage que la mise en scène n’ait pas persévéré dans cette direction, sans doute par contrainte budgétaire (on est ici au summum de ce que l’époque pouvait produire). Je n’ai pas pu m’empêcher de songer au Gollum de Peter Jackson !

    Heureusement, à quelque chose malheur est bon, et l’épisode ne gaspille pas l’opportunité d’optimiser la concentration de l’action sur le duo Mulder/Scully du fait de l’effacement des personnages secondaires. Nous avons droit à toute une succession de scènes très divertissantes, qui font tout le prix de cet épisode. On s’amuse ainsi beaucoup de voir Scully toute gênée par le mépris goguenard affiché par Mulder envers le fameux séminaire, alors même qu’elle ressent la même chose. Le souci de la respectabilité et du respect des règles reste bien ancré chez les Scully… Surtout on peut se demander si Scully (en souvenir ?), ne nous fait pas un plan à la Eddie Van Blundht quand elle vient partager une bouteille avec son collègue et déclare bien explicitement que normalement deux collègues de sexe opposé ne peuvent occuper la même chambre… Mais manque de chance, cette fois c’est le vrai Mulder qui se trouve là, et donc il est bien entendu hors de question de penser à autre chose qu’à l’enquête ! Mais ne s’agirait-il pas plutôt d’une angoisse devant une possible concrétisation ? En tout cas notre héros déguerpit bien vite, laissant une Scully bien dépitée de devoir boire toute seule ! Bien tournée, la scène apparaît autant ambiguë que plaisante.

    La nuit passée « Into the Wild » paraît moins dense et aboutie que son équivalent dans Les Dents du Lac, mais réserve tout de même quelques bonnes surprises comme Scully chantant (atrocement) une berceuse à Mulder ! Leur conversation permet également de confirmer que la page du cancer a été définitivement tournée. On apprécie le clin d’œil à l’Homme Invisible, les choix d’inserts de films se révèlant toujours excellents dans les X-Files ! La fin développe un beau suspense, apportant une énergie bienvenue à l’épisode. Le récit voit également se dérouler un intense échange de vannes entre les deux collègues, notamment à propos des hommes-mites et consorts. Spotnitz montre toujours un authentique talent pour les dialogues, mais cette virtuosité l’entraîne à trop les privilégier au détriment de l’intrigue (et puis cette histoire de Fontaine de Jouvence… Pourquoi les Conquistadors seraient-ils demeurés dans la forêt ?).

    Enfin, l’autre grande vedette du récit demeure la somptueuse forêt canadienne, à la beauté d’autant plus étincelante que nous savons que nous allons très bientôt en être privés, au moment où la série s’apprête à quitter sa terre d’élection pour migrer au sud. Par contre, avouons que l’on a beaucoup de mal à se croire en Floride ! Hélas, l’épisode illustre également ici sa plus grande lacune : si la forêt de Vancouver se montre ici enchanteresse et joliment filmée, on ne ressent pas un seul instant le sentiment de péril et d’isolement qui devrait normalement s’imposer aux personnages. La mise en scène de Brett Dowler manque cruellement du souffle et de la densité nécessaires pour que l’on retrouve l’enfermement et l’oppression incomparables du grandiose Quand vient la nuit, auquel l’histoire du jour fait inévitablement penser.

    Anecdotes :

    • Mulder et son père ont été guides de forêt pendant l’enfance et adolescence de Fox. Il ne supporte pas le Ice Capades, spectacle américain de danse sur glace crée en 1940. Itinérant pendant un demi-siècle, il s’est implanté désormais dans neuf états américains. La VF remplace le Ice Capades par l’opéra !

    • La chevelure de Gillian Anderson ondule par temps humide. Détour ayant été tourné sous un temps pluvieux, sa coiffure apparaît inhabituellement négligée.

    • Scully chante (affreusement faux) Joy to the world (Elle descend de la montagne en VF). Cette chanson composée par Hoyt Axton est aussi connue sous le titre Jeremiah was a bullfrog, première phrase de la chanson. Louis regarde à la télévision L’homme invisible (1933), un film réalisé par James Whale d’après un roman de H.G.Wells.

    • Mulder trouve l’inscription « ad noctum ». Mais nox est un substantif de la 3e déclinaison de la grammaire latine (et non la 2e), et devrait donc se lire « ad noctem ».

    • Michelle Fazekas est en fait le nom de l’assistante personnelle de Frank Spotnitz.

    • Scully croit que la citation du guide sur les dangers de la nature est de Walt Whitman. Walt Whitman (1819-1892) est un poète américain qui fut le chantre de son pays, de ses beautés, de sa civilisation. Il est considéré avec Emily Dickinson comme le plus grand poète américain du XIXe siècle. Il a ouvert la voie au courant symboliste français.

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    5. PROMÉTHÉE POST-MODERNE
    (POST-MODERN PROMETHEUS)


    Scénario : Chris Carter
    Réalisation :
    Chris Carter

    Is there anything that you don't believe in, Mulder ?

    Résumé :

    Shaineh Berkowitz est agressée par un monstre. 3 jours plus tard, elle se réveille enceinte bien qu’elle ait eu une ligature des trompes il y a deux ans ! Le monstre serait en fait le « Grand Mutato », personnage de BD créé par Izzy, le fils de Shaineh, lui-même né dans des circonstances analogues. Izzy leur déclare que le monstre existe et se cache on ne sait où. Mulder et Scully visitent un scientifique fou qui prétend être sur le point de créer des humains de n’importe quel apparence. Peu après, sa propre femme se retrouve enceinte, et d’une manière certainement pas naturelle…

    Critique :

    Cette audacieuse variation sur le thème de Frankenstein (l’épisode comporte plusieurs clins d’œil au classique de Mary Shelley, dont son titre) doublée d’un bel hommage à l’univers des comics anciens, séduit d’abord par la beauté étrange de sa mise en scène. La première originalité réside dans le choix d’un noir el blanc intégral, chose jusque là rarissime dans l’univers des séries télé (Le rêve était presque parfait de Clair de Lune se situait dans les années 40 et n’était que partiellement en bichromie). D’abord déconcertante, on s’aperçoit bien vite que cette option correspond parfaitement à l’ambiance fantasmagorique de cette histoire présentée comme un conte de fées, proche de l’univers d’un Tim Burton ou des classiques de l’âge d’or d’Hollywood.

    C’est d’autant plus vrai que ce classieux noir et blanc s’accompagne d’une réalisation poussant loin les limites de l’esthétique, par des angles de vue subtilement discordants ou des gros plans très suggestifs de visages pour le moins pittoresques ! La mise en scène regorge de trouvailles visuelles, dans le champ principal mais aussi disséminées dans le décor et chez les personnages secondaires. L’épisode s’offre également le luxe d’un extraordinaire final où la maestria de Chris Carter s’enflamme comme à l’ultime détonation d’un grandiose feu d’artifice. Sous les feux d’une boule à facettes brillant comme un soleil, la caméra virevolte en tous sens pour nous faire vivre d’une manière incroyablement intense l’excitation d’un concert, et l’émotion de Mutato. Le visuel s’entremêle à une musique aussi originale que formidable, puisqu’aux thèmes toujours si évocateurs de Mark Snow viennent s’ajouter quelques-unes des plus belles chansons de Cher.

    Spectacle entier à la poésie onirique pimentée avec un goût très sûr par de l’humour absurde de haut vol, Prométhée post-moderne s’impose comme un authentique chef-d’œuvre de l’art audio-visuel, et un des épisodes expérimentaux les plus aboutis de l’univers des séries télé. On se surprend à le regarder trois fois d’affilée, avec toujours le même ravissement et la découverte de nouvelles pépites.

    Mais l’épisode ne se contente pas de demeurer un étrange et fascinant objet d’art : il s’attache également à nous raconter une aussi riche que captivante histoire. Le portrait de groupe de cette petite communauté au fin fond d’un trou perdu de l’Amérique profonde se révèle caustique et très distrayant (on pense parfois à Lynch, avec un Twin Peaks mâtiné d’Elephant Man). Quelques belles individualités s’en détachent comme la mère et le fils Berkowitz, réellement incontournables ! L’intrigue montre cependant la finesse de ne pas tomber dans la caricature facile et trop à charge. La population, aussi crispante qu’elle puisse être, se montre finalement sympathique et capable de rédemption, en un mot très humaine.

    L’adversaire du jour, joué avec brio par John O'Hurley (Seinfeld), développe une vision actualisée du savant fou, dont le but principal demeure l’accession à la notoriété, et dont la fatuité et la pédanterie dissimulent mal un côté minable assez croquignolet.

    Néanmoins la grande figure de Prométhée post-moderne demeure bien entendu le Grand Mutato lui-même. Chacune de ses manifestations s’auréole d’une rare poésie, car bien loin d’être un monstre, il s’agit d’une personne sensible aux enthousiasmes très juvéniles. Repoussé par les humains, il s’est bâti un univers onirique se révélant très émouvant autour de Cher, son idéal féminin, même si ses actes s'avèrent moralement aussi critiquables que ceux d'un Eddie van Blundht dont il se montre étonnamment proche. Le très inattendu retournement de situation où on le découvre s’adressant à la foule synthétise cette dualité entre apparence extérieure et nature intérieure en une scène touchante mais toujours empreinte de l’humour si particulier de l’épisode ! L’étonnant maquillage prouve encore une fois si besoin en était le savoir-faire des artistes de la série. Ces travestissements dissimulent toujours de stupéfiantes découvertes car, alors que le légendaire Flukeman n’était autre que Darin Morgan, Mutato se voit incarné par Chris Owens, bien connu pour ses interprétations de l'Homme à la Cigarette jeune et bientôt de Spender ! Chapeau l’artiste, il confère beaucoup de vie au personnage, et parvient à en restituer à la perfection les émotions alors même que le visage demeure inexpressif.

    L’épisode gagne encore en profondeur en questionnant sur le développement incontrôlé de la génétique, mais aussi sur l’influence pernicieuse de la téléréalité sur une population avide de reconnaissance médiatique. On remarque que Jerry Springer joue joliment le jeu, ce qui prouve bien que le gaillard est un malin (Roseanne et Cher, conviées, ne furent malheureusement pas disponibles) !

    Enfin, last but not least, Prométhée post-moderne permet également au duo Mulder/Scully de briller de tout son éclat. Leurs dialogues crépitent réellement durant tout le récit ! Cela débute par la relecture acidulée de la lettre de Mme Berkowitz par une Scully exhalant l’irritation et l’ironie sceptique, tandis que Mulder, stoïque, encaisse silencieusement tout en ne perdant pas une miette du show. La scène déclenche vraiment l’hilarité et lance idéalement l’histoire. Par la suite, alors que Mulder prend d’entrée l’histoire au sérieux tout en s’amusant visiblement beaucoup, Scully est persuadée du canular et de la perte de temps au beau milieu de nulle part. Du coup elle s’énerve de tout, ce qui nous vaut un duel fort plaisant avec Mulder. On apprécie bien d’autres scènes amusantes comme l’incollable Scully prise en flagrant délit d’ignorance par le savant fou, ou la voir courir à toute vitesse pour rattraper les grandes enjambées de Mulder à l’approche de la fameuse maison ! (Pour l’anecdote, ce sont ici les doublures des acteurs qui jouent.) On note que Mulder continue sa période de scepticisme envers les Aliens.

    Duchovny et Anderson n’hésitent pas à prendre le ton de l’atmosphère décalée de l'épisode en surjouant leurs personnages, mais toujours avec un goût très sûr et une absolue maîtrise. En trouvant toujours le ton juste et en élargissant leur répertoire, ils manifestent toute l’étendue de leur immense talent, en même temps que s’affiche leur parfaite complicité. L’épisode a la finesse de ne pas développer une caricature de ses héros (même jouissive comme dans d’autres épisodes décalés : Bad Blood est pour bientôt), mais laisse leurs sentiments profonds s’exprimer, sans doute du fait que Chris Carter en est l’auteur.

    Le récital offert durant tout l’épisode débouche ainsi sur une magnifique apothéose lorsque Mulder convie Scully à danser et que celle-ci, un instant interdite, finit par le rejoindre, toute ravie. L’instant paraît purement magique, chargé d’émotion et non sans nous évoquer le grand souvenir de Danse macabre ! Tout comme Mutato, nos héros partagent un grand moment de félicité, et telle reste finalement la conclusion de Prométhée post-moderne : le bonheur reste possible, envers et contre tout.

    Exemple stupéfiant d’audace de narration et de mise en scène, menant à la perfection le difficile exercice de mêler poésie, fantastique, et humour, et offrant de superbes partitions à ses interprètes, Prométhée post-moderne demeure l’un des épisodes les plus inoubliables des X-Files ! Il reçoit justement l’Emmy Award de la direction artistique en 1998. Il fut également nommé pour six autres catégories…

    Anecdotes :

  • Episode intégralement tourné en noir et blanc.

  • Mark Snow déclara qu’il s’agissait de sa meilleure partition parmi les épisodes de la saison.

  • Le titre de l’épisode s’inspire du titre original du livre Frankenstein or the Modern Prometheus. Il existe d'autres références au magnum opus de Mary Shelley dans l'épisode.

  • Chris Carter écrivit l’épisode avec Cher en tête. Mais cette dernière, bien que fan de la série, déclina la proposition de Carter, estimant que son apparition serait de « mauvais goût ». Elle l’autorisa cependant à utiliser sa musique, ainsi qu’un extrait de Mask (1985), film que regarde Le Grand Mutato. Cher regretta par la suite ce refus en voyant la qualité de l’épisode. C’est Tracey Bell, un sosie de la chanteuse-comédienne, qui apparaît dans l’épisode. De même, le rôle de Shaineh Berkowitz fut pensé pour Roseanne Barr, indisponible au moment du tournage.

  • The Great Mutato est le nom d’un personnage qui avait déjà été utilisé dans Les Simpson. Carter dut demander l’autorisation à Matt Groening, le créateur de la série, pour utiliser ce nom.

  • C’est le dessinateur Claude St-Aubin - qui fit par ailleurs une adaptation en comics de l’épisode Gorge Profonde (saison 1) - qui dessina la couverture du livre visible au début et à la fin de l’épisode, ainsi que la photo finale crayonnée de Mulder et Scully dansant ensemble.

  • On entend trois chansons de Cher durant l’épisode : The sun ain't gonna shine anymore de Bob Crewe et Bob Gaudio, Gypsies, tramps & thieves de Bob Stone, et durant la scène finale, Walking in Memphis de Marc Cohn.

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    6/7. EMILY
    (CHRISTMAS CAROL/EMILY)

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    Épisode Mythologique

    Scénario : Vince Gilligan, John Shiban, & Frank Spotnitz
    Réalisation :
    Peter Markle (1re partie), et Kim Manners (2e partie)

    Résumé :

    Alors qu’elle passe Noël en famille, Scully reçoit un coup de téléphone de... Mélissa !! Il provient d’une maison où une femme, Roberta Sim, vient de se suicider. Problème : la police est là depuis pas mal de temps et est catégorique : personne n’a appellé ! Scully pense que Roberta a en fait été assassinée, et remarque qu’Emily, leur fille adoptive, ressemble étrangement à Mélissa quand elle était petite. Emily, souffrant d’une maladie rare, subit des essais cliniques dans un hôpital qui cache de lourds secrets. Scully remarque des inconnus qui s’intéressent aux Sim...

    Critique :

    Le premier des deux doubles épisodes mythologiques traditionnels de la saison 5 présente l’originalité d’une particulièrement nette différence d’intérêt entre ses deux segments.

    Le premier, Christmas Carol, séduit par bien des points. Il y bien sûr l’originalité de retrouver Scully seule pour cette enquête très particulière, et la qualité même de cette histoire mêlant admirablement émotion et authentique sens du mystère. Gillian Anderson habite réellement cet épisode par l’intensité qu’elle donne aux tourments d’une Scully confrontée aux affres de la stérilité et à la découverte particulièrement déstabilisante d’Emily. Cela nous vaut un très beau portrait intimiste d’une femme dont les doutes face à son travail rejoignent ceux exprimés dans Never again, mais refusant d’abdiquer face au désespoir, et découvrant une raison d’espérer même au risque de replonger dans l’enfer d’une maladie qui serait cette fois celle de sa fille adoptive.

    Le tableau s’enrichit encore de la description de l’environnement familial. L’incommunicabilité régnant au sein de la famille Scully s’avère particulièrement prégnante en cette période de Noël : introversion de Scully, volontarisme bien intentionné mais finalement intrusif de Bill, incompréhension manifestée par Linda, souffrance réprimée de Margaret, fantômes des défunts… Justement, Melissa opère un retour très particulier dans cette histoire mettant joliment en œuvre le thème classique du coup de fil reçu d’outre-tombe, un sujet traité à moult reprises tant dans la littérature qu’à l’écran.

    Cette dimension familiale très forte constitue un des atouts de l’épisode, particulièrement mis en valeur par d’excellents comédiens connaissant parfaitement leurs personnages. À cet égard, les retrouvailles avec l’aussi belle que talentueuse Melinda McGraw, espérées durant tout l’épisode, apportent un vrai couronnement à celui-ci. Elle et Gillian fonctionnent à la perfection, et cela restera un des regrets suscités par la série que de n’avoir pas développé davantage la relation entre Melissa et Dana tant on apprécie ici leurs rencontres à l’occasion de Noëls successifs. La série parvient ainsi à reconstituer la magie de Noël (scène très émouvante où les deux sœurs reçoivent leurs croix), comme cela sera plus tard le cas pour Les amants maudits.

    La petite Emily, qui représente tant pour Scully comme le montre la déchirante confrontation avec la conseillère sociale, est elle aussi joliment interprétée par la très jeune Lauren Diewold, vraiment adorable.

    Parallèlement à cette intensité émotionnelle le récit n’oublie pas de développer un vrai mystère à résoudre, dont Scully démêle l’écheveau avec brio, mais aussi avec une approche très "Mulderienne". La disciple a beaucoup appris du maître en quelques années, tant la jeune élève jadis fraîchement émoulue de Quantico aurait été bien en peine de réaliser pareil exploit ! Le policier local, joué avec un naturel confondant par John Pyper-Ferguson (Jeremiah, Night Stalker), d’abord volontiers condescendant et passablement machiste va devoir vite changer de ton… On apprécie également la présence de l’habituelle autopsie par Scully, cette fois d’autant plus bizarre qu’elle résulte… banale !

    Cette première partie aussi riche que captivante, très littéraire (on ne dira jamais à quel point Mulder et Scully bénéficient d’une profondeur sans commune mesure avec les autres personnages de série télé), se conclut par le traditionnel cliffhanger hallucinant (quoiqu'ici assez prévisible), qui achève de faire basculer l’affaire dans le Non Classé ! Dès lors, on jubile en se disant que Scully n’a plus le choix et va devoir faire appel au spécialiste, quitte à irriter Bill, et que, de passionnant, l’épisode va désormais devenir génial…

    Patatras ! Après une magnifique introduction onirique (Scully face à la solitude de sa vie avec la croix offerte à Emily) faisant écho aux saisissantes scènes de rêve de la première partie, on déchante très vite. Que Mulder en sache d’entrée autant grâce à un providentiel piratage de Frohike tient du procédé, tandis que la référence à Crichton ressort plus de la faute de goût qu’autre chose... Surtout, après le mystère et l’originalité de Christmas Carol, on ne peut ressentir l’atterrissage sur les voies bien balisées de la Mythologie que représente Emily que comme une perte de dimension et d’intérêt, tandis que la famille Scully est promptement évacuée. Le fait que Mulder, le grand héraut de la vérité, ait caché autant de choses cruciales à Scully a aussi du mal à passer. Après la grande justesse de ton précédente, la maîtrise narrative paraît ici bien moins assurée. On commence à sentir comme de l’artificialité…

    Et puis présenter comme une immense révélation le fait qu'Emily soit une hybride s’avère un tantinet dérisoire tellement c’était évident (bon, techniquement, c’est un prototype de super soldat, comme précisé dans une scène coupée d’Essence, mais qui s’en soucie ?). Autant on appréciait de voir une Scully autonome, autant elle apparaît ici d’entrée à la remorque de Mulder. Et puis cela part dans une histoire de médecins à la Urgences : code déontologique, protocole de soins, effets larmoyants appuyés, dénonciation lourdingue du mercantilisme, jargon inepte (« J’espère que vous savez ce que c’est ? » « Une formation néoplasique !») enfin en un mot tout le barnum et le pathos coutumiers du genre. Donc, fatalement, cela ennuie très vite (litote). À un moment on a envie de crier : « Pouce, n’en jetez plus ! ».

    Pendant ce temps, Mulder oublie toute finesse et cela marche, puisque Calderon l’emmène directement au repaire des méchants. On se demande pourquoi il se montre si subtil d’habitude alors qu’il suffit de secouer les suspects… Le tout sous un soleil évoquant déjà la Californie ; eh bien cela promet ! On ne comprend pas vraiment pourquoi le membre de la colonie, se sachant suivi par Mulder, l’emmène directement chez les porteuses. Grâce à Dieu, Frohike accomplit une brève apparition, et cette fois c’est : « Non, ne pars pas, ne nous laisses pas seuls ! » que l’on a envie de s’écrier. Ensuite Mulder, dont le scepticisme envers les Aliens semble envolé, ouvre un frigo et tombe pile sur un clone issu de Scully. Il est stupéfait, mais moins que nous devant tant « d’aisance narrative ».

    Si Duchovny se montre au moins alerte et dynamique, on ne peut que ressentir de la tristesse pour une Gillian Anderson devant se cantonner à une seule expression faciale de désespoir durant toute l’histoire, et dont le rôle se résume principalement à du remplissage inutile avec plusieurs scènes totalement dénuées de la moindre justification. La mort d’Emily s’avère bien entendu un moment très touchant, conjointement à la naissance de Matthew. La conclusion de cette production hospitalière que reste avant tout Emily demeure cependant singulièrement démonstrative et pesante, bien dans la tradition du genre. Rarement on aura accueilli l'achèvement d’un épisode avec autant de soulagement !

    Malgré le naufrage de sa seconde partie, Emily brille cependant par l’étonnante qualité de Christmas Carol, qui reste l’épisode centré sur la famille Scully que l’on espérait depuis longtemps. Pour la suite, la séquence d’intro suffit à résumer l’épisode, dont on fera l’économie de la vision avec profit (c’est l’unique épisode mythologique où Carter n’a pas mis la main, on comprend mieux). Son seul intérêt reste de nous faire mieux comprendre la volonté inexorable de Scully à vouloir sauver l’enfant dans I Want To Believe. Pas cette fois !

    Pour l’anecdote, Scully adolescente est interprétée par Zoé Anderson, sœur cadette de Gillian !

    Anecdotes :

  • Le numéro de badge de Scully est 2317-616.

  • Le titre Christmas carol vient du roman du même nom de Charles Dickens. Les visions du passé de Scully et les messages de l’au-delà font d'ailleurs penser à ce roman. Alistair Sim, l’acteur jouant le rôle principal de l’adaptation cinématographique de 1951 du roman de Dickens, donne son nom à la famille Sim de l'épisode.

  • La lettre contenant le résultat des tests ADN de Scully a été écrite par John Gilnitz. C'est une nouvelle apparition de ce nom clin d’œil aux trois scénaristes (John Shiban, Vince Gilligan, Frank Spotnitz).

  • Emily est interprétée par la jeune Lauren Diewold (qui reprendra ce rôle dans L’âme en peine). Elle fut choisie car Kim Manners l’avait appréciée dans un épisode de MillenniuM, Le monstre (saison 2). Elle remplaça une précédente enfant qui s’était montrée incapable de jouer les scènes d’hôpital, le décor lui faisant trop peur.

  • D’après Vince Gilligan, les fans de l’époque ont peu apprécié la tragique fin de l’épisode : ils ont eu de la peine pour Scully !

  • Quand Mulder s’adresse au juge, il appelle Scully « Dana » en VO comme en VF ! Evénement assez rare pour être signalé.

  • Le chapeau porté par Mulder lors de sa fugitive apparition dans la première partie a été tricoté par sa future femme, Téa Leoni.

  • 925 du jour : dans la deuxième partie d’Emily, Frohike déclare que l’enfant né le 25 septembre 1994 est une « healthy baby girl ». Pour rappel, Piper Maru Anderson, fille de Gillian, est née le 25 septembre 1994 !

  • 1013 du jour : le prélèvement de Scully date du 10/13/94 (notation anglo-saxonne). 


  • 8. KITSUNEGARI
    (KITSUNEGARI)


    Scénario : Vince Gilligan & Tim Minear
    Réalisation :
    Daniel Sackheim

    Résumé :

    Le Pousseur (cf. épisode Autosuggestion, saison 3) s’échappe de l’asile où il avait été enfermé. Affaibli, fatigué, il dispose toutefois toujours de son terrible pouvoir d’autosuggestion. Le cadavre de Bowman, le procureur ayant instruit l’affaire contre lui, est découvert : il est mort en ayant bu de la peinture bleue jusqu’à asphyxie. Modell reprend son jeu du chat et de la souris avec Mulder, mais ce dernier est intrigué par son comportement moins meurtrier que de coutume. Il en vient à penser que Linda Bowman, la veuve du procureur, n’est pas innocente dans cette affaire…

    Critique :

    Un des rares regrets véritables que laisse la série demeure de n’avoir jamais revu l’Incendiaire, mais elle ne rate pas un autre rendez-vous longuement espéré : les retrouvailles avec Robert Patrick Modell alias le Pusher, l’un des plus formidables Monster of the week toutes saisons confondues. La question ne consiste pas à savoir s’il s’agit d’un retour vraisemblable compte tenu de l’état où nous l’avions laissé (après tout, nous sommes dans les X-Files !), mais si cette deuxième se révèle à la hauteur des sommets atteints par la première.

    On retrouve certes tout l’humour si particulier, la brillante intelligence, et le fascinant pouvoir si propice aux scènes chocs d’un Modell toujours aussi magistralement interprété par Robert Wisden. De plus, l’épisode est parsemé de clins d’œil amusants au précédent comme ce bleu céruléen devenu indissociable du personnage. Malheureusement, tout en demeurant d’une qualité très appréciable (le suspense demeure continu jusqu’à la conclusion), l’épisode prend le risque de s’embarquer sur d’autres voies.

    Certes, il reste louable d’avoir voulu éviter le « retour de la vengeance » de Modell, mais c’est tout de même bien la poursuite de l’étincelant duel avec Mulder que l’on attendait avant tout. Se priver de ce fort concept impose que la solution de remplacement soit à la hauteur, et force est de constater que cela n’est pas tout à fait le cas. Voir le Pusher devenu « gentil » décontenance quelque peu, même s’il conserve sa malice. La raison de ce revirement n’apparaît pas non plus très claire !

    Linda Bowman s’avère un intéressant personnage, parfaitement glaçant, mais moins pétillant et original que le Pusher. On en revient à une figure classique de serial killer, certes bien campée par une Diana Scarwid (Wonderfalls, Lost, Prison break, Pushing Daisies, etc.) lui donnant une vraie présence, mais sans les spécificités si stimulantes du Pusher. On s’amuse moins, mais les assassinats paraissent toujours bien amenés. Le récit tente de créer une ambiguïté intéressante (Mulder est-il ou non sous l’emprise de Modell ?), mais ne développe pas assez cette idée ; et puis notre héros a si souvent raison… Cette moindre dimension et qualité de l’histoire devient particulièrement évidente lors du duel final, considérablement plus faible que la fameuse partie de roulette russe qui demeure un des moments marquants de la série.

    Le pseudo-suicide de Scully se ressentant de manière aussi peu crédible que celui de Mulder lors de la saison précédente, le suspense et l’énigme de la situation s’en voient clairement désamorcés. On s’étonne aussi que Linda n’exerce son emprise que sur Mulder, négligeant tout à fait que Scully soit armée. La mise en scène paraît également moins dense que précédemment alors que cette histoire familiale et de vengeance ressemble parfois à du mélodrame. La scène finale entre Skinner et Mulder paraît inutilement appuyée.

    Ces défauts empêchent certes l’épisode de dégager un plaisir aussi intense que précédemment, mais Modell reste un joueur extraordinaire (et Mulder un sacré renard !). Le suspense se maintient à un niveau suffisamment élevé pour que Kitsunegari, qui avait un sacré défi à relever, demeure un fort agréable moment. Étrangement, Scully confond Budo et Bushido !

    Anecdotes :

  • Suite de l’épisode Autosuggestion (saison 3).

  • Le procureur assassiné s’appelle Bowman. Un clin d’œil à Rob Bowman, un des principaux réalisateurs de la série.

  • Comme dit dans l’épisode, Kitsunegari signifie en japonais Chasse au renard. Le renard étant ici Mulder, puisque son prénom Fox signifie renard.

  • Remarquez la forme étrange de la tumeur de Linda Bowman : elle ressemble à un diamant avec un S au centre. C'est peut-être une référence à Superman puisque Tim Minear, co-auteur de l’épisode, venait juste de quitter le staff de la série Lois et Clark pour lequel il a écrit 5 épisodes, et qu’il avait dirigé en tant qu'executive story editor pendant 22 épisodes.

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    9. SCHIZOGONIE
    (SCHIZOGENY)


    Scénario : Jessica Scott & Mike Wollaeger
    Réalisation :
    Ralph Hemecker

    Résumé :

    Bobby, un adolescent, ne supporte plus Phil, son beau-père. Un soir, il s’enfuit dans la forêt. Phil tente de le rattraper mais est aspiré par de la boue ! Plus tard, le père d'une amie de Bobby meurt dans des circonstances analogues. Mulder et Scully font la connaissance de Karin, la psychologue de Bobby, qui se dit capable de transformer la peur en « pouvoir ». Un arboriculteur déclare que tous les vergers de la région sont malades depuis qu’un « méchant homme » a été enterré ici. Mulder voit un lien entre les deux événements...

    Critique :

    Cette particulièrement sombre variation sur le thème de l’enfance maltraitée, une malédiction s’étendant aux victimes devenant bourreaux, compte de nombreuses réussites à son actif. L’aussi esthétique qu’imaginative mise en scène multiplie les perspectives audacieuses et les amples mouvements de caméra, assurant un vrai cachet à l’épisode. Surtout, Hemecker sait tirer idéalement partie de cet étrange paysage de vergers et noisetiers composant un étonnant mélange de bosquets et de plaines, comme on l’a rarement vu ailleurs. Magnifié par la belle luminosité des scènes diurnes (sublime photographie), le panorama paraît alors vraiment superbe, mais ces fuseaux de bois jaillissant comme des griffes deviennent la nuit venue un vrai décor de cauchemar. Le résultat obtenu se révèle aussi effrayant que la forêt profonde déjà admirée dans la série. On n’est guère surpris par la décapitation de Karin, tant ces courses hallucinées dans les ténèbres évoquent la légende du Cavalier sans tête !

    Les recours au patrimoine culturel nord-américain, à une ruralité revendiquée comme à un authentique sens de l’épouvante, préfigurent ici de manière frappante le succès de Supernatural dont les X-Files constituent bien une des principales sources d’inspiration. On y retrouve d’ailleurs Chad Lindberg dans le rôle du très particulier Ash, l’un des alliés récurrents des frères Winchester !

    L’intrigue se suit également avec plaisir, avec quelques coups de théâtre bienvenus. Seul bémol, Sarah-Jane Redmond ne donne pas beaucoup de dimension à son personnage, Karin Matthews apparaissant bien moins effrayante et troublante qu’à pu l’être B.J. (Aubrey), autre femme possédée par un sombre passé. Elle fera beaucoup mieux en interprétant la terrible Lucy Butler de MillenniuM ! Les jeunes comédiens ont eux certes un jeu légèrement démonstratif, mais demeurant convaincant.

    Mulder et Scully se lancent dans un duel assez pimenté, débuté lors d’une de ces autopsies dont Scully a décidemment le secret. Leur combat amical s’accompagne d’un humour bienvenu, d’autant que Mulder n’est pas en mal de calembours ! À noter de sa part un réflexe très Sherlock Holmes puisque c’est la boue présente sur les chaussures de Karin qui lui met la puce à l’oreille ! On regrettera qu’une fois sa défaite avérée, Scully reste à la remorque de Mulder et n’apporte pas grand-chose à cet épisode où le duo ressort franchement déséquilibré. On la voit même paniquée et appelant Mulder au secours devant le vieux forestier…

    Sans atteindre tout à fait les sommets de la série, Schizogonie reste un spectacle de haute qualité où la noirceur de l’âme humaine va jusqu’à corrompre la nature elle-même, avec une tonalité cauchemardesque très psychanalytique. Bienvenue dans l’univers chatoyant des X-Files !

    Anecdotes :

  • La schizogonie désigne un mode de reproduction asexuée. Mais le titre anglais est peut-être un mot-valise entre schizophreny (la maladie du méchant de l’épisode), et le suffixe -geny signifiant production, origine, dans le domaine de la reproduction ; ici il désignerait donc les enfants.

  • Les formules chimiques écrites au tableau pendant le cours de physique sont erronées : le chlorure de sodium (ou sel) et le chlorure d’hydrogène (gaz donnant au contact de l’eau l’acide chlorydrique) s’écrivent respectivement NaCl et HCl, et non NaCl2 et HCl2.

  • Lisa est interprétée par Katharine Isabelle, la fille de Graeme Murray, production designer de la série.

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    10. LA POUPÉE
    (CHINGA)


    Scénario : Stephen King & Chris Carter
    Réalisation :
    Kim Manners

    - Scully ?
    - Yes ?
    - Marry me !

    Résumé :

    Melissa Turner et sa fille Polly font leurs courses. La poupée de Polly se met à parler et Melissa a une vision d’horreur où elle voit la mort du boucher. Quelques secondes plus tard, toutes les personnes présentes deviennent folles et se mutilent atrocement le visage, et le boucher se tue en se plantant un couteau dans l’œil ! Scully est en vacances, mais vient à passer au village où a lieu l’événement. Elle apprend que Melissa a une réputation de sorcière maléfique. Sans l’aide de Mulder, Scully tente de résoudre cette obscure affaire alors que les morts se multiplient…

    Critique :

    Annoncée de longue date, la survenue dans l’univers des X-Files du « Roi de l’Épouvante », Sa Majesté Stephen King en personne, avait comme il se doit suscité les plus grandes espérances. Autant dire que l’on attendait immensément de cet épisode, et sans doute trop. En effet, la réception en fut globalement négative, de nombreux admirateurs de King comme des X-Files (ce sont souvent les mêmes !) trouvant le résultat et l’effroi suscité relativement décevants.

    En fait, on avait oublié que l’épouvante selon Stephen King (auteur bien plus littéraire qu'on ne l’imagine habituellement) naît autant de la nature profonde des personnages que de la dimension surnaturelle. Leurs névroses ou leur violence (King trace un portrait sans concessions d’une certaine brutalité de la société américaine), et davantage encore la propension qu’a l’esprit humain à se réfugier dans la folie face à l’horreur, participent aux passages les plus authentiquement effrayants de l’œuvre, au moins autant que les abominations perpétrées par Winnigos et autres Régulateurs.

    Or, cet aspect psychologique passe très malaisément à l’écran, un format plus propice et enclin à une horreur généralement visuelle et spectaculaire. Ceci explique en grande partie, outre un mercantilisme certain, pourquoi tant d’adaptations de King se sont révélées des échecs cuisants, le succès n’apparaissant que quand cette double dimension se voyait correctement prise en considération (Shining, Carrie au bal du Diable). Cette difficulté devient plus aiguë encore lors d’un épisode de série télé, fut-elle les X-Files, où l’on a moins le temps et les moyens nécessaires que dans un film pour se lancer dans des compositions aussi subtiles. C’est pourquoi, à bien y réfléchir, froidement, en laissant de côté un enthousiasme bien naturel, l’épisode paraissait bien plus périlleux que prometteur !

    Et ce qui devait arriver arriva.

    En fait, l’épisode réalise très bien le plus facile, soit le travail de production reconstituant le décorum des récits de King. Comme tous les autres fans du grand Steve, j’ai poussé un super cri de joie en voyant pour la première fois la plaque minéralogique du Maine, tant ce sauvage État est indissociable de son univers. Aidée par la topographie et la météo de la région de Vancouver (il était grand temps de tourner cet épisode), la mise en scène peint d’ailleurs avec justesse cette contrée du nord de la Nouvelle-Angleterre, aux confins du Canada. Elle s’offre même le luxe d’y rajouter un lac, qui pour les amateurs situe l’action non loin de la ville mythique de Castle Rock.

    Le récit se ponctue ainsi de nombreux clins d’œil comme le supermarché, cœur du rêve américain transformé en cauchemar, la persistance du puritanisme (à peine esquissé, malheureusement), l’artefact maléfique doté de conscience, le shining dont bénéficie Melissa (on lui doit les seules images réellement effrayantes de l’épisode), le souvenir de Salem, un shérif sympathique et solide (Larry Musser, l’impayable Detective Manners du Seigneur du magma !)… On a bien un épisode « à la Stephen King », mais pas un véritable car il échoue à en reconstituer l’essence.

    Malgré la très belle composition de Susannah Hoffman, on ne perçoit que très partiellement ses affres intérieures, qui constitueraient le cœur de l’ouvrage de l’auteur. Privé de ce ressort essentiel, la poupée et ses effets ridicules paraissent beaucoup plus grotesques qu’autre chose, tout simplement parce que nous les considérons de l’extérieur, au lieu de les voir à travers les yeux exorbités d’horreur de la mère ou des autres victimes. C’est bien là que réside la faute originelle de l’épisode. À ce moment-là, il aurait mieux valu jouer la carte du gore rigolard et jouissif d’un Chucky (la référence est citée, tout comme Elm Street), ce qui aurait été mieux que ce néant.

    C’est d’autant plus frustrant que les praticiens chevronnés de l’œuvre du Maître de Bangor voient littéralement se dérouler le récit écrit en même temps que se déroule l’épisode, qu’ils en apprécient toute la richesse, toutes les potentialités, en contraste avec le bien faible spectacle offert. On enrage ! Bien que rejoignant la tradition très X-Files des enfants inquiétants, la petite fille se voit plombée par le jeu crispant au possible de la jeune Jenny-Lynn Hutcheson. Si on ajoute à cela une mise en scène souvent figée et un final aux confins de la caricature la plus épaisse, le rendez-vous est bien manqué. Reste une fierté certaine pour notre série bien aimée, comme consacrée par l’onction du grand auteur, fan lui-même depuis bien longtemps (d’autant plus que le prochain épisode sera lui cosigné par William Gibson).

    Mais La poupée fut également coécrit par Chris Carter en personne, je pense que les autres auteurs de la série auraient volontiers tué pour pouvoir travailler avec King, et qu’il était assez inévitable que le Boss ne délègue à personne d’autre un tel honneur ! On doit sans doute à Carter ce qui finalement demeurera le plus mémorable de l’épisode : les hilarantes conversations téléphoniques entre Scully et Mulder, style Guerre des coprophages. Là où le départ en vacances de l’autre renforçait le désarroi et le spleen de Scully dans Never again, Mulder se retrouve lui à mater du porno (enfin, un reportage sur les abeilles tueuses) en dévorant ses graines, joue à la baballe en caleçon, connaît les affres du frigo de célibataire, et bien évidemment, s’amuse avec les légendaires crayons de bois, tout en s’entêtant à rechercher des solutions rationnelles grotesques à l’affaire (Scully le prend avec sa coutumière susceptibilité…).

    C’est finement observé, et très amusant, d’autant que Duchovny nous régale d’un de ses numéros de comique dont il a le secret. Cependant, au-delà de la plaisanterie, on voit bien que notre héros est lui aussi totalement déboussolé sans sa Scully, même si cela s’exprime d’une manière plus masculine…

    Au fil des saisons, Scully a gagné toute sa place dans les Affaires Non Classées, et Mulder a désormais le plus grand mal à travailler sans elle ! Un seul être vous manque… Allons, ces deux-là sont décidemment faits pour être ensemble ! (Évidemment, une vision cynique de l’épisode serait que sans Scully, Mulder soit lui aussi en vacances…). Le retour de Scully nous vaut une scène particulièrement réjouissante !

    Gillian réalise de nouveau une superbe prestation en composant une Scully sur laquelle le Maine (dont elle porte le nom sur son appréciable tee shirt) déteint visiblement, car elle n’a jamais paru aussi ouverte au surnaturel ! Scully aura tendance à éviter les supermarchés en pénétrant dans une ville car elle avait déjà connu une belle émotion dans La guerre des coprophages ! Alors que ses tailleurs demeurent au mieux tristement impersonnels, Scully sait visiblement s’habiller en dehors du bureau… on avait déjà remarqué un suggestif décolleté dans Small Potatoes, et elle nous régale ici en début d’épisode d’un tee shirt assez saisissant… Militons pour le Friday Wear au FBI ! On note également que bien avant Hollywood, elle s’offre un bain capiteux interrompu par un grossier téléphone ! Décidemment, le grand vent californien commence à souffler sur la série : il atteint les lacs du Maine pour bientôt toucher l’impénétrable forêt de Vancouver…

    Enfin, on se permettra un ultime regret, même avec ces réjouissantes discussions. N’en déplaise aux admirateurs (admiratrices !) de Scully, on aurait préféré que ce soit Mulder qui s’aventure quelque part entre Bangor et Derry. C’est tout de même lui qui présente la plus grande affinité avec le surnaturel, et dont on espérait la rencontre avec les sympathiques inventions de King, dont on ne dira jamais assez qu’il a fait immensément mieux que ce que pourrait suggérer cet épisode.

    Personnellement, j’aurais rêvé d’une rencontre et d’une aventure vécue en commun avec Roland Deschain de Gilead, celui-ci partageant finalement bien des points communs avec Mulder, y compris sa quête inexorable vers la Tour Sombre et sa Vérité secrète. Après tout, Roland a bien foulé notre Terre… Les discussions entre les deux personnages auraient vraiment valu leur pesant d’or. Enfin, chaque amoureux de cet immense écrivain américain qu’est Stephen King aura eu sa propre idée de la rencontre de celui-ci avec les X-Files, et c’est tant mieux ainsi !

    Anecdotes :

  • Aka. Bunghoney. Le titre original Chinga fut refusé par la FOX lors de la première diffusion de l’épisode, car dans certains pays hispanophones, sa traduction est « baiser » dans le sens sexuel du terme ! Chinga est aussi le nom d’une météorite qui a atterri en Sibérie (non, pas à Tunguska) en 1913. Le script de l’épisode nous apprend que Chinga est le nom de la poupée, bien que son nom ne soit jamais prononcé.

  • Mulder regarde un film pornographique lorsque Scully lui téléphone. Vous avez dit X-Files ?

  • Si l’on excepte les séries créées par lui, La Poupée est un des rares épisodes de série télé sur un scénario original de Stephen King, et non une adaptation d’une de ses œuvres.

  • Gillian Anderson a un tatouage sur la cheville droite, ce qui ne cadre pas vraiment avec la personnalité de Scully. Le tatouage fut donc supprimé numériquement lors de la scène où elle tend sa jambe pour fermer la porte de la salle de bain.

  • La fille de Tom Maddox, co-scénariste de l’épisode suivant, apparaît dans l’introduction. Un cadeau d’anniversaire de Papa Chris !

  • Lorsque Scully passe devant le miroir de sa chambre d’hôtel après avoir pris son bain, on peut voir un membre de l’équipe dans le reflet.

  • Quand Scully envisage que la poupée de Polly soit possédée par des esprits de tueurs, Mulder mentionne Chucky. Il s’agit du monstre de la saga d'horreur éponyme créé par Don Mancini. Il est incarné d’ailleurs par Brad Dourif, une des plus mémorables guests star de la série (Le Message, saison 1).

  • La musique entendue quand Scully s’arrête à la station-service est le 1er mouvement Allegro moderato du Concerto pour piano n° 3 en si mineur op.89 de Johann Nepomuk Hummel.

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  • 11. CLIC MORTEL
    (KILL SWITCH)


    Scénario : William Gibson & Tom Maddox
    Réalisation :
    Rob Bowman

    Résumé :

    Donald Gelman tente de pénétrer une base de données informatique lorsque 8 dealers et 2 policiers, prévenus par un même coup de fil mystérieux de se rendre dans le café où il se trouve, arrivent. S’ensuit un carnage sans survivants. Mulder escamote l’ordinateur de Gelman, et, aidé des Bandits Solitaires, trouve la cachette de la hackeuse Invisigoth. Elle, Donald, et un autre collègue, ont créé il y’a 15 ans une Intelligence Artificielle. Mais elle a fini par échapper à leur contrôle et veut tuer ses créateurs avant de contaminer tous les ordinateurs de la planète ! C’est elle qui a passé le coup de fil fatal car Donald tentait de la tuer. Une seule solution pour l’arrêter : lui injecter le virus Clic Mortel, mais l’IA n’a pas l’intention de se laisser détruire…

    Critique :

    Mulder dans la Matrice ! Les X-Files traversent une période très littéraire : après le grand Stephen King, c’est au tour de William Gibson et Tom Maddox d’écrire un épisode. On assiste ici comme à une consécration de la série car si ces deux auteurs (dont se détache Gibson) apparaissent moins connus du grand public que King, ils n’en demeurent pas moins de considérables plumes de la SF. Gibson, accompagné de quelques autres dont Maddox, est le père d’une des chapelles majeures de la SF des années 80 et 90 : le Cyberpunk.

    Clic Mortel, épisode particulièrement calibré, s’articule autour de quelques-uns des thèmes majeurs de ce mouvement (la Toile, les IA, les univers virtuels), ce qui constitue à la fois son intérêt et sa limite. En effet, le Cyberpunk, novateur en son temps (et non exempt de tics irritants et globalement surcoté) s’est vu rattrapé par l’évolution de la société. Victime de son succès, ce qui fascinait jadis est devenu soit commun (le Net) soit s’est révélé chimère (la réalité virtuelle). L’attrait de cette prose diminue par conséquent, d’autant que transparaît avec davantage de vivacité sa faiblesse littéraire. Au total, la dimension archétypale de l’épisode fera qu’il sera considéré différemment que l’on apprécie ou non le Cyberpunk, ou qu’on ne connaisse tout simplement pas, ce qui reste toujours une option possible ! Choisis ton camp, camarade, le Cyber ne m’a personnellement jamais fait vibrer…

    Plusieurs aspects irritants du Cyber grèvent l’épisode, ce sont d’ailleurs les mêmes qui avaient coulé à pic Un fantôme dans l’ordinateur (saison 1). On assiste ainsi à une fascination un peu naïve devant le Réseau et la figure du Hacker. L’aventure de la Silicon Valley nous est racontée comme un conte pour enfants, avec une évocation gourmée des grands gourous. L’ensemble paraît franchement dépassé. Encore une fois, on se situe ici dans le subjectif, un amateur du genre sera aux anges ! Comme toujours, on ressent comme un certain mépris (plus diffus ici qu’ailleurs) pour tout ce qui n’est pas Cyber. Tous ces défauts se voient concentrés dans la figure majeure de l’épisode, l’incarnation jusqu’au-boutiste de la Cyberpunkette, comme jaillie de Shadowrun, qu’est Invisigoth (sic), soit l’un des personnages les plus datés et référencés (caricaturaux) de la série. Et pourtant, là où Ghost in the machine était tombé au champ d’honneur des épisodes ratés, Clic mortel parvient à rebondir et à représenter un épisode très plaisant à regarder. Mais quel est donc son secret, s’interroge (ou pas) mon public virtuel à l’autre bout de la toile ?

    Tout d’abord, quoique l’on pense du personnage, Gibson a un vrai talent de conteur et connaît son métier. Il développe une intrigue fort efficace, alternant scènes marquantes (l’introduction est un joyau), coups de théâtre, et vrai suspense. On ne s’ennuie pas un seul instant tout au long de cette balade de Mulder et Scully au pays merveilleux des machines qui font bip-bip, d’autant que la mise en scène de Rob Bowman se montre explosive à souhait (plus gros budget des cinq premières saisons !), et que les spécialistes des effets spéciaux de la série accomplissent encore des prouesses.

    Gibson et son acolyte résistent à la tentation du manifeste nous délivrant un panorama général de la thématique Cyberpunk. Ce choix judicieux conserve de précieuses marges de souplesse à l’histoire. On se rend également très vite compte qu’une des graves faiblesses des romans Cyber, la faible épaisseur psychologique des personnages, se révèle ici une force. On saisit bien toutes les dimensions de la personnalité d’Invisigoth (très tonique Kristin Lehman, une habituée du genre), à l’inverse des plongées en eau profonde de King très difficilement adaptables à l’écran, comme l’avait démontré La poupée.

    Surtout, Clic mortel introduit ce qui manquait dramatiquement à Un fantôme dans l'ordinateur : l’humour. La confrontation Invisigoth-Scully, que tout oppose, nous vaut ainsi plusieurs scènes divertissantes. Tout comme Mulder, qui visiblement s’amuse beaucoup, on suit le match avec intérêt d’autant que Scully nous rappelle qu’elle est capable de sortir les griffes à l’occasion ! Comme avec Phoebe et Bambi, mais pour des motifs différents, quoique… L’épisode a l’habileté de ne pas trop tirer sur la corde, et fait suffisamment vite évoluer cette relation vers une certaine solidarité, avant que la lassitude ne s’installe. La fameuse scène de la Matrice joue également brillamment la carte de l’humour, entre médecins et infirmières bimbos en folie (la meilleure scène hospitalière de la série !), tandis que Gillian nous régale d’une scène de kung-fu proprement hallucinante. Dans la suite de cette chronique des X-Files, ce sera désormais « Mme Anderson », on ne sait jamais ! Au-delà du gag, Gibson se situe ici à son meilleur en évoquant avec brio l’aberration et l’inhumanité de cette IA tentant de nous singer avec une folie manifeste. C’est plus habile que Néo ou Johnny Mnemonic !

    Mais la partie la plus pétillante de ce très réussi détour par l’humour demeure bien entendu la survenue des Bandits Solitaires. Langly et ses deux compères bidouillent suffisamment sur le Net pour que leur intervention paraisse toute naturelle, comme une heureuse évidence annonçant Maitreya (avec les mêmes auteurs). Les voir se décomposer d’admiration devant leur cyber-idole reste hilarant, d’autant que la belle leur manifeste comme il se doit un mépris des plus cinglants. La suite montrera cependant tout le contraire, nul ne résiste bien longtemps au Trio (n'est-ce pas, Miss Harlow ?) ! L’épisode bascule ici totalement dans la comédie, avec d’excellents à-côtés comme une Scully ayant visiblement la plus haute opinion des parutions de nos amis ! On ne peut que regretter que l’IA Invisigoth ne se soit pas manifestée dans Au cœur du complot, tant sa relation avec les Bandits Solitaires aurait été pétillante.

    Ainsi se déroule fort agréablement cet épisode, entre action spectaculaire, humour débridé, et Cyberpunk intelligemment épuré. Malheureusement, Clic Mortel, au lieu de se conclure sur la surprenante naissance de la nouvelle IA, débouche sur une énième réapparition du Monster of the week. C’était déjà le cas dans La poupée, mais au moins on s’insère ici davantage dans la parano inhérente à la série. Cette faute de goût n’entache pas profondément la réussite de l’épisode, une des bonnes surprises de cette saison 5 parfois sous-estimée. Et on n’a pas fini de rigoler !

    Les amateurs de Stargate reconnaîtront avec plaisir dans la scène d’introduction Peter Williams, le terrible Apophis !

    Anecdotes :

  • Les Bandits Solitaires surnomment Invisigoth « Princesse Ninja ». Il s’agit du nom d’un jeu vidéo japonais sorti en 1985 chez Sega.

  • Episode le plus cher de la période Vancouver, il fut aussi le plus long à tourner. Bowman déclare que ce fut un de ses tournages les plus difficiles !

  • La scène du « Scully-fu » (dixit Rob Bowman) est une idée de William Gibson qui voulait montrer une Scully plus combattive. Gillian Anderson déclare qu’elle a adoré tourner cette scène ! Une des infirmières bimbos serait par ailleurs membre de la SPCDD ou Society for the Prevention of Cruelty to David Duchovny !! Société ayant réellement existé, mais qui semble avoir été dissoute depuis.

  • Le groupe de métalcore Killswitch Engage a choisi ce nom en hommage à cet épisode. On entend par ailleurs la chanson Twilight Time du groupe The Platters.

  • Erreurs : On peut voir le micro lorsque Mulder et Scully examinent le corps de Figgis. Quand Invisigoth force Scully à raccrocher le téléphone, Mulder n’entend plus que la tonalité, mais les téléphones cellulaires n’émettent pas de tonalité après la fin d’un appel.

  • On peut voir un extrait de cet épisode à la TV dans l’épisode Démons intérieurs (saison 3) de la série MillenniuM, l’autre grande série de Chris Carter. Autocitation, quand tu nous tiens…

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    12. LE SHÉRIF A LES DENTS LONGUES
    (BAD BLOOD)


    Scénario : Vince Gilligan
    Réalisation :
    Cliff Bole

    Résumé :

    Mulder et Scully sont sur la sellette : Skinner veut leur rapport sur une affaire qu’ils ont mené dans un village du Texas. Mulder soupçonnait que des vampires habitaient dans ce village après que des vaches puis un homme furent retrouvés totalement vidés de leur sang. A la fin de l’enquête, Mulder a tué son suspect avant de se rendre compte qu’il s’est peut-être trompé d’homme. Sa possible bavure risque de les mener en prison ! Pire, les deux enquêteurs ont chacun leur propre version de l‘histoire…

    Critique :

    Mulder theVampire Slayer ! Gillian Anderson rappelle souvent au fil des interviews que Bad Blood constitue son épisode préféré. On comprend aisément pourquoi tant cette histoire particulièrement décalée se révèle hilarante et autorise d’étonnants numéros d’acteurs.

    L’idée de base reprend peu ou prou celle du Seigneur du magma, mais cette fois Scully n’est pas la seule a faire le pitch, et sa version s’oppose frontalement à celle de Mulder ! Ce duel ajoute du piquant d’autant qu’en filigrane, il permet de vaguement deviner à quoi ressemblent les scènes de ménages chez le futur couple… Outre les variations particulièrement amusantes sur tel ou tel point du récit (le shérif a-t-il effectivement les dents longues ? la gestion du lit mécanique…), cette très habile structure narrative nous vaut un double portrait inversé particulièrement acide et détonnant, chaque partenaire démolissant l’autre avec une jouissance narquoise particulièrement communicative ! Cela change très agréablement de la relation habituelle tout en demeurant à l’évidence si énorme dans le traitement qu’il ne faut pas le prendre au sérieux.

    C’est ainsi que Scully peint Mulder comme un agité en surchauffe permanente, incapable de raisonner, et dont le penchant pour le fantastique confine au pathétique. Il se révèle de plus un redoutable cuistre et un rude macho envers sa partenaire ! (On pense furieusement à sa description par Jose Chung !). On se régale tant l’ironie se révèle cinglante et fait mouche. Utilisant un langage à l’occasion obscène, en roue libre, et cumulant plusieurs traits du looser absolu, ce Mulder permet également d’entrapercevoir Hank Moody… La riposte de Mulder voit apparaître une Scully ayant tout d’un terrible dragon femelle dont la froideur narquoise puis la fureur déchaînée terrorisent littéralement son malheureux partenaire ! Avec de plus un cœur d’artichaut et une attirance idiote pour le bellâtre local (tiens, tiens, Mulder serait-il jaloux ?). Le seul regret devant ce brillant exercice de style demeure la faible durée de la version « Scullysienne » par rapport à la « Mulderienne ». Cet écart se justifie par le fait que Mulder est plus dans l’action, mais on avoue une préférence pour le style Scully dont on aurait bien repris encore un peu… Cette double caricature est bien sûr exagérée, mais est-elle totalement fausse ?

    Comme si ce n’était pas encore suffisant pour composer un épisode extraordinaire, viennent s’ajouter plusieurs gags absolument irrésistibles comme le pastiche des croquignolettes autopsies de Scully (gore un jour, gore toujours), le mobile home en folie, Mulder chevauchant le cercueil, ou cette idée géniale de vampires devenus de bons et inoffensifs citoyens payant leurs impôts. Cela contraste délicieusement avec les poncifs sur les Fils de la Nuit habilement disséminés au cours de l’histoire (qui n’oublie pas de faire peur de temps à autre), on se croirait parfois vraiment à Sunnydale !

    Gilligan est vraiment un fan authentique d’une série qu’il connaît sur le bout des doigts et dont il parsème de références l’épisode (El Chupacabra, les vaches déjà vues dans Ève, les graines de tournesol...).

    Gillian Anderson et David Duchovny, tout à fait exceptionnels, s’amusent visiblement beaucoup à donner des versions aussi comiques de leurs personnages et nous communiquent pleinement leur bonne humeur. On se régale devant leur originale prestation exactement comme on se réjouit de voir s’encanailler Patrick Macnee et Diana Rigg dans Who’s who ???. Luke Wilson (Scream) accomplit lui aussi un brillant triple numéro (shérif si délicieusement viril, bouseux à moitié débile, et Prince des Ténèbres), l’étincelante réussite de Bad Blood lui doit beaucoup !

    Au total, même après l’avoir vu et revu, c’est en riant ou en souriant à chaque instant que l’on visionne de nouveau cet épisode dont l’énergie ne faiblit jamais. Ce n’est pas selon moi l’épisode le plus drôle de la série du fait de la pure démence du Seigneur du magma (et puis la Morgan’s touch reste tout de même unique, même si on sait depuis Small Potatoes que Vince Gilligan est un disciple particulièrement éclairé, non un vulgaire copiste) mais Bad Blood arrive vraiment à une petite encablure derrière ! Vive les épisodes décalés !

    La secrétaire de Skinner (le seul à garder la tête froide dans cette affaire, la fréquentation du duo l’a blindé) est interprétée comme souvent par la propre épouse de Mitch Pileggi, Arlene Warren Pileggi, qui servit aussi de doublure à Gillian Anderson.

    Anecdotes :

  • Mitch Pileggi (Skinner) rencontra sa future épouse sur le tournage de la série. Arlene fut non seulement une doublure de Gillian Anderson, mais fut aussi celle qui jouera le sosie de Scully dans Doubles (saison 7).

  • Cet épisode est inspiré d’un épisode analogue de The Dick van Dyke show. Vince Gilligan voulait écrire en réalité trois ou quatre versions de l’histoire, nombre qu’il ramena à deux pour des raisons de durée et de cohérence.

  • Le shérif de l’épisode s’appelle Hartwell, ce qui est le second prénom d’Holly, la petite amie de Vince Gilligan, scénariste de l’épisode. Par ailleurs, Ronnie, le vampire livreur de pizza, a comme second prénom LaVelle. C’est un clin d’œil à Xander LaVelle Harris (Alex en VF), un des personnages principaux de Buffy contre les vampires. L’autre grande série emblématique des 90’s venait de commencer l’année précédente.

  • Erreurs : Lors de la pesée des organes, Scully confond le petit intestin et le gros intestin. Toujours durant la scène de l’autopsie, Scully déclare à son magnétophone qu’elle va faire une incision sur le corps, mais quelques secondes avant, on a vu que le corps portait déjà la trace de l’incision (erreur de montage). L'acteur jouant le cadavre ne peut s'empêcher de respirer. Enfin, on peut voir un assistant de tournage donner (en bas à gauche de l'écran) à David Duchovny un pied de chaise supplémentaire s'apparentant à un pieu dans l'intervalle [32 min 37 sec à 32 min 45 sec]. (Merci à "Galou" pour cette dernière remarque).

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    13/14. PATIENT X
    (PATIENT X / THE RED AND THE BLACK)

    xfiles 5 13


    Épisode Mythologique

    Scénario : Chris Carter & Frank Spotnitz
    Réalisation :
    Kim Manners (1re partie) et Chris Carter (2e partie)

    One more anal-probing gyro-pyro levitating ectoplasm alien anti-matter story and I'm going to take out my gun and shoot somebody.

    Résumé :

    Kazakhstan. Une nuit, deux adolescents sont témoins d’un crash spatial et courent sur les lieux, mais l’un d'entre eux se fait tuer par « quelqu’un ». Au matin, Krycek enlève le second garçon malgré l’intervention de Marita Covarrubias. Mulder, sceptique depuis les révélations de Kritschgau, refuse de s’occuper de Cassandra Spender, une femme qui aurait été enlevée plusieurs fois par les aliens. Son fils Jeffrey ordonne à Scully de rester à l‘écart, mais un second crash a lieu à Skyland Mountain, où Scully fut enlevée. Pendant ce temps, un conflit interne déchire le Syndicat entre collaborationnistes et résistants aux « colons »...

    Critique :

    Épisode particulièrement dense et crucial pour la Mythologie, Patient X voit cependant son succès être entaché d’irritantes faiblesses.

    En particulier, c’est ici que se manifeste avec le plus d’éclat une des pires idées de la série : l’incompréhensible crise de scepticisme de Mulder (He doesn't want to believe anymore). On reste stupéfait de le voir bouleverser toutes ses convictions à partir des simples déclarations de Kritschgau. Cela ne fonctionne pas du tout et entrave le développement de l’histoire plus qu’autre chose, sans rien apporter. D’ailleurs, les auteurs de la très décevante seconde partie d’Emily avaient tout simplement tiré un trait dessus, ce qui constituait une belle facilité mais demeurait compréhensible ! Cela devient d’autant plus ridicule qu’au fil de l’épisode, tout le monde, de Cassandra à Skinner, l’exhorte avec des arguments convaincants, et que lui, raide comme l’as de pique, demeure totalement hermétique. Mulder autiste, vous n’en aviez pas rêvé, Patient X l’a fait.

    Le summum est atteint quand Scully devient une croyante à tout crin : on voit bien que les auteurs se sont grisés avec cette double inversion (la virtuosité c’est parfois périlleux), mais leur idée ne fonctionne pas et nous vaut essentiellement des scènes verbeuses, péremptoires, et frustrantes. De surcroît, la fin de l’épisode amorce un laborieux rétropédalage qui en dit long sur la validité de cette situation.

    Le corollaire de tout ce gâchis demeure une inertie assez inouïe de Mulder et Scully qui passent la majeure partie du double épisode à s’introspecter et à bavarder de la réalité de la nature de la Conspiration. Au niveau de l’action, Scully, à part une énième séance d’hypnose - ils y passeront tous - se contente de se rendre au rendez-vous mortel et d'y échapper miraculeusement (bon, ça c’était inévitable !). Ajoutons tout de même que les scènes avec Cassandra sonnent très justes, Gillian Anderson trouvant une remarquable partenaire avec Véronica Cartwright (Alien, Les Oiseaux, Body Snatchers…), une recrue de choix qui montre le renom désormais atteint par la série. Mulder, confiné dans son sublime isolement, n’entreprend rien de bien concret et il faut vraiment que Krycek vienne lui livrer l’affaire en main pour qu’il se décide à bouger. On s’étonne de ne pas le voir verser un pourboire à Alex ! La scène en résultant, assez faible, est d‘ailleurs expédiée dans les dernières minutes de l’épisode et vaut essentiellement par l’apparition toujours spectaculaire du Bounty Hunter. On se situe vraiment loin de la frénésie d’Anasazi !

    Et puis on subit une inflation de la dimension familiale de la Mythologie, alors qu’il ne s’agit pas selon moi, de la plus intéressante. C’est ainsi que l’on assiste à l’apparition fugitive du certes lumineux personnage de Cassandra et surtout à l’entrée en scène de Jeffrey Spender. Interprété avec subtilité par Chris Owens qui interprète également l'Homme à la Cigarette jeune, Spender s’affiche déjà tel que nous le découvrirons davantage par la suite : torturé par son passé familial, mais aussi très préoccupé par sa carrière et sa réputation. Très ambivalent, ce personnage falot au tragique destin n’aura guère eu de chance dans son parcours et ses rencontres (notamment avec Diana Fowley). Il demeure encore ici en devenir, et Patient X s’achève sur la révélation foudroyante (passablement éventée par la citation de William B. Davis au générique) que l'Homme à la Cigarette est bien vivant, et qu’il est son père. Il serait donc le demi-frère de Mulder. Toute une tragédie grecque… Rappelons que Jeffrey était alors là pour servir de remplaçant éventuel à Mulder en cas de départ de Duchovny (nous sommes en pleine crise « Los Angeles »).

    Et pourtant, malgré les prestations décevantes de Mulder et Scully, Patient X ne manque certes pas d’attraits. En effet, cette fois, c’est l’intérêt qui est ailleurs, dans les méandres méphitiques de la Conspiration et le bouleversement qu’elle affronte. L’inflexion majeure que représente l’entrée en lice d’une nouvelle puissance extraterrestre s’avère passionnante et apporte un renouvellement tombant à point nommé (on n’avait rien vu de neuf depuis quelques temps). Le seul bémol reste d’assister à quel point Mulder prend fait et cause pour la « Résistance » alors même que celle-ci brûle vif les gens comme d’autres cueillent des marguerites. Une mise en perspective (résistance et terrorisme) aurait été la bienvenue, mais qu’importe, ces nouveaux venus apportent une dimension supplémentaire et complexifient la donne au bon sens du terme.

    Plus captivant encore demeure le déroulement de la crise au sein de la Conspiration avec une éloquente évocation de la perte que représente l’absence du Fumeur. En effet, si les capacités d’analyse et de réflexion paraissent encore vivaces, c’est la panique au niveau du passage à l’acte. Voir les dirigeants ainsi décontenancés représente une originalité de plus. Les membres lambda ont des vapeurs, tandis que le Elder sort du lot mais demeure incapable d’une réaction dépassant les jeux de pouvoir où il excelle. Seul le vieil Anglais (génialissime John Neville, grande figure du théâtre canadien, OBE), avec une ténacité très insulaire, relève réellement le gant, notamment par son « alliance » avec Krycek scellée après une scène mémorable. Un schisme s’ouvre quand il saisit la possibilité d’une résistance alors que le reste du groupe demeure collaborationniste sous l’égide du Elder. Le conflit débouchera sur la résolution brutale de Fight The Future, qui verra disparaître un adversaire de grande classe comme on en aura rarement vu dans une sérié télé. Toutes ces scènes de confrontations se révèlent électriques à souhait et constituent le meilleur de l’épisode. On ne s’en lasse pas !

    L’ultime attrait de l’épisode réside dans le couple maudit de la série. La relation Marita-Krycek, subodorée lors de la dernière image de Zero sum, apparaît ici au grand jour. Le moins que l’on puisse dire est que ces deux-là ne lambinent pas comme certains (suivez mon regard). Le grand humaniste que restera continuellement Alex continue son flamboyant parcours, constamment victime de son destin si particulier le mettant toujours dans la pire situation possible ! Même après la trahison, sa sombre association avec Marita se poursuivra jusqu’à tard dans la série. Marita résulte ici plus énigmatique que jamaise, entre inféodation à la Conspiration (elle y apparaît comme une biche cernée par les loups) et sincère élan humanitaire qu’elle paiera d’ailleurs très cher. Quoiqu’elle ait commis par ailleurs, la terrible expérience subie le lui fera pardonner comme le fera Mulder lui-même ultérieurement. Suivre la trajectoire et l’étonnante association entre ces deux grands solitaires apporte un vrai plus à l’épisode, d’autant qu’ils sont interprétés par les très inspirés Laurie Holden et Nicholas Lea, que l’on adore et qui apparaissent trop rarement dans la série.

    C’est bien pour cette fascinante galerie de portraits des adversaires d’un Mulder restant, lui, aux abonnés absents, que Patient X se regarde toujours avec le même plaisir. On ne dira jamais assez à quel point les méchants sont primordiaux dans une série !

    Anecdotes :

  • Aka. Blood lines.

  • Pour la dixième fois de la série, l’indicatif The truth is out there est remplacé par Resist or serve (dans le générique de la deuxième partie de l'épisode). Il s’agit d’une réplique de Krycek signifiant que le combat contre les colons extraterrestres se résume à cette seule règle. Ce sera ultérieurement le nom donné au jeu vidéo adapté de la série en 2004 et se déroulant pendant la saison 7 de la série.

  • Première apparition des personnages de Cassandra Spender (Veronica Cartwright) et de Jeffrey Spender (Chris Owens).

  • Parmi la liste des morts de Skyland Mountain, on relève plusieurs noms de l’équipe technique des X-Files. Le jeune garçon messager qu’on voit au début et à la fin de ce double épisode est joué par Jack Finn, fils de Joseph Patrick Finn, producteur de la série.

  • Le prénom de Cassandra est bien choisi pour la Patiente X, car dans la mythologie grecque, Cassandre était une prophétesse dont personne ne croyait les oracles (souvent alarmistes), bien qu’elle eût toujours raison !

  • Dans l’introduction de l’épisode, Marita apostrophe Krycek en brandissant les articles 39 et 42 du chapitre 7 de la Charte des Nations Unies. L’article 7.39 indique que le Conseil de sécurité doit réagir immédiatement en cas d’agression ou de rupture de paix. L’article 7.42 indique que si la négociation diplomatique échoue ou est inadéquate (comme ici), le Conseil doit employer la force pour maintenir l’ordre.

  • Krycek se moque de l’Homme bien manucuré en lui disant qu'il a décroché son « bat-phone ». Il s’agit d’une référence au téléphone de Batman.

  • Le titre original de la deuxième partie de l’épisode The red and the black semble être un hommage au roman de Stendhal, mais il est plus plausible que ce soit à cause d’un film de propagande anti-communiste des années 50 ayant ce titre. Ou peut-être à cause de la chanson éponyme du groupe Blue Öyster Cult qui a écrit plusieurs chansons ayant pour sujet les hommes en noir !

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  • 15. COMPAGNONS DE ROUTE
    (TRAVELERS)


    Épisode Semi-Mythologique

    Scénario : John Shiban & Frank Spotnitz
    Réalisation :
    William A. Graham

    Résumé :

    1990, un shérif découvre un cadavre intégralement vidé de ses organes et de ses muscles mais à la peau intacte dans la maison d’un vieil homme, Edward Skur ! Il tue en légitime défense l’assassin qui expire en prononçant le nom de Mulder. Cinq jours plus tard, Arthur Dales, ancien agent du FBI, raconte à Mulder une affaire concernant le mort 38 ans plus tôt dont il s'était occupé. Une sombre affaire que l’intègre agent voulut résoudre en dépit de ses supérieurs qui lui imposèrent la loi du silence…

    Critique :

    Les X-Files continuent d’approfondir et d’enrichir leur univers en plongeant cette fois dans le passé du service des Affaires Non Classées. On apprend ainsi d’où vient le fameux X (à la différence du U de Unsolved, il y a toujours de la place dans ce tiroir estime la secrétaire !), mais au-delà du clin d’œil, cette balade dans de très sombres années 50 permet surtout une transposition très fine des thèmes majeurs de la série.

    C’est ainsi que l’on retrouve la paranoïa ambiante (autour du péril communiste et du spectre nucléaire), une Source assez trouble (le propre père de Mulder !), la Conspiration (une monstrueuse expérimentation mettant déjà en œuvre les pratiques nazies), l’atmosphère si particulière du FBI (il est très amusant de découvrir l’immeuble d’alors, et Hoover compose un Skinner vraiment particulier !), et bien entendu l’agent en quête de vérité, avec ce personnage très prometteur que constitue Arthur Dales.

    L’épisode ne se contente pas de constituer un exercice de style parfaitement abouti, mais nous conte une histoire parfaitement terrifiante. Elle se voit renforcée par l’habile mise en scène de William Graham, mêlant avec réussite une évocatrice reconstitution d’époque et un sens consommé de l’épouvante. On apprécie de voir les Fifties décrites sans nostalgie, entre Maccarthysme et FBI tout puissant. On retrouve l’ambiance si fascinante du fabuleux Quatuor de Los Angeles de James Ellroy ou de l’excellent film Mulholland Falls, un authentique plaisir ! L’intrigue mêle astucieusement présent (enfin, 1990, soit un léger flash-back) et passé via le personnage de Bill Mulder, dont l’ambivalence connue se montre ici particulièrement évidente.

    L’interprétation, particulièrement brillante, ajoute un attrait supplémentaire à l’épisode puisque celui-ci nous permet d’apercevoir Garret Dillahunt (le sombre Ross des 4400) et surtout Fredric Lehne (un méchant récurrent de Supernatural, mais aussi le Marshal de Lost !) qui nous régale ici d’une composition enthousiasmante de conviction. Mais la grandiose surprise de Travelers demeure l’apparition de Darren McGavin qui fut, entre bien autres choses, Kolchak the Night Stalker envers qui Chris Carter avoua toujours une grande admiration et qui constitua une des principales sources d’inspiration des X-Files. Quelle grande idée et quel bel hommage ! Sa rencontre avec Duchovny fonctionne totalement et résonne comme un passage de témoin, tant entre interprètes qu’entre personnages. On devine que Mulder va s’empresser de passer aux Affaires Non Classées ! Ainsi va cette saison 5, certes composée en patchwork, mais relevant haut la main le défi de la faible présence des interprètes principaux retenus par Fight The Future, et faisant de nécessité vertu en déployant des trésors d’imagination. Encore une fois, on oublie totalement l’absence de Gillian Anderson, ce qui on en conviendra ne représente pas un mince exploit !

    Arthur Dales était un personnage trop formidable pour que Chris Carter s’en tienne là. Il le fera revenir dans Agua mala, puis l’inouï The Unnatural.

    À noter un gag très étrange : avec son imperméable, sa cigarette, et sa coupe de cheveux, Mulder ressemble ici étrangement à l'Homme à la Cigarette ! On remarque aussi qu’il porte une alliance, mais que les fans de la relation Mulder/Scully se rassurent, il s’agit bien de celle de Duchovny ! Autres temps…

    Anecdotes :

  • 5e épisode sans Scully.

  • 2e et dernier épisode à se dérouler intégralement dans le passé (après Les Bandits Solitaires).

  • Arthur Dales reviendra dans Agua Mala (saison 6), tandis que son frère apparaîtra dans Le grand jour (saison 6). Arthur Dales fut un nom de plume utilisé par Howard Dimsdale, un professeur de l’American Film Institute black-listé durant le McCarthysme. Il l’utilisa pour continuer à publier ses œuvres. Il fut un des professeurs de John Shiban et Frank Spotnitz, les scénaristes de cet épisode qui lui rendent ici hommage.

  • Travelers est le surnom donné aux américains qui développèrent des liens avec les communistes durant la chasse aux sorcières du McCarthysme.

  • La tirade de J. Edgar Hoover adressée à Arthur Dales est en réalité tirée d’un discours du sénateur McCarthy.

  • 2111 du jour : Fox Mulder rencontre Arthur Dales le 21 novembre 1990.

  • La voix de la chanteuse entendue dans le disque est d’après l’inscription Paula Rabwini, une allusion au producteur de la série Paul Rabwin.

  • Le partenaire de Dales s’appelle Michel Hayes, nom du fiancé de Mary Astoudian, assistante personnelle de Chris Carter.

  • Anachronisme : dans l’histoire de 1952, on peut voir dans l’appartement du cadavre un tourne-disque de marque DUAL 1214 qui ne fut pas commercialisé avant les années 60.

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    16. L'ŒIL DE L'ESPRIT
    (THE MIND'S EYE)


    Scénario : Tim Minear
    Réalisation :
    Kim Manners

    Résumé :

    Marty Glenn, 27 ans, est retrouvée dans la même chambre qu’un cadavre d‘un trafiquant de drogue. Sa cécité, l’absence de mobile, ainsi que son tempéramment cynique et méprisant n’aident pas la police à faire avancer l’enquête. Mulder pense que Marty, bien qu’aveugle, a développé un sixième sens lui permettant d’avoir des visions. Lorsqu’un second meurtre est commis, elle s’accuse du crime. Mulder, convaincu de son innocence, persiste, et veut comprendre le revirement de Marty ainsi que son secret…

    Critique :

    Cet épisode détonne clairement vis-à-vis des précédents. Même si l'idée de base paraît astucieuse, elle a été traitée ailleurs avec quelques variations d'une manière bien plus intense (Souvenirs d'oubliette). Ici, l'histoire met beaucoup de temps à évoluer une fois indiqué le postulat, ce qui nous vaut une succession d'entretiens Mulder/Marty certes individuellement réussis, mais à force répétitifs. Il ne se passe pas grand chose entre Mulder et Scully qui n'ont que quelques scènes minimalistes ensemble. De plus, on remarque que Mulder s'étonne d'entendre Pennock lui reprocher son scepticisme alors même qu'il vient d'en manifester un étonnant d'exemple dans Patient X. Non seulement cette idée ne fonctionne que très médiocrement, mais en plus seulement par intermittence.

    Ce manque de nervosité de l'intrigue se voit renforcé par la mise en scène un peu en retrait de Kim Manners, dynamisant moins l’épisode que de coutume. Même les effets spéciaux, une des grandes forces de la série, se révèlent ici peu heureux, les visions de Marty demeurant laides et sans cachet. Pour tout dire, on goûte assez peu cette incursion très prononcée dans le domaine policier (on voit même un assistant du procureur intervenir dans une scène caricaturale au possible). Les X-Files ont désormais acquis leur propre ton, développé leur propre univers, et l'on ne comprend pas vraiment l'intérêt de s'aventurer dans du policier hyper classique et peu relevé, avec un argument fantastique tenant davantage du prétexte qu'autre chose.

    Fort heureusement, l'épisode bénéficie du renfort de comédiens que l'on aime beaucoup : le vétéran et toujours excellent Blu Mankuma (déjà vu dans Ghost in the machine) dont le métier permet de donner une dimension supplémentaire au Détective Pennock, personnage sinon dépourvu de toute originalité, et surtout Lili Taylor (Mystic Pizza, Six Feet Under...). Celle-ci réalise une reconstitution particulièrement convaincante de la cécité mais sans se limiter à ce déjà fort bel exploit. Elle compose en effet un formidable personnage féminin (une fois de plus dans cette série) dont le courage et l'esprit combattif forcent l'admiration, de même que la volonté d'assumer ses actes.

    Le récit a l'habileté de ne pas faire d'elle une victime, bien au contraire. Ce n'est pas si souvent que l'on vainc Mulder au concours de vannes et Marty y arrive haut la main grâce à son humour caustique apportant une vie dont l'épisode a terriblement besoin. C'est grâce à Lili que, dans sa toute dernière partie, l'épisode trouve un second souffle grâce à cette idée émouvante d'une aveugle de naissance découvrant le mystère et la beauté de la vision, pour s'enfoncer de nouveau dans la nuit de son propre chef. Malheureusement, comme lors du très indigeste Si j'étais toi où elle retrouvera Duchovny, son beau talent ne suffit pas à sauver cet épisode trop long à éclore, mais lui permet d'éviter une catastrophe absolue.

    L'auteur, le très imaginatif Tim Minear, saura par la suite épurer et dynamiser son écriture et fera les belles heures de Angel, Firefly, Wonderfalls...

    On note au cours du récit plusieurs clins d'œil à la première affaire O.J. Simpson, qui vient alors de défrayer la chronique.

    Anecdotes :

  • Mind’s eye désigne une capacité de visualisation d’images autre que par la vue : par la pensée. C’est ce dont est atteint Marty.

  • D’un plan à l’autre, les mains de Mulder et Marty changent de position entre les barreaux dans la scène finale. 

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    17. L'ÂME EN PEINE
    (ALL SOULS)

    Scénario : John Shiban & Frank Spotnitz, d’après une histoire de Billy Brown & Dan Angel
    Réalisation :
    Allen Coulter

     

    Résumé :

    Dara Kernoff, 16 ans, gravement handicapée, se lève de son fauteuil roulant, marche vers une silhouette qui l’enveloppe dans une lumière foudroyante, et meurt les yeux carbonisés en position de prière ! Dara a trois sœurs jumelles introuvables. Le père Grégory s’intéresse de près à elles et voudrait les « sauver de Satan ». Mulder et Scully tentent de retrouver les trois sœurs au plus vite, mais Scully est saisie de flashes où elle voit Emily, ce qui la bouleverse. Elle comprend que les quatre filles sont au cœur d’un duel où des forces surnaturelles bataillent violemment…

    Critique :

    Ce fascinant et superbe épisode prolonge brillamment la thématique d’Emily, en s’inspirant fort heureusement de la première partie de ce double épisode inégal.

    En effet, il s’attache de nouveau à explorer la psychologie si richement dessinée de Dana Scully, à travers sa douleur devant la perte de son enfant et sa profonde relation avec la foi catholique. L’ensemble ressort écrit très subtilement, en évitant toute espèce de caricature. Le récit se voit également magnifié par le jeu particulièrement sensible et émouvant de Gillian Anderson, principalement mise en avant ici, et qui réalise à cette occasion une de ses prestations les plus subtiles. Elle est servie par la structure narrative de l’épisode qui recourt de nouveau à la technique si efficace du flash-back narratif, ce qui nous vaut plusieurs scènes très touchantes au confessionnal, notamment une sublime conclusion sur le deuil.

    Assez inévitablement, Mulder (toujours accro au porno) se voit relégué au second plan. Cependant, même si son registre sceptique apparaît moins riche que la palette d’émotions ressenties par Scully, il fonctionne ici beaucoup mieux qu’envers la Conspiration. En effet, Mulder s’est toujours montré rétif devant le fait religieux (sauf lorsqu’il s’agit de pleurer Samantha…), et on devine sa méfiance naturelle s’exacerber devant toute vérité révélée. Sa passion envers le paranormal se heurte également à la relecture globalisatrice et finalement rationaliste qu’en effectue aujourd’hui l’Église. Ceci débouche au cours du récit sur l’inversion déjà observée dans Patient X, mais fonctionnant avec davantage d’acuité et de pertinence.

    L’épisode ne s’attache pas uniquement à la personnalité de héros figurant décidemment parmi les personnages de série télé les plus subtilement et profondément écrits, mais nous offre une intrigue fantastique particulièrement relevée par son intervention directe du Divin. Au cinéma, comme en littérature ou à la télévision, ce genre d’histoire comporte toujours une dimension supplémentaire, voire transcendante pour peu que la qualité et l’ambition soient au rendez-vous. Et Dieu sait que c’est le cas ici ! Spotnitz et les autres auteurs vont chercher leur inspiration dans le mythe si passionnant des Séraphins et Néphilims qu’ils retranscrivent avec virtuosité et sensibilité.

    La mise en scène d’Allen Coulter demeure également très efficace, bénéficiant des apparitions réellement spectaculaires du Séraphin et de l’image aussi morbide qu’esthétique de ces jeunes femmes foudroyées, une des plus inoubliables de la série. On pénètre ici dans une atmosphère évoquant très clairement MillenniuM, l’autre grande série de Chris Carter. Mark Snow et sa musique réalisent encore des miracles ! La fausse piste menée loin dans l’épisode s’avère redoutable… Les apparitions d’Emily ponctuent superbement le récit, évitant toujours d’en faire trop - le grand péril de ce genre d’exercice. La séparation définitive avec une Scully la laissant partir reste un grand moment.

    L’interprétation des seconds rôles se montre également au diapason, avec un triple numéro d’Emily Perkins (Ginger Snaps, Juno) forçant l’admiration. Se détache également Glenn Morshower qui campera un autre Aaron dans 24h chrono (un clin d’œil des auteurs de cette série ?), le Prétorien constituant un des rares alliés sûrs de Jack Bauer. Il compose ici un Satan particulièrement convaincant, aussi habile dans la ruse qu’impitoyable dans la violence. On note à cette occasion la seule faute de goût de cet épisode particulièrement abouti : les cornes du Diable se reflétant sur le sol. Cela paraît quelque peu enfantin, mais il fallait bien un indice à Scully alors que même Mulder n’y avait vu que du feu ! Avoir mené l’enquête avec le Malin sans se douter de rien restera parmi les plus grandes contre-performances du meilleur agent du FBI…

    Si l’univers des Néphilims vous intéresse, allez jeter un œil sur le jeu de rôle homonyme, superbement écrit et très évocateur. La série des « En remorquant Jéhovah » de James Morrow introduit également le Divin dans le fantastique avec une Diabolique malice !

    Assez inexplicablement (sans doute l’intervention divine dans l’univers très SF des X-Files n’a-t-elle pas convaincu le public), cet épisode connaît l’audience la plus faible de la série. Bon, avec 13,4 millions de spectateurs, tout est relatif !

    Anecdotes :

  • Le titre original vient d’une fête chrétienne inspirée d’une ancienne fête païenne : le jour des morts, fêté traditionnellement le 2 novembre. Dans les pays anglophones, on nomme cette fête All souls’day (jour de toutes les âmes).

  • Deuxième épisode où Mulder et Scully luttent contre le Diable lui-même, après La main de l’enfer (saison 3).

  • Le prêtre qui confesse Scully est joué par Joseph Patrick Finn, le producteur en chef de la série. Tracy Elofson, assistant du co-producteur exécutif R.W.Goodwin, joue le séraphin apparaissant à Scully.

  • La musique entendue lorsque Scully contemple en pleurant la photo d’Emily est une version pour piano du 3e mouvement Largo de la Symphonie n° 5 en ré mineur op.47 de Dmitri Shostakovich.

  • Erreurs : Contrairement à ce qui est dit dans l’épisode, les Séraphins n’ont qu’une seule face, et non quatre. Ce sont les Chérubins qui ont quatre faces. La comédienne jouant la sœur décédée pendant l’enterrement bouge.

  • Lorsque Mulder consulte la Bible aprocryphe, il se demande s’il n’y a pas là-dedans des chansons de Jesus-Christ Superstar. Il fait référence au fameux opéra-rock d'Andrew Lloyd Webber et Tim Rice, adapté en film en 1973 par Norman Jewison.

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    18. LES NOUVEAUX SPARTIATES
    (THE PINE-BLUFF VARIANT)


    Scénario : John Shiban
    Réalisation :
    Rob Bowman

    Résumé :

    Le FBI et la CIA tentent d’interpeller Jacob Steven Haley, numéro 2 de l‘organisation terroriste Les nouveaux spartiates. Haley s’échappe d'une souricière en laissant derrière lui un cadavre horriblement dévoré par une bactérie inconnue ! Scully soupçonne Mulder d’avoir aidé Haley à s’enfuir et le prend en filature. 14 nouveaux cadavres sont retrouvés dans un petit cinéma, victimes de la bactérie inconnue. Nos agents sont pris dans un infernal jeu de dupes où personne ne semble être ce qu’il est en réalité…

    Critique :

    Ne touchez pas aux réglages de votre téléviseur, vous êtes bien en train de regarder un épisode des X-Files

    Cette histoire surprend car elle se rapproche bien plus d’un récit très classique mêlant des thématiques de police et d'espionnage (symbolisé par l’alliance du FBI et de la CIA) que d’un épisode des X-Files. On assiste ainsi à une totale absence de surnaturel, tandis que le complot suggéré ne se rattache même pas véritablement à la Conspiration (comme dans Les Bandits Solitaires). Tout juste distingue-t-on une reconstitution de la paranoïa propre à la série. Pour le reste, nous avons droit à un véritable catalogue de clichés des deux genres : agents doubles, attaque de banque hyper nerveuse, collègue qui doute de l’autre mais demeurant solidaire devant l’autorité, mais en fait l’autre est en service commandé, intrigue relativement complexe, manipulation des individus… Rien qui ne constitue des éléments particulièrement identifiants moult fois vus ailleurs. L’amateur de science-fiction et des X-Files tels que nous les connaissons depuis très bientôt cinq saisons échues, se demande ce qu’il fait là et d’où peut bien sortir ce proto épisode de 24h chrono.

    Certes, ce n’est pas pour autant que l’on s’ennuie en regardant Les nouveaux spartiates. Intrigue, musique, et réalisation demeurent des modèles d’efficacité, tandis que le défilé de gueules pittoresques chez les terroristes reste très amusant. De plus, les auteurs, comme sentant bien la faiblesse de leur propos, s’efforcent non sans succès de le pimenter par quelques coups d’éclat, maintenant éveillée l’attention du spectateur. Le somptueux parc, les masques rigolos, la scène d’épouvante du cinéma (les artistes de la série s’en donnent à cœur joie), l’étrange décor à l’abandon où se réunissent les Spartiates constituent autant de faits hauts en couleurs destinés à faire oublier la grisaille de l’histoire. On note également une guest star de luxe avec le toujours impressionnant Sam Anderson (Lost, Angel, Urgences, Picket Fences…) dans un rôle finalement très proche de l’inoubliable Holland Manners de chez Wolfram and Hart, on en frémit ! Au total, l’épisode paraît loin de représenter une catastrophe, il s’en faut de beaucoup ; simplement quand on regarde les X-Files, c’est pour retrouver Mulder et Scully, pas Jack Bauer et Chloe O'Brian.

    Le rôle de la jeune caissière est tenu par la fille de Tom Braidwood, assistant de direction important des X-Files et de MillenniuM, « accessoirement » interprète de l’inénarrable Melvin Frohike. Kate Braidwood est apparue dans deux autres épisodes ; les X-Files étaient une grande famille !

    Anecdotes :

  • La scène de l’interrogatoire de Mulder ressemble beaucoup à celle du Faucon maltais (1931) de Roy del Ruth, et présente dans les trois remakes (dont celui de 1941, le plus connu).

  • Scully soupçonne Mulder de trahison et le suit jusqu’à l’hôtel Aaron Burr. Aaron Burr fut le troisième vice-président des Etats-Unis (pendant le mandat de Thomas Jefferson). Il fut convaincu de haute trahison après la découverte du complot qu’il ourdissait contre l’Etat pour fonder un nouvel état dissident indépendant du pouvoir.

  • Dans ce même hôtel, Mulder utilise comme faux nom Kaplan. Il s’agit d’un clin d’œil à La mort aux trousses d’Alfred Hitchcock, où le héros est pris pour un agent secret du nom de George Kaplan.

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  • 19. FOLIE À DEUX
    (FOLIE A DEUX)


    Scénario : Vince Gilligan
    Réalisation :
    Kim Manners

    Scully, you have to believe me. Nobody else on this whole damn planet does or ever will. You're my one in five billion.

    Résumé :

    Gary Lambert a la conviction qu’un monstre visible de lui seul se promène dans son entreprise, tuant puis « zombifiant » ses collègues qui ne s’aperçoivent de rien. Il craque et prend en otage ses collègues dont son chef Greg Pincus - qui serait le monstre - mais aussi Mulder qui devait enquêter sur Lambert quand le FBI est tombé en possession d‘une cassette qu'il leur a envoyé. Le SWAT, accompagné par Scully, est sur le point de lancer une attaque. Mais Mulder, à sa grande horreur, finit par voir Pincus sous les traits du monstre décrit par Lambert…

    Critique :

    Cet épisode particulièrement virtuose se révèle un aussi troublant que terrifiant voyage au pays du cauchemar. Dans un premier temps, l'histoire, suprêmement habile, distille savamment l'ambiguïté entre surnaturel et folie autour du personnage de Gary Lambert.

    Mais Vince Gilligan ne se contente pas de cette interrogation certes brillante mais à l'issue prévisible, après tout nous sommes dans les X-Files ! Il apporte une dimension supplémentaire tout à fait déstabilisante par sa description de la folie, dans laquelle le paranormal agit uniquement comme facteur déclenchant.

    Car Gary Lambert n'est pas un héros comme David Vincent qui après avoir aperçu l'horreur derrière le voile rassurant de la vérité consensuelle, se montre capable d'une riposte rationnelle. Dépourvu du statut de héros, sa fuite dans l'irrationnel explicitée par Mulder nous touche d'autant plus qu'il s'agit d'un simple individu comme nous. Son basculement se voit traduit par une grande conviction grâce au jeu très ardent de Brian Markinson (Dark Angel, The L Word), mais aussi par une mise en scène au terrible impact de l'un des monstres les plus terrifiants de la série, et des maquillages de zombie méphitiques à souhait, bien supérieurs à ce que l'on a pu souvent voir sur grand écran. En patron sympathique et sincère, John Apicella accomplit également une belle performance, accroissant le doute sur la nature paranormale de l'affaire.

    Les jeux de lumière, les gros plans sur les visages et les travellings, concourent efficacement à cette atmosphère de cauchemar éveillé, portée, sublimée par la musique d'un Mark Snow toujours incroyable. L'épisode se double aussi d'une critique caustique de l'entreprise moderne, de ses open-spaces déshumanisants comme de son management méprisant, au mieux paternaliste. Univers déshumanisant, folie et individus insectoïdes, les auteurs nous offrent en fait une variation « X-Filienne » très aboutie de Kafka, un immense classique à lire et à relire.

    L'intrigue se montre toujours plus ambitieuse en décrivant de manière très parlante cette fameuse folie à deux, soit la transmission du dérèglement mental de Lambert à Mulder. Notre héros évolue ainsi au fil de l'épisode selon un dégradé aussi terrifiant qu'inexorable. De prime abord sceptique, Mulder voit d'abord son intention éveillée par un détail lié aux Dossiers X relevant comme d'une idée fixe chez lui. Cette affaire l'intéressant toujours davantage, il appelle Scully en renfort avant la rencontre avec Lambert (joli parallèle avec la prise d'otage de Duane Barry, où cette fois la conviction était partagée au préalable).

    Après la révélation, le cours des choses s'accélère, et Mulder finit par apparaître aussi instable (notamment avec Skinner) et paniqué que Lambert. Et ce alors même qu'il a traversé sans défaillir tant de périls insensés et jusqu'ici réservé ses crises à Samantha et à ses ennemis de la Conspiration ! La nature si hors normes du monstre, plus effroyable encore que le Flukeman, rend parfaitement crédible cette évolution conduisant à la scène terrifiante de l'hôpital, filmée comme une pure abomination onirique.

    Nous sommes bien ici face à l'un des épisodes les plus inquiétants et fascinants de la série, où l'effondrement de Mulder raconté comme un pur cauchemar paranoïaque, terrorise davantage que le Monster of the week lui-même. Ultime exploit du récit, celui-ci nous montre comment la contagion vient finalement se briser sur les murailles du cartésianisme de Scully, après avoir ici également semé habilement le trouble : autopsie jouant le rôle de catalyseur telle la phrase « se dissimuler dans la lumière » pour Mulder, paroxysme final de la scène de l'ascenseur... c'est bien grâce à l'obstination raisonnée de notre héroïne que le cycle infernal se trouve finalement brisé. On a assez raillé le scepticisme scientifique de Scully tout au long de ces cinq saisons tout en célébrant l'ouverture d'esprit de Mulder, pour ne pas saluer cette audace ressentie comme une justice enfin rendue ! Les Affaires Non Classées c'était un travail d'équipe, rappellera fort justement Mulder dans I Want To Believe...

    On remarque que Mulder porte encore des attelles suite à ses doigts brisés par les Spartiates, c'est à ce genre de petit détail que l'on devine qu'une série est écrite avec sérieux !

    Mulder évoque le Syndrome d'Helsinki, alors qu'il s'agit de celui de Stockholm !

    La "folie à deux" n'est pas un terme choisi au hasard, il recouvre une forme de démence partagée (expérience commune de schizophrénie), syndrome étudié et traité en psychiatrie.

    Roger R. Cross (24h chrono) réalise sa quatrième apparition très efficace dans la série, toujours dans un rôle de policier.

    Enfin, on s'autorisera un petit instant d'émotion lorsque l'épisode nous offre encore un superbe paysage de la région de Vancouver. Encore 50 minutes et ce sera la Fin !

    Anecdotes :

  • Nouvelle référence à Holly Rice, la petite amie du scénariste de l’épisode Vince Gilligan : l’agent chargé de l’opération est l’agent Rice.

  • La quantité de sang sur les lèvres de Mulder varie d’un plan à l’autre.

  • L’affaire similaire à cet épisode s’est déroulée le 9 août 1992 comme le dit Scully au téléphone. Gillian Anderson est née un 9 août.

  • Le film vu par la dernière victime est Le petit colonel (1935) de David Butler.

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    20. LA FIN
    (THE END)

    Épisode Mythologique

    Scénario : Chris Carter
    Réalisation :
    R.W.Goodwin

    Résumé :

    Gibson Praise, 12 ans, prodige du jeu d’échecs, mate un grand maître russe. A ce moment, un tireur embusqué tue ce dernier. Mulder est tenu à l’écart de l'enquête ; il intervient quand même et découvre que la cible du tueur n’était pas le russe mais bien le jeune garçon ! Aidé par Scully et Diana Fowley, son ancienne coéquipière des Affaires Non Classées, Mulder découvre que le Syndicat est derrière cet attentat manqué et que Gibson serait la clé de tous les dossiers X : sa quête trouverait enfin sa conclusion ! Mais Mulder ne voit pas que le Fumeur lui a ourdi un piège diabolique…

    Critique :

    La Fin, comme ultérieurement Le Commencement lançant la saison 6, souffre d’un cahier des charges très contraignant : introduire Fight The Future sans empiéter sur son déroulement, et clore la période Vancouver.

    On y retrouve donc les défauts traditionnels des épisodes de présentation : très longue exposition des nombreux nouveaux personnages (Fowley, Gibson Praise, Spender qui connaît ici son vrai lancement) et sacrifice concomitant de l’intrigue, celle-ci se résumant ici à peu d’éléments. L’espace s’étendant entre la scène de début et l’accélération finale demeure bien trop statique et prolongé.

    Heureusement, il se ponctue de quelques moments forts, comme les si chaleureuses et émouvantes retrouvailles des membres de la Conspiration et du Fumeur. Pour son retour dans la série, à l’issue d’une cinquième saison dont il fut quasiment absent, William B. Davis remporte encore la partie grâce à une composition foudroyante d’intensité et de talent. Un authentique récital. La dimension supplémentaire que l'Homme à la Cigarette et son interprète octroient à la série s’avère décidemment indéniable. On observe également que l’association très improbable entre le vieil Honorable Anglais madré et raffiné avec le jeune Américain impulsif et sanguinaire fonctionne en fait à merveille. Dommage qu’elle doive si vite prendre fin… La trouvaille des messages insérés dans des emballages de Morley s’avère une très bonne idée !

    Mais l’intérêt de l’épisode semble surtout résider dans la qualité et la profondeur pour la présentation desquelles il sacrifie son intrigue. Tout en représentant une intrigante énigme, Gibson nous émeut tant il paraît fragile face aux prédateurs le convoitant. Ses scènes avec Mulder, et surtout avec Scully, s’avèrent touchantes et subtilement écrites. Bien loin de se poser en comparse ou en simple utilité, Spender existe et s’impose avec des sentiments et des tourments à fleur de peau. Malgré son côté veule et arriviste, on ne peut s’empêcher de le prendre en pitié face à son incompréhension devant cet univers étrange et inquiétant pour lequel il n’est visiblement pas taillé. Le voir autant dominé par Mulder devient presque pénible, surtout que la révélation paternelle n’occasionne qu’un trauma supplémentaire et qu’il s’apprête à tomber dans les crochets d’une redoutable mante religieuse.

    Car la grande révélation de La Fin demeure bien entendu l’entrée en scène de Diana Fowley, qui va bientôt devenir l'être le plus universellement honni de la série. N’en déplaise à ses détracteurs (détractrices), le personnage montre de solides qualités personnelles, dont le charisme et l’intelligence non dénuée de cynisme, avec une Mimi Rogers lui apportant une présence et une autorité très naturelles.

    C’est bien à une adversaire d’une toute autre trempe que la fugace Phoebe Green qu’est désormais confrontée Scully, d’autant que Mulder (qui conserve inutilement un piteux silence sur son passé avec Fowley) semble décidemment toujours très proche de ses ex ! Le match débute d’ailleurs d’emblée avec une Diana débinant Scully en toute solidarité auprès de Mulder et tâchant de se placer (ce n’est pas gagné), tandis que Scully interrompt la discussion sur l’affaire en cours pour interroger les Bandits Solitaires à propos de sa rivale ! Quoiqu’elle s’en doutait visiblement déjà, sa mine quand lui est révélée cette relation passée vaut le coup d’œil (jolie performance de Gillian Anderson). Prudemment, les Bandits Solitaires s’abstiennent de tout commentaire…

    Hélas, ces personnages demeurent essentiellement pour l’instant à l’état de promesses, et ne contrebalancent que partiellement la vacuité de l’histoire. L’épisode est cependant sauvé grâce à une brusque accélération en fin de parcours, où l’on retrouve enfin comme un écho du rythme infernal du triptyque Anasazi. Le parallèle entre la partie d’échecs initiale et la partie remportée par le Fumeur aux dépens de Mulder reste fort bien troussé. Malheureusement, l’épisode ne se conclut pas par l’époustouflant cliffhanger de rigueur, car bien entendu, le public de Fight The Future ne devait pas se limiter aux fidèles de la série ! La déchirante scène finale n’y pallie pas intégralement, malgré un grand Duchovny.

    Ainsi se conclut cette cinquième saison comportant nombre d’excellentes surprises, mais surtout la première période de la série, car Fight The Future a déjà été tourné à Los Angeles. Les X-Files, même s’ils vont perdurer et parfois trouver de nouvelles inspirations en Californie, vont laisser une partie de leur âme entre les sublimes et impénétrables forêts canadiennes, les inaccessibles montagnes, et la si paisible et raisonnable cité de Vancouver au climat perpétuellement gris et pluvieux, où l’irruption du paranormal ne s’y manifestait qu’avec d’autant plus d’impact. Quand j’évoque la série, c’est toujours cette atmosphère que je retrouve, bien davantage que la suivante en tout cas. L’épisode salue élégamment cette cité en y débutant explicitement pour la première fois, et avec 12 000 fans locaux spécialement conviés à la scène initiale, et plus tard en tournant plusieurs vues du Vancouver Science World. Mais il en faudra bien plus pour calmer la légitime ire de ses habitants, qui forcera encore Duchovny à s’en expliquer quand I Want To Believe viendra y prendre ses quartiers !

    Après le générique, on apprécie également le post-it dédié à Samantha sur le poster légendaire, et les photos de Tooms et de Duane Barry sur le mur du bureau. Une manière raffinée de faire le bilan au moment où la page se tourne. Le spectaculaire incendie s’explique également par cette migration : le décor devant être détruit puis reconstruit à Los Angeles, Carter craignait que les fans les plus intégristes de la série ne s’indignassent des inévitables différences ; l’excuse est ainsi toute trouvée pour justifier les modifications !

    Anecdotes :

  • Pour la onzième fois, l’indicatif The truth is out there est remplacé par The End, titre de l’épisode et fin symbolique de la première période de la série.

  • Première apparition de Diana Fowley (Mimi Rogers) et Gibson Praise (Jeff Gulka). Le casting de Diana Fowley est une idée de David Duchovny qui avait déjà tourné avec elle dans le film The Rapture où ils jouaient un couple marié.

  • Les habitants de Vancouver étaient si enthousiastes de jouer dans la série (l’introduction) que l’équipe dut refuser du monde dans le stade faute de place ! D’après R.W.Goodwin, ce fut son expérience la plus inoubliable. La scène fut tournée pendant huit heures !

  • Les Bandits Solitaires sont toujours aussi paranos : ils n'ont pas moins de sept verrous sur leur porte d’entrée !

  • Il y a un problème de montage dans l’introduction : le grand maître russe prend la tour de Gibson avec son roi (Rh8xg8 en notation échiquéenne), mais le coup de Gibson qui est vu ensuite est le coup précédent (Tg4-g8+) ! Par ailleurs, quand l’adversaire de Gibson est touché par la balle, il s’écroule en faisant tomber l’échiquier qui est sur la table au plan suivant.

  • Le Inget Murray Hospital est nommé d’après deux membres de l’équipe technique : Shirley Inget et Graham Murray.

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    TOP 5 SAISON 5

    1) Les Bandits Solitaires
    2) Prométhée post-moderne
    3) Le shérif a les dents longues
    4) Folie à deux
    5) Compagnons de route

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    Crédits photo : FPE.

    Images capturées par Estuaire44.

     saison 1 saison 3

    X-Files (1993-2002)

    Saison 4


    1. TOUT NE DOIT PAS MOURIR
    (HERRENVOLK)


    Épisode Mythologique 

    Scénario : Chris Carter
    Réalisation : R.W.Goodwin

    Résumé : 

     

     

     

    Mulder et Jeremiah Smith parviennent à échapper au Bounty Hunter, laissant Scully derrière eux. Mais le chasseur se remet aussitôt à leurs trousses, bien décidé à supprimer sa proie. Pendant que Scully tente de déchiffrer les fichiers informatiques de Smith, ce dernier emmène Mulder dans un champ au Canada où se trouve une colonie d’hybrides. Parmi ses « habitants », Mulder reconnaît un clone de sa propre sœur. Surveillée de loin par L’Homme à la Cigarette, Teena Mulder n’arrive pas à se réveiller de son coma…

    Critique :

    La saison 4 débute sur un ton mineur, avec un épisode qui ralentit encore le rythme par rapport au précédent, déjà peu nerveux. La faute en revient principalement à la mise en scène passablement statique de Goodwin. Celui-ci se contente de passer les plats, et le résultat demeure rien moins que convaincant lorsqu’il tente d’accélérer le tempo. La course-poursuite du début se révèle ainsi plus brouillonne que réellement trépidante. La musique de Mark Snow demeure néanmoins sublime, comme toujours. Un certain manque de contenu dans son intrigue doit également être reproché à Carter, qui se limite à une très simple course-poursuite vite expédiée. Celle-ci parait uniquement destinée à introduire les quelques éléments clés de la Mythologie qu’il entend révéler, rien de plus. Et pourtant, Herrenvolk ne se limite pas seulement à un simple épisode fonctionnel, destiné à annoncer notamment la thématique du film à venir.

    On apprécie ainsi de voir Carter optimiser la grande présence de Roy Thinnes en reconstituant l’atmosphère unique des Envahisseurs : Amérique désertique, paranoïa ambiante, colonisation en marche, base secrète où se trame un sombre projet, abandonnée sans la moindre preuve après le passage du héros, etc. Malheureusement, ce bel hommage se voit sapé par la mise en scène sans cachet de Goodwin. L’épisode résulte totalement dépourvu de l’intensité dramatique époustouflante caractérisant Les Envahisseurs. Reste bien entendu le plaisir non démenti de contempler Thinnes et Duchovny évoluer ensemble, le duo fonctionnant à la perfection. On se situe quand même cent coudées au-dessus de l’infâme reprise des Envahisseurs avec ce pauvre Bakula.

    C’est finalement dans les seconds rôles que l’épisode trouve réellement un second souffle. Lors de la scène d’ouverture, ces clones blonds évoquent Le village des Damnés dans cet épisode décidément très années 60 ! Avant I Want To Believe où elle apparaît très brièvement dans une très amusante scène pour le coup vraiment aux frontières du réel, il est très plaisant de retrouver si longuement Vanessa Morley, d’autant qu’elle manifeste de vrais talents de comédienne. L’Agent Pendrell, qui a toujours cinq minutes (et des heures de travail) pour Scully, et qui arrange nerveusement sa cravate quand elle entre ou la défend mordicus devant les patrons, s’avère aussi amusant et attendrissant que de coutume. Scully elle-même demeure relativement en retrait, mais nous offre néanmoins un beau moment d’émotion quand elle soutient un Mulder désemparé. Le Fumeur montre un vrai attachement pour Teena Mulder (à l’évidence la vraie raison de son intervention), une tentative originale d’humaniser le personnage, mais potentiellement très dangereuse ! On en reparlera dans quelques épisodes.

    Steven Williams nous gratifie d’un ultime superbe numéro d’acteur lors de la fin brutale de son personnage, mais là on ne comprend plus. Mulder et X s’étaient définitivement séparés sur des menaces de mort et autres amabilités, et voici que ce dernier, d’ordinaire si prudent, n’hésite pas à se mettre en grand péril pour venir avertir notre héros d’un hypothétique danger planant sur sa mère ! Incohérence ? Sans égaler tout à fait la relation si enthousiasmante entre Deep Throat et Mulder, X laissera néanmoins un très grand souvenir aux amateurs de la série. Le passage de témoin apparaît fort élégamment tourné, puisque la scène suivante voit l’arrivée de la nouvelle source de Mulder : Casque d’Or a le blond vénitien et les yeux pers de Laurie Holden, mais dans un style très différent pour le moins de X. Marita prépare cependant de rudes moments à Mulder !

    Tout ceci ne vient pas compenser la frustrante atonie de l’épisode, et, hormis la visite bienvenue de Roy Thinnes, le diptyque Talitha Cumi/Herrenvolk ne demeurera décidemment pas parmi les meilleurs doubles épisodes de la série.

    Anecdotes :

    • Pour la cinquième fois, l’indicatif The Truth is out there est remplacé par Everything Dies (« Tout meurt »), il s’agit de la réponse du Bounty Hunter lorsque Mulder lui supplie d’épargner la vie de Smith.

    • Le titre original Herrenvolk fait référence à un terme nazi désignant la « race supérieure » désignée par Hitler, ici appliqué évidemment à la race hybride. Le titre français est en fait la réplique finale de Marita Covarrubias.

    • Cet épisode est marqué également par la mort de Mr.X (Steven Williams), assassiné par un tueur. X sera apparu dans 12 épisodes de la série. Il reviendra cependant le temps d’un flash-back dans Les Bandits Solitaires (saison 5), et comme apparition dans le finale de la série La Vérité est ici (saison 9).

    • Cet épisode marque également l’entrée en scène de Marita Covarrubias (interprétée par Laurie Holden), troisième informatrice de Mulder. Le sigle SRSG signifie Special Representative to the Secretary General. Une rumeur prétend que Covarrubias serait le nom d’une avocate qui travaille pour la chaîne FOX, premier diffuseur des X-Files.

    • Vanessa Morley (Samantha Mulder) se fit piquer dès le début de la scène du hangar d’abeilles. Très professionnellement, elle ne broncha pas et attendit la fin du tournage de la scène pour hurler de douleur ! Duchovny la félicita en lui disant « Eh, t’es un p’tit dur toi ! ». Admiratif de son courage, Goodwin lui offrit une copie de médaille militaire : une plaque avec un cœur violet !

    • Cette scène fut une des plus délicates à réaliser des X-Files : il y’a en effet un mélange compliqué d’abeilles réelles et de synthèse. D’après R.W.Goodwin, ce fut un des épisodes les plus pénibles à réaliser de la série.

    • R.W.Goodwin a réalisé les épisodes mettant en scène la mort de Gorge profonde, de Bill Mulder, de Melissa Scully, et Monsieur X. Depuis, il paraît que les acteurs sont toujours un peu nerveux quand il dirige un épisode de série télé !

    • Le tournage de l’épisode ne se déroula exceptionnellement pas à Vancouver. Les mystérieux champs de l’épisode sont en fait de simples champs de ginseng !

    • Si les clônes n’ont aucun langage, quelle est l’utilité de mettre l’inscription « bell » (cloche) près de la cloche d’appel des maisons ?

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    2. LA MEUTE
    (HOME)


    Scénario : Glen Morgan & James Wong
    Réalisation : Kim Manners

    Résumé :

    Le cadavre d’un bébé est retrouvé dans un champ, l’autopsie révèle qu’il a toutes les malformations génétiques possibles et imaginables ! Mulder et Scully soupçonnent les Peacock, une famille dégénérée de trois fermiers souffrants d’horribles malformations, d’être à l’origine du drame. Ces derniers ne sortent jamais de leur maison isolée de la ville, et n’obéissent qu’à leurs instincts sauvages les plus profonds. Inquiets de voir le FBI et le shérif de la ville s’intéresser à eux, ils commencent à devenir de plus en plus violents…

    Critique :

    La famille dégénérée s’en prenant aux visiteurs reste un classique du film d’horreur américain, de La Colline a des yeux à Massacre à la tronçonneuse, jusqu’au plus récent Détour mortel. Les X-Files devaient fatalement s’y intéresser, avec une jolie réussite à la clé.

    Les piliers du genre sont introduits avec beaucoup d’audace : la maison isolée, immonde et piégée, les physiques difformes (encore un superbe travail des artistes de la série), les scènes très gores… Pour son retour, le duo Morgan/Wong réalise réellement des étincelles et évoque très crûment l’inceste, chose rare dans une série télé. Mais la série n’oublie pas de mettre son grain de sel, notamment par une mise en scène de très haute volée, bien plus imaginative que ce que l’on voit le plus souvent sur grand écran, et pleine de bonnes idées (les hyènes de la télévision, la balade nocturne des monstres au son d’une musique sirupeuse, le petit paradis rural tout autour…). Surtout, elle n’hésite pas à introduire une solide dose d’humour, notamment via les vannes d’un Mulder se montrant ici en grande forme. On peut également y rajouter le passage des cochons, franchement désopilant en plein drame (excellent clin d’œil à Babe). Ce constant contraste entre humour et ténèbres demeure une grande réussite du récit.

    L’autre grand intérêt de l’épisode réside dans la fenêtre supplémentaire qu’il ouvre sur nos héros et leur relation. La prédilection de Mulder pour le baseball s’affiche au grand jour, ce qui énerve passablement Scully, mais il aura ultérieurement l’occasion de l’y convertir (on en reparlera). Scully ressent avec plus de force son envie de maternité, prologue encore que cela. D’ailleurs Mulder évoque une possible retraite à la campagne, dans une maisson très reculée… comme se sera le cas dans I Want To Believe ! Durant tout l’épisode, les deux agents ne se quittent quasiment pas, ce qui nous vaut un nombre élevé de scènes de dialogues, brillantes et parfois mordantes. Duchovny et Anderson connaissent désormais leurs personnages sur le bout des doigts et accomplissent un superbe numéro.

    L’épisode a été partiellement censuré, les vagissements de la scène d'introduction indiquant initialement que le bébé a été enterré vivant. Les autorités obtiendront un fond musical, mais le passage original est disponible en bonus. Chouette ambiance… classé comme un film pour adultes, Home ne fut d’ailleurs pas rediffusé avant longtemps par la Fox !

    L’excellent Tucker Smallwood apparaissait dans la série annulée de Morgan/Wong, Space : Above and beyond. Les deux feront ainsi participer aux X-Files de nombreux acteurs de cette série défunte ; ce sont finalement des sentimentaux qui s’ignorent…

    Anecdotes :

    • On en apprend davantage sur Mulder : il est passionné par le baseball (mais pas Scully) depuis qu’il est enfant. Avec Samantha, ils allaient à la plage en ville, se baladaient dans les vignes, et mangeaient des sardines bolognaise. Les portes de la maison n’étaient jamais verrouillées. Il n’y a aucune malformation génétique dans sa famille (ni chez celle de Scully), mais ils semblent tous être myopes.

    • De son côté, Scully a un neveu qui regarde Babe 15 fois par jour. Or, Melissa n’a jamais eu d’enfant, et Bill Scully semblera connaître les joies de la paternité qu’après cet épisode (Emily - partie 1, saison 5). On peut donc supposer qu’il s’agit du fils de Charles Scully, le second frère de Scully que l’on ne voit jamais.

    • C’est l’épisode préféré de Kim Manners. Ce dernier raconte qu’à la lecture du script, il dit « Voilà l’occasion de faire un classique ! ». Il dit en effet, que c’est un « script de film d’horreur comme il en verrait plus (pour la télé NDLR) ». Depuis, il y’a quand même eu la série Supernatural (où il fut un des artisans les plus investis). Selon lui, l’épisode a surtout choqué les américains non à cause de sa violence brute, mais à cause de la peur primale, enfantine, qu’il y’ait un monstre caché sous notre lit.

    • Un producteur déclara à Chris Carter en lisant le script : Vous êtes allé trop loin ! Et en effet, l’épisode fut censuré aux USA à cause de sa violence. Kim Manners est toutefois fier d’avoir réalisé l’épisode censuré de la série ! Il reçut par ailleurs une signalétique d’avertissement ce qui sera aussi le cas de Via Negativa (saison 8).

    • L’épisode eut un tel impact que quand le Congrès américain débattit de la mise en application de la puce antiviolence qu’on grefferait aux prisonniers avant leur libération, cet épisode fut cité comme argument pour son application !

    • Le shérif s’appelle Andy Taylor. C’est le nom du personnage principal d’une fameuse sitcom des années 60 The Andy Griffith Show joué par l’acteur éponyme du titre. Mulder fait d’ailleurs la référence.

    • Mulder a l’air désolé de voir un vieux journal sur la mort d’Elvis Presley. On sait depuis longtemps qu’il ne croit pas à sa mort…

    • Peacock est le nom de famille des voisins des parents de Glen Morgan. Ils ont dû être ravis…

    • La chanson entendue dans la Cadillac quand les Peacock vont massacrer le shérif et sa femme est Wonderful ! Wonderful! de et par Johnny Mathis.

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    3. TELIKO
    (TELIKO)


    Scénario : Howard Gordon
    Réalisation : James Charleston

    Résumé :

    Dans un avion en provenance du Burkina-Faso, une hôtesse découvre avec horreur le cadavre d’un afro-américain entièrement décoloré ! Deux mois plus tard, trois autres jeunes noirs sont portés disparus et un quatrième vient d’être retrouvé, la peau aussi totalement dépigmentée. La cause des morts demeure inconnue. Scully trouve une graine africaine sur le corps de la victime. Pendant ce temps, l’assassin mystérieux frappe encore…

    Critique :

    Après Chine, Caraïbes, et autre Europe Orientale, les X-Files décidément universels s’intéressent maintenant aux mythes de l’Afrique noire. Même si l’épisode développe une intrigue très classique (l’école Tooms), la réussite n’en paraît pas moins évidente grâce à une mise en scène crépusculaire à souhait, portée par une toujours sublime musique de Mark Snow, ici subtilement enrichie d’éléments africains (flûtes et percussions). La tonalité est très sombre, d’autant que la série n’hésite pas à évoquer la triste condition sociale des immigrés africains. Cette noirceur imbibe tout l’épisode, tandis que la personnalité morbide du Teliko et les superbes maquillages, effraient réellement. Le tout se voit couronné par une longue scène d’action aussi palpitante que claustrophobique où Scully se met particulièrement en valeur. La seule réelle pointe d’humour provient de l’Agent Pendrell tout décontenancé de ne pas avoir affaire à Scully, mais rassuré par un Mulder à demi narquois ! Le même Mulder semble bien moins méfiant envers Marita Covarrubias qu’envers M. X…

    Une nouvelle différenciation s’introduit dans le Duo, Mulder voyant des conspirations partout (même en dehors de la Conspiration), au grand effarement de Scully ! Le message du générique est d’ailleurs Deceive, inveigle, obfuscate, tout un programme ! Ce solide épisode n’atteint pas les sommets de son modèle, mais développe une ambiance réellement sinistre, très dense. Qu’on se le dise, on ne va pas beaucoup rigoler au cours de cette saison 4, sans doute la plus sombre de toute la série !

    On remarque la présence de Carl Lumbly, le futur Marcus Dixon d’Alias et déjà prénommé ainsi dans l’épisode !

    Anecdotes :

    • Pour la sixième fois, l’indicatif The Truth is out there est remplacé par Deceive, Inveigle, Obfuscate (Tromper, manipuler, noircir). C’est la phrase que Scully - reprise plus tard par Mulder - dit pour dénoncer la paranoïa de son collègue. C’est aussi la première fois que l’indicatif de la série est modifié pour un épisode loner, non mythologique.

    • Teliko est un mot africain désignant des esprits fantômes.

    • Le numéro de badge de Scully est JTT0331613. Elle lit le Herald Tribune.

    • Quand Mulder conduit la voiture pour se rendre avec Scully dans le bâtiment abandonné, le verrou de la portière est tantôt ouvert, tantôt fermé suivant les plans…

    • 925 : Aboah, d’après sa carte d’identité, est né le 9/25/64 (notation anglo-saxonne).

    • 517 : Scully arrive au travail à 5h17 du matin.

    • Il s’agit du 74e rapport de Scully. En effet, si on excepte le pilote (qui est l’épisode « 0 ») et Les vampires (saison 2), où elle n’apparaît pas, Teliko est le 74e épisode de la série où elle travaille aux Affaires Non Classées.

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    4. LES HURLEURS
    (UNRUHE)


    Scénario : Vince Gilligan
    Réalisation : Rob Bowman

    Résumé :

    Mary, fraudeuse en fuite avec son petit ami, s'arrête à un drugstore pour tirer une photo d’identité nécessaire à un passeport. Mais la photo d’elle qui sort de l’appareil la représente, hurlant, se faisant kidnapper par des visages d’horreur grimaçants ! Peu après, elle se fait enlever et son petit ami est assassiné : on lui a enfoncé un poinçon dans l’oreille jusqu’au cerveau ! Mulder explique la prédiction de la photo par la capacité qu’aurait le ravisseur de modifier à distance par la pensée des pellicules photographiques. Peu après, Mary est retrouvée : elle a subi une lobotomie qui a détruit ses facultés cérébrales…

    Critique :

    Mulder dans la Twilight Zone ! En effet, cette histoire de photographie montrant l’avenir, outre Stephen King, évoque irrésistiblement la Quatrième Dimension et plus particulièrement l’épisode Futurographe (A most unusual camera). Mais là où la Quatrième Dimension nous offrait un épisode à l’humour noir réjouissant, Les hurleurs s’avère un épisode des plus sombres.

    Le récit s’insère ainsi parfaitement dans la tonalité générale très noire de cette saison 4. Outre une mise en scène de haut vol et un scénario particulièrement astucieux et plein de suspense, Les hurleurs reste avant tout un grand épisode de comédiens. Cette pénétration aussi aboutie que glaçante d’un délire homicide doit ainsi beaucoup à l’étonnante prestation du toujours excellent Pruitt Taylor Vince (Deadwood, Murder One...). Face à lui, Scully se révèle une redoutable profiler pour sauver sa vie, ce qui donne lieu à une partie d'échecs verbale très éprouvante, avec une Gillian Anderson au diapason. Duchovny ne dépare pas l’ensemble en Mulder se surpassant comme toujours quand sa partenaire est en danger. Les étranges photographies constituent une nouvelle preuve de l’impressionnant savoir-faire de l’équipe technique des X-Files.

    Dans la lignée de l’épisode précédent, la série accentue le clivage entre Mulder et Scully, le premier s’acharnant jusqu’à ce que toute la Vérité soit découverte, tandis que la seconde, davantage sensible à l’atrocité, se contente de l’arrestation du coupable. Nous apprenons que Scully maîtrise l’Allemand, l’ayant appris durant ses études (les partenaires féminines des grands justiciers sont souvent très fortes en langues étrangères…). De plus, elle est visiblement très douée en contorsionnisme pour s’être libérée aussi vite de ses liens ! Enfin, on s’inquiétait car cela faisait quelque temps qu’elle n’avait plus arboré d’horreur vestimentaire : nous voici donc rassurés avec un ensemble tenant beaucoup du sac de pommes de terre.

    Initialement prévu pour suivre immédiatement Tout ne doit pas mourir, cet épisode fut finalement le quatrième de la saison, avec à la clef une scène supprimée montrant Mulder prendre au téléphone des nouvelles de sa mère (visible dans les suppléments).

    Anecdotes :

    • Si Scully parle allemand (étudié à la fac), cela ne semble pas le cas de Mulder.

    • Le rapport de Scully indique que l'épisode se déroule le 11 octobre (16 jours avant la première diffusion de l’épisode, le 27).

    • Le titre original signifie « troubles » en allemand. Mais désigne aussi Howard Unruh (1921-2009), premier tueur en série solitaire de l’histoire des USA : il assassina 13 personnes et en blessa 3 le 6 septembre 1949 à Camden, New Jersey. Arrêté, il fut interné jusqu'à sa mort dans un asile psychiatrique après avoir été reconnu pénalement irresponsable de ses actes. Vince Gilligan trouva étrange cette coïncidence entre le mot allemand et le patronyme du tueur qu’il en fit le titre de son scénario.

    • Pruitt Taylor Vince était accroché à des poulies fixées au plafond par une corde, pour être sûr qu’il resterait en équilibre sur les échâsses.

    • Mulder fait référence à Louis Daguerre (1787-1851). Il a contribué avec Nicéphore Niepce à l’invention de la photographie. Daguerre fut l’inventeur du premier procédé photographique commercialisé car permettant de conserver en permanence les épreuves tirées de son appareil : le daguerréotype. Outre les travaux de son collaborateur, il a utilisé les propriétés photochimiques de l’iode, puis la vapeur de mercure, pour fixer les images sur une surface donnée.

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    5. LE PRÉ OÙ JE SUIS MORT
    (THE FIELD WHERE I DIED)


    Scénario : Glen Morgan & James Wong
    Réalisation : Rob Bowman

    Résumé :

    Sydney, membre de la secte du Temple des Sept Etoiles, prévient par téléphone le FBI que Vernon Ephesian, le fondateur de la secte, cache des armes illégales et qu’il inflige des maltraitances. Mélissa, une des femmes de Vernon, est possédée par plusieurs personnalités, et elle « est » Sydney. Scully la croit schizophrène mais Mulder pense que Melissa a vécu des vies antérieures qui prennent sporadiquement le contrôle de son esprit. Cela réveille en lui des souvenirs de ses propres vies antérieures : lui-même est mort pendant la guerre de Sécession, dans ce même pré où se trouve le Temple. Mulder et Mélissa se soumettent à une séance d’hypnose pour faire resurgir leur passé…

    Critique :

    Ce magnifique épisode se caractérise d’abord par une très grande richesse d’écriture (Morgan et Wong sont bien de retour !), en trois temps. Le récit débute ainsi par une évocation aussi pénétrante que glaciale du phénomène sectaire. En 1996, le drame de Waco reste dans toutes les mémoires, et l’épisode en opère une remarquable reconstitution sans aucun tape à l’œil (David Koresh est d’ailleurs explicitement cité en VO, et se prénomme en réalité Vernon…). Puis, nous suivons la découverte de l’effarante vérité, parfaitement distillée par des indices successifs jusqu’à la révélation finale. La qualité de jeu de Duchovny, qui accomplit ici une de ses plus belles performances de la série, aide le spectateur à s’identifier à lui et à partager cette expérience particulièrement troublante. Enfin, l’épisode débouche sur une déchirante histoire d’amour se poursuivant d’incarnations en incarnations, même si les parallèles Samantha/CSM/Scully semblent quelque peu tirés à la ligne. On remarquera que « Scully » apparaît plus comme la bonne copine que comme l’âme sœur au fil des époques…

    Mais l'épisode acquiert toute sa dimension grâce à la merveilleuse mise en scène du grand Rob Bowman. Celui-ci, par de savants effets de caméra (magnifiques travellings), des effets de lumières recherchés et un décor naturel à l’intemporalité saisissante, confère un impact et une esthétique rare à cet épisode. Le tout se voit magnifié par la musique de Mark Snow, plus envoûtante que jamais. Cette poésie funèbre, cette prégnance de l’Apocalypse, la dimension spirituelle, le final morbide, cette profondeur psychologique des personnages l'emportant sur le développement de l’action font de cet épisode une véritable fenêtre ouverte sur MillenniuM, tandis qu’il demeure résolument en marge des X-Files, avec un Mulder comme on ne le reverra jamais. Ce n’est ainsi pas vraiment une surprise de voir l’excellente Kristen Cloke roder son futur personnage de Lara Means (encore une ancienne de Space 2063), tandis que Michael Massee (24h chrono, Carnivale…) apporte un vrai magnétisme à son sinistre personnage.

    La tonalité très sombre de cette histoire se communique à Mulder et Scully qui, dans l’approfondissement des épisodes précédents de cette saison 4, voient leur duo connaître un clivage particulièrement prononcé, bien au-delà des différences d’opinions habituelles. On voit ainsi Scully accuser Mulder de mensonge et de manipulation (un comble !) alors même que des vies sont en jeu. Ceci débouche sur une véritable querelle assez étonnante de violence, et fait s’interroger sur la possibilité d’une crise au sein du duo, même si la complicité finit par triompher une fois encore. Le pré où je suis mort restera comme un des sommets de la série, aussi décalé qu’a pu l’être L’heure perdue pour les Avengers. Il demeure d’ailleurs passablement controversé !

    On notera également une nouvelle référence au Flukeman (après celle du Pousseur), décidément cet épisode aussi aura marqué les esprits ! Le texte cité par Mulder à l’ouverture comme à la conclusion de l’épisode (une excellente idée de plus) est tiré de Paracelsus (1835), par Robert Browning.

    Anecdotes :

    • L’introduction (avec Mulder) ne dure qu’1 minute. C’est une des plus courtes de la série.

    • Parmi les vies antérieures de Mulder, il fut Sullivan Biddle, soldat sudiste de la Guerre de Sécession tué le 26 novembre 1863 dans un champ lors de la bataille d’Apison, dans le Tennessee, sous les yeux de Sarah Kavanaugh. Sarah était sa compagne infirmière, précédente incarnation de Mélissa Rydell. Il fut également une femme juive polonaise, dont le fils deviendra dans sa vie suivante Samantha Mulder, sa sœur. Son mari deviendra Mélissa dans cette vie-ci. « Elle » mourut dans un ghetto pendant la seconde guerre mondiale.

    • Morgan et Wong se sont vraisemblablement inspirés de la déchirante lettre à sa femme qu’écrivit une semaine avant sa mort un soldat de la guerre de Sécession nommé Sullivan Ballou. Il lui écrivait entre autres que leur amour « ne mourrait jamais ». La thèse des scénaristes respecte donc finalement la lettre de Ballou grâce à l’idée des différentes vies !

    • Parmi les vies antérieures de Scully, elle fut le sergent et ami de Mulder lors de la bataille fatale où elle trouva aussi la mort. Elle fut aussi le père de Mulder quand il était cette femme juive, mort également dans le ghetto.

    • Curieuse incohérence :  Le Fumeur fut dans cette dernière vie l’officier de la Gestapo qui envoya en camp Mélissa quand elle était le mari de Mulder. Mais dans l’épisode L’épave, 2e partie (saison 3), Le Fumeur a plus d’une vingtaine d’années en 1953, ce qui tendrait à penser qu’il est né au début des années 30... alors qu’il vivait déjà une autre vie, celle de l’officier ! Pour ne rien arranger, l’épisode L’Homme à la Cigarette tend à penser qu’il est né vers 1940 !

    • Une scène coupée de l’épisode montre que Melissa a vécu au moins deux autres vies antérieures que celles conservées au montage final (une fraîche jeune fille naïve et un grincheux acide). Cela tend à penser que Mulder a vécu au moins quatre vies antérieures si on suppose que leur histoire d’amour a été présente dans chaque vie. Écorchés (saison 9) nous apprendra que Monica Reyes eut aussi des vies antérieures.

    • Événement rarissime : Mulder appelle Scully par son prénom en VO ! Une "faiblesse" sans doute due à l’émotion qui le submerge lors de la séance d‘hypnose.

    • Il est surprenant que les membres de la secte meurent tous aussi rapidement après avoir ingurgité du cyanure de potassium, poison certes mortel mais à action lente. Sinon, on notera un faux raccord quand Mulder dit au revoir à Mélissa avant sa libération : tantôt il tient sa main, tantôt non.

    • Mulder fait référence au siège de Waco : du 28 février au 19 avril 1993, la secte de L’église adventiste du septième jour fut encerclée par l’ATF (Bureau of Alcohol, Tobacco, Firearms and Explosives) qui avait appris la présence d'armes illégales chez eux. Le tout se termina dans un terrible bain de sang. Ce traumatisant événement, un des plus catastrophiques de l’histoire des USA, fit couler beaucoup d’encre, notamment sur son issue fatale qui aurait pu peut-être être évitée. L’épisode en fait un décalqué fidèle : nom de la secte ressemblant, même boîte de Pandore, assaut par le FBI cette fois, même issue tragique.

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    6. SANGUINARIUM
    (SANGUINARIUM)


    Scénario : Valerie Mayhew et Vivian Mayhew
    Réalisation : Kim Manners

    Résumé :

    Un chirurgien esthétique devient fou et assassine un patient, pensant faire une « vidange ». Il ne se souvient ensuite plus de rien. Mulder repère un pentagramme sur les lieux et cela lui fait penser que la magie noire est en cause. Lorsque deux autres chirurgiens commettent eux aussi des « accidents » fatals, la clinique est à bout de nerfs. D’ailleurs, 10 ans auparavant, des faits similaires se sont produits, conduisant à la mort de 4 patients et au suicide d’un médecin. Mulder et Scully découvrent qu’une des infirmières s’adonne à la sorcellerie, mais un point les intrigue : elle fait de la magie « blanche », de la magie de « protection »…

    Critique :

    Quand les X-Files rencontrent Nip/Tuck ! Cette satire de la chirurgie esthétique, narquoise et teintée de l’humour le plus noir, fait en effet irrésistiblement penser aux troubles aventures de Sean et Christian, dont elle présente le même impact. Outre une dénonciation très pointue (au scalpel) de cette chirurgie et de l’importance qu’occupe le paraître dans nos sociétés, l’épisode joue avec virtuosité de l’idée qu’elle constitue un pendant moderne à la sorcellerie médiévale et à son penchant pour les métamorphoses corporelles. Bon, Gillian Anderson a beau jeu de dénoncer la futilité de telles opérations alors qu’elle n’en a à l’évidence nul besoin…

    Cet épisode très relevé se voit accorder un surcroît de saveur par un recours immodéré au gore le plus sanguinolent, avec à la clé quelques images les plus chocs de la série (Nip/Tuck, encore et toujours) ! L’intrigue ménage un joli coup de théâtre à mi-parcours, notamment grâce à la qualité du jeu de O-Lan Jones, très convaincante en sorcière plus vraie que nature. Si la galerie de portraits de médecins avides ayant abandonné toute éthique professionnelle vaut son pesant d’or, la vedette de l’épisode demeure incontestablement Richard Beymer. Cette grande figure de Twin Peaks donne à son personnage la malice et la présence d’un Ben Horne. Aussi subtil que cynique, ce sorcier force l’admiration ! Il arrivera que Mulder soit vaincu par des pouvoirs surhumains, mais bien peu le battront au jeu de la ruse comme l’accomplira le bon docteur, avec un coup de maître final absolument infernal ! Au sein de cette saison si funèbre, il paraît finalement logique que l’humour le plus marquant soit celui du Diable…

    Anecdotes :

    • Shannon Tweed (1957), actrice et mannequin de charme, est la comédienne préférée de Vince Gilligan, d’où une « Dr.Shannon » dans l’épisode, Gilligan ayant un peu travaillé à Sanguinarium. L’adresse « 1953 Gardner Street » fut baptisée en l’honneur de Gerald Gardner qui fonda en 1953 une religion néo-païenne fondée sur la sorcellerie. Il écrivit le manifeste de sa secte Le livre desombres, terme popularisé par la série Charmed. Encore une fois, les X-Files sont en avance sur leur temps ! Par ailleurs, l’infirmière-sorcière Rebecca partage son nom avec Rebecca Nurse, une des sorcières de Salem (affaire qui vit l’exécution de plusieurs personnes accusées de sorcellerie en 1692 aux Etats-Unis). Quant à Arthur Edward Waite, c’est un écrivain connu pour ses fictions utilisant le thème de la sorcellerie médiévale.

    • Une belle erreur de sous-titrage : le Dr.Lloyd a ingéré 1900 pilules en 5 ans et non 19100, ce qui l’aurait vraisemblablement tuée ! Par ailleurs, nos agents stationnent leur voiture devant le Dr.Franklin sous une pluie battante, sortent de la voiture, et entrent chez lui en étant totalement secs ! C’est à ça qu’on reconnaît les héros…

    • Ce n’est qu’une coïncidence, mais les fans de la série Scrubs (créée cinq ans plus tard) souriront en entendant la mention d’un « Dr.Cox » dans l’épisode (31’55).

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    7. L'HOMME À LA CIGARETTE
    (MUSINGS OF A CIGARETTE SMOKING MAN)


    Épisode Mythologique

    Scénario : Glen Morgan & James Wong
    Réalisation : James Wong

    Résumé :

    L’Homme à la Cigarette espionne le domicile des Bandits Solitaires : Frohike révèle en effet à Mulder et à Scully quelques fragments du passé de leur ennemi commun. Pendant qu’il attend que Frohike sort de la maison pour l’abattre d’une rafale de mitraillette, des souvenirs de sa vie tumultueuse lui reviennent en mémoire au fur et à mesure du récit de Frohike : son implication dans les plus grands évènements de l’Amérique, puis au niveau international, son rôle dans la Conspiration… mais aussi sa passion contrariée pour l’écriture…

    Critique :

    Cet épisode crucial pour la Mythologie nous révèle la biographie (partielle !) de celui qui demeure sans doute l'adversaire récurrent le plus fascinant de l'univers des séries télé : l'Homme à la Cigarette. Nous aurions pu nous trouver face à un récit platement explicatif ou au clinquant sonnant creux, mais le manque d'ambition ou de souffle créatif n'a jamais constitué la marque première du duo Morgan & Wong. Aussi, comme précisé dès la citation ouvrant l'épisode (Car il n'y a pas de jours sombres pour ceux qui triomphent) donnent-ils une dimension toute shakespearienne à ce personnage, que l'on découvre derrière successivement tous les principaux drames modernes de l'Amérique (Baie des Cochons, assassinats de JFK puis de Luther King). Ces passages sont magnifiquement filmés, chacun dans un style différent, et stupéfient littéralement le spectateur par leur intensité. Le récit multiplie également les références à l'univers de la série, et pousse l'audace jusqu'à boucler la boucle en revenant sur la toute première scène des X-Files, cette fois vue par les yeux du Fumeur ! Cet élan finit par déboucher sur une scène hallucinante, où le génie confine à la folie en posant le Fumeur comme véritablement le maître occulte du monde ! (une bouffée délirante de Frohike ?)

    Mais, plus que ces évènements, c'est bien sa sombre et énigmatique personnalité qui captive, son inclination pour la violence, mêlée à une grande intelligence et à une trouble fascination pour ses victimes (il faut le voir reprendre la prière de Bob Kennedy). Le gaillard fait littéralement froid dans le dos, et ce sociopathe pourrait constituer un serial killer des plus crédibles... C'est d'ailleurs finalement la scène des cravates qui effraie le plus, tandis que le récit présente l'habileté suprême de conserver sa part de mystère au Fumeur. La solitude du pouvoir et de celui qui l'incarne se voit magnifiquement exprimée, ainsi que la conscience d'une certaine damnation. Malheureusement, rien n'est parfait en ce vaste monde, et, outre qu'il souligne assez lourdement la filiation de Mulder, l'épisode se conclut par un pastiche assez consternant de Forrest Gump. Certes, la scène est brillantissime, mais cette faiblesse humaine me semble déparer le personnage et annoncer la fin particulièrement grotesque qu'il connaîtra. Ce n'est pas ainsi, en perdant, que je souhaite me le représenter tout simplement, et je crains que les auteurs n'aient été ici saisis du vertige de la virtuosité...

    Si William B. Davis confirme son immense talent de comédien, on apprécie également la superbe prestation de Chris Owens qui par un joli clin d'œil incarnera bientôt Spender. On se réjouit également de retrouver les Bandits Solitaires (outre Deep Throat !) dont nous étions privés depuis déjà quelque temps, quoiqu'assez logiquement dans cette saison très funèbre. D'ailleurs, toujours aussi iconoclastes (un épisode sans Mulder ni Scully...), Morgan & Wong avaient bel et bien prévu de faire abattre Frohike par l'Homme à la Cigarette, et il fallut une intervention directe de Chris Carter pour les en dissuader ! La scène aurait d'ailleurs été tournée. On en frémit ! Musings of a Cigarette Smoking Man (quel titre...) achève de planter l'imposante statue du Fumeur, et de faire de lui non un simple second rôle, mais bien l'une des composantes majeures de l'incroyable succès de la série. Un épisode définitivement incontournable pour le fan !

    Anecdotes :

    • Episode sans Mulder ni Scully. Premier sans Mulder, deuxième sans Scully, si l’on excepte leurs voix au téléphone et la réutilisation des images d’archives du pilote.

    • Biographie partielle du Fumeur :

      • Né le 20 août 1940 à Bâton-Rouge, Louisiane. Son père est un agent double travaillant pour l’URSS. Il fut arrêté et exécuté pour espionnage au début de la Guerre. Sa mère, fumeuse invétérée, mourut d’un cancer du poumon. Il fut alors placé dans des orphelinats du Middle West. Sans amis, il lit beaucoup seul.

      • Le 30 octobre 1962, il a le grade de capitaine dans un régiment de parachutistes où Bill Mulder est son collègue. Ses supérieurs, insatisfaits de la gestion de la crise de la Baie des cochons par John Fitzgerald Kennedy, lui demandent de superviser l’assassinat de cet homme devenu dangereux pour la sécurité de l’Amérique à leurs yeux. Il accepte et manipule Lee Harvey Oswald pour qu’il tue le président à Dallas le 22 novembre 1963. Il fuma sa première cigarette ce jour-là (ce qui entre toutefois en contradiction avec L’épave, 2e partie [saison 2] où on le voit déjà en train de fumer en 1953). Après cet évenement, il démissionne de l’armée et entre au FBI où il accède vite à de très hautes fonctions.

      • En 1968, il habite au 555 Brooksbank Avenue, Washington D.C. 20091. Il écrit un roman : Take a chance, a John Calquitt adventure sous le nom de plume de Raul Bloodworth. Il tue au même moment Martin Luther King le 4 avril à cause de ses prises de position anti-militaristes à propos du conflit au Viêtnam. Au 1er novembre, l’éditeur Albert Goodwinkle refuse son roman qu’il juge trop irréaliste.

      • En 1980, il donne l’ordre de piquer avec une aiguille anesthésiante le gardien russe de hockey sur glace lors des Jeux Olympiques d’hiver de Lake Placid, ce qui permet aux USA de gagner la demi-finale. C'est un évenement connu sous le nom de « Miracle sur glace », l'équipe d’URSS était en effet présumée invincible.

      • Il est arrivé au « sommet » rapidement, communique avec tous les hauts personnages de ce monde, et contrôle beaucoup d’évenements à l’échelle internationale, comme empêcher les Bills de remporter le Superbowl en 1991. Il habite à ce moment-là à Romming House, 418 Main Street, Washington.

      • Le 12 novembre 1996, il apprend que son livre Roman A Clef (une autobiographie à peine déguisée) qu’il a envoyé aux éditions Walden Roth va être publié en magazine. Fou de joie, il est sur le point de démissionner du FBI. Mais l’éditeur a entièrement réécrit la fin de l’histoire, la rendant caduque. Découragé, il décide de rester au FBI.

      • Le Fumeur n’a cependant jamais changé sur un point : il déteste le cinéma. Et on voit au début de l’épisode qu’il possède un briquet avec l’inscription « Trustno1 ».

    • On apprend que le premier mot que prononça Fox Mulder à sa naissance fut… JFK !

    • La thèse que Dana Scully soutint à l’Université du Maryland porte le titre Einstein twin’s paradox, a new interprétation. Elle eut son doctorat le 15 mai 1986. Sa thèse mentionne par ailleurs le MJ-12 (Majestic 12), nom d’un supposé groupe de scientifiques qui aurait enquêté discrètement pour le gouvernement sur l’incident de Roswell. A croire qu’elle était destinée à rencontrer Mulder ! La série reparlera de la thèse de Scully dans Aux frontières du jamais.

    • Le prénom de Gorge Profonde est Ronald si l’on en croit le sous-titrage anglais.

    • Dans le kiosque à journaux de la fin de l’épisode, on peut voir un magazine d’histoires dont l’une d’entre elles s’intitule « Where the hell is Darin Morgan » ? Hommage au frérot qui a en effet quitté la série. Il reviendra toutefois en tant qu’acteur cette saison dans La queue du diable.

    • Pas mal d’autoréférences à la série avortée de Morgan & Wong : Space 2063. Jack Colquitt, personnage d’un épisode de la série, devient le héros du roman du Fumeur. Son premier roman Take a chance a pour titre une phrase-gimmick de la série. Le terme « classified compartmentalized » se retrouve dans la série. Enfin, les Silicates de Space prennent leur décision en tirant à pile ou face, tout comme CSM et Gorge Profonde tirent au sort pour savoir qui tuera l’alien.

    • 1013 du jour : 1013 est le numéro de la résolution impliquant l’élimination immédiate des extra-terrestres.

    • Le Fumeur prend auprès de Oswald le pseudonyme de Mr.Hunt, un mystérieux homme présent à Dallas lors de l’assassinat de Kennedy et qui est suspecté par les théoriciens du complot d’en être un des instigateurs.

    • L’adresse de la lettre envoyée au Fumeur à Pasadena est fictive : La Cienaga Street n’existe pas dans cette ville.

    • Jackie Kennedy est jouée par Heike Brandstatter, associée du chef de casting.

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    8/9. TUNGUSKA
    (TUNGUSKA / TERMA)

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    Épisode Mythologique

    Scénario : Frank Spotnitz & Chris Carter
    Réalisation : Kim Manners (1re partie) et Rob Bowman (2e partie)

    Résumé :

    Pour se venger du Syndicat qui a tenté de le tuer, Alex Krycek aide Mulder et Scully à intercepter une valise diplomatique contenant une roche extra-terrestre destinée au Syndicat. Mais la roche contient de l’huile noire qui contamine et paralyse un scientifique quand il tente de l‘analyser ! Grâce à Marita Covarrubias, Mulder apprend que la roche est originaire de Tunguska, en Russie, où eut lieu en 1908 un événement inexpliqué. Il part là-bas, accompagné de Krycek. Mais ce faisant, il laisse le champ libre à Vassily Peskow, ancien agent secret russe, qui est chargé d'éliminer toute trace de l’affaire de l’huile noire aux USA. Le Syndicat comprend qu'il a lui-même été manipulé...

    Critique :

    Cela débutait pourtant bien, avec une première partie captivante marquée par le spectaculaire (mais guère explicité) retour sur scène d’Alex Krycek. Les différents coups de théâtre coutumiers de ces doubles épisodes se suivent avec plaisir, notamment la scène particulièrement terrifiante de l’Huile Noire jaillissant lors d’un contrôle douanier (Brrr…). Cette terrible substance reste bien l'une des grandes idées de la série ! Surtout, on assiste ici au terme logique de la crise que l’on a observée progressivement s’installer entre Mulder et Scully. Cet émoi, habilement semé, confère un véritable impact à l’impressionnante scène d’ouverture, d’autant qu’elle se voit précédée dans la chronologie par une discussion assez violente où Scully va jusqu’à interpeller Mulder sur l’avenir de leur association. Bon, le suspense reste relatif quant à une défection de Scully, mais l’effet demeure réussi. L’épisode se suit donc avec plaisir, d’autant qu’il nous offre une spectaculaire apparition de Marita, qui, en son peignoir d’un blanc satiné, s’avère définitivement différente de Deep Throat et de X ! Duchovny restitue à la perfection la haine féroce qu’inspire Krycek à son personnage, on se régale !

    Et puis, patatras ! L’épisode baisse brusquement de niveau quand Mulder passe en Russie. Outre que cette Russie peuplée de serfs et de cosaques semble bloquée à l’époque de Tolstoï (d’ailleurs le scénario n’y est guère épais), tout s’y avère d’un ridicule achevé. On note ainsi une recherche à tout crin de l’effet, tranchant avec la finesse d’écriture coutumière de la série. On ne croit pas une seconde à cette histoire d’un vaccin de très haute technologie concocté dans les hangars crasseux d’un goulag. Cette succession morbide de cachots et de mains coupées reste plus glauque que réellement effryante, même si le cliffhanger traditionnel demeure redoutable et que le running gag de Krycek dégustant un maximum devient franchement rigolo. Le comble grotesque se voit atteint avec un Mulder se dissimulant sous un tapis de feuilles comme un vrai warrior. Où sommes-nous, chez Rambo ? D’une manière générale, on sent que Carter dispose d’un vrai budget (la série atteint alors des sommets d’audience historiques) et qu’il se fait plaisir avec des évènements privilégiant le spectaculaire au détriment de la cohérence et du développement de l’intrigue. On en reparlera d’ailleurs dans Fight The Future ! À propos de film, le véhicule de Mulder déboule un ravin, cela va devenir une habitude… Le personnage de l’agent secret russe apparaissant tel Fantômas toujours au bon endroit au bon moment va encore plus loin dans la facilité et accroît l’incrédulité ressentie. On admet ce genre de péripéties chez le Bounty Hunter et ses pouvoirs, ici cela ne peut pas passer.

    Enfin, on note un contraste détestable entre d’une part la simplification excessive de l’intrigue principale (s’évader d’un goulag en prenant seulement le camion, être secouru par des samaritains providentiels pour réapparaître pile au bon moment à Washington...), et d’autre part une complexification de la Mythologie, avec notamment une embrouille tordue et décevante autour du Bien Manucuré qui accomplit clairement ici son apparition la plus faible de la série ! L’épisode se pare néanmoins d’une scène particulièrement émouvante : les lumineuses retrouvailles de Mulder et Scully. Le couple a victorieusement franchi l’orage et définitivement refermé une parenthèse troublée. C’est bien ensemble qu’ils affronteront la sombre épreuve à venir. Mais ce grand moment demeure bien tardif et ne saurait dissiper la mauvaise impression laissée par Terma. Donc, au total deux étoiles, mais trois pour la première partie et seulement une pour la seconde, franchement ratée !

    Anecdotes :

    •  Pour la septième fois, l’indicatif The Truth is out there est remplacé - à la fin du générique de Terma - par E pur si muove (Et pourtant, elle tourne). Il s’agit de la fameuse phrase qui aurait été prononcée par l’astronome Galilée (1564-1642) après que l’Inquisition le força à renier ses découvertes sur l’héliocentrisme (le soleil est au centre de l’univers, et non la Terre). Son sens dans cet épisode signifie sans doute que malgré les pressions du gouvernement à faire taire Mulder et Scully, ces derniers savent qu’ils ont raison.

    • Walter Skinner habite à Crystal City en Virginie, au 17e étage de son immeuble. L’appartement de Marita Covarrubias se trouve, lui, à Upper Side NY City.

    • Les parents d’Alex Krycek sont russes et immigrèrent en Amérique pendant la Guerre Froide. Cela explique qu’il parle russe. Le russe de Nicholas Lea (ainsi que celui des autres acteurs le parlant) est par ailleurs tout à fait correct - malgré un accent plus faillible. Ne connaissant pas la langue, il dut apprendre ses répliques en phonétique.

    • Comme dit dans l’épisode, Tunguska est le nom d’une ville sibérienne où un astéroïde mystérieux s’écrasa en 1908. Terma est la ville de Dakota du Nord où se situe la dernière scène de l’épisode, mais il veut dire aussi prison en russe, mort en latin, ou vérité cachée chez les bouddhistes tibétains !

    • Mulder évoque l’attentat d'Oklahoma City : le 19 avril 1995, Timothy McVeigh gara un camion bourré d’explosifs près d’un bâtiment fédéral. Ce fut un désastre humain (168 morts, 680 blessés) et économique car une grande partie de la ville fut détruite. Arrêté, le terroriste expliqua qu’il voulait se venger de la gestion du siège de Waco - dont Le pré où je suis mort s’inspire - ainsi que de la « tyrannie du gouvernement ». Il devait être exécuté six ans plus tard.

    • Peskov écoute chez lui le 3e mouvement Largo du Trio n° 2 pour violon, violoncelle, et piano, en mi mineur op.67 de Dmitri Shostakovitch (1906-1975). Les dirigeants de l’URSS imposèrent à ce compositeur de créer des œuvres nationalistes bien qu’il ne fût pas le compositeur officiel du régime. Quoi de plus normal donc qu’un soviétique nostalgique de la Guerre Froide écoutant du Shostakovitch !

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    10. CŒURS DE TISSU
    (PAPER HEARTS)


    Épisode Semi-Mythologique

    Scénario : Vince Gilligan
    Réalisation : Rob Bowman

    Résumé :

    Mulder fait le même cauchemar depuis trois nuits : il suit une étrange lumière rouge qui le mène dans un parc où se trouve le cadavre d’une petite fille. Mulder part sur les lieux de son cauchemar et y trouve en effet le squelette de la fillette ! Il s’agit d’une des victimes du serial killer John Lee Roche depuis longtemps sous les verrous grâce à Mulder. Lors d'une visite des deux agents dans sa prison, Roche prétend être l’assassin de Samantha Mulder ! Scully pense que Roche est capable de lire les pensées de Mulder et l’avertit qu’il pourrait le manipuler, mais Mulder, choqué, croit qu’il lui a dit la vérité et cherche à en avoir le cœur net. Commence un intense duel psychologique…

    Critique :

    Mulder dans les Griffes de la Nuit.

    Cette histoire, un magnifique scénario de Vince Gilligan, met en scène un superbe duel entre Mulder et l’effroyable John Lee Roche (excellent Tom Noonan, un habitué du genre), haletant de bout en bout, et porté par une magnifique mise en scène. Les visions oniriques apparaissent ainsi somptueuses, leur magie se distillant avec une élégante économie de moyens. De même, le mano a mano final développe un suspense à couper au couteau, digne des meilleurs moments de 24h chrono. La musique de Mark Snow est une fois de plus merveilleuse (le jeu des clochettes), il fut d’ailleurs nommé aux Emmy Awards pour le travail réalisé sur cet épisode.

    Le Freddy Krueger version X-Files (rien ne manque : rêves truqués, humour noir, tueur d’enfants…) s’avère un adversaire aussi retors que sinistre, jouant à merveille de l’éternel talon d’Achille de Mulder : son désespoir jamais éteint face à la disparition de Samantha, obscurcissant régulièrement ses brillantes capacités intellectuelles. Duchovny se montre une nouvelle fois exceptionnel en exprimant l’espoir frustré de son personnage et sa douleur lorsqu’il retrouve sa lucidité en ayant le courage de renoncer à ce… doux rêve. Sans avoir la tripe sanguinaire, on ne peut que se réjouir quand il se résout finalement à abattre Roche, tant celui-ci compte parmi les monstres les plus répugnants de toute la série. Scully montre sa véhémence coutumière dès lors qu’il s’agit d’enfants, comme elle l’illustrera de nouveau dans I Want To Believe.

    À propos de I Want To Believe et du funeste Xzibit, on remarque que l’épisode introduit un customiseur de voitures et qu’il s’agit d’un idiot, de plus interprété par un acteur sans talent particulier. Décidément, la concordance est parfaite ! C’est d’ailleurs avec une jouissance sans mélange que l’on voit Mulder démolir son joyau. Destroy my ride ! On note également l’apparition de l’édition originale d’Alice au pays des merveilles (l’épisode compte de nombreuses références à Lewis Carroll), avec les fameuses illustrations de John Tenniel également aperçues dans l’épisode des Avengers : Le Quadrille des Homards. Cœurs de tissu, dont Duchovny déclara qu’il constituait selon lui le meilleur des épisodes centrés sur Mulder, s’impose comme un épisode très relevé, bien dans la tonalité funèbre de cette saison 4. La Quête continue…

    Anecdotes :

    • On apprend que Samantha Mulder s’est cassé la clavicule lors d’une chute de balançoire quand elle avait 6 ans.

    • Vince Gilligan écrivit le rôle de John Lee Roche spécialement pour Tom Noonan. Au départ, Roche tuait les enfants en leur arrachant le cœur. Mais Gilligan finit par trouver son idée tellement répugnante qu’il l’abandonna… ou plutôt l’adoucit avec les fameux « cœurs de papier ». L'auteur déclara qu'il s'agissait du pire personnage qu'il ait jamais crée. Cette déclaration ayant été faite bien avant Breaking Bad, on ne sait pas si c'est toujours son opinion !

    • Coïncidence :  le personnage de Noonan dans le film Collision Course (1989) de Lewis Teague s’appellait Scully !

    • Nouvelle référence à Holly, la petite amie de Gilligan : la ville où Mulder retrouve la voiture de Roche s’appelle Hollyville.

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    11. CHUPACABRA
    (EL MUNDO GIRA)


    Scénario : John Shiban
    Réalisation : Tucker Gates

    Résumé :

    Dans un camp d’immigrés mexicains, une lumière blanche explose dans un champ et fait tomber une pluie jaune. Une chèvre et une jeune femme, Maria, sont retrouvées mortes, atrocement défigurées. Soledad, le fiancé de Maria, est convaincu que son frère Eladio l’a tuée car il n’aurait pas supporté qu’elle le rejette. Soledad se lance à la poursuite de son frère en cavale pour le tuer et venger Maria. Tout le camp pense qu’Eladio est en fait une incarnation du Chupacabra, un monstre légendaire aux pouvoirs terrifiants. Mulder, Scully, et un inspecteur du coin, tentent de le retrouver avant Soledad tandis qu’Eladio sème à son corps défendant la désolation autour de lui...

    Critique :

    La grande force de Chupacabra, outre l'ouverture sur les très originales et savoureuses légendes sud-américaines, consiste en une évocation sans fard de la situation des immigrés mexicains illégaux. Vivant dans des bidonvilles, exploités par des négriers et des passeurs marrons, leur sécurité ignorée par la police, subissant le mépris de la population, ces gens font peine à voir, et c'est encore une fois dans le sens d'un certain engagement à gauche, sinon humaniste, que la série les envisage.

    Mais on observe peu de choses ensuite, l'enquête de Mulder et Scully se bornant à suivre une piste pour le moins évidente, sans d'ailleurs parvenir à leurs fins... on les a connus en meilleure forme ! Scully nous assassine notamment avec une profusion de jargon médico-scientifique... Les auteurs tentent de redonner du brio à l'enquête par une scène finale bien écrite avec Skinner, mais assez inutile. L'épisode s'essaie également à la satire de la telenovela sud-américaine, reprenant plusieurs figures imposées de ce genre ultra codifié comme les deux frères aimant la même femme. Malheureusement, cela demeure trop timide et manque de mordant. De fait, Chupacabra ne se résout pas à choisir entre ces trois directions, d'où l'impression frustrante d'inachevé qui demeure, malgré une habile conclusion entrecroisée.

    On notera tout de même une galerie d'interprètes latinos très convaincants, ainsi que les créations somptueuses de délire horrifique des artistes de la série. Ceux-ci s'en donnent à cœur joie, et ils s'imposent finalement comme les véritables héros de cet épisode peu emballant par ailleurs.

    Anecdotes :

    • Le titre original de l’épisode est la traduction espagnole de As the World turns, le 2e plus long soap opera de l’histoire de la télévision : crée par Irna Phillips en 1956, il dura jusqu’en 2010, soit une durée de 54 ans (soit 13858 épisodes) ! L’épisode s’essaye en effet à la satire de son équivalent espagnol : la telenovela. El Chupacabra signifie « suceur de chèvres ».

    • Scully fredonne le fameux air Maria de la comédie musicale West Side Story de Leonard Bernstein. On notera que Caroline Beaune a une voix plus juste que Gillian Anderson. Scully aura l’occasion de pousser à nouveau la chansonnette dans Détour (saison 5) pour un résultat aussi désastreux qu’hilarant.

    • Mulder fait référence à Plácido Domingo, le fameux ténor d’opéra (et chef d’orchestre) espagnol.

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    12. RÉGÉNÉRATIONS
    (LEONARD BETTS)


    Scénario : Vince Gilligan, John Shiban, & Frank Spotnitz
    Réalisation : Kim Manners

    Résumé :

    Leonard Betts meurt décapité lors d'un accident de voiture. Le lendemain, son cadavre a disparu de la morgue et les caméras de surveillance révèlent qu’un homme à la tête invisible se promenait dans les couloirs ! Un autre examen révèle que la tête de Betts est animé d’une énergie puissante et qu’elle semble vivante. Mulder est persuadé que Betts est capable de régénérer son corps mutilé et qu’il est en train de recouvrer sa tête ! Les deux agents apprennent non seulement que tout le cerveau de Betts est infecté par un cancer qui aurait dû le tuer bien des années avant, mais qu’en plus il a déjà été déclaré mort il y’a six ans…

    Critique :

    Aux frontières du soutenable… Bien avant I Want To Believe, le titre français du jour était déjà régénération(s), mais cette fois amplement justifié ! On remarque que le méchant récupère d’ailleurs des morceaux du corps de ses victimes pour reconstituer le sien, tandis qu’une bonne partie de l’histoire se déroule en milieu hospitalier (mais ici sans le pathos coutumier du genre…).

    Sur une trame très classique (Eugène aura décidément marqué la série, à juste titre), l’épisode va très loin dans le gore, en se basant tout de même sur l’idée pour le coup originale du cancer vivant. Le ton funèbre et l’enfermement savamment distillé par l’habile réalisation élèvent cette histoire d’un mort perpétuellement en sursis au rang de superbe diamant noir de cette saison, qui en compte pourtant quelques autres de la plus belle eau. L’intrigue sait progressivement révéler l’effarante vérité avec une habileté consommée, tout en ménageant de constants et surprenants rebondissements. L’effroi que suscite naturellement le cancer se voit employé à la perfection dans ces décors glacés où l’on erre sans cesse d’hôpitaux en morgues en passant par les tables d’autopsie. Les excellentes idées de mises en scène se multiplient, comme cette image du corps sans tête suggérée dans le reflet renvoyé par les frigos de la morgue (la scène d’ouverture fait irrésistiblement penser à un Tru Calling soupoudré d’humour noir). On en frémit réellement, d’autant que les scènes gores présentent un impact certain grâce aux effets spéciaux toujours étonnants. Allergiques aux hôpitaux, passez votre chemin ! L’interprétation apparaît une fois de plus de très haut niveau. S’y détache bien évidemment Paul McCrane, grand spécialiste des rôles durs, dont cette avant-première du Dr Romano d’Urgences constitue bien entendu un magnifique clin d’œil. On ne peut s’empêcher de songer que passer d’infirmier à mandarin constitue certes une belle progression, mais par contre des X-Files à Urgences

    L’autre vif attrait de l’épisode consiste dans sa manière de se centrer sur Scully. On la sent au début toute contente de se retrouver sur son terrain de prédilection, l’hôpital, et ainsi de pouvoir en remontrer pour une fois à Mulder… Avec une malice très féminine, elle le convie d’ailleurs à se joindre à elle dans la fouille des immondes déchets hospitaliers ! Le pauvret est au supplice… Qui aime bien châtie bien, son partenaire n’hésite pas à lui rendre la monnaie de sa vanne à propos de sa frayeur lors de l’autopsie ! Ces scènes se révèlent particulièrement drôles (gores aussi, ce qui ne gâche rien). Cela faisait quelques temps que nous étions privés des autopsies si particulières de Scully, et l’amusement reste comme toujours au rendez-vous ! Par la suite, elle paraît effarée, et même scandalisée, de voir ce temple de la science profané par l’irruption du paranormal, ce qui nous vaut des discussions assez jouissives avec Mulder, elle multipliant comme jamais les termes scientifiques comme pour se rassurer, tandis que lui aligne comme à plaisir les théories les plus folles (et les excellentes vannes). La traditionnelle agression par l’adversaire du jour a bien lieu, mais alors que précédemment Mulder arrivait en sauveur, cette fois Scully parvient à s’en sortir toute seule. Décidément, le personnage a bien progressé et pris une assurance et une autonomie bienvenues par rapport aux commencements de la série. Enfin, vient la terrible révélation finale. Des scènes amusantes jusqu'à ce tragique instant, l’épisode constitue un fort habile entonnoir nous emmenant avec un rare impact jusqu'à l’épreuve à venir.

    Tout du long, Gillian Anderson se montre éblouissante de talent et de profondeur de jeu. C’est un ravissement de la voir donner ainsi vie avec passion à son personnage. Ses deux dernières scènes, où on découvre Scully deviner l’insoutenable vérité en refusant d’inquiéter son partenaire jusqu’à l’effroi nocturne, comptent parmi les plus grands numéros de comédienne vus dans l’ensemble des séries contemporaines. Quelle actrice ! On se permettra d’observer également que décidément la grande beauté de Scully atteint son zénith durant cette saison 4, période où Gillian fut élue plus belle femme au monde par un grand magazine américain.

    Ce grand classique des X-Files demeure aussi l’épisode de la série ayant réalisé la plus grande audience (pratiquement 30 millions de spectateurs). Pour rester honnête, il convient de préciser qu’il suivait immédiatement le Superbowl… c’est aussi l’occasion pour le Dr Chuck Burks de réapparaître après Les Calusari. Ce personnage très amusant (il a un esprit très Bandits Solitaires !) va devenir un personnage récurrent (6 apparitions), sans parvenir toutefois à devenir aussi attachant que l’Agent Pendrell.

    Anecdotes :

    • L’implicite révélation finale du cancer de Scully (une idée de Vince Gilligan) déchaîna les fans sur Internet, tout le monde s’interrogeant sur ce qui allait se passer !

    • Un des monstres préférés de Frank Spotnitz. John Shiban raconte que lui et les co-auteurs du scénario sont allés chacun dans la surenchère pour trouver le sommet gore de l’épisode (la nouvelle tête de Betts sortant par sa bouche). Le producteur Paul Rabwin raconte que ce fut un des effets spéciaux les plus éprouvants à réaliser dans la série ! Pour plaisanter, Kim Manners s’est servi de ce procédé pour faire une farce et mettre sa propre tête à la place de celle de Paul McCrane (Leonard Betts) ! Cette scène est disponible dans le DVD.

    • Il y’a un John Gilnitz dans l’épisode : c'est une des victimes de Betts.

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    13. JAMAIS PLUS
    (NEVER AGAIN)


    Scénario : Glen Morgan & James Wong
    Réalisation : Rob Bowman

    Résumé :

    Mulder prend une semaine de congés et délègue à Scully une affaire extra-terrestre. Mais Scully est en pleine dépression et n'enquête que machinalement. Edward Jerse est un jeune homme brisé par son divorce qui un soir se fait tatouer Betty, une belle femme, avec l’inscription « Never again » sur le bras. Mais à sa grande horreur, le tatouage lui parle dans sa tête et le pousse à accomplir des actes de plus en plus horribles. Scully finit par le rencontrer au cours de son enquête, et, attirée par Edward, dîne avec lui, provoquant la jalousie de Betty…

    Critique :

    Comme l'indique d'ailleurs clairement le titre, le duo Morgan/Wong fait ici ses adieux à la série pour voguer vers de nouvelles aventures. Bien entendu, ces auteurs aussi imaginatifs qu'audacieux fonctionnant volontiers en marge du reste de l'équipe de production ne pouvaient pas prendre congé avec un épisode banal. Le scénario instaure ainsi une véritable crise existentielle chez Scully, alors que Mulder se voit contraint administrativement de prendre une semaine de congé. Ceci nous rappelle d'ailleurs que Mulder et Scully sont bien des fonctionnaires, José Chung avait raison ! Si ces vacances s'avèrent très amusantes (avec notamment un pèlerinage spirituel à Graceland !), elles demeurent en marge, tandis que le récit se centre quasi exclusivement sur Scully.

    Celle-ci semble en proie à une véritable dépression, doutant de tout jusqu'à sa relation avec Mulder et de l'intérêt même des Affaires non classées ! Ce n’est pas en relation avec son cancer, l'épisode n'y fait pas explicitement mention d’autant que l’ordre des épisodes 12/13/14 a été bouleversé. On peut y discerner surtout la tendance coutumière de Morgan/Wong à pianoter sur la relation Mulder/Scully. Cette présentation d'une Scully "lost in translation" dans une ville de province lors d'une enquête ennuyeuse, d'une grande finesse d'écriture et portée par une Gillian Anderson particulièrement inspirée, se suit avec le plus vif intérêt, mais également quelque incrédulité... On ne peut s'empêcher d'y voir une certaine tentation de la transgression et de la virtuosité pour elle-même, plutôt qu'une réelle inflexion du personnage. L'épisode se termine d'ailleurs amèrement sur l'image d'un duo véritablement au bout du rouleau, une idée que la suite de la saison démentira au plus haut point !

    L'aspect fantastique demeure ici accessoire sans que cela constitue un réel problème, le cœur de l'épisode étant bien le spleen de Scully. On remarque d’ailleurs que, bien avant I Want To Believe, Scully résout l’affaire en un instant sur le Net… Néanmoins cette histoire de tatouage reste habilement agencée, comme toujours avec ces auteurs. Cet épisode, un temps destiné à être diffusé après le Superbowl, devait être dirigé par Quentin Tarantino, finalement empêché pour des raisons juridiques. La réalisation de Rob Bowman apparaît toutefois si efficace que l'on ne parvient pas à le regretter !

    Le serpent Ouroboros du tatouage de Scully évoque irrésistiblement celui de MillenniuM, où les auteurs feront également merveille ! La voix du tatouage est assurée par Jodie Foster/Clarice en VO. De même que Chris Carter était intervenu pour éviter l'assassinat de Frohike dans Musings of a Cigarette Smoking Man, le Boss a du agir également ici pour empêcher que la scène intime de Scully et Ed Jerse ne soit trop explicite... L'audace diabolique du duo ne connaît pas de limites ! Certains s'interrogent de fait sur l'existence d'un tel évènement ; à la vision de l'épisode, c'est pourtant une évidence ! Enfin, pour les amateurs de potins, Gillian Anderson, qui vient alors de divorcer, aurait connu une brève romance avec le séduisant Rodney Rowland...

    Never again reste le brillantissime testament de Morgan/Wong, même s'il n'entraîne pas une adhésion aussi totale que leurs précédents opus. Après celui de Darin Morgan (les coups de fil des Coprophages sont bien plus amusants qu’ici !) , leur départ définitif - du moins jusqu'à la saison 10, 18 ans plus tard - constitue une perte des plus lourdes pour les X-Files !

    Anecdotes :

    • Scully fuguait la nuit et fumait les clopes de sa mère quand elle avait 13 ans. Ça tue le mythe ! La dernière fois qu'elle eut un rencard, elle a vu le film Glengarry de James Foley, film qui date de 1992. Or, le film n’est sorti que le 29 septembre de cette année, alors qu’elle était entrée au FBI depuis six mois. N'ayant pas eu d'autre rendez-vous depuis, on peut supposer qu’il s’agit de son prétendant du Diable du New Jersey (saison 1).

    • Mulder n’a pas pris de vacances en 4 ans. Quel employé modèle !

    • Scully et Jerse passent la soirée dans le Hard Eight Lounge. Hard Eight Pictures, Inc. est en fait le nom de la société de production de Morgan et Wong.

    • L’assassinat de la voisine d’Edward est filmé selon le célèbre travelling arrière de Sir Alfred Hitchcock de Frenzy, quand Bob Rusk est sur le point de tuer Babs. La chanson entendue lors de la scène est Doesn't somebody want to be wanted, chanson composée par le groupe fictif de musique The Partridge Family dans la sitcom du même nom. Jodie Foster (la voix de Betty) a d’ailleurs joué un de ses premiers rôles dans un épisode de la série.

    • Au début de l’épisode, Scully tourne en dérision l’histoire de Mulder en la comparant avec un épisode de la série animée pour enfants des années 60 The Bullwinkle Show.

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    14. JOURNAL DE MORT
    (MEMENTO MORI)


    Épisode Mythologique

    Scénario : Chris Carter, Vince Gilligan, John Shiban, & Frank Spotnitz
    Réalisation : Rob Bowman

    Résumé :

    The Truth will save you, Scully. I think it'll save both of us.

    Scully apprend qu’elle est atteinte d’une tumeur cervicale inopérable et sans doute incurable. La cause de son cancer vient de son enlèvement. Mulder refuse de rester inactif et mène son enquête pour trouver un moyen de sauver quand même sa coéquipière. Il apprend que le nom de Scully figure dans une clinique « spéciale » qui fait des traitements contre la stérilité alors qu’elle n’y a jamais mis les pieds. Il s’y introduit avec l’aide des Bandits Solitaires…

    Critique :

    Cet épisode, véritable croisée des chemins de cette saison, comporte deux segments bien distincts. Le premier constitue une enquête hyper classique, et finalement très schématique, au sein d’une Mythologie continuant à se complexifier mais demeurant parfaitement cohérente. Cet aspect demeure trop précipité pour totalement entraîner l’adhésion. Ainsi, on comprend très rapidement que le gaillard est un Hybride, bien avant l’apparition du poinçon fatidique. Le nom sur la boule de neige ou la séance de tir alors que la porte ne s’ouvre pas représentent autant de poncifs passablement éculés, alors que l’on attend tout autre chose des X-Files (en l’obtenant souvent). Pourquoi le tueur de l'Homme à la Cigarette démarre-t-il sa voiture pour simplement se positionner devant la porte de la maison ? Demeurent tout de même des scènes faustiennes en diable et somptueusement filmées entre l'Homme à la Cigarette et Skinner, et l’intervention aussi pittoresque qu’à l’accoutumée des Bandits Solitaires. Que Mulder fasse appel à eux pour une intervention reste l’indice absolu d’une situation définitivement désespérée… Surtout cette enquête ne sert finalement que de véhicule au véritable sujet de l’épisode, un moment clé et particulièrement déchirant dans la relation unissant Mulder et Scully.

    L’épisode débute ainsi par une scène magnifique où Scully envoie comme une lettre d’adieu à Mulder, le passage restant absolument bouleversant même quand on le connaît par cœur. Ces passages du « Journal de Mort » de Scully scandent le récit de moments particulièrement vibrants, tandis que Gillian Anderson nous régale d’une éblouissante démonstration de son grand talent d’actrice. Elle remportera l’Emmy Award 1997 pour cet épisode, ce qui n’est vraiment que justice. Duchovny n’est pas en reste et manifeste parfaitement l’énergie désespérée qui anime Mulder dans sa quête pour sauver Scully. Il ira jusqu’à tenter une négociation avec l'Homme à la Cigarette… on se demande vraiment si ceux qui reprochent à l’acteur la fadeur de son jeu ont vraiment vu la série ! Les deux collègues (le terme apparaît définitivement inapproprié après cet épisode) se soutiennent l’un l’autre avec beaucoup de dignité et de courage, chacune de leurs scènes arracherait vraiment des larmes à une pierre, sans toutefois jamais tomber dans le pathos… Les dialogues entre Scully, Margaret et l’ultime survivante du groupe paraissent également très réussis. Un épisode central de la série, cultissime pour les passionnés de la relation Mulder/Scully, mais qui ne laissera personne indifférent !

    À noter deux scènes coupées exceptionnelles (maudits écrans publicitaires). La première met en scène Scully recevant la visite de son frère Bill ; le moins que l’on puisse dire est que leur relation apparaît déjà particulièrement tendue, le passage paraît étonnement dur ! Le personnage fera finalement son apparition dans Gethsemane. Comme dans One Breath, le père de Scully lui rend aussi visite, ce qui nous vaut le plaisir de revoir Don S. Davis. Mais surtout, alors que la version finale de l’épisode met en scène un chaste baiser sur le front, nous découvrons, effarés, qu’il est bel et bien suivi par la première vraie embrassade entre nos deux héros. Sans doute dû ici au trop-plein d’émotions, ce moment clé sera finalement remis à plus tard…

    Enfin Memento Mori est aussi le titre d’un épisode de Chicago Hope (également de Stargate), I Want To Believe s’annonce déjà…

    Anecdotes :

    • L’idée du baiser entre Mulder et Scully est une improvisation des acteurs. Toute l'équipe en resta muette de surprise ! Chris Carter coupa la scène car il voulait encore retarder ce moment fatidique. Dans l’autre scène coupée (la visite de Bill Scully), on apprend que Bill est dans la marine et a été muté à la NAS Miramar, tout comme son père.

    • Épisode préféré de Frank Spotnitz.

    • Le superbe monologue d’introduction fut écrit par Chris Carter. Il s’agit de « l’introduction la plus émouvante jamais écrite par lui pour la série » (Spotnitz).

    • Scully a été enlevée fin octobre 1994. La date de son « examen » étant le 29 octobre.

    • Gillian Anderson fut emballée à l’idée que son personnage soit atteint d’un cancer, car lui permettant de jouer quelque chose de nouveau. Chris Carter avait prévu que Mulder se comportât de manière héroïque mais Duchovny l’en dissuada : il voulait au contraire accentuer la vulnérabilité de son personnage pour gagner en émotion.

    • Le tuyau où les Bandits Solitaires guident Mulder est en carton, avec des lumières fixées à la base. A cause de l’étroitesse du lieu, ce fut Dean Haglund (Langly) qui dut actionner le clap !


    15. LA PRIÈRE DES MORTS
    (KADDISH)


    Scénario : Howard Gordon
    Réalisation : Kim Manners

    Résumé :

    Un groupe de trois jeunes antisémites assassine Isaac Luria, un épicier juif. Le lendemain de son enterrement, un des trois tueurs est retrouvé étranglé, avec curieusement des traces de doigts appartenant à Luria ! Le cadavre d’un des deux autres tueurs est retrouvé plus tard près de la tombe de Luria. Scully soupçonne Jacob, le malheureux père, de s’être fait justice lui-même ; mais Mulder pense que Luria est revenu d’entre les morts sous la forme d’un golem vengeur, un monstre légendaire de la culture juive…

    Critique :

    L’épisode paraît ne pas manquer d’atouts. L’histoire se montre particulièrement émouvante (la scène de la bague nuptiale…) grâce à une mise en scène habile, alternant scènes violentes et touchantes avec une grande justesse. L’omniprésence de la pénombre situe bien l’intrigue aux limites crépusculaires de la mort et de la vie. Les fenêtres ouvertes sur la culture juive se révèlent passionnantes. L’extrême droite nazillonne se voit montrée telle qu’elle est (des abrutis sanguinaires passablement minables, avec une jolie vision inversée des Bandits Solitaires et de leurs publications), et l’antisémitisme se voit éloquemment condamné. La musique de Snow appuie comme toujours somptueusement le déroulement de l’intrigue. Les acteurs font merveille, surtout Justine Miceli (NYPD Blue), particulièrement convaincante sur un registre difficile et risqué. Alors ? Alors cette belle romance d’amour et de désespoir semble vraiment se suffire à elle-même, d’autant que l’aspect X-Files s’avère artificiellement et maladroitement greffé sur ce magnifique thème principal.

    L’enquête se scande ainsi par plusieurs facilités : le livre qui prend feu pour la simple épate (on se croirait dans un numéro de Maleeni le Prodigieux, à moins que Xander Harris ait encore eu la facétieuse idée de parler en latin), une explication scientifique de Scully ridicule, mais qui nous vaut un hochement de tête sarcastique de Mulder assez plaisant, il est vrai, certains raccourcis temporels trop criants comme l’ambulance arrivée en trois secondes ; le Golem impressionne nettement moins que d’autres Monster of the week, et il ne se passe aucune scène marquante entre Mulder et Scully… Et puis on se demande à quoi sert l’intervention du fin duo qui n’empêche aucun meurtre, le Golem étant finalement détruit par sa créatrice. Non, décidément, cela semble paradoxal, mais cette histoire très « Anne Rice » aurait gagné à être dépouillée du rituel X-Files pour prendre toute sa dimension et son autonomie. La série accroît tout de même ici l’universalité de ses sujets de manière éclatante ! On apprécie également de voir l’affaire pour une fois exposée par Scully. Je conseille également la lecture de Pieds d'Argile (Terry Pratchett, Les Annales du Disque Monde), une autre variation subtile et amusante sur le Mythe du Golem, avec d’intéressants clins d’œil aux Robots d’Isaac Asimov.

    Et avouons qu’après la superbe mais ténébreuse succession d'épisodes très noirs de cette saison 4, on commence à aspirer à un peu de divertissement, sinon de gaîté… Nul doute d’ailleurs que le prochain épisode ne se montre plus joyeux et rieur ! Ah bon ?!

    Anecdotes :

    • L’épisode est dédié à Lilian Katz, il s’agit de la grand-mère d’Howard Gordon, le scénariste de l’épisode.

    • Le Kaddish est une prière sous forme d’une grande invocation où l’homme magnifie la grandeur de Dieu. Il est récité à la synagogue lors de funérailles juives, avec des variantes suivant les régions et les branches de la religion. Un des textes du Kaddish sera utilisé pour la 3e symphonie "Kaddish" de Léonard Bernstein.

    • Isaac Luria (1534-1572)  est en fait le nom d’un fameux rabbin, considéré comme le plus grand penseur du mysticisme juif.

    • Jacob Weiss aurait appartenu à l’organisation terroriste Irgun et aurait été arreté à ce titre par les anglais en 1959... sauf que l’Irgun a été dissous en 1948 !

    • Quand les deux assassins entendent la discussion entre Brunjes, Mulder, et Scully, l’un d’entre eux relève la phrase de Scully sur la rumeur qu’Isaac serait encore en vie… mais il l’attribue à Mulder !

    • Le détective John Bartley est nommé d’après le directeur de la photographie des trois premières saisons des X-Files. Il apparaît d’ailleurs dans l’introduction d’Anagramme (saison 3).

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    16. L'HOMME INVISIBLE
    (UNREQUITED)


    Épisode Semi-Mythologique

    Scénario : Howard Gordon & Chris Carter, d’après une histoire d’Howard Gordon
    Réalisation : Michael Lange

    Résumé :

    Un général américain est retrouvé mort dans sa voiture hermétiquement fermée de l’intérieur ! L'assassin est Nathanael Teager, membre de « La main Droite », une association d’anciens soldats du Viêt-Nam préparant un coup d’Etat, et déclaré mort au Viêt-Nam en 1973. Il possède le don de se rendre invisible à volonté et le démontre en tuant dans une chambre close un second général. Skinner mobilise tous ses hommes dont Mulder et Scully pour sauver le 3e général visé par Teager. Mais comment neutraliser un ennemi qui peut disparaître en un clin d’œil ? Quel est son mobile ? Agit-il pour le compte de quelqu’un ?…

    Critique :

    La grande faiblesse de l’épisode réside dans sa trop grande similitude avec Insomnies : même thématique (regard critique sur le traumatisme du Vietnam), et déroulement de l’intrigue sensiblement équivalent. Il en découle une certaine prévisibilité ne pouvant que desservir le récit. De plus, la comparaison tourne plutôt à l’avantage du premier, les manifestations du pouvoir onirique d’Augustus Cole apparaissant plus troublantes que les pourtant spectaculaires tours de passe-passe de Teager. Le grand Tony Todd accomplit une performance plus notable que l’efficace Peter Lacroix, un habitué des séries de Science-Fiction.

    Mais l’épisode n’en reste pas moins fort plaisant à regarder grâce à une mise en scène efficace, avec notamment de forts jolis angles de caméra et des travellings impressionnants. Les effets spéciaux, certes réduits, demeurent comme toujours très efficaces. En particulier, on apprécie vivement que cette habile variation autour de cette figure centrale du Fantastique qu’est l’Homme Invisible ne se traduise pas par la succession coutumière d’effets plus ou moins fabriqués du type objets se déplaçant tout seuls, etc… (Suivez mon regard sur une certaine ambassade soviétique). Les apparitions et disparitions de Teager s’avèrent toutes des modèles d’efficacité et de sobriété. L’histoire s’agence habilement, avec un duel Mulder/Teager fort plaisant à suivre. Une interrogation cependant : si Teager est visible à travers une caméra, pourquoi le FBI n’en dispose-t-il aucune autour du Général, au lieu de se livrer à cette partie de cache-cache des plus risquées ?

    L’interprétation se montre brillante (belle apparition de Scott Hylands), comme souvent tout au long de la série. L’épisode se pare d’à-cotés très positifs, comme une jolie visite de Washington, un détour bien amené par la Mythologie, une apparition comme toujours particulièrement bienvenue de Marita Covarrubias (ah, Marita…) sous l’égide de Lincoln, ou un rappel du passé militaire si troublant de ce personnage ô combien complexe et passionnant que se révèle toujours Walter Skinner.

    Anecdotes :

    • L'histoire anticipe curieusement sur Homeland, que le scénariste Howard Gordon co-créa 14 ans plus tard : un vétéran de l’armée américaine cherche à assassiner des personnages haut placés de son pays, l'on y voit une agent fédéral (Scully) courir au milieu d'un débat politique pour stopper un ex-soldat d'ouvrir le feu sur des politiciens et des militaires (comme Carrie à la poursuite de Brody dans le finale de la saison 1), et l'on voit une veuve découvrant que son mari militaire présumé mort a survécu, mais qui a depuis refait sa vie avec un autre homme (comme Jessica Brody et Mike Faber).

    • Erreurs :

      • Lors du défilé militaire, le joueur de caisse claire situé juste derrière le chef ne marche pas en rythme.

      • Faux raccord quand Mulder parle à Skinner par oreillettes : Skinner a tantôt sa main derrière l’oreille, tantôt non.

      • La porte du repaire de « La Main Droite » est fermée quand Mulder et Scully arrivent mais est ouverte quand les chiens apparaissent. 

    • Plusieurs membres de l’équipe ont leurs noms écrits sur le mémorial des victimes.

    • 1148 du jour : Il est 11h48 quand Mulder et Scully se rendent au mémorial pour interroger Mme Davenport.

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    17/18. TEMPUS FUGIT
    (TEMPUS FUGIT / MAX)

    xfiles 4 17

    Épisode Mythologique

    Scénario : Chris Carter & Frank Spotnitz
    Réalisation : Rob Bowman (1re partie) et Kim Manners (2e partie)

    Résumé :

    Le vol 549 se crashe au sol après une chute de 9000 mètres. Parmi les victimes se trouve Max Fenig (cf. L'Ange déchu, saison 1), qui a été plusieurs fois kidnappé par des extra-terrestres ! Mulder et Scully apprennent que les victimes du crash ont reçu des radiations inexplicables, que toutes les montres des victimes ont 9 minutes de retard par rapport à l'heure du crash comme ce qui arrive à chaque enlèvement extra-terrestre ! L’avion a-t-il été intercepté par un OVNI ? Max détenait-il un objet compromettant ? La situation se complique quand l’armée tente d’éliminer un militaire qui veut aider nos agents, que la sœur de Max est à son tour kidnappée, et qu'un allié de nos héros est victime d'un attentat. En recoupant des documents appartenants à Max et sa découverte au fond d'un lac, Mulder met au jour une vérité vertigineuse...

    Critique :

    Les avions, volant dans des espaces normalement inaccessibles à l’homme et finalement très mystérieux, comme quittant temporairement notre univers, ont de tout temps fasciné auteurs et amateurs de Fantastique (Stephen King, Les Langoliers). Ce thème passionnant a bien entendu été exploité avec bonheur dans les séries télé, en particulier The Twilight Zone (titre même de l’anthologie, avion échoué dans un étrange désert, revenant vide, perdu dans l’espace-temps, monstre sur l’aile…), mais aussi plus récemment dans Torchwood. C’est donc fort naturellement que les X-Files en viennent à leur tour à aborder ces rivages, et avec quelle maestria !

    La première partie se déroule comme un thriller captivant de bout en bout, où l’on suit avec un très vif plaisir la succession des révélations chocs mais aussi les échanges très ludiques d’hypothèses sur le crash entre Mulder, Scully, et Millar (excellent Joe Spano, Hill Street Blues). La déclinaison du récit en énigmes à résoudre est une vraie réussite. La tension ne diminue jamais, et, sans atteindre tout à fait les cimes d’Anasazi, on est content de se retrouver devant un épisode mythologique de la plus belle eau et au budget visiblement conséquent. On se réjouit également de revoir, hélas pour une tragique conclusion, l'amusant Max Fenig de Fallen Angel. Ce personnage se montre une nouvelle fois particulièrement attachant !

    L’intrigue offre également une nouvelle occasion de différencier les caractères de Mulder et Scully : alors que celle-ci se montre très sensible au drame et aux meurtres postérieurs, Mulder paraît lui quasi indifférent. Passé en mode « traque », seule l’ardente volonté de découvrir la vérité semble l’animer, et la mise en scène parfaitement efficace sait à merveille nous faire ressentir cette flamme l’habitant. Duchovny nous régale d’un récital particulièrement magistral. Outre le cliffhanger coutumier, percutant mais non plus exceptionnel cette fois-ci, Mulder s’étant déjà fait capturer par des militaires, le récit se conclut avec éclat par une scène faisant écho à la pétillante introduction de l’anniversaire de Scully (tous les sept ans, comme les chiens). C’est en effet dans ce même bar que le si sympathique Agent Pendrell trouve un trépas fort cruel, marqué par une ironie tragique au moment où il allait enfin partager une table avec son étoile. On ne se demande pas vraiment pourquoi il se retrouvait à boire tout seul au bar… Je ne connaissais même pas son prénom restera l’épitaphe lapidaire, mais oh combien significative de Pendrell, dont la fin constitue le nadir de cette succession de noirceurs de la saison 4. So long, Pendrell !

    La seconde partie apparaît un peu moins consistante. Même si elle répond avec clarté et précision aux interrogations de la première, elle se résume principalement à la mise en œuvre des deux scènes d’abordage d’avions. Mais celles-ci s’avèrent réellement stupéfiantes d’intensité et de maîtrise technique. En utilisant simplement décors, sons et savants éclairages, loin des images informatiques contemporaines, les incroyables artistes de la série réussissent un double prodige, aussi merveilleux que spectaculaire. On ne peut qu’applaudir la performance ! Le face-à-face entre Mulder et le très habile tueur taciturne du jour se révèle également très prenant. Le bilan de l’épisode ressort très amer, toutes ces morts n’empêchant pas Mulder de se retrouver finalement les mains vides, et cette fois pas du fait de ses adversaires ! La petite touche finale d’humour entre Mulder et Scully apparaît ainsi particulièrement bienvenue ; quand tout le reste n’est plus que cendres, il demeure toujours au moins leur complicité… À propos du duo on note que quand Mulder se dévêt sans trop de gêne devant sa partenaire, celle-ci se retourne, passablement embarrassée. Décidément ces deux-là ne sont pas encore intimes ! Les moments de honte de Scully quand Mulder explique ses théories à un tiers sont toujours aussi délectables…

    Tempus Fugit s’impose comme un double épisode mythologique de très haut niveau, démontrant qu’en sa quatrième saison la série n’a rien perdu de sa fougue. Seul petit regret, l’absence de l'Homme à la Cigarette : il manque toujours quelque chose aux récits mythologiques quand ils se voient privés de la lumière sombre de William B. Davis…

    À noter également, dans la série des « vus ailleurs » : une chambre de motel, avec télé devant le lit, où se déroule un mystérieux Événement, dont l’Occupante disparaît sans laisser de traces, où la porte s’ouvre de manière très curieuse tandis que tout le monde court après d’étranges Artefacts… Bon dieu, mais c’est bien sûr, nous sommes dans The Lost Room !

    Bon, je suis fier de moi, j’ai terminé cette critique sans vanne foireuse sur Il est libre, Max, il y en a même qui l’ont vu voler. Ah, zut.

    Anecdotes :

    • Cet épisode marque la mort de l’agent Pendrell (Brendan Beiser) qui sera apparu dans 9 épisodes de la série.

    • L’idée de l’épisode est de David Gauthier, responsable des effets spéciaux.

    • VF : Joyeux anniversaire Dana ! VO : Happy birthday Scully !

    • A la fin de l’épisode, la montre de Skinner marque 10h56. Chris Carter est né en octobre 1956.

    • Un épisode de Rocky & Bullwinkle (voir Plus Jamais) a un personnage qui est un habitant de la Lune nommé Paul Gidney, nom que prend Max Fenig comme pseudonyme.

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    19. AUX FRONTIÈRES DU JAMAIS
    (SYNCHRONY)


    Scénario : Howard Gordon & David Greenwalt
    Réalisation : James Charleston

    Résumé :

    23h40, Jason et Lucas, deux étudiants en cryobiologie, se disputent quand un vieil homme arrive et supplie Lucas de s’arrêter : un bus va l’écraser à 23h46 s’il ne change pas son chemin. Mais Lucas l’ignore et continue… et se fait écraser par un bus à l’heure dite ! Le vieil homme entretemps a été embarqué par la police mais il s’est échappé et le policier est mort totalement congelé ! Tout accuse Jason sur qui croulent les preuves. De plus, les empreintes retrouvées sur le policier correspondent… à celles de Jason ! Mulder et Scully découvrent dans leur enquête le second cadavre aussi congelé d’un… cryobiologiste...

    Critique :

    Cet épisode clairement mineur détonne singulièrement au sein d’une saison 4 incroyablement relevée. Le voyage temporel ressort comme un des thèmes les plus riches et passionnants de la Science-Fiction, et la version donnée ici en demeure terriblement basique. On ne discerne aucune originalité ni prise en compte de subtils paradoxes dans ce récit. Dans un sujet proche, Barjavel faisait déjà beaucoup mieux en 1943 avec Le voyageur imprudent. Cette faiblesse demeure d’autant plus rageante que la série nous offrira des épisodes de tout autre stature dans ce domaine : Monday (verrou temporel) ou Redrum (déstructuration temporelle). On en est loin.

    Cela débute très mal par une introduction dévoilant une trivialité devinée dès les premiers instants, avec un ton grandiloquent parfaitement dérisoire. Une fois les jalons posés, l’histoire se suit sans surprises dans un déroulement très mécanique et multipliant les facilités (pourquoi le voyageur se pique-t-il ? Comment au juste voyage-t-il ? Pourquoi ne pas tuer ses victimes avec des moyens classiques mais plus définitifs ? etc.). L’attention du spectateur peine à se maintenir tant la mise en scène, certes efficace, n’apporte pas la fantaisie dont l’épisode aurait besoin. L’interprétation se maintient à un honnête niveau, mais sans les grands numéros d’acteurs admirés dans d’autres épisodes. Restent de nouveaux exploits des artistes de la série et un Mulder très en forme, pétillant d’esprit (la scène de présentation de l’affaire est très réussie), titillant de manière très réjouissante Scully sur sa fameuse thèse. Duchovny et Anderson insufflent beaucoup d’humour à leurs jeux et sortent indemnes de ce qui restera comme le fiasco de cette saison.

    À noter qu’un titre français particulièrement ridicule vient couronner l’ensemble, alors que les comédiens de doublage français de Mulder et Scully accomplissent un bel ouvrage comme toujours. Hiro Kanagawa, un habitué des séries fantastiques, refera une apparition dans Au cœur du Complot et MillenniuM.

    Anecdotes :

    • David Greenwalt écrira un épisode d'Angel (La machine à arrêter le temps) décrivant pareillement une manipulation temporelle devant déboucher sur une catastrophe.

    • La thèse de Scully (voir L’Homme à la Cigarette) portait sur le voyage temporel.

    • Lisa Ianelli monte dans le bus 4221... et descend du bus 4170 !

    • La scène d’ouverture évoque (en miroir) le film Retour vers le futur.


    20.LA QUEUE DU DIABLE
    (SMALL POTATOES)


    Scénario : Vince Gilligan
    Réalisation : Cliff Bole

    Résumé :

    - I don't imagine you need to be told this, Mulder, but you're not a loser.
    - Yeah, but I'm not Eddie van Blundht either, am I ?
    - (Silence)

    Au moment d’accoucher, une femme dit que le père de son enfant vient d’une autre planète ! Pire, le bébé qu’elle met au monde est pourvu d’une queue ! C’est la cinquième fois en trois mois que cela se produit. Mulder et Scully découvrent que les quatre autres bébés pourvus d’une queue sont le fruit du même géniteur. Mulder arrête vite le coupable, il s’agit d’un concierge : Eddie van Blundht. Scully croit qu’il a drogué et violé ces femmes, mais Mulder pense qu’il est capable de changer d’apparence à volonté. C’est en effet ce qui se produit, et la situation se complique quand Eddie s’évade et prend l’apparence de Mulder !…

    Critique :

    Ah, le charme de ces récits décalés, à côté des loners classiques et autre Mythologie… Ne serait-ce que pour représenter l’unique épisode comique de cette aussi noire que somptueuse saison 4, Small Potatoes mériterait déjà toute notre sympathie, tant cette bouffée d’oxygène nous fait du bien ! Mais ce ne serait pas faire justice à ce très gouleyant épisode si on se limitait à ce constat. En effet, c’est bien par ses qualités propres que cette histoire emporte l’adhésion tant elle apparaît comme un véritable festival de gags et d’effets comiques particulièrement réussis, de plus de natures très différentes. Humour de situation, de réparties, de l’absurde, satirique envers les héros de la série, voire noir lors de la très gratinée autopsie du jour... le cocktail drolatique de l’épisode s’avère vraiment irrésistible. Lee de Broux et Christine Cavanaugh accomplissent également de savoureuses apparitions.

    On rit souvent de bon cœur, comme lorsque Mulder prend la bombe Skywalker en pleine figure, avec une Scully prenant un malin plaisir à bien enfoncer le clou, ou quand Mulder démolit l’appendice de la dépouille, le pastiche de Taxi Driver, Mulder et Scully se regardant avec embarras quand on les prend pour des parents, etc... Les exemples abondent, tandis que Mulder en prend pour son grade durant tout le récit. La mise en scène et la musique jouent efficacement sur le registre humoristique, et les acteurs se montrent au diapason. Si Gillian Anderson se montre excellente, la palme revient à Duchovny qui accomplit ici une prouesse proprement époustouflante, manifestant avec un rare abattage les dons pour la comédie qu’il confirmera plus tard en tant que « Hanky ».

    Mais une grande comédie ne saurait se contenter d’empiler les gags, même excellents, et Small Potatoes atteint une nouvelle dimension grâce au passionnant et finalement très subtil personnage de Eddie. Interprété avec une grande conviction par nul autre que Darin Morgan (à qui Vince Gilligan rend ici comme un hommage), ce prétendu loser se révèle progressivement un fin psychologue non dénué d’humanité. Agréablement ambivalent, on ne sait trop finalement que penser de son action certes moralement très condamnable, mais qui non révélée apporte en fait un peu de bonheur et de romantisme chez des femmes à l’existence sinon bien morose. L’épisode se double ainsi d’une satire de l’American way of life bien propret, qui pour en être feutrée n’en demeure pas moins redoutable.

    Une démonstration particulièrement éclatante en est réalisée avec Scully. Cette dernière, qui passe ses week-ends à bosser (mais qui, tout comme Skinner, ne se rend absolument pas compte de la substitution alors que les indices pleuvent… reviens, Mulder !), tombe instantanément sous le charme d’un Eddie accomplissant en une soirée ce que Mulder a été incapable de mener à bien en quatre ans. Il se montre également bien plus empathique qu’un Fletcher dont il n’a ni le cynisme rigolard ni la veulerie crapuleuse, sans doute parce qu’il recherche vraiment l’amour. Certes, grâce à la survenue du vrai Mulder (tiens, on avait oublié l’humour de boulevard !), la morale est sauve, mais qui pourrait nier que l’on n’avait pas vu Scully aussi heureuse depuis bien longtemps ? Eddie conclut son magistral passage dans les X-Files par une explication de texte pétillante à souhait avec Mulder, où il lui assène une Vérité pas piquée des vers. Mulder est bien trop intelligent pour répliquer par la négative… Le seul petit regret de cet enthousiasmant épisode reste de voir enfermé dans un hôpital pénitentiaire celui en qui l’on a pu découvrir l'un des plus touchants et sympathiques fameux Monstres de la semaine !

    À noter que la saison 4 restera celle des occasions manquées pour notre duo : après le baiser coupé de Memento Mori, voici que ce moment crucial est de nouveau remis à plus tard. Enfin on se dit que le stupéfiant Yappi a vraiment marqué les esprits car il effectue une nouvelle apparition au détour d’un tabloïd !

    Anecdotes :

    • On apprend que Mulder a quand même un semblant de vie privée puisqu’il a une maîtresse du nom de Chantal aux Communications Téléphoniques (relation qui le fait bénéficier de certaines réductions). Toutefois, il se fait appeler Marty auprès d’elle (comme il l’avait fait dans Les Vampires [saison 2]). Sa carte d’identité indique qu’il mesure 6 pieds (1m83). C’est en effet à 1 cm près la taille de David Duchovny. L’adresse de Mulder est 42-2630 Hegal Place, Alexandria, Viriginia, 23242.

    • Les Bandits Solitaires sont plus que jamais obsédés par l’assassinat de JFK, et on apprend qu’ils adorent le steak fromage.

    • Scully travaille chaque vendredi soir sur une monographie. Elle envoie ses travaux à une revue de pénologie. Ici, le sujet est le rapport entre l’acetylcholine (ou sérotonine) et le comportement délinquant. Eddie semble on ne peut plus intéressé… Sinon, elle a eu un petit ami à 18 ans du nom de Marcus mais il ne semble pas lui avoir laissé d’impérissables souvenirs…

    • David Duchovny a improvisé certaines de ses répliques et gestes quand il joue Eddie jouant Mulder.

    • Le titre original Small potatoes est une expression signifiant quelque chose (ou quelqu’un) qui n’a aucune importance, qui ne compte pas vraiment. Il se rapporte ici au peu de considération qu’a Eddie pour lui-même.

    • Le gag du h silencieux dans « Blundht  » serait une private joke à David Duchovny : beaucoup de personnes prononcent le H dans « Duchovny » (qui se prononce en fait Dukovni). Et d’ailleurs, le père de David s’appelait Amram Ducovny (sans h).

    • Le premier épisode comique écrit par Vince Gilligan était initialement un projet de film (comme pour Autosuggestion [saison 3]). Au départ, les bébés devaient naître avec des ailes, mais Gilligan opta finalement pour des queues car plus faciles à créer par ordinateur ! La référence à Star Wars est également un hommage : c’est un des films préférés de l’auteur.

    • Alors qu’il avait écrit la moitié de l’épisode, Gilligan se rendit compte que dans son esprit, seul Darin Morgan pouvait incarner Eddie. Darin rapporte le dialogue entre lui et Vince :

      • Qu’est-ce que je joue cette fois ? Un beau mec qui cherche l’âme sœur ?

      • Non, tu joues un mec gros et moche qui féconde les femmes en les violant car tu es né avec une queue…

      • (Silence)

      • [Soupir]… Ok, Vince, merci, envoie-moi le script ! 

    • Quand Mulder et Scully vont voir le père d’Eddie, on peut se demander pourquoi Scully sort un parapluie de la voiture alors qu’il ne pleut pas.

    • Pour appuyer sa thèse sur le pouvoir de morphing d’Eddie, Mulder le compare à McGruff the Crime Dog. Il s’agit d’un chien anthropomorphe de cartoon, et se comportant comme un humain. Il est utilisé en Amérique depuis 1980 pour soutenir des messages de prévention de toutes sortes destinés aux enfants (drogues, violence, alcool...).

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    21. NID D'ABEILLES
    (ZERO SUM)

    Épisode Mythologique

    Scénario : Howard Gordon & Frank Spotnitz
    Réalisation : Kim Manners

    Résumé :

    Une employée de poste s’éclipse pour aller fumer aux toilettes. Une monstrueuse colonie d’abeilles s’infiltre alors dans la salle et s’abat mortellement sur elle ! Skinner, soumis aux ordres du Fumeur s’il veut obtenir un vaccin contre le cancer de Scully (actuellement à l’hôpital), se voit obligé d’effacer toute trace de l’événement. Mais Mulder commence à avoir des soupçons et se demande qui efface les traces. Skinner, piégé, ne peut rien dire. Alors qu’une deuxième victime meurt de la même horrible manière, Skinner commence à s’interroger sur les causes de ces morts. Quelles sont donc les motivations du Consortium ? Peut-il échapper à la main de fer du Fumeur ?

    Critique :

    Cet épisode présente une structure très originale car il se révèle quasi totalement centré sur Skinner, tandis que Mulder demeure à la marge et que Scully reste totalement absente (retour à la case cancer après l’accalmie de Small Potatoes). On est ravi pour ce formidable personnage qui méritait bien un tel honneur, d’autant que l’épisode se révèle passionnant.

    Cela débute, tel un excellent Columbo, par un long passage somptueusement filmé où l’on suit Skinner dans son rôle de nettoyeur au service du Fumeur. Une fois Mulder entré en action, on passe à un schéma hitchcockien où Skinner découvre l’ampleur du complot dans lequel il se trouve compromis, et désormais se débat. Le récit, nerveux à souhait et au suspense constant, se voit scandé par une série de confrontations tendues qui sont autant de scènes choc : avec Mulder, l'Homme à la Cigarette (aux nerfs décidément d’acier) mais aussi la toujours charmante Marita dont la félonie se trouve ici révélée (quelle surprise !). Les conversations de Marita avec Skinner et l'Homme à la Cigarette apportent une nouveauté bienvenue. Autant de morceaux de bravoure qui font le prix de cet épisode très percutant, porté par la musique de Snow. On notera que Skinner restera sans aucun doute comme le supérieur hiérarchique le plus braqué par ses subordonnés de l’univers des séries télé !

    Mitch Pileggi (à la musculature toujours aussi impressionnante) montre une grande subtilité de jeu, à la hauteur de la richesse de son personnage. Ce thriller à haute tension, ponctué de scènes horrifiques particulièrement marquantes, se conclut abruptement, nous laissant littéralement le souffle coupé et terriblement désireux de découvrir la suite ! Cet épisode mythologique de haute volée (on ne regrette même pas l’absence de Scully !) est dédié à Vito Pileggi, père de Mitch. Après Herrenwolk, on continue à progresser vers Fight The Future

    Anecdotes :

    • Troisième épisode sans Scully. L’épisode est centré sur Skinner. Il est dédié à Vito J. Pileggi, le père de Mitch.

    • 20e et dernier scénario d'Howard Gordon. Il quitte la série à la fin de cette saison après quatre ans de bons et loyaux services pour aller travailler dans Buffy contre les vampires puis Angel (il y retrouvera David Greenwalt avec qui il a cosigné Aux frontières du jamais), soumettre des pilotes rejetés, avant d'accéder à la consécration en devenant showrunner de la série 24 heures chrono et co-créateur de la série Homeland.

    • Skinner habite dans l'appartement 1708 de son immeuble. Son arme de service est un Sig Sauer P228. L’adresse complète de Marita Covarrubias est 1001 1st avenue NY, NY. Son numéro de téléphone est (212) 555 0101.
    • Le titre original Zero Sum (en français : Jeu de somme nulle) est un terme de probabilités désignant un jeu où on ne peut gagner qu’aux dépens de ses adversaires ; pas de juste milieu : on gagne tout ou on perd tout. Tel est l’enjeu du pari que doit relever Skinner : ou il échoue et il est totalement fichu, ou il gagne, et obtient ce qu’il désire.

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    22. AMOUR FOU
    (ELEGY)


    Scénario : John Shiban
    Réalisation : James Charleston

    Résumé :

    Pintero, un tenancier de bowling, aperçoit, coincé dans le mécanisme d’un poseur de quilles, le cadavre d’une jeune femme à la gorge tranchée. Sortant dehors, il constate avec stupéfaction qu’un cadavre vient d’être retrouvé dans le parking… et qu’il s’agit de la même jeune femme ! Mulder pense que Pintero a vu un spectre, une âme qui venait de quitter son corps. Les deux agents soupçonnent Harold Spuller, un aliéné mental qui ne cesse de réciter des chiffres, et qui fait une crise quand Mulder lui demande s’il a vu des fantômes. Alors que d’autres meurtres identiques ont lieu, Scully est de plus en plus mal : elle a aussi été témoin d’une apparition prémonitoire et commence à s’effondrer moralement et psychiquement…

    Critique :

    Malgré des débuts assez amusants, Scully paraissant visiblement aussi captivée par le bowling que par le baseball et nous offrant un de ses regards-de-la-honte bien croquignolets, cet épisode se révèle, encore une fois, particulièrement sombre. C’est le cas concernant une intrigue du jour se développant entre mort et folie, avec à la clef des apparitions spectrales particulièrement saisissantes ! La mise en scène impressionne par sa dimension crépusculaire, et bénéficie de l’époustouflant numéro de Steven Porter, étonnant de conviction. Les rebondissements parfaitement maîtrisés de l’intrigue offrent également un récit policier de haute qualité, au vrai suspense. Mais cette brillante réussite ne constitue finalement que le socle sur lequel se bâtit l’argument principal du récit : la dérive psychologique subie par Scully.

    Alors que ces apparitions se relient d’une manière particulièrement sinistre à son cancer, Scully, jusque-là relativement épargnée, se trouve brutalement confrontée à un surnaturel des plus morbides. Ceci, se cumulant au stress induit par sa maladie, nous fait assister au poignant spectacle d’une Scully craquant littéralement sous nos yeux : déni de réalité et incommunicabilité avec son partenaire, scène très émouvante chez la psychologue (déjà vue dans Le Fétichiste) où Scully révèle à quel point elle s’appuie sur Mulder, effusion finale de larmes… on touche au plus près la réalité de cette terrible maladie, tout en demeurant très pudique et en évitant le mélodrame. Gillian Anderson se montre absolument bouleversante, faisant réellement corps avec les tourments traversés par son personnage. Elle s’affirme définitivement comme une très grande actrice de l’émotion. C’est la suprême habileté de l’épisode que de reposer, bien au-delà de son aspect paranormal, sur une description très profonde et pertinente des vicissitudes de l’âme humaine confrontée à sa propre mortalité.

    Au total, l’épisode s’achève sur une Scully plus proche de l’effondrement que jamais. Il est vraiment temps que le cauchemar s’achève, pour elle mais aussi pour nous, tant le spectateur sort laminé par un épisode aussi superbement abouti qu’éprouvant ! John Shiban signe ici une de ses meilleures histoires, et semble déjà anticiper sur sa participation à Supernatural, très friande du thème des spectres.

    Pour les amateurs de littérature, une élégie est une poésie lyrique plaintive, évoquant la mort ou la souffrance amoureuse due à l’absence. Encore une fois, le titre original apparaît bien supérieur à sa traduction…

    Anecdotes :

    • Aka. Tulpa. Aka. Revenant. Tulpa est un terme utilisé dans le mysticisme tibétain pour désigner une apparition fantômatique produite par l’esprit.

    • Si Scully n’aime pas trop le bowling, Mulder semble être plutôt doué (réussissant un strike).

    • Sydney Lassick (Chuck Forsch) joue ici le rôle d’un malade mental, rôle qu’il avait déjà joué dans Vol au-dessus d’un nid de coucou (1975) de Milos Forman dont le film par ailleurs s‘inspire (maison de fous, infirmière sadique…). On notera d’ailleurs qu’après Brad Dourif (Le Message, saison 1), Vincent Schiavelli (Faux frères siamois, saison 2), et Michael Berryman (Révélations, saison 3), c’est le 4e acteur qui a joué dans le film de Forman et dans X-Files !

    • Chuck Forsch est le nom d’un des assistants de Chris Carter. Une des victimes s’appelle Risa Shapiro, c’est le nom de l’agent de David Duchovny. Le Dr.Martin Alpert est le médecin particulier de John Shiban.

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    23. CRIME DE MÉMOIRE
    (DEMONS)

    Épisode Mythologique

    Scénario : R.W.Goodwin
    Réalisation : Kim Manners

    Résumé :

    Mulder se réveille dans une chambre d’hôtel loin de chez lui. Sa chemise est ensanglantée bien qu'il ne soit pas blessé, et il ne se souvient de rien. Mulder a de fortes crises où il voit des souvenirs embrumés de la nuit où Samantha a été enlevée. De plus, Amy et David Cassandra, un couple de retraités, a été assassiné avec le pistolet de Mulder, et un policier se suicide… Pendant que l’inspecteur place Mulder en garde à vue, Scully s’aperçoit que le policier mort connaissait les victimes, et qu'Amy prétendait avoir été enlevée par des extra-terrestres…

    Critique :

    Cet épisode tente d’entremêler Mythologie et thriller onirique, mais le résultat ne semble guère concluant. Certes, la mise en scène demeure efficace, et l’histoire bénéficie d’une très belle composition de Gillian Anderson, judicieusement mise en avant ici avec une Scully remuant ciel et terre pour sauver son partenaire. Si l’ensemble se suit sans déplaisir ni ennui, force est de constater qu’un nombre considérable d’éléments vient entacher la performance et interdire à l’épisode d’atteindre la moyenne particulièrement relevée de cette saison.

    Ainsi, si l’intrigue ne comporte pas de contradiction ou de trou béant, les indices se succèdent à une vitesse trop élevée, et résultent obtenus bien trop facilement par nos enquêteurs pour que cela n’entache pas la crédibilité d’un épisode justement quasi dépouillé de toute dimension fantastique et très polar. Après tous les miracles opérés par l’hypnose au cours de la série, y compris dans cette saison (Le pré où je suis mort), on ne comprend tout simplement pas pourquoi Mulder a recours à ce qui ressemble tout de même beaucoup à de la trépanation. Et puis, on répugne sincèrement à le voir abdiquer son si bel intellect pour désespérer au point de s’en remettre à un gourou pour le moins douteux. Alors qu’il parait évident dès le départ que, comme toujours, Mulder n’abandonnera pas tant que la Vérité demeurera dissimulée, Scully s’épuise à lui demander un nombre incroyablement élevé de fois d’aller à l’hôpital, encore et toujours en vain. Cela lasse très vite, et puis cela crispe.

    Alors que la série nous a habitué à des effets spéciaux aussi habiles qu’élégants, les visions oniriques s’avèrent criardes et d’une grande laideur, et de plus sans réel intérêt. On reste très loin de La Maison du Docteur Edwardes qui sert visiblement de modèle à l’épisode. Où est Skinner ? Qu’un agent du FBI soit incarcéré pour meurtre semble laisser le Bureau totalement indifférent. Le pire demeure que les scénaristes capitulent en rase campagne et renoncent à nous expliquer comment Mulder a pu concrètement en arriver à la situation où nous le découvrons. On reste dans le flou complet derrière l’alibi commode de l’amnésie, cela s’assimile vraiment à de la facilité. Par contre, les auteurs disposent du temps nécessaire pour tartiner sur l’identité du père du Mulder, cette problématique me paraissant loin d’être la plus intéressante de la série, et n’ayant jamais autant ressemblé à du mauvais mélo.

    Parmi les côtés positifs de l’épisode figure tout de même l’excellence de l’interprétation des seconds rôles, Vanessa Morley et Chris Owens dans leur emploi coutumier, ainsi que Jay Acovone (Stargate), l’excellent invité du jour.

    Anecdotes :

    • Les Mulder avaient une résidence secondaire à Quonochontaug.

    • Mulder fait une nouvelle allusion à O.J.Simpson (voir Autosuggestion, saison 3).

    • 925 du jour : Il est 9h25 quand Mulder demande au docteur de continuer le traitement.

    • L’ombre d’un membre de l’équipe est visible sur le mur quand Scully trouve le magazine-clé chez le policier mort.

    • Le policier se suicidant s’appelle Michael Fazekas, c’est le nom de l’assistant de Frank Spotnitz.

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    24. LE BAISER DE JUDAS
    (GETHSEMANE)


    Épisode Mythologique

    Scénario : Chris Carter
    Réalisation : R.W.Goodwin

    Résumé :

    L’agent Dana Scully reconnaît devant les policiers le cadavre trouvé dans l’appartement de Mulder : c’est bel et bien celui de son défunt partenaire ! Devant la commission du FBI, elle déclare les recherches de Mulder obsolètes : elle a en effet découvert qu’il a été depuis son entrée aux Affaires Non Classées la victime d’une gigantesque manipulation : les extra-terrestres n’ont jamais existé !
    24 heures plus tôt, Mulder s’est envolé au Canada retrouver un groupe de chercheurs ayant découvert ce qui pourrait être le corps d’un alien pris dans les glaces. Mais les chercheurs ont été assassinés lorsqu’il les a rejoint… De son côté, Scully rencontra Michael Kritschgau, du ministère de la Défense, qui lui avoua l’existence de la plus grande machination jamais orchestrée au monde…

    Critique :

    L'aussi ténébreuse qu'enthousiasmante saison 4 se conclut par le premier volet du désormais traditionnel arc mythologique. Sans doute pour maintenir l'intérêt et éviter un sentiment de routine, Chris Carter introduit un lot pour le moins non négligeable de nouveautés. Dans la forme, l'histoire s'avère être un long flash-back correspondant à une narration de Scully. L'effet paraît fort réussi, scandant le récit d'intermèdes réalisés avec élégance (beaux jeux d'ombres et de lumières), et portés par la grande sensibilité de Gillian Anderson. L'évocation de la métastase de son cancer s'effectue avec autant de dignité que d'impact. Décidément, cette saison demeurera des plus sombres jusqu'à la toute fin... Blevins effectue un retour bienvenu.

    Sur le fond, Carter va encore plus loin car il n'hésite pas à remettre en cause les fondements de l'univers de la série en introduisant l'idée que les incursions extraterrestres ne constitueraient qu'un immense simulacre destiné à couvrir des expériences menées par l'armée américaine. Mulder aurait été berné depuis le commencement ! Cette théorie proprement vertigineuse, renforcée par le côté volontiers accusateur du discours de Scully, donne un intérêt supplémentaire à l'histoire et nous vaut un beau portrait psychologique de Mulder. Celui-ci s'effondre jusqu'à en pleurer en voyant s'évaporer les fondements de son combat, même si évidemment on se doute bien qu'il y a anguille sous roche ! Nous avons vu l'Huile Noire, etc. L'épisode bénéficie également de vues somptueuses sur les splendides montagnes canadiennes enneigées, on s'en régale.

    Malheureusement, Le baiser de Judas souffre d'un manque certain de rythme et de contenu. Le pan de l'intrigue relevant de Mulder demeure trop schématique et prévisible, et dépourvu du tempo frénétique qu'ont pu manifester par le passé les arcs similaires. De fait, on comprend très vite que nous n'assistons ici qu'à un simple prologue, l'essentiel de l'intrigue se déroulant ultérieurement. Le double épisode réussi Redux le confirmera d'ailleurs amplement par la suite. On peut regretter ce dosage déséquilibré qui prive de matière cet épisode. L'arc Anasazi (la référence ultime en la matière) savait atteindre son paroxysme dès le commencement, ce n'est pas le cas ici. L'absence du Fumeur (mais aussi des Bandits Solitaires !) se fait encore une fois cruellement sentir dans ce type d'épisode.

    De plus, le fameux cliffhanger de fin de saison se montre ici passablement éventé. D'une part, on se doute bien que Mulder est évidemment encore de ce monde, et d'autre part, on a assisté à la séance d'ouverture qui annonce déjà cette pseudo révélation. Et puis cette histoire de suicide ne tient pas la route. Même si les Aliens n'étaient que supercherie, le mystère de la disparition de Samantha et de son devenir demeurerait. Imagine-t-on Mulder renoncer à résoudre cette énigme ? La « surprise » tombe donc deux fois à plat, renforçant cette impression d'une réussite imparfaite de l'épisode. Et puis, après Le Seigneur du magma, on a de nouveau droit à un clin d'œil à la vidéo de Roswell, mais avec autrement moins de drôlerie. Ceci dit, les interrogations installées font que l'on attend la suite avec la plus grande impatience, tandis que la situation de Scully prend un tour désespéré. Suspense !

    Pour la curiosité, Matthew Walker interprétera plus tard le fameux Merlin de Stargate SG1. À noter que, après la scène coupée de Memento Mori, Gethsemane voit l'entrée en scène effective de Bill (excellent Pat Skipper) dans une version un peu adoucie. L'épisode ouvre d'ailleurs une fenêtre sur les repas familiaux des Scully, qui permet de mieux comprendre à quel point Dana apprécie l'excitation des Affaires non classées... John Finn campe solidement un Kritschgau appelé à revenir ultérieurement dans la série (saison 7).

    Gethsemane correspond au lieu où se déroule la Passion du Christ, élément biblique que le titre français retranscrit plus explicitement. La culture religieuse reste décidément plus prégnante aux États-Unis qu'en France !

    Anecdotes :

    • Pour la huitième fois de la série, l’indicatif The Truth is out There est remplacé par Believe the Lie (Croyez au mensonge). Une phrase-clé citée 3 fois dans l’épisode.

    • Première apparition « officielle » (après la scène coupée de Memento Mori) de Bill Scully, un des frères de Scully interprété par Pat Skipper. C’est également la première apparition de Michael Kritschgau (dont le nom est celui d’un ami d’enfance de Gillian Anderson), l’employé du ministère de la Défense interprété par John Finn.

    • Après avoir retrouvé un semblant de foi religieuse dans Révélations (saison 3), Scully semble à nouveau s’en éloigner.

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    TOP 5 SAISON 4

    1) Le pré où je suis mort
    2) Journal de mort
    3) L'Homme à la Cigarette
    4) La queue du diable
    5)La meute

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    Crédits photo : FPE.

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