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Saison 1Saison 3

Night Gallery

Saison 2 - Partie 1



1-A. THE BOY WHO PREDICTED EARTHQUAKES



Date de diffusion : 15 septembre 1971

Scénario : Rod Serling, d'après une nouvelle de Margaret St Clair

Mise en scène : John Badham

Durée : 21’35’’

Résumé : 

Herbie, un jeune garçon de dix ans, a la faculté de prévoir les événements survenant le lendemain. Après qu’il ait prédit un tremblement de terre, cela lui vaut de devenir une vedette de la télévision, grâce à un producteur tentant d’exploiter au maximum son talent. Un jour, Herbie annonce que le lendemain verra le début d’un âge d’or universel, mais une universitaire l’étudiant demeure sceptique. Comment peut-il être aussi catégorique, alors que son pourvoir de prédiction ne dépasse pas 48 heures ?

Critique :

Rod Serling débute en fanfare cette nouvelle saison, avec un bref récit à chute typique ce qu’il proposait dans La Quatrième Dimension. Le format court, à peine plus de  vingt minutes, convient idéalement à ce forma, d’autant que Serling le maîtrise à merveille. Toute la première partie exprime ainsi une satire féroce des mœurs télévisuelles à Los Angeles, où rien n’a réellement changé depuis les années 70. Le passage se montre aussi décapant que drôles, grâce à la présence d’acteurs chevronnés, comme l’irremplaçable Bernie Kopell. La rapidité des événements et le contraste soudain avec l’horreur de la révélation finale produit un effet réellement effrayant.

Le véritable atout de l’opus reste toutefois l’extraordinaire maestria de la mise en scène de John Badham, qui assure un tempo d’enfer grâce un montage tonique et une profusion d’idées aussi variées au suggestives. Il parvient ainsi à rendre profondément étrange les paroles d’Herbie (parfait Clint Howard) et participe pleinement au succès par contraste de la chute. En effet à son maelstrom visuel succède la chambre d’hôtel quasiment située dans le néant, parfait décor pour une révélation finale glaçante.

Anecdotes :

  • John Badham effectue ici l’une de ses toutes premières réalisations professionnelles. Jusque-là il faisait visiter les studios Universal aux touristes, tout en se créant des contacts auprès des producteurs. Il va participer six fois à l’anthologie, avant de devenir le metteur en scènes de plusieurs films à succès (La fièvre du samedi soir, Wargames, Short Circuit…). Se consacrant de nouveau à la télévision depuis la fin des années 90, il demeure encore actif aujourd’hui, réalisant plusieurs épisodes de la série Supernatural.

  • La voix du pilote de l’hélicoptère est assurée par l’acteur Mike Road, qui lit également les noms des artistes invités durant le générique.

  • L’épisode adapte la nouvelle The Boy Who Predicted Earthquakes, de Margaret St. Clair. Le texte fut initialement dans le journal canadien Maclean's, en 1950.
  • Clint Howard (Herbie) est le frère du réalisateur Ron Howard. Il participe à de nombreuses séries des années 60 et 70, ainsi qu’à divers films de son frère.

  • Le peintre Thomas Wright s’est inspiré de son propre fils pour réaliser le tableau représentant l’épisode.

  • Le film que regarde Wellman est L’île du docteur Moreau (1932).

  • Le tremblement de terre prédit par Herbie est celui survenu dans la vallée de San Fernando, quelques mois avant la diffusion de l’épisode. Le 9 février 1971, il coûta la vie la vie à 64 personnes, notamment dans la ville de Sylmar, à proximité de Los Angeles. 

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1-B. MISS LOVECRAFT SENT ME

Date de diffusion : 15 septembre 1971

Scénario : Jack Laird

Mise en scène : Gene Kearney

Durée : 3’32’’

Résumé :

Envoyée par l’agence de baby-sitters de Miss Lovecraft, la jeune Betsy frappe à la porte d’un superbe manoir gothique. Elle est reçue par le père de famille, mais les événements étranges se multiplient. Son hôte ne se reflète pas dans un miroir et la bibliothèque contient d’inquiétants grimoires de magie noire. 

Critique :

Ce très court métrage introduit les vignettes le plus souvent écrites par le show-runner Jack Laird. Celui-ci les percevait comme une amusante spécificité de son anthologie, en plus d’un gage de modernité. Malheureusement l’humour détonne surtout par sa naïveté, l’unique ressort humoristique étant l’accumulation des preuves  de la nature vampirique de l’hôte non compris par une jeune fille guère intuitive. La modernité visée par Leard devient simplement une scène peu relevée de La Famille Addams, série de la décennie précédente. La chute n’apporte aucune valeur ajoutée et l’on se demande bien ce que Lovecraft vient faire dans cette histoire, Bram Stoker aurait été bien davantage indiqué. Outre la sympathique fraîcheur de Sue Lyon, on s’amuse toutefois de la divertissante caricature du Vampire des vieux films hollywoodiens, effectuée par l’impeccable Joseph Campanella.

Anecdotes :

  • Joseph Campanella (Father) apparut dans d’innombrables séries télévisées. Son rôle le plus connu reste celui du patron de Jo Mannix, en première saison des aventures du détective privé, avant que celui-ci n’ouvre sa propre agence.

  • Sue Lyon (Betsy) est restée dans l’histoire du cinéma comme étant la Lolita de Stanley Kubrick, en 1962. Malgré ce remarquable lancement, sa carrière souffrit de ses troubles bipolaires récurrents  et se limita à quelques apparitions durant les années 60 et 70.

  • Le Vampire Father représente clairement une parodie du Dracula de Bela Lugosi, dans le célèbre film de 1931. 

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1-C. THE HAND OF BORGUS WEEMS

Date de diffusion : 15 septembre 1971

Scénario : Alvin Sapinsley, d'après une nouvelle de George Langelaan

Mise en scène : John M. Lucas

Durée : 20’59’’

Résumé :

La main droite de Peter Lacland semble désormais habitée par un esprit maléfique, qui incite son propriétaire à commettre des meurtres. Lacland résiste désespérément et finit par se faire amputer pour éviter de devenir un assassin. Mais l’histoire ne s’arrête pas là.

Critique :

Le franco-britannique George Langelaan (198-1972) fut avant tout un auteur à succès de récits d’espionnage, où il mit à profit son passé d’agent secret durant la Seconde Guerre Mondiale. Mais il eut également la marotte du surnaturel, se consacrant notamment durent des décennies à la chasse à la preuve de l’existence des revenants. Cette passion se retrouva dans plusieurs écrits se découvrant comme autant de variations autour du thème des fantômes et autres entités spectrales. Malheureusement, l’ambiance souvent très évocatrice de ces ouvrages ne va que fugacement se retrouver au cours de l’épisode.

En effet l’adaptation échoue totalement à susciter l’élément clef de ce type de récit horrifique que représente une tension allant crescendo. Les manifestations de la main ne font que se répéter encore et encore, sur un mode venant progressivement très répétitif. La mise en scène suit le même chemin, les premiers gros plans, réellement suggestifs, sur la main possédée, ne font ensuite que ressasser. Peut-être pour gagner du temps de narration, le récit a recours à la forme narrative du flash-back, le héros racontant son histoire au chirurgien. Mais la technique n’est guère maîtrisée, avec notamment le doublon sans intérêt de la scène d’ouverture. La chute reste également très prévisible. L’interprétation demeure toutefois de qualité et le mélange d’un environnement très 70’s avec un thème ancien du Fantastique suscite en soi une curiosité.

Anecdotes :

  • Gorge Maharis (Peter Lacland), d’ascendance grecque, joua de nombreux rôles de beaux ténébreux au cinéma comme à la télévision. Son rôle le plus connu demeure celui de Buz Murdock, l’un des deux protagonistes de la série itinérante à grand succès Route 66 (1960-1964). Il connut également une belle carrière de chanteur.

  • L’épisode s’inspire de la nouvelle The Other Hand, de George Langelaan, initialement publiée dans  The Magazine of Fantasy and Science Fiction (octobre 1961). Publié sans discontinuité depuis 1949, ce magazine est célèbre pour avoir accueilli régulièrement de grands auteurs de Science-fiction, ainsi que plusieurs publications initiales de nouvelles parmi les plus fameuses du genre (Un Cantique pour Leibowitz, de Walter M. Miller ou La Tour Sombre, début de la grande œuvre de Stephen King) 

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1-D. PHANTOM OF WHAT OPERA ?

Date de diffusion : 15 septembre 1971

Scénario : Gene Kearney

Mise en scène : Gene Kearney

Durée :  ‘3’38’’

Résumé :

Le Fantôme de l’opéra, au visage dissimulé par un masque, entraîne une jeune femme dans son repaire souterrain. Il lui ordonne de ne pas tenter de découvrir ce que dissimule le masque, ce à quoi elle s’empresse de désobéir. Cette action va avoir une conséquence inattendue.

Critique :

Le dénouement a pour lui de résulter quelque peu étonnant. Par contre l’objectif poétique qu’il semble viser échoue de par la brièveté de la narration et de son non développement au-delà du simple effet choc.  Par ailleurs l’omniprésence du masque et l’accumulation de maquillage fait que Leslie Nielsen demeure méconnaissable de bout en bout. L’épisode se prive ainsi de l’essentiel de sa présence et se limite de ce fait à un exercice de style assez creux. Cette formule en vignette continue à ne pas convaincre, d’autant que l’on se dit que les quelques minutes gaspillées de la sorte auraient pu aider l’opus précédent a susciter une vraie atmosphère.

Anecdotes :

  • Leslie Nielsen (le Fantôme de l’Opéra) se fit connaître pour des rôles sérieux, parfois même sombres (Planète interdite, 1956. L’aventure du Poséidon, 1972), avant d’opter pour la comédie à la fin des années 70 à travers les productions du trio .Z.A.Z. (Y a-t-il un  pilote ?et Y a-t-il un flic ?, Police Squad, Scary Movie...). Il participa également à de nombreux jeux télévisés. Nielsen fut aussi un passionné de golf, et ses vidéos d’apprentissage de ce sport, réalisées avec beaucoup d’humour, connurent un grand succès aux USA. 

  • L’épisode s’inspire du célèbre film Le fantôme de l’Opéra (1925), dont le rôle principal fut tenu par Lon Chaney.

  • Le tableau introduisant l’épisode représente également le Fantôme alors incarné par Chaney.  

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2-A. A DEATH IN THE FAMILY

Date de diffusion : 22 septembre 1971

Scénario : Rod Serling, d'après une nouvelle de Miriam Allen deFord

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 22’23’’

Résumé :

 Jared Soames, un entrepreneur de pompes funèbres, se montre scandalisé quand les autorités lui amènent la dépouille d’un vieillard pauvre et sans famille, pour un enterrement expéditif. Il promet alors au défunt de lui offrir bien mieux qu’une tombe anonyme. Quand un jeune bandit, évadé de prison et grièvement blessé, s’introduit chez Soames, il découvre à ses dépens ce que signifie réellement cette promesse.

Critique :

Si la chute du récit se laisse trop facilement deviner, la découverte savamment progressive de la folie de Soames apporte une réelle atmosphère intrigante, puis horrifique, au récit. Habilement soutenue par une mise en scène claustrophobe à souhait, l’idée de base résulte très efficace, aussi bien par son cheminement que par sa conclusion choc, qui sait apporter un surcroît d’humour noir à l’ensemble. D’ailleurs, trois ans plus tard, le téléfilm Kolchak : The Night Strangler développera en substance le même thème, certes dans un environnement totalement différent. Contrairement à l’adversaire de Carl Kolchak, Jared Soames a l’habileté de se montrer fondamentalement bienveillant, ce qui, en définitive, le rend plus troublant encore. L’interprétation de l’acteur vétéran E. G. Marshall joue d’ailleurs admirablement de cette originalité, valant à l’opus un beau mélange d’émotion humaine et de comique morbide. 

Anecdotes :

  • E. G. Marshall est avant tout connu pour ses rôles à la télévision (notamment le chirurgien vedette de The New Doctors, 1969-1973), mais il apparut aussi au cinéma ; il faut ainsi le Président des USA dans Superman II (1980).

  • L’épisode s’inspire de la nouvelle A Death in the Family, de Miriam Allen DeFord. Elle fut initialement publiée dans The Dude (Novembre 1961), un magazine masculin des années 50.

  • Clef de voute du récit, le monologue final de Soames fut en partie coupé lors de la diffusion originelle de l’épisode, du fait de contraintes de durée. Il fut heureusement rétabli lors de la syndication et il figure dans la version en DVD. 

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2-B. THE MERCIFUL

Date de diffusion : 22 septembre 1971

Scénario : Jack Laird, d'après une nouvelle de Charles L. Sweeney, Jr

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 3’27’’

Résumé :

La scène représente un couple d’un certain age. La dame semble en train d’emmurer son mari dans la cave, tout en conversant paisiblement avec lui. Mais qu’est-il donc en train de se passer ?

Critique :

Cette nouvelle vignette de Jack Laird s’avère meilleure que bien d’autres. La conclusion crée un vrai choc, couronnant parfaitement la tonalité surréaliste et intrigante de la scène. La brièveté même de la scène devient ici un atout, puisque le spectateur est stupéfié avant d’avoir pu réellement tenter de deviner la réalité de ce qu’il considère. Par ailleurs tout temps mort aurait ici gravement pénalisé l’ensemble. La mise en scène de Jeannot Swarc se montre efficace par sa révélation progressive de la scène. Très complices, Imogene Coca et  King Donovan apportent une précieuse touche insolite à cette fable insolite évoquant en arrière-plan l’usure de la vie de couple.

Anecdotes :

  • Imogene Coca et  King Donovan jouent le mari et l’épouse, ils étaient réellement mariés lors du tournage de l’épisode.

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2-C. CLASS OF '99

Date de diffusion : 22 septembre 1971

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 18’47’’

Résumé :

En 1999, l’amphithéâtre d’une université accueille des étudiants venus passer leur examen oral final. Glacial, le Professeur leur pose plusieurs questions de connaissances, puis passe vite à des mises en situation psychologiques. Il incite ainsi les étudiants à se révéler de plus en plus détestables, racistes et agressifs les uns envers les autres. Tous vont dans son sens, sauf un qui se rebelle quand il lui est demandé d’en abattre un autre. Quand le Professeur ordonne à un autre étudiant d’exécuter le récalcitrant, il est aussitôt obéi. Il faut dire que ces étudiants s’avèrent très particuliers, de même que le diplôme qu’ils sont en train d’obtenir.

Critique :

L’épisode et sa chute prodigieuse apportent un vrai choc au spectateur. Par son sombre prophétisme, il synthétise toutes les préoccupations de Rod Serling concernant l’évolution négative de nos sociétés, voire de l’Humanité en tant qu’espèce, incapable de s’affranchir de ses démons avant qu’il ne soit trop tard. Ici directement à l’écriture, et non adaptateur d’un texte préexistant, Serling nous délivre un message d’alerte d’une force rare. Mais aussi un conte parfaitement maîtrisé, intriguant toujours davantage son public par une réalité basculant progressivement dans une horreur aussi éprouvante qu’absurde à première vue, idéal prologue à la détonante révélation finale.

 L’opus aurait aisément trouvé sa place parmi les meilleurs de La Quatrième Dimension, d’autant que la mise en scène de Jeannot Szwarc se montre à la hauteur, dynamisant le huis clos et nous régalant d’une excellente direction d’acteurs. Ainsi le jeu apparemment désincarné des jeunes acteurs jouant les étudiants (hormis pour le déviant) indique subtilement la véritable nature des personnages. Le voit se voit surplombé par un Vincent Price impérial dans un rôle lui allant comme un gant. L’un des chefs-d’œuvre de la Galerie de Nuit proposée par Rod Serling.

Anecdotes :

  • L’insert représentant l’université est en fait un panorama de la  Simon Fraser University. Celle-ci a alors récemment inauguré, en 1965, et son design futuriste convient effectivement à une société futuriste. Elle servira d’ailleurs également de décor à la planète Tollana, dans Stargate SG-1.

  • Les jeunes acteurs interprétant les étudiants ont déclaré avoir beaucoup apprécié leurs échanges avec Vincent Price. Celui-ci s’était montré aussi aimable et disponible que son personnage était glacial et détestable.

  • Rod Serling fut ravi de la mise en scène du presque débutant Jeannot Swarc. Par la suite il obtint que celui-ci fut associé à plusieurs autres épisodes dont il assura l’écriture. Swarc devint l’un des meilleurs réalisateurs de l’anthologie et totalisa 19 épisodes à son actif, ce qui allait propulser une très belle carrière télévisuelle. En 1984, il sera également le réalisateur du film Supergirl.

  • Vincent Price (Le Professeur) fut l’une des plus grandes figures du cinéma d’épouvante, genre qu’il marqua par sa présence élégante, son rire diabolique et son timbre de voix particulier, à la fois inquiétant et caressant. Il devient ainsi un acteur fétiche de Roger Corman et participe à de nombreux classiques du genre : La Chute de la Maison Usher, Le Corbeau, la Mouche, L'Abominable Docteur Phibes ? Je suis une légende... . Il se parodie dans Batman 1966 avec l’inénarrable Crâne d’œuf, mais aussi dans Le théâtre de sang aux côtés de Diana Rigg (1973). Egalement un important acteur de voix, il assura celle du clip Thriller de Michael Jackson, mais aussi celle de l’attraction Phantom Manor, à Disneyland Paris. 

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2-D. WITCHES FEAST

Date de diffusion : 22 septembre 1971

Scénario : Gene Kearney

Mise en scène : Jerrold Freedman

Durée : 5’04’’

Résumé :

Lors d’un convent trois sorcières affamées prépare un infâme brouet en plongeant toute une palanquée de substances dégoutantes. Furieuses, elles doivent en attendre une quatrième, en retard alor s qu’elle apporte l’élément principal. Celui-ci va se révéler surprenant. 

Critique :

Quel dommage de conclure un épisode aussi relevé par une telle pochade. On retrouve ici l’une de ces vignettes promues par le showrunner Jack Leard, destinées à apporter un traitement se voulant original et décapant à des figures classiques du fantastique. Une fois de plus rien ne fonctionne, l’exercice de style se résumant en tout et pour tout à deux actrices et un évident travesti grimés en caricatures de sorcières à pustule se trémousser autour d’un chaudron, tout en énumérant une interminable liste de victuailles et d’incantations grotesques, écrite en vers de mirliton. Le procédé se révèle aussi lourd qu’indigeste, et ce n’est la chute ridicule qui sauve la situation. L’ensemble ne dure que cinq minutes mais parvient néanmoins à ennuyer jusqu’à l’irritation. L’unique curiosité demeure la présence d’Agnes Moorehead en méchante sorcière, très différente d’Endora, mais l’actrice ne tient pas ici son meilleur rôle, loin s’en faut.

Anecdotes :

  • Agnes Moorehead (la principale sorcière) reste bien entendu dans les mémoires pour la terrible Endora de Ma sorcière bien-aimée (1964-1972). Précédemment, elle connut une très belle carrière à Broadway et Hollywood. À l'écran comme sur les planches, elle travailla souvent avec Orson Welles (Citizen Kane, La Splendeur des Anderson…). Elle fut sélectionnée quatre fois à l'Oscar du second rôle féminin mais ne parvint jamais à le remporter.

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3-A. SINCE AUNT ADA CAME TO STAY

Date de diffusion : 29 septembre 1971

Scénario : Alvin Sapinsley, d'après une nouvelle d'A.E. van Vogt

Mise en scène : William Hale

Durée : 30’38’’

Résumé :

Craig Lowell, professeur de logique, est étonné par le comportement manifestement excentrique d’Ada, tante de son épouse Joanna, lorsque celle-ci leur rend visite. D’après plusieurs indices, il en arrive à la conclusion étonnante que non seulement Tante Ada est une sorcière, mais aussi qu’elle prépare un sortilège pour échanger son corps défaillant avec celui de Joanna ! Dès lors, il va tenter de sauver son épouse.

Critique :

L’adaptation télévisuelle proposée par Night Gallery d’une célèbre nouvelle du géant de la Science-fiction américaine qu’est A. E. van Vogt apparaît plus sage et plus classiquement ordonnancée que son modèle. Le texte original constituait une terriblement déstabilisante évocation de la folie submergeant la raison, tandis qu’ici l’on retrouve un récit de fantastique horrifique assez standard. Par ailleurs, si l’épisode demeure de bonne facture, il commet quelques maladresses. Ainsi, l’intrigue joue d’une ambigüité concernant l’identité de Tante Ada, ainsi qu’une révélation progressive. Or, l’actrice Jeannette Nolan interprète d’emblée Ada comme un cliché total de sorcière, ce qui ôte pas mal de son suspense à l’histoire

Par ailleurs si James Farentino (Craig) se montre convaincant lors des scènes de couple tournées avec son épouse Michele Lee, son interprétation globale de Craig reste si caricaturale que l’on avoisine une parodie involontaire. L’adaptation télévisuelle regagne toutefois des couleurs grâce à son traitement de l’image. Le metteur en scène William Hale propose ainsi un destin beaucoup plus spectaculaire pour Tante Ada que chez van Vogt. D’autre part les scènes de magie bénéficient d’étonnants effets visuels, grâce à un travail très soigné sur les lentilles de la caméra.

Anecdotes :

  • James Farentino (Craig Lowell) et Michele Lee (Joanna Lowell) étaient réellement mariés lors du tournage de l’épisode.

  • L’épisode s’inspire de la nouvelle The Witch, d’A. E. van Vogt, publiée initialement dans Unknown Worlds, en février 1943. Ce Pulp hybride entremêlant Fantasy et Science-fiction fut publié de 1939  à 1943.Il est resté fameux pour ses spectaculaires couvertures et illustrations.

  • William Hale rapporte que l’actrice Jeannette Nolan apporta ses propres vêtements et maquillages pour jouer Tante Ada, refusant les accessoires fournis par le studio.

  • Son traitement spectaculaire de l’image valut, non pas des félicitations, mais un licenciement à William Hale. En effet le showrunner Jack Leard était toujours impitoyable avec ses metteurs en scène concernant la tenue des délais. Or le travail complexe entrepris par Hale sur les lentilles de la caméra l’amena à dépasser de quelques heures la durée impartie de quatre jours pour le tournage. Transmettre l’épisode à quatre heures du matin et non pas avant minuit lui valut de ne plus jamais travailler pour Night Gallery. Toutefois les deux hommes se réconcilièrent par la suite et travaillèrent ensemble sur Kojak.

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3-B. WITH APOLOGIES TO MR. HYDE

Date de diffusion : 29 septembre 1971

Scénario : Jack Laird

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 1’56’’

Résumé :

Alors qu’il s’apprête à sortir pour la nuit, le Dr. Jekyll boit son fameux élixir, concocté par son fidèle assistant de laboratoire. Il entreprend de se transformer, mais encore faut-il que le breuvage ait été bien dosé !

Critique :

Voici un nouveau court sketch de Jack Laird destiné à aborder de manière décapante les classiques de l’épouvante gothique. Le procédé se révèle une nouvelle fois navrant par son inanité et la lourdeur de sa chute. Toutefois la distribution vaut le coup d’œil, avec le plaisir toujours renouvelé de retrouver Adam West et le caméo amusant de Laird en assistant de laboratoire en mode « Igor ». Il manifeste une belle énergie et semble bien s’amuser, c’est toujours ça de prix. Le talent de Jeannot Szwarc derrière la caméra sauve également les meubles, avec une parodie joliment troussée de la fameuse de la transformation Jekyll/Hyde.

Anecdotes :

  • L’épisode est écrit par Jack Laird, showrunner de la série. Il joue également ici le rôle de l’assistant de laboratoire. Laird effectuera deux autres caméos au cours de l’anthologie.

  • Adam West (Mr. Hyde) a participé à de très nombreuses séries, mais reste avant tout connu comme l’interprète de Batman dans la fameuse série Batman 1966 (1966-1968). Il est également un grand acteur de voix.

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3-C. THE FLIP SIDE OF SATAN

Date de diffusion : 29 septembre 1971

Scénario : Malcolm Marmorstein & Gerald Sanford d'après une nouvelle d'Hal Dresner

Mise en scène : Jerrold Freedman

Durée : 17’03’’

Résumé :

Le disc-jockey J.J. Wilson est envoyé par son agent prendre en charge une petite radio située au milieu de nulle part et émettant seulement de nuit. Wilson à la surprise de constater que les seuls disques présents contiennent une musique funèbre accompagnant une invocation de Satan. Un appel à son agent lui révèle que celui-ci le met en cause dans le suicide de son épouse. Wilson se rend compte qu’il est enfermé et incapable d’arrêter l’invocation.

Critique :

L’épisode s’appuie sur la mise en scène très inventive du jeune réalisateur Jerrold Freedman (30 ans), qui connaîtra par la suite une belle carrière télévisuelle. Il sait rendre le huis clos de plus en plus inquiétant, alors que le piège se referme toujours davantage sur le protagoniste et que le récit verse dans le Fantastique horrifique, avec une judicieuse exploitation des potentialisés visuelles et sonores d’un studio de radio d’époque. Malheureusement cet effort se voit contre carré par un scénario confus (quel est le rôle exact de l’agent ?), une conclusion qui détonne par son manque de substance et surtout le jeu du sympathique Arte Johnson. Cet artiste comique fut sans doute engagé du fait de sa grande popularité  en tant que pilier du Rowan & Martin's Laugh-In , mais il échoue  totalement à retranscrire l’effroi vécu par le disc jockey. Celui-ci reste avant tout une caricature distrayante jusqu’au terme de l’histoire, ce qui s’avère contreproductif jusqu’à faire tourner l’ensemble à vide.

Anecdotes :

  • Jerrold Freedman va tourner en tout six épisodes de l’anthologie. Il va également réaliser bien plus tard, entre autres, le pilote de MacGyver et deux épisodes des débuts des X-Files, Ghost in the Machine et Born Again. De 1970 à 1975, il fut le mari de Katherine Woodville, elle-même l’épouse de Patrick Macnee de 1965 à 1969.

  • Arte Johnson (J.J. Wilson) est l’unique acteur apparaissant durant tout l’épisode. Il s‘agit de la seule fois où ce procédé sera employé dans l’anthologie.

  • Cet humoriste fut très populaire pour ses participations à l’émission humoristique Rowan & Martin's Laugh-In et ses caricatures d’accent germanique. 

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4-A. A FEAR OF SPIDERS

Date de diffusion : 06 octobre 1971

Scénario : Rod Serling, d'après une nouvelle d'Elizabeth Walter

Mise en scène : John Astin

Durée : 21’48’’

Résumé :

Justus, écrivain brillant mais très imbu de lui-même, traite avec mépris sa voisine Elizabeth qui s’est éprise de lui.  Mais Justus souffre d’une violente arachnophobie et quand il aperçoit une araignée de la taille d’un chien dans sa chambre, il se réfugie chez Elizabeth. Mais l’amoureuse éconduite lui réserve un tour cruel face à ce qu’elle pense être une hallucination. Mais Justus est-il oui ou non dans le vrai ?

Critique :

L’épisode joue joliment de l’arachnophobie, une peur servant d’efficace outil à nombre de films d’épouvante, tels Tarentula, Arachnophobia, Arac Attack Spiders, etc.  Au cœur de nombre de ces récits, on trouve ainsi le thème de l’araignée géante, dont l’apparition fugace est ici rendue particulièrement saisissante grâce au talent de John Astin. L’ancien interprète de Gomez Addams démontre une nouvelle fois qu’il constitue l’un des metteurs en scènes majeurs de l’anthologie, un instillant par ailleurs des plans en vue plongeante parfaitement anxiogènes, évoquant un cauchemar éveillé, mais aussi en installant toute une élégante théâtralisation de la confrontation entre Elizabeth et Justus (remarquable Patrick O’Neal).

 Ce dernier point résulte d’autant plus crucial, que Rod Serling a l’intelligence de se servir de l’arachnophobie comme prétexte pour instiller un effroi bien supérieur encore, né du spectacle de la cruauté que s’assènent tout à tour les deux protagonistes. On regrettera toutefois la présence trop envahissante du propriétaire des lieux, M. Boucher, qui n’apporte rien à l’action et dont l’humour bon enfant apparaît au rebours de tout le reste de l’épisode. Par ailleurs si la référence faite à Kafka se justifie par le ton surréaliste de la narration et un lointain écho de La Métamorphose, les dialogues recèlent trop de références littéraires pour ne pas, parfois, avoisiner la préciosité.

Anecdotes :

  • Patrick O'Neal (Justus) fut avant tout un comédien de théâtre, issu de l'Actor's Studio. Il accomplit quelques apparitions au cinéma et à la télévision. Il fit finalement fortune dans la restauration, possédant à New York plusieurs établissements de grand standing.

  • Steven Spielberg devait initialement diriger l’épisode, mais, ayant eu un empêchement, il fut remplacé à la dernière minute par John Astin.

  • Kim Stanley (Elizabeth) et Tom Pedi (Mr. Boucher) connurent de grandes difficultés à se souvenir de leur texte. Kim Stanley en improvisa une large part, à la vive irritation de Rod Serling. Tom Pedi mémorisa une phrase après l’autre, étant filmé par John Astin via plusieurs très brèves scènes en gros plan.

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4-B. JUNIOR

Date de diffusion :  06 octobre 1971

Scénario : Gene Kearney

Mise en scène : Theodore J. Flicker

Durée : 1’49’’

Résumé :

Un couple endormi est réveillé par son enfant, qui réclame qu’on lui apporte un verre d’eau. Le père est réticent, mais finit par s’exécuter. On s’aperçoit alors que son fils n’est pas un charmant bambin.

Critique :

Nous découvrons ici un nouveau sketch conçu par Leard comme une revue humoristique et novatrice des grandes figures de l’épouvante gothique, le tout se dégageant le même sentiment d’inutilité qu’à l’accoutumée. Le prétexte est inepte et représente de plus un doublon partiel de l’enfant monstrueux suggéré dans Miss Lovecraft Sent Me, en début de saison. La révélation est efficacement amenée par la mise en scène et la reconstitution du maquillage d’un des grands classiques du cinéma demeure de qualité, mais tout ceci résulte bien trop fugace pour réellement marquer. Il en va de même du jeu plutôt réussi des comédiens. L’épisode se montre d’autant plus irritant qu’il constitue un véritable trou d’air après le très relevé A Fear of Spiders. La seule satisfaction est que Rod Serling continue à ne pas assurer de présentation pour ces sketchs, cela limite le gâchis de talent.

Anecdotes :

  • Wally Cox (Father) fut un acteur populaire des premiers temps de la télévision, au début des années 50. Il accéda à la célébrité avec Mr. Peppers (1952-1955); par la suite il participa à de nombreux sitcoms et jeux télévisés, ainsi qu'au pilote de Mission Impossible. Il était un proche de Marlon Brando, son ami d'enfance. 

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4-C. MARMALADE WINE

Date de diffusion : 06 octobre 1971

Scénario : Jerrold Freedman, d'après une nouvelle de Joan Aiken

Mise en scène : Jerrold Freedman

Durée : 11’45’’

Résumé :

Alors qu’il photographiait des couguars, le journaliste Roger Blacker se perd en forêt, sous une pluie battante. Il est recueilli dans la résidence secondaire d’un célèbre chirurgien. Afin d’impressionner celui-ci, il affirme être capable de prédire l’avenir. Or le hasard fait que ses premières révélations s’avèrent exactes, ce qui impressionne grandement son hôte.

Critique :

A côté de nombreux écrits pour la jeunesse, régulièrement adaptés à l’écran, Joan Aitken écrivit plusieurs nouvelles fantastiques ou policières à l’atmosphère délicieusement angoissante. A la fois scénariste et réalisateur, Jerrold Freedman réussit ici une adaptation particulièrement ambitieuse. Le récit respecte à la lettre le thriller original et sait mettre en avant ses qualités de nouvelle à chute horrifique parfaitement choquante. Les amateurs de Stephen King pourront y voir comme une très efficace préfiguration de Misery. Jerrold Freedman a par ailleurs indiqué avoir déjà en tête les deux comédiens retenus quand il écrivit les dialogues et leur choix s’avère effectivement parfait, d’autant que leur complicité demeure évidente de bout en bout.

Mais c’est la mise en scène qui assure en définitive l’enthousiasmante spécificité de l’opus, avec un univers quasi expérimental, en rupture totale avec la tonalité gothique globalement développée par l’anthologie. La photographie, surréaliste et ultra soignée, ainsi que les décors oniriques nous entrainent dans un Etrange proche du théâtre de Beckett ou Ionesco. La forêt stylisée évoquera ainsi aux amateurs des Avengers celle du rêve de Steed dans Too Many Christmas Trees. Tout ceci ne demeure pas gratuit et apporte tout un impact supplémentaire à une conclusion achevant de basculer dans un cauchemar éveillé.  

Anecdotes :

  • L’épisode est basé sur la nouvelle Marmalade Wine, de Joan Aiken. Le texte a été initialement publié en  septembre 1958, dans la revue Suspense.

  • Robert Morse (Roger Blacker), acteur et chanteur, a participé à de nombreuses séries, dont récemment Mad Men et American Crime Story.

  • Rudy Vallée (le chirurgien) fut lui aussi un acteur et chanteur très populaire. Il est considéré comme l’un des premiers Crooners référencés, anticipant à la naissance de ce style durant les années 30. Dans la fameuse série télévisée Batman 1966, il incarne Lord Marmaduke Ffogg, l’ennemi tellement anglais du Duo dynamique. Avec sa sœur, Lady Penelope Peasoup, Lord Marmaduke affrontera Batman, mais aussi Sted et Mrs Peel, dans le Comics réalisant un crossover entre les deux séries, en 2016.

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4-D. THE ACADEMY

Date de diffusion :  06 octobre 1971

Scénario : Rod Serling, d'après une nouvelle de David Ely

Mise en scène : Jeff Corey

Durée : 14’15’’

Résumé :

M. Holston, riche homme d’affaires, vient visiter une académie militaire où il entend placer son fils turbulent. Le directeur lui fait découvrir les différentes parties d’un établissement qui, au fur et à mesure de la visite, se révèle de plus en plus intrigant et sinsitre.

Critique :

L’épisode souffre d’une comparaison avec ce chef d’œuvre de Night Gallery qu’est Class of '99. On y part pareillement de la peinture de prime abord normale d’une enceinte de formation de la jeunesse, pour ensuite évoluer progressivement vers une situation de plus en plus délirante, servant à dénoncer les travers de la société et de l’âme humaine. Le propos de Serling apparaît ici moins universel et, si les deux acteurs principaux s’avèrent convaincants, ils n’ont pas la formidable aura de Vincent Prince. Toutefois l’institution très américaine qu’est l’académie militaire, destinée à remettre un jeune dans le droit chemin (ou dans le moule, selon la perception que l’on en aura) se voit ici critiquée de manière particulièrement acérée. Serling mène de main de maître l’évolution vers la conclusion choc, tirant aussi bien profit des dialogues que des décors, le tout constituant autant d’indices sur la nature réelle de l’endroit. Hoston apporte une habileté supplémentaire, alors qu’il compose tout au long du récit le témoin extérieur à travers lequel le spectateur découvre la situation, son retournement final accroit encore l’effroi final.

Anecdotes :

  • Pat Boone (Holston) est avant tout connu comme chanteur aux USA. Il connut de nombreux succès comme Crooner, mis contribua également à populariser le Rock’n’roll. Durant les années 50, il fut ainsi l’un des principaux rivaux d’Elvis. Il est aussi un animateur de jeux télévisés.

  • L’épisode est basé sur la nouvelle The Academy, de David Fly. Le texte a été initialement publié en  juin 1965, dans la revue Playboy.

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5-A. THE PHANTOM FARMHOUSE

Date de diffusion : 20 octobre 1971

Scénario : Halsted Welles, d'après une nouvelle de Seabury Quinn

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée :

Résumé :

Un sanatorium situé dans une compagne isolée abrite plusieurs dépressifs profonds. L’un d’entre eux déclare voir depuis sa fenêtre qu’une maison en ruines a été inexplicablement remise en état et qu’une charmante jeune femme y vit, avec ses deux parents. Le psychiatre demeure incrédule, mais d’autres patients sont découverts morts, comme agressés et déchiquetés par des bêtes sauvages. Il décide alors de mener l’enquête et rencontre la jeune femme en forêt, avant d’en tomber amoureux.

Critique :

L’épisode a le mérite de tenter de dépoussiérer le mythe du Loup-garou, en s’affranchissant des approches gothiques de la Lycanthropie et en l’entremêlant dans un charmant mélodrame amoureux, quoi qu’un peu daté. Bien que l’histoire se développe sur un rythme très lent l’ensemble fonctionne grâce à la superbe mise en scène de Jeannot Szwarc. Celui-ci tire le meilleur parti de l’environnement bucolique d’un épisode tourné en grande partie dans de superbes décors naturels, tout en laissant libre court à ce romantisme qui animera souvent ses futurs films où il s’associera pareillement à des thèmes revenant du Fantastique ou de la Science-fiction (Supergirl, Quelque part dans le Temps, Santa Claus…).

De ce point de vue l’opus constitue une intéressante ouverture sur son œuvre. A côté de la forte présence de David Carradine en patient et de Lynda Marsh en mystérieuse jeune femme (hélas affublée d’une perruque blonde assez ridicule), on regrettera par contre le manque d’expressivité de David McCallum, qui affaiblit considérablement son personnage de psychiatre troublé. De même la conclusion demeure trop prévisible et en revient pour partie à une approche plus usuelle du Loup-garou.

Anecdotes :

  • David McCallum est notamment connu pour ses rôles récurrents dans The Man from U.N.C.L.E., Sapphire & Steel et NCIS : Enquêtes spéciales. David Carradine l’est pour celui du protagoniste de la série  Kung Fu, postérieure de quelques mois à l’épisode

  • Jeannot Szwarc a indiqué qu’il s’agissait de l’un de ses tournages les plus difficiles pour l’anthologie. Les animaux restaient souvent passifs et il fut très malaisé de reconstituer une atmosphère nocturne, le tournage ayant dû se dérouler en plein jour pour des raisons budgétaires.

  • L’épisode est basé sur la nouvelle The Phantom Farmhouse, de Seabury Quinn. Le texte a été initialement publié en  Octobre 1923, dans la revue Weird Tales.

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5-B. SILENT SNOW, SECRET SNOW

Date de diffusion : 20 octobre 1971

Scénario : Gene Kearney, d'après une nouvelle de Conrad Aiken

Mise en scène : Gene Kearney

Durée : 16’18’’

Résumé :

Le jeune Paul a un secret : il a des visions toujours fréquentes d’une merveilleuse neige tombant du ciel, mais qu’il est le seul à percevoir. La neige devient de plus en plus présente et finit même par lui parler amicalement, lui disant qu’elle sera bientôt là. Paul s’immerge de plus en plus dans son univers enneigé, ce qui finit par inquiéter ses parents le voyant toujours davantage silencieux et renfermé sur lui-même.

Critique :

L’épisode parvient à créer un véritable trouble chez le spectateur, grâce à la parfaite ambigüité qu’il sait jusqu’au bout maintenir quant à ce qui est réellement en train de survenir, un phénomène surnaturel, ou un enfant en train de progressivement sombrer dans une forme d’autisme ? Les deux options semblent d’ailleurs tragiques, la subjugation d’un être innocent pour des motifs obscurs, ou un crépuscule de l’éveil au monde, qui n’est pas sans s’assimiler à la remarquable évocation de l’autisme qu’accomplira bien plus tard Joss Whedon dans A la dérive, l’un des épisodes les plus marquants de Buffy contre les Vampires.

Malgré ce soubassement sombre, et inquiétant, l’épisode recrée une atmosphère étrange et parfois merveilleuse, caractéristique du Fantastique. Quand la Science-fiction abord le thème d’une neige consciente et parlante, cela donne le très mouvementé et spectaculaire The Snowmen, chez le Docteur. Sans aucun effet spécial, la mise en scène développe un véritable insolite, s’appuyant sur la narration très évocatrice effectuée par Orson Welles, des angles de vue soigneusement fignolés et l’étonnante prestation du jeune Radames Perra, rendant très crédible sa peinture d’un jeune garçon dérivant entre deux mondes, toujours plus loin du notre.

Anecdotes :

  • L’auteur de la nouvelle originelle, l’écrivain Conrad Aiken est le père de Joan Aiken, similairement à l’origine de l’épisode Marmelade Wine, cette saison.

  • Des extraits du texte originel de Conrad Aiken sont récités par Orson Welles. Ce dernier préféra s’enregistrer par ses propres moyens plutôt que de se rendre aux studios et envoya simplement la bande magnétique par la poste. Elle arriva à la dernière minute et la production l’intégra d’emblée.

  • La peinture introduisant l’épisode est également vue sur un mur de bureau dans l’épisode Jeu d’identité de Columbo (5.03).

  • Radames Perra (Paul) interpréta le jeune Kwai Chang Caine, dans tous les flashbacks de la série Kung-Fu (1972-1975), y compris la fameuse séquence du Petit Scarabée. Il fut également John, qui, fit soupirer Mary Ingalls durant les trois premières saisons de La Petite Maison dans la Prairie (1974-1983). Il abandonna l’interprétation à l’âge adulte, avant de se reconvertir avec succès dans l’électronique. 

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6-A. A QUESTION OF FEAR

Date de diffusion : 27 octobre 1971

Scénario : Theodore J. Flicker, d’après une nouvelle de Bryan Lewis

Mise en scène : Jack Laird

Durée : 38’24’’

Résumé :

Suite à un pari, le Colonel Malloy, célèbre aussi bien pour son courage que pour sa cruauté, accepte de passer la nuit dans une maison hantée, sans en sortir jusqu’au matin. Sur place il est confronté à de nombreuses manifestations surnaturelles épouvantables, mais finit par s’apercevoir qu’il est en fait enfermé dans une maison pleine de dispositifs électroniques très avancés. Il est en fait l’objet d’une vengeance due à son sinistre passé.

Critique :

Cette variation réussie sur l’inépuisable thème de la maison hantée amusera les amateurs des Avengers par son parallèle marqué avec L’Héritage diabolique, l’une des plus mémorables aventures vécues par Emma Peel. Si le décor gothique se substitue au design original et surréaliste des Avengers, les ressorts narratifs demeurent les mêmes, jusqu’à la confrontation explicative avec le Mastermind (certes bien vivant), via un écran. L’objectif reste ainsi de faire sombrer le protagoniste dans la folie. Le fait qu’il s’agisse ici d’une anthologie et non d’une série avec une héroïne récurrente augmente efficacement le suspense quant à la destinée finale du colonel. 

En dehors de ce clin d’œil assez irrésistible l’épisode vaut par toute une première partie magnifiquement mise en scène par Jack Laird et proposant une belle synthèse de tous ls ressorts horrifiques, visuels ou musicaux, que peut proposer un manoir gothique hanté. A peu près tout le catalogue y passe, d’autant qu’être le showrunner du programme a visiblement permis à Leard de disposer d’un budget pour le moins confortable. Nielsen réalise une impressionnante prestation assurant la véracité de la séquence et démontre une nouvelle fois que l’humour déjanté n’est pas la seule corde à son arc. La confrontation télévisée avec son ennemi dure sans doute un peu trop longtemps, notamment concernant l’exposé des causes de la vengeance, mais elle permet de pointer efficacement à quel point le suggéré peut causer un effroi supérieur aux effets visuels directs.

Anecdotes :

  • Leslie Nielsen (Colonel Malloy) se fit connaître pour des rôles sérieux, parfois même sombres (Planète interdite, 1956. L’aventure du Poséidon, 1972), avant d’opter pour la comédie à la fin des années 70 à travers les productions du trio .Z.A.Z. (Y a-t-il un  pilote ?et Y a-t-il un flic ?, Police Squad, Scary Movie...).

  • Alorq qu’il était célèbre pour être impitoyable envers les dépassements de délais des tournages, Laird fut dépassé par le sien et ne put l’achever qu’avec un jour et demi de retard sur le planning, soit un délai considérable.

  • L’extérieur de la maison hantée est en fait représenté par le fameux hôtel du film Psychose (1960). Ce décor est situé dans les Studios Universal, où il figure au programme des visites guidées. 

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6-B. THE DEVIL IS NOT MOCKED

Date de diffusion : 27 octobre 1971

Scénario : Gene Kearney, d'après une nouvelle de Manly Wade Wellman

Mise en scène : Gene Kearney, Francis Lederer et Hank Brandt

Résumé :

A la tête de ses hommes, un général SS traque les maquisards d’une région perdue des Balkans.  Il arrive au château de celui qu’il estime être le chef de la résistance, un noble très respecté (et obéi). Fort courtois, le Comte offre un succulent souper à son hôte allemand, mais ne l’accompagne pas : en effet il a pour coutume de ne dîner qu’à minuit.

Critique :

La chute de l’épisode pâtit bien entendu d’être devinée dès qu’apparaît le Comte. C’est d’autant plus vrai que l’idée centrale du scénario n’est pas quelque peu préfigurer un classique du cinéma fantastique des années 80, La Forteresse Noire, voyant pareillement une garnison SS confrontée à l’horreur que dissimule un château isole de Roumanie. Néanmoins la narration a l’habileté de ne pas être dupe et de plutôt jouer la carte de l’humour d’une savoureuse caricature de Dracula, confrontée à une autre figure du Mal, en définitive bien davantage sinistre. La pétillante rencontre d’un Francis Lederer et d’un Helmut Dantine très à leur affaire participe également au succès de l’ensemble. En prenant le temps de développer une véritable histoire et de soigner ses personnages, l’épisode montre avec netteté ce qu’auraient du devenir les sketchs autrement plus inconsistants de Jack Laird, visant à une relecture humoristique des figures de l’horreur gothique.

Anecdotes :

  • Francis Lederer (Dracula) fut un acteur d’origine autrichienne qui joua de nombreux personnages issus d’Europe de l’Est. Il tient ici son dernier rôle à la télévision, alors qu’il jouait déjà Dracula dans le film Le retour de Dracula (1958).

  • Helmut Dantine (le général SS) est lui aussi d’origine autrichienne et joua pareillement de nombreux rôles d’Europe de l’Est. Il interpréta à plusieurs reprises des officiers nazis.

  • L’épisode est basé sur la nouvelle The Devil Is Not Mocked, de Manly Wade Wellman. Elle fut initialement publiée dans Unknown en Juin 1943.

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7-A. MIDNIGHT NEVER ENDS

Date de diffusion : 03 novembre 1971

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 20’10’’

Résumé :

Ruth Asquith roule de nuit et prend un auto-stoppeur, un jeune militaire. En discutant, à travers des pressentiments et des sensations de déjà-vu, ils s’aperçoivent progressivement qu’ils ont déjà vécu plusieurs fois cette scène, avec quelques changements. Ils ignorent par contre tout de leur propre identité. Il en va de même pour deux autres individus qu’ils rencontrent, un patron de café et un shérif.

Critique :

Clairement, Bruce Serling cède ici à la tentation de recycler l’un des scénarios de La Quatrième Dimension au profit de sa nouvelle anthologie.  Il met la barre très haute en décidant d’écrire un remake de l’un des meilleurs opus d’alors, Five Characters in Search of an Exit. On retrouve en effet l’idée de personnages ignorant qui ils sont vraiment et pris dans un enfermement, ici temporel au lieu de spatial (on trouve ici un écho partiel du thème du verrou temporel, développé ultérieurement par le film Un jour sans fin) . De fait l’histoire se suit avec intérêt, d’autant que l’interprétation de Susan Strasberg rend Ruth très humaine et sensible, alors que par définition elle ne forme qu’une silhouette.

Mais la narration apparaît moins maitrisée que dans The Twilight Zone. Les quelques indices insérés s’avèrent moins idéalement dosés, ce qui permet au spectateur de comprendre à mi-parcours ce qu’il est en train de se passer. L’imagination se voit bridée, de même que cela enlève une partie de son impact à la chute. Par ailleurs les protagonistes et leurs dialogues se montrent également moins agréablement insolites. On peut y sans doute y percevoir une conséquence néfaste de la récriture du script de Serling décidée par Leard. Heureusement le talent du metteur en scène Jeannot Swarc, aidé par les décorateurs du studio parvient à créer une atmosphère onirique, suppléant en partie aux faiblesses de la narration. De plus cette stylisation du réel résulte parfaitement en phase avec la clef de l’énigme.

Anecdotes :

  • Susan Strasberg (Ruth Asquith), d’origine juive, se fit connaître par l’immense succès de sa représentation d’Anne Franck, dans la version théâtrale du fameux Journal. A 18 ans, elle devint la plus jeune actrice à avoir son nom en haut d’une affiche de Broadway. Elle participe à de très nombreuses séries, des années 60 aux 80 et est l’auteure de deux best-sellers autobiographiques. Elle fut l’une des meilleures amies de Marilyn Monroe.

  • Le décor du restaurant sera réemployé dans l’épisode The Tune in Dan's Cafe, cette saison.

  • Le visage du tableau introduisant l’épisode est inspiré de Rod Serling.

  • Jack Leard fit réécrire le scénario originel de Rod Serling par son superviseur de scénarios, qui l’altéra en grande partie. La relation entre Serling et Leard allait progressivement se détériorer au fil de la série.  

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7-B. BRENDA

Date de diffusion : 03 novembre 1971

Scénario : Matthew Howard, d'après une nouvelle de Margaret St. Clair

Mise en scène : Allen Reisner

Durée : 29’32’’

Résumé :

Brenda, une pré-adolescente que des problèmes relationnels rendent agressive, s’ennuie sur l’île où elle passe des vacances avec ses parents. En forêt elle rencontre une étrange créature humanoïde faite de mousse été feuilles Un lien s’établit entre eux, mais l’être effraie les parents.

Critique :

A travers une fable fantastique, l’épisode voulait sans doute s’efforcer d’explorer la difficulté de communication pouvant exister entre une enfant hyper sensible et son entourage. Une louable intention, mais qui échoue à se concrétiser. Le récit manque totalement du merveilleux nécessaire pour exprimer le mystère et la spécificité de l’enfance, a contrario des futurs films de Spielberg. La créature relève du Nanar et son côté ridicule empêche la narration de relever d’autre chose que d’un comique involontaire tournant rapidement à l’agacement. Peut-être le public des années 70 était-il moins blasé que nous sur cette question, mais, tel quel, l’épisode suscite un tel ennui que sa presque demi-heure de durée résulte interminable. C’est d’autant plus vrai que l’action se limite pour l’essentiel à suivre les agissements stupides ou incohérents d’une jeune héroïne insupportable. A plusieurs reprises, elle change ainsi totalement de sentiment envers l’entité, sans aucune raison perceptible. Le final veut créer une émotion supplémentaire, mais sombre dans le pathos déclamatoire. On admire quelques superbes panoramas californiens, mais c’est insuffisant pour sauver l’opus.

Anecdotes :

  • Le nom « Matthew Howard » est un pseudonyme souvent utilisé par l’auteur Douglas Heyes, quand il n’écrit pas directement un scénario, mais adapte un texte originel.

  • L’épisode se base sur la nouvelle Brenda, Margaret St. Clair , initialement publiée dans Weird Tales en Mars 1954.

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8-A. THE DIARY

Date de diffusion : 10 novembre 1971

Scénario : Rod Serling

Mise en scène: William Hale

Durée : 25’48’’

Résumé :

Redoutable chroniqueuse mondaine, Holly s’acharne contre Carrie, une star déclinante, suite à une rivalité amoureuse. Celle-ci lui offre un journal intime vierge, qu’elle déclare avoir acheté fort cher dans une curieuse boutique. Holly a la surprise de découvrir que le journal se remplit de lui-même, toujours une journée à l’avance. Il annonce ainsi plusieurs morts que Holly ne peut empêcher, mais l’aventure prend un tour encore plus sinistre quand plus rien n’apparaît sur le journal des jours à venir de Carrie.

Critique :

L’amateur de séries télévisées pourra reconnaitre un thème finalement assez similaire, quoique traité de manière autrement sinistre, à celui de l’aimable Demain à la Une (1996-2000), où un chat mystérieux apportait chaque jour au héros le journal du lendemain. Mais l’épisode relève en définitive de La Quatrième Dimension, avec une nouvelle description d’un individu aux prises avec un dérèglement du réel. L’histoire se montre habile, avec un crescendo progressif voyant le piège progressivement se refermer sur Holly. Un suspense est également installé quant à la nature exacte du phénomène en cours, surnaturel ou délitement psychiatrique de l’héroïne, qui remplirait inconsciemment son journal personnel. Par son aspect claustrophobe, la mise en scène accompagne efficacement le sentiment d’enfermement toujours davantage ressenti par Holly. Il est par contre à regretter que la chute de l’histoire, aussi bouleversante soit-elle, demeure assez floue sur ce qui relève du réel ou d’une psychose. Patty Duke réalise une impressionnante prestation, d’autant plus forte que la dérive psychologique d’Holly n’est pas sans donner écho à son parcours personnel. Un autre intérêt de la distribution réside dans la brève apparition d’une Lindsay Wagner pré Super Jaimie, au jeu déjà très plaisamment reconnaissable.

Anecdotes :

  • Virginia Mayo (Carrie) fut repérée par la MGM lors d’une comédie musicale à Broadway et effectua de nombreuses charmantes apparitions dans les Westerns et films d’aventures des années 50 et 60, avec de nombreux rôles de Girl-next-door. Durant les années 70 elle s’oriente vers la télévision (Santa Barbara). Elle soutint activement les campagnes de Nixon et de Ronald Reagan, un ami de longue date avec lequel elle avait plusieurs fois tourné.

  • Patty Duke (Holly) fut une enfant star oscarisée (Miracle en Alabama, 1962). Mais rudement exploitée par les agents à qui ses parents l’avaient confié, elle connut des dépressions et des troubles bipolaires qui s’accrurent avec l’âge. . Sa carrière en fut pénalisée et, à partir des années 70, elle dut se consacrer à la seule télévision, où elle continua toutefois à connaître le succès. Elle fut l’épouse de John Astin et laissa un livre racontant son parcours : Brilliant Madness : Living with Manic Depressive Illness.

  • Très brièvement aperçue, l’infirmière est jouée par Lindsay Wagner. Ils ‘agit de l’un de ses tous premiers rôles recensés à la télévision. La jeune actrice allait accéder à la célébrité en 1975, en devenant Super Jaimie, la Femme bionique. 

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8-B. A MATTER OF SEMANTICS

Date de diffusion : 10 novembre 1971

Scénario : Gene Kearney

Mise en scène : Jack Laird

Durée : 2’23’’

Résumé :

Le Comte Dracula se rend dans une banque du sang. L’infirmière en service croit que son Eminence va faire un dépôt, mais il s’agit plutôt d’un retrait. 

Critique :

Une nouvelle fois la vignette du jour proposée par Jack Laird apparaît davantage indigente qu’amusante. Evidemment le spectateur établit immédiatement l’évident rapport de causalité existant entre la visite de Dracula et la banque de sang, et s’attend dès lors à que la chute apporte un élément nouveau. Ce qui ne sera malheureusement absolument pas le cas. Malgré la vacuité de l’exercice, on apprécie tout de même l’amusant cabotinage du toujours suavement pittoresque Cesar Romero. L’acteur semble bien s’amuser, mais il est hélas le seul.

Anecdotes :

  • Cesar Romero (le Comte Dracula) est resté fameux pour avoir le premier incarné le Joker à l’écran, dans la série Batman 1966 (le Clown diabolique était apparu dans les Comics en 1940), une enthousiasmante création. Des années 30 aux 50, cet acteur d’ascendance cubaine (surnommé The Latin from Manhattan par les échotiers) tint de nombreux rôles de figures historiques espagnoles ou de Latin lover, où sa distinction naturelle et ses manières suaves firent merveille. Chanteur et danseur accompli, il fut également le partenaire à l’écran de la grande Carmen Miranda.

  • E. J. Peaker, l’actrice incarnant l’infirmière, a indiqué que bien que Laird soit crédité comme réalisateur, la séquence a été mise en scène par Spielberg, alors un jeune talent mis en avant lors du pilote de l’anthologie.

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8-C. BIG SURPRISE

Date de diffusion : 10 novembre 1971

Scénario : Richard Matheson

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 10’33’’

Résumé :

A la campagne, le vieil Hawkins indique à trois jeunes garçons que s’ils creusent sous le chêne qu’il désigne, ils trouveront une grande surprise. Anima par la cupidité, l’un des trois garçons va creuser suffisamment profond pour atteindre la fameuse « surprise ».

Critique :

L’arrivée de Richard Matheson, écrivain talentueux devenu l’un des piliers de La Quatrième Dimension, au sein de la galerie de Nuit créait bien entendu une grande curiosité. Celle-ci résulte en partie déçue, car le texte originel, comme son adaptation télévisuelle, apparaissent assez anodins vis-à-vis des chefs d’œuvre proposés par Matheson dans la première anthologie de Serling. La chute demeure toutefois réellement surprenante et Jeannot Swarc sait déployer une grande inventivité visuelle afin d’animer un récit se limitant essentiellement à creuser un trou ! Surtout, avec le recul l’épisode se montre amusant du fait du contre-pied assez jouissif qu’il représente face aux récits à la Spielberg qui vont marquer la décennie suivante (Les Goonies) et que l’on a récemment retrouvé via le succès de Stranger Things. Les jeunes gens s’y montent ainsi antipathiques au possible, aussi bêtement cupides que leurs ainés et parfaitement désagréables les uns envers les autres, un vrai régal. Evidement la conclusion de l’aventure sera loin d’être euphorisante.

Anecdotes :

  • Plusieurs brefs inserts tirés du film d’Hitchcock Les Oiseaux prennent place en cours d’épisode.

  • John Carradine (Hawkins) fut un célèbre chef de troupe de Broadway, montant notamment des pièces shakespeariennes connaissant un grand retentissement. Au cinéma il fut également un acteur à succès, spécialisé dans les Westerns (L'Homme qui tua Liberty Valence, 1962) et les films d'épouvante (House of Dracula, 1945).  Sa voix profonde et sonore contribue beaucoup à sa popularité. John Carradine était ainsi surnommé The Bard of The Boulevard pour son habitude de déclamer du Shakespeare durant ses promenades. Il est le père de quatre acteurs, dont David, popularisé par la série Kung Fu (1972-1975).

  • L’épisode est basé sur la nouvelle Big Surprise (également intitulée What Was in the Box), de Richard Matheson. La nouvelle fut initialement publiée dans Ellery Queen's Mystery Magazine, en Avril 1959.

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8-D. PROFESSOR PEABODY'S LAST LECTURE

Date de diffusion : 10 novembre 1971

Scénario : Jack Laird

Mise en scène : Jerrold Freedman

Durée : 10’54’’

Résumé :

Spécialiste universitaire des religions comparées, le Pr. Peabody présente à ses étudiants un pittoresque culte local, centré sur la petite ville d’Arkham. Il décrit tout à tour avec ironie les différents dieux de son panthéon, les « Grands Anciens ». A l’extérieur du bâtiment, une grande tempête commence à se lever.

Critique :

Le début de l’épisode suscite la curiosité, avec le clin d’œil bien trouvé du Mythe de Cthulhu et de ramené au rang de petit culte local. Malheureusement la suite échoue à développer le moins du monde cette idée de départ. Le récit se borne à montrer Peabody continuer à présenter chaque dieu, accompagné d’un commentaire ironique à la drôlerie très relative, plus quelques autres concepts de base de l’univers de Lovecraft. On finit par se lasser de l’exercice, malgré l’énergie déployée par Carl Reiner pour animer un exercice de style en soi particulièrement statique. La chute s’avère tellement navrante qu’elle achève de couler l’opus, au lieu de la sauver. L’ensemble laisse transparaître un fort sentiment de paresse. Ainsi l’idée que les étudiants soient des homonymes de Lovecraft et consorts n’est pas du tout exploitée. Les commentaires et questions de ces étudiants auraient pu aisément insérer de petits clins d’œil aux auteurs, et non demeurer tristement interchangeables. En fait, on devine vite que Laird a repris l’une de ses fameuses vignettes pour se borner à la délayer de 3 à 11 minutes, simplement en prolongeant autant que nécessaire la liste des Grands Anciens.

Anecdotes :

  • Carl Reiner (Pr. Peabody) est une grande figure de la comédie américaine à la télévision, dont la carrière remonte aux débuts du genre, dans les années 50. Il totalise 12 Emmy Awards et est la père du réalisateur Rob Reiner.

  • Chaque nom d’étudiant correspond à celui d’une grande plume du Fantastique horrifique, avec notamment Lovecraft et deux de ses principaux disciples, Bloch et Derleth.

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9-A. HOUSE - WITH GHOST



Date de diffusion : 17 novembre 1971

Scénario : Gene Kearney d'après une nouvelle d'August Derleth

Mise en scène : Gene Kearney

Durée : 17’54’’

Résumé :

Un couple d’Américains séjournant en Angleterre s’adresse à une curieuse agence immobilière londonienne, proposant des locations de maison hantée, l’épouse étant en effet passionnée de spiritisme, tandis que le mari cherche une demeure isolée nantie d’un grand escalier, afin d’occire sa moitié et de pouvoir profiter de sa fortune avec sa maîtresse. Mais, à sa grande surprise, le fantôme s’avère bien réel et rien ne va se dérouler comme prévu.

Critique :

Les prémisses de l’épisode se montrent prometteuses, grâce au cachet anglais les caractérisant. Cette saveur s’installe grâce à des décors et à des inserts bien choisis, à défaut de résulter originaux (le Parlement, les Cotswolds). Toute la scène de l’Agence Chischester, Piccadilly, se verra sans doute très appréciée par les amateurs des Avengers, pour constituer un endroit à la fois décalé et très anglais, à la façon de la saison 4, tandis que son pittoresque propriétaire constitue un Excentrique de la plus belle eau, avec sa marotte des fantômes de diverses espèces.

La réussite de ce volet de l’opus sera prolongée grâce aux apparitions d’acteurs bien choisi aux côtés d’un efficace Bob Crane, tels Bernard Fox, grands spécialistes de rôles d’Anglais ou Alan Napier, le so British Alfred de Batman’66. Malheureusement, contrairement au style originel de Derleth, l’épisode décide de développer sa situation initiale sur un ton très porté sur la pure comédie. Or les gags vont s’y révéler très laborieux, relevant parfois de la simple farce, tout au long d’un déroulement bien trop prévisible, y compris lors de la chute.  

Anecdotes :

  • Deux acteurs devenus célèbres grâce à la série Papa Schultz (1965-1971) participent à l’épisode, Bob Crane (le mari) et Bernard Fox (le fantôme).

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9.B. A MIDNIGHT VISIT TO THE NEIGHBORHOOD BLOOD BANK



Date de diffusion : 17 novembre 1971

Scénario : Jack Laird

Mise en scène : William Hale

Durée : 1’35’’

Résumé :

Un Vampire s’introduit dans la chambre d’une jeune femme endormie, afin d’étancher sa soif de sang. Mais une déconvenue l’attend.

Critique :

L’épisode représente une énième vignette pseudo humoristique de Jack Laird, visant une nouvelle fois à représenter de manière décalée les figures classiques de l’horreur gothique. L’indigence de l’humour fait derechef tomber le récit à plat, avec cette fois une circonstance aggravante le quasi doublon opéré de manière assez paresseuse avec le précédent exemple en la matière. A Matter of Semantics. Victor Buono succède ainsi à Cesar Romero comme grand acteur au talent gâché au bénéfice d’une pesante caricature de Vampire. Le plus amusant demeure le soin avec lequel Rod Serling veille encore et toujours à n’effectuer aucune présentation pour ce type de sketch.

Anecdotes :

  • Victor Buono (Le Vampire) a souvent joué des méchants hors normes et flamboyants, à la télévision comme au cinéma. Il est le Comte Manzeppi dans deux épisodes (sur trois participations) des Mystères de l'Ouest, le délirant King Tut dans neuf épisodes de Batman 1966, le Mr Moon des Incorruptibles et le Pr. Schubert dans cinq épisodes de L'homme de l'Atlantide, entre autres nombreux rôles. Acteur, écrivain, poète, chef cuisinier, il succomba à une crise cardiaque à l'âge de 43 ans, le 1er janvier 1982. Il fut l'un des très rares acteurs de son temps à ne jamais faire mystère de son homosexualité.

  • Journey Laird, fille du producteur de la série, joue ici la victime visée par le Vampire. Il s’agit de son unique rôle répertorié.

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9-C. DR. STRINGFELLOW'S REJUVENATOR



Date de diffusion : 17 novembre 1971

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Jerrold Freedman

Durée : 21’16’’

Résumé :

Particulièrement cynique et hâbleur, Doc Stringfellow est l’un de ces nombreux charlatans parcourant le Far West pour vendre des élixirs de pacotille à une clientèle crédule. Arrivé dans une petite ville, il va tenter de profiter de l’agonie d’une petite fille atteinte d’une péritonite, afin de se faire de la publicité. L’avènement va scandaliser son serviteur et complice, mais aussi le médecin local, qui de son côté à sombré antialcoolisme. L’avidité de Stringfellow va toutefois connaître un stupéfiant châtiment.

Critique :

L’épisode suscite un retour au Weird West, ce Far West mâtiné de fantastique auquel La Quatrième Dimension aura consacré plusieurs opus. D’ailleurs la figure traditionnelle du charlatan vendeur de mirifiques élixirs s’y voyait évoquée dans des épisodes aussi différents que Mr. Denton on Doomsday ou Mr. Garrity and the Graves. Ce plaisant effet Madeleine se voit encore renforcé par la présence de Murray Hamilton dans le rôle du médecin alcoolique, lui qui incarna Mister Death dans le remarquable One for the Angels, opus dont le récit renvoie un curieux effet miroir à celui-ci. Mais l’opus sait développer un intérêt propre grâce à l’implacable portrait de Stringfellow, savamment dressé par Rod Serling.

Impeccablement interprété par un Forrest Tucker très en verve et maîtrisant à merveille les codes du Western, Stringfellow s’émancipe du simple cliché du charlatan pour acquérir une dimension toute shakespearienne à travers son affirmation de la grandeur inhérente à la vente d’un rêve enchantant un quotidien morne ou tragique. Cette métaphore permet à Serling de fustiger les travers d’une industrie hollywoodien dont il critique la vénalité, l’orgueil démesuré et la perte de repères moraux l’entraînant à confondre enchantement et billevesées mercantiles.

 Des propos n’ayant rien perdu de leur acuité de nos jours, d’autant plus scandaleux lorsqu’ils s’adressent à l’enfance. La talentueuse mise ns cène sait également apporter une vraie force au moment fatidique voyant le fantastique faire brusquement irruption afin de châtier Stringfellow. On regrettera toutefois la grandiloquence de certaines scènes trop démonstratives (comme le bûcher des vanités final), un travers de Serling là-aussi occasionnellement perceptible dans la Zone crépusculaire.

Anecdotes :

  • Forrest Tucker (Dr. Ernest Stringfellow) se fit connaître dans les spectacles de Vaudeville. Outre ses rôles humoristiques, il tourna dans de nombreux Westerns. Sa carrière souffrit d’un alcoolisme s’aggravant durant les années 70. En 1986, il mourut d’un cancer, après s’être effondré en chemin vers la cérémonie d’inauguration de son étoile sur le fameux Walk of Fame.

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9-D. HELL'S BELLS



Date de diffusion : 17 novembre 1971

Scénario : Theodore J. Flicker d'après une nouvelle d'Harry Turner

Mise en scène : Theodore J. Flicker

Durée : 8’55’’

Résumé :

Un Hippie meurt dans un accident de voiture. Après avoir été jugé par trois démons, il se retrouve précipité en Enfer. Mais le domaine de Satan va se révéler très différent de ce qu’il anticipait.

Critique :

Ce bref épisode développe une joyeuse pochade se moquant des aspects les plus caricaturaux du mouvement hippie, alors en pleine actualité mais se ringardisant progressivement. En effet il a l’astuce de reprendre l’idée originelle du huis clos de Sartre (L’Enfer c’est les autres), en plongeant le héros dans un enfer constitué de poncifs de la société américaine traditionnelle, tous dépeints comme particulièrement ennuyeux. L’écriture se montre irrésistiblement féroce, mais pas réactionnaire pour autant, puisque que renvoyant dos à dos ces deux visions de la société quand celles-ci se caricaturent elles-mêmes. La caricature du Hippie permet à John Astin de déployer toute sa fantaisie de grand acteur comique, on se régale. Malheureusement, Theodore J. Flicker se montre moins inspira derrière la caméra qu’à l’écriture, sa mise en scène peu imaginative et très figée entrave réellement le succès d’un épisode toutefois bien plus relevé que les sketchs pseudo gothiques de Jack Leard.

Anecdotes :

  • John Astin (Randy) reste célèbre pour son interprétation de Gomez Addams dans La Famille Addams (1964-1966) et du Professeur Wikwire dans Les Aventures de Brisco County Jr (1993-1994). Tout au long de sa carrière il se spécialisa dans les rôles d'excentriques, souvent humoristiques, parfois menaçants. Il joua dans La Quatrième Dimension Les Mystères de l'Ouest, Bonanza, Le Virginien, Police Woman, L'Île Fantastique, Love Boat, Arabesques, Killer Tomatoes... Menant également une carrière de metteur en scène, il fit ses premières armes avec Night Gallery, en réalisant trois segments d’épisode.

  • Theodore J. Flicker, auteur et réalisateur de l’épisode, joue également le Diable.

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10-A. DARK BOY



Date de diffusion : 24 novembre 1971

Scénario : Halsted Welles, d'après une nouvelle d'August Derleth

Mise en scène : John Astin

Durée : 31’02’’

Résumé :

Judith arrive dans une petite localité du Far West, où elle est a été appelée pour devenir la nouvelle institutrice. Dans sa classe elle remarque un étrange petit garçon isolé des autres, arborant une cicatrice. Elle va progressivement comprendre qu’il s’agit en fait d’un fantôme qu’elle est la seule à voir.

Critique :

L’épisode doit beaucoup à la mise en scène de John Astin, une nouvelle fois très inspirée. Celui-ci sait mettre en valeur les paysages naturels, le récit se montrant riche en scènes en extérieur, tout en sachant rendre parfois étonnamment insolites les manifestations du fantôme (notamment lorsqu’il apparaît à la fenêtre de l’école). Toutefois, même ajouté au talent sensible d’Elizabeth Hartman, cette réalisation ne compense pas la faiblesse de l’intrigue. Ainsi, la mise en place progressive du fantôme prend beaucoup trop de temps, d’autant qu’elle se montre répétitive à souhait au travers de différentes journées très semblables vécues par l’héroïne, et qu’elle occupe la quasi-totalité de l’épisode, l’affaire se résolvant en suite en deux minutes (littéralement). Cette pesanteur s’accompagne aussi d’un ton émollient soulignant que l’épisode s’éternise trop pour son bien (avec plus d’une demi-heure il reste l’un des plus longs de l’anthologie). Cela passe par une sous intrigue romantique se plaquant sur l’ensemble, ou une esthétique de roman photo, avec ces agriculteurs travaillant la terre mais jamais poussiéreux ou en sueur, ou de ses maisons à la joliesse totalement décalées du réel.

Anecdotes :

  • Elizabeth Hartman (Judith) devient en 1965, à l’âge de 22 ans, l’une des plus jeunes actrices à remporter le Golden Globe. Ce rôle de jeune aveugle dans Un coin de ciel bleu lui vaut aussi d’être proposée aux Oscars. Par la suite sa carrière se partage entre cinéma et théâtre. Elle se suicide en 1987, après avoir souffert de dépression chronique durant de nombreuses années.

  • L’épisode est basé sur la nouvelle The Dark Boy, d’August Derleth. Le texte fut initialement publié dans The Magazine of Fantasy and Science-Fiction, en février 1957. Souvent surnommé F&SF par les amateurs du genre, ce magazine, régulièrement publié depuis 1949, est réputé pour la grande qualité littéraire de ses textes. 

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10-B. KEEP IN TOUCH - WE'LL THINK OF SOMETHING



Date de diffusion : 24 novembre 1971

Scénario : Gene Kearney

Mise en scène : Gene Kearney

Durée : 18’41’’

Résumé :

Obsédé par une femme peuplant ses rêves depuis des années, un homme fait appel à la police pour la retrouver, sous le prétexte d’une agression inventée. Claire se révèle être une femme séduisante et très riche, mais aussi malheureuse en mariage. Une étrange romance va naître entre eux. 

Critique :

L’intrigue suit une curieuse trajectoire, partant d’une situation totalement énigmatique et plaisamment révélée par touches successives, mais en fait pour converger vers un trigonale amoureux à la résolution des plus classiques. L’on ne sort de l’ambigüité qu’à son détriment, pourrait être la morale de cette écriture ne s’extirpant pas d’un certain mélodrame sur le tard. L’épisode vaut néanmoins le coup d’œil pour une première partie très amusante au sein du commissariat, bref mais divertissant pastiche des séries policières en vogue au cours de la décennie. Mais il capitalise surtout sur le charme étrange de Joanna Pettet, dont le côté à la fois énigmatique et évanescent lui apporte ses meilleurs moments. La présence d’Alex Cord au look très daté amusera les amateurs nostalgiques de Supercopter, tant son personnage romantique se situe à l’opposé d’Archangel.

Anecdotes :

  • Joanna Pettet (Claire) se fit connaître dans le cinéma de son Angleterre natale au cours des années 60, ainsi qu’à Broadway. Elle est ainsi la Mata Bond de Casino Royale (1967). A partir des années 70 elle apparaît davantage dans les séries télévisées américaines (Banacek, Mannix, L’Île fantastique, La croisière s’amuse, Arabesque...). Elle va également participer quatre fois à Night Gallery. Elle se retire au début des années 90, après la mort de son unique enfant suite à une overdose.

  • Alex Cord (Sutton) est notamment connu pour le rôle d’Archangel dans la série Supercopter (1984-1986).

  • On voit un plan de New York sur l’un des murs du commissariat, alors que l’action prend place à San Francisco. 

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Saison 2 Partie 1Saison 3

Night Gallery

Saison 2 - Partie 2



11-A. PICKMAN'S MODEL



Date de diffusion : 01 décembre 1971

Scénario : Alvin Sapinsley, d 'après une nouvelle d'H. P. Lovecraft

Mise en scène : Jack Laird

Durée : 26’51’’

Résumé :

A Boston, vers la fin du XIXème siècle, le jeune professeur d’art Richard Pickman est renvoyé d’une école accueillant les jeunes filles de la haute société. En effet il a présenté à celles-ci l’une de ses propres peintures, représentant une sinistre goule ans un cimetière, un sujet jugé inapproprié. L’une de ses élèves, Mavis Goldsmith, est néanmoins intriguée par le tableau et se décide à visiter l’atelier de Pickman en l’absence de celui-ci. Elle va y effectuer une terrifiante rencontre.

Critique :

Night Gallery s’attaque ici à un authentique défi, avec l’adaptation d’une des œuvres maîtresses de H.P. Lovecraft, emblématique de son style aussi bien que de son univers. Un évènement d’ailleurs souligné par un vibrant hommage au Maître de Providence lors du traditionnel prologue. La gageure se voit remportée haut la main grâce au talent de la transposition à l’écran écrite par Alvin Sapinsley, auteur vétéran dont la carrière remonte aux débuts de la télévision mais, qui écrivit surtout pour le genre policier. Il sait rendre croissant le suspense jusqu’à la révélation horrifique et crée judicieusement le personnage de Mavis Goldsmith, idéale pour servir de guide au spectateur lors de la découverte de l’univers cauchemardesque de Pickman et de ses peintures au si troublant réalisme. Par ailleurs il imprègne les dialogues entre Mavis et Pickman d’une indéniable poésie gothique, rendant parfaitement compte de la qualité littéraire de l’oeuvre originelle.

Le passage de l’écrit au visuel se déroule également à la perfection, avec Jack laird effectuant sans doute sa meilleure mise en scène de l’anthologie et particulièrement suggestive. Les artistes et costumiers des Studios Universal apportent aussi une précieuse contribution, nous offrant une impeccable reconstitution d’époque, mais aussi et surtout une Créature authentiquement terrifiante, digne de ce que pouvait alors proposer le cinéma. Louise Sorel et Bradford Dillman effectuent de solides compositions, sans sombrer dans l’hyperbole.  On peut regretter que le dénouement postérieur à l’action principale résulte quelque peu prévisible. Mais l’épisode compose un authentique chef d’œuvre doublé d’un bel hommage au pouvoir d’évocation de la peinture, en écho au sujet de l’anthologie elle-même.

Anecdotes :

  • Bradford Dillman (Pickman) débuta à Broadway, et appartint à l’Actor’s Studio. En 1959, il reçoit le prix d’interprétation masculine au Festival de Cannes, pour Le Génie du Mal. Outre le cinéma, il participe à de très nombreuses séries : Hulk, Les Mystères del’Ouest, Columbo… Il fut l’époux de l’actrice et Top model Suzy Parker.

  • En 1972, l’épisode fut proposé aux Emmy Awards, pour le maquillage de la Goule. Les artistes de la série, Leonard Engelman et John Chambers, l’ont développé à partir du moule de L'Étrange Créature du lac noir (1954).

  • Le tableau présenté par Rod Serling lors du prologue apparaît en tant que tel dans le déroulement de l’épisode (il s’agit de celui de la Goule), un fait demeurant rarissime au cours de l’anthologie.

  • L’épisode est basé sur une célèbre nouvelle de Lovecraft, Le Modèle de Pickman. Elle fut initialement publiée dans Weird Tales, en Octobre 1927. Ce Pulp dédié au Fantastique et à la Fantasy (1923-1954) est devenu une icône de la Pop Culture, tant il a accueilli d’auteurs emblématiques. Ceux-ci forment une incomparable galerie : Abraham Merritt, Fritz Leiber, Clark Ashton Smith. Robert E. Howard... Le magazine demeure particulièrement associé au souvenir du Maître de Providence, qui y publia ses premiers écrits avant d’en devenir une signature régulière. 

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11-B. THE DEAR DEPARTED

Date de diffusion : 01 décembre 1971

Scénario : Rod Serling, d’après une nouvelle d'Alice-Mary Schnirring

Mise en scène : Jeff Corey

Durée : 21’40’’

Résumé :

Mark Benett est un faux medium, escroquant ses riches clients lors de pseudo séances de spiritisme montées par Joe Casey, spécialiste en effets spéciaux. Mais la tension monte dans le duo, d’autant que Benett a une liaison avec la femme de Casey, Angela. Casey meurt brusquement dans un accident de circulation. Benett et Angela vont tenter une monter une séance sans son secours, mais celle-ci va se révéler très surprenante. 

Critique :

Après avoir connu les cimes avec Le Modèle de Pickman, le spectateur tombe ici de haut. Sans être désagréable, l’épisode reste très anodin. La chute en est ultra prévisible et le ton mélodramatique de la chute la rend pesante, surtout par rapport au manque d’intensité précédent. Le récit aurait put fonctionner si une ambiance réellement trouble et turpide s’était instaurée au sein du triangle amoureux, mais l’opus manque de temps pour cela, tandis que les comédiens se montrent aussi insipides que la mise en scène. Les amants ne sont d’ailleurs absolument pas coupables de la mort du mari, ce qui ne change rien au ton assez moralisateur de l’ensemble. L’épisode ne fait malheureusement que survoler ce qui aurait pu former un vrai sujet, l’évocation de trucages bien antérieurs à l’ère des images générées par ordinateur et formant aussi bien l’apanage des escrocs que celui du cinéma ou du music-hall.

Anecdotes :

  • Steve Lawrence (Mark Bennett) est avant tout connu aux USA en tant que chanteur. Il se produisit en duo avec son épouse Eydie Gormé, des années 50 aux 2000, notamment à Las Vegas.

  • L’épisode est basé sur la nouvelle du même nom d’Alice-Mary Schnirring, initialement publiée dans Weird Tales, en Mai 1944.

  • Hormis pour la mise en place de la situation, le script initial de Rod Serling a été entièrement réécrit par Jack Laird. 

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11-C. AN ACT OF CHIVALRY

Date de diffusion : 01 décembre 1971

Scénario : Jack Laird

Mise en scène : Jack Laird

Durée : 1’05’’

Résumé :

Quand une jolie blonde pénètre dans un ascenseur, tous les Messieurs présents ôtent leur chapeau. La Mort y entre à son tour, sous la forme d’un grand squelette portant lui aussi chapeau. Les Messieurs lui demandent alors de saluer la demoiselle, et Mister Death s’exécute… A sa manière.

Critique :

Certes toujours très peu substantielle, ce nouveau sketch comique se révèle plus amusante que la plupart de ces vignettes de Jack Laird visant à mettre en scène les figures horrifiques classiques de manière originale. La popularité des chapeaux masculins situe agréablement l’action dans le temps. La chute se révèle réellement inattendue et digne d’Halloween. Pour sa quasi première apparition à l’écran et dans un rôle muet, Deirdre Hall pétille déjà. Et puis avouons qu’il s’avère difficile de na pas songer à la représentation anthropomorphique de la Mort dont le regretté Terry Pratchett fit l’un des personnages les plus délectables et décalés de ses Annales du Disque-Monde.

Anecdotes :

  • La jeune femme blonde est interprétée par Deirdre Hall, Il s’agit quasiment de son premier rôle répertorié. Elle va accéder à la célébrité en 1976 avec le rôle du Dr. Marlena Evans, dans le soap opera à succès Des jours et des vies. Elle le tient encore aujourd’hui, quatre décennies et 2 300 épisodes plus tard. Présente à l’écran depuis 1965, Des jours et des vies est la deuxième série américaine la plus ancienne encore en activité, après Hôpital central (1963). Deirdre Hall est également la super héroïne Electra Woman, dans l’inoubliable série Electra Woman and Dyna Girl (1976).

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12-A. COOL AIR

Date de diffusion : 08 décembre 1971

Scénario : Rod Serling, d'après une nouvelle d'H. P. Lovecraft

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 25’59’’

Résumé :

A New York, dans les années 20, la jeune Agatha Howard rend visite au Dr. Juan Muñoz, ami de son père, avec lequel il avait tenté jadis de trouver un moyen de repousser la mort. Muñoz lui réserve un accueil cordial, mais Agatha remarque qu’un froid inhabituel règne chez son hôte, son appartement étant littéralement réfrigéré.  Au fil de ses visites, Agatha finit par s’y habituer, mais reçoit une nuit un appel désespéré de Muñoz, dont la climatisation vient de tomber en panne. Elle va alors découvrir son terrible secret.

Critique :

Après Le Modèle de Pickman, la Galerie de Nuit incorpore un nouveau chef d’œuvre à l’occasion de cette adaptation tout à fait réussie d’Air froid, deuxième classique d’H. P. Lovecraft, auteur fondamental dont on ne soulignera jamais assez l’influence profonde qu’il exerce encore aujourd’hui sur les Littératures de l’Imaginaire (le lecteur français pourra retrouve er ces deux nouvelles et quelques autres textes formidables dans le recueil Je suis d’Ailleurs, paru dans la collection Présence du Futur, chez Denoël). 

Les deux nouvelles partagent la même idée d’une horreur dissimulée derrière la trompeuse normalité de notre monde et jouent avec une parfaite efficacité sur le moment où le voile se déchire, avec un impact aussi terrible pour le protagoniste que pour le public. L’épisode a la chance de réunir le meilleur duo d’auteur et réalisateur de l’anthologie avec Rod Serling et Jeannot Szwarc. Serling reconstitue à merveille la psychologie des personnages et sait instiller un mystère que l’on devine déjà horrifique autour de Muñoz, tout en jouant parallèlement sur la peur universelle de la mort. Que la seule porte de sortie soit celle proposée par le récit se montre d’une ironie dévastatrice.

Celle-ci se ressent d’autant plus fortement qu’elle frappe de plein fouet la sympathique Agatha et son amour naissant pour Muñoz, Serling ne s’intéresse pas seulement au concept mais aussi aux ressentis de ses personnages, ce qui rend l’ensemble bien plus poignant pour le téléspectateur. L’aspect le plus profanatoire de l’histoire reste ainsi sans doute que Muñoz n’ait jamais abdiqué son humanité. Les images de Szwarc se montrent ingénieusement évocatrices, compte-tenu des moyens de l’anthologie, aidé par d’excellents comédiens. Le réalisateur se livre à tout un travail sur les couleurs, les lents déplacements de focus et sur les lentilles de caméra, suggérant toujours l’épouvante sans jamais la révéler pleinement, avant que l’heure ne soit venue.

Anecdotes :

  • Barbara Rush (Agatha Howard) connut une belle carrière dans le Hollywood d’après-guerre, où elle se spécialisa dans les rôles de femmes raffinées de la haute société. Egalement très présente au théâtre, elle se tourna comme beaucoup d’autres vers la télévision à partir des années 60. Elle apparaît dans Le Fugitif, Batman, Mannix, les Rues de San Francisco

  • L’épisode est basé sur la nouvelle Air froid, de Lovecraft. Elle fut initialement publiée dans Tales of Magic and Mystery (Mars 1928), puis dans Weird Tales (Septembre 1939).

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12-B. CAMERA OBSCURA

Date de diffusion : 08 décembre 1971

Scénario : Rod Serling, d'après une nouvelle de Basil Copper

Mise en scène : John Badham

Durée : 21’47’’

Résumé :

L’usurier Sharsted se rend chez M. Gingold, afin de réclamer le recouvrement d’une créance. Tout en lui reprochant son avidité prédatrice, Gingold lui fait visiter sa belle collection d’œuvres d’art, dont une étrange caméra victorienne.  Mais rien ne semble distraire Sharsted de sa rapacité, avant qu’il ne se trouve confronté à une capacité inattendue de la caméra.

Critique :

La première partie vaut par la beauté du décor de la collection de Gingold, décidément le savoir-faire et les magasins des Studios Universal auront été régulièrement sollicités avec bon heur par l’anthologie, ainsi que pour le face à face de deux épatants comédiens. Ross Martin parvient ainsi à dépasser l’obstacle d’une perruque digne des facéties d’Artemus Gordon afin de donner de l’intensité à son personnage, de même que René Auberjonois, loin de ses rôles humoristiques coutumiers, avec le sinistre et cynique Shasted. Le bel assemblage de la caméra victorienne suscite un agréable suspense, mais la révélation de son pouvoir déçoit.

 En effet, au-lieu de déboucher sur une conclusion choc, l’artefact ouvre une toute nouvelle séquence. Or celle-ci ne vient rien apporter de plus que lors de la découverte initiale, hormis quelques jolis effets d’image ourdis par John Badham et un discours très démonstratif sur le détestable métier d’usurier. Ce ton prêcheur finit par nous faire prendre en sympathie Sharsted (d’autant qu’il est patent que Gingold avait tous moyens de le rembourser), ce qui est certainement le contraire du but visé par ce récit d’abord intrigant avant de devenir moralisateur.

Anecdotes :

  • Ross Martin (Mr. Gingold) reste bien entendu l'interprète du célèbre Artemus Gordon des Mystères de l'Ouest (1965-1969). Ce comédien polyglotte eut également une belle carrière au cinéma, jouant notamment régulièrement dans les films de Blake Edwards (La Grande Course autour du monde, 1965...). Il participa également à de nombreuses séries télé des années 60 et 70 : Wonder Woman, Columbo, Hawaï Police d'État, Drôles de Dames… Il décède d'une crise cardiaque survenue durant une partie de tennis.

  • René Auberjonois (Sharsted), d’origine suisse est un descendant de Joachim Murat et de Caroline Bonaparte. Il participe à de nombreuses séries et tient notamment les rôles récurrents d’Odo dans Star Trek : Deep Space Nine et de Paul Lewinston dans Boston Justice. Auberjonois est également un très important acteur de voix pour dessins animés, dramatiques radio, livres audio et jeux vidéo.
  • Sharsted affirme à Gingold n’éprouver aucun intérêt pour la photographie. René Auberjonois est en fait un passionné de photographie, dont les œuvres ont été exposées à diverses reprises.

  • L’épisode se base sur la nouvelle Camera Obscura, de Basil Copper. Le texte fut initialement publié dans l’anthologie The Sixth Pan Book of Horror Stories (1965).

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12-C. QUOTH THE RAVEN

Date de diffusion : 08 décembre 1971

Scénario : Jack Laird

Mise en scène : Jeff Corey

Durée : 1’48’’

Résumé :

Dans un manoir gothique, Edgar Allan Poe rédige son poème Le Corbeau, sous le regard attentif d’un de ces oiseaux. Mais le corbeau est-il un simple spectateur ?

Critique :

Voici une vignette supplémentaire de Jack Laird, destinée à apporter un regard insolite et se voulant amusant sur les grandes figures de l’épouvante figure. Le manoir caricatural séduit dans les premiers instants du sketch, mais la chute tombe à plat tant elle reste prévisible, car, pour aussi absurde que paraisse la situation, la corbeau n’a tout simplement aucune autre raison d’être là que celle qui nous est révélée. On avouera également une gêne particulière à voir un écrivain essentiel, et non une simple figure fictive, passé à la moulinette de ces séquences dépourvues d’un réel intérêt et passablement irrévérencieuses.

Anecdotes :

  • Le poème Le Corbeau (1845) est l’une des œuvres les plus fameuses d’Edgar Allan Poe. Son succès immédiat assura la suite de sa carrière. Il fut traduit en français par Charles_Baudelaire. Il figure désormais dans la culture populaire américaine, étant référencé dans de nombreux films et séries.

  • Le titre Quoth the Raven est une citation du poème de Poe.

  • Le nom Allan est mal orthographié en Allen, mais il s’agit peut-être d’un clin d’œil de l’acteur interprétant l’écrivain, Marty Allen.

  • Le tableau présentant l’épisode est en fait une caricature de Jack Laird.

  • La voix du corbeau est celle de Mel Blanc, grand acteur de voix pour dessins animés et également auteur de celle de Bugs Bunny, Daffy Duck, Elmer Fudd, etc.

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13-A. THE MESSIAH ON MOTT STREET

Date de diffusion : 15 décembre 1971

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Don Taylor

Durée : 35’58’

Résumé :

La veille de Noël, dans le ghetto juif du Lower East Side, le vieil Abraham Goldman est à l’agonie, malgré les bons soins du Dr. Levine. Il refuse d’être hospitalisé car cela serait abandonner à l’assistance publique Mikey, le petit-fils dont il a la charge. Tandis que par sa force de volonté, Abraham parvient à repousser une ultime fois l’Ange de la Mort, l’enfant part en quête du Messie dans les rues de New York, afin de sauver son grand-père.

Critique :

Diffusé le 15 décembre 1971, l’épisode sacrifie au rituel très américain des épisodes de Noël. On pourrait considérer d’un œil critique, voire cynique, le déferlement de bons sentiments qui l’anime du début à la fin, avec une conclusion d’ailleurs aussi prévisible qu’à contre-courant de la tonalité horrifique de l’anthologie. Et pourtant l’ensemble se montre irrésistiblement émouvant. Particulièrement inspiré, Rod Serling sait éviter le ton prêcheur sur lequel il achoppe parfois, évitant les tirades trop démonstratives pour au contraire privilégier l’émotion vraie de personnages dépeints avec beaucoup de saveur et d’empathie. L’auteur trouve un excellent relai chez ces comédiens, tous parfaits.

On discerne une émotion particulière chez un Edward G. Robinson renouant avec ses racines judaïques à l’occasion de ce qui demeure quasiment son ultime rôle. Yaphet Kotto apparaît également particulièrement habité par son rôle aux deux visages. Tandis que l’opus s’offre le luxe de critiquer les faux visages mercantiles de Noël lors de la quête de Mikey, il sait conserver un certain mystère autour du miracle final. La mise en scène sait aérer le huis clos de la chambre de l’agonisant, tout en réussissant certaines scènes, comme l’apparition de la Mort sous forme d’ombres soudaines. Un épisode de Noël (ou d’Hanoucca) particulièrement réussi.

Anecdotes :

  • Edward G. Robinson (Goldman), acteur juif d’origine roumaine, fut une grande star d’Hollywood. Il se fit connaître en 1930 avec Little Caesar et obtint le prix d’interprétation masculine au Festival de Cannes en 1949 pour La Maison des étrangers. Sa participation à l’anthologie reste l’un de ses derniers rôles. En 1973 il décède peu de temps avant la cérémonie des Oscars, où un prix devait lui être remis pour l’ensemble de sa carrière.

  • Yaphet Kotto (Buckner) a débuté à l’Actors Studio, avant de jouer de nombreux rôles d’action au cinéma. Il est notamment connu pour le rôle de Mr Grosbonnet dans le James Bond Vivre et laisser mourir (1973) et pour celui de Parker dans Alien, le huitième passager (1979).

  • Pressentant le potentiel de l’épisode, NBC sollicita les Studios Universal, qui mobilisèrent toute une équipe afin de parvenir à créer l’illusion d’un hiver new yorkais lors de scènes en extérieur en fait tournées en plein été californien. 

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13-B. THE PAINTED MIRROR

Date de diffusion : 15 décembre 1971

Scénario : Gene Kearney, d'après une nouvelle de Donald Wandrei

Mise en scène : Gene Kearney

Durée : 13’40’’

Résumé :

Pour maintenir sa petite Frank Standish a du prendre une associée, Mrs Moore, qui le révulse par sa vulgarité, son modernisme tapageur et son avidité. Mrs Moore finit par l’expulser, tout en méprisant l’une de ses amies, Ellen, venue lui confier un vieux miroir. Celui-ci s’avère s’ouvrir sur un monde préhistorique.

Critique :

L’épisode consacre de précieuses minutes à une exposition de la situation passablement laborieuse, de plus alourdie d’inserts redondants. L’action ne débute véritablement qu’avec l’arrivée du miroir fatidique, mais se montre dès lors bien plus détectable. Le récit utilise de manière astucieuse ce vaste thème de la magie des miroirs irrigant l’ensemble de la littérature fantastique anglo-saxonne, de Lewis Carroll à Terry Pratchett, tandis que l’effet spécial transformant le miroir en une porte donnant sur un autre monde résulte étonnamment réussi. Les inserts de films Universal représentant des dinosaures se montrent par contre antédiluviens, mais cela participe assez bien à la tonalité comique de l’ensemble. Il en va pareillement de l’humour noir d’une chute certes très prévisible, mais inversant cruellement la perspective entre le si adorable couple de vieilles gens et une Mrs Moore jouée avec énergie par Zsa Zsa Gabor. Un épisode léger, mais plaisant.

Anecdotes :

  • Zsa Zsa Gabor (Mrs Moore) fut une figure des comédies musicales des années 50, mais aussi des films de Science-fiction, avec sa participation au mémorable Queen of Outer Space (1958). Personnalité flamboyante d’Hollywood, elle demeure avant tout connue pour son train de vie fastueux, sa vie privée tumultueuse (neuf mariages) et ses participations hautes en couleur à de multiples émission télévisées. 

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14-A. THE DIFFERENT ONES

Date de diffusion : 28 décembre 1971

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : John Meredyth Lucas

Durée : 15’14’’

Résumé :

Dans le futur, un père ne sait que faire de son fils né difforme et vivant de se fait très isolé. Dans un premier temps les autorités ne lui proposent que l’euthanasie, mais se ravisent en suggérant au jeune homme de participer à l’installation d’une colonie terrienne sur une planète où existe déjà une autre civilisation. Une grande surprise l’y attend.

Critique :

L’épisode souffre d’une trop grande proximité de thème et de déroulement avec l’un des plus classiques de The Twilight Zone : The Eye of the Beholder. Ceci se ressent d’autant plus douloureusement que la comparaison ne tourne certes pas en la faveur de ce remake inavoué écrit par un Rod Serling peut-être en mal d’inspiration En effet la chute, certes amusante et non dépourvue d’astuce, ne présente en aucun cas l’impact et la résonnance de la première version. Il en va pareillement de la mise en scène, même si l’emploi de décors et d’inserts de films donne à l’ensemble une agréable saveur typique de la Science-fiction alors en vogue.

En effet, elle ne saurait rivaliser avec le chef d’œuvre claustrophobe du cauchemar en noir et blanc dans lequel nous immergea jadis La Quatrième Dimension. Il en va de même concernant un maquillage assez fauché, pour lequel le passage à la couleur s’avère bien cruel. Dans des circonstances similaires, une anthologie comme Au-delà du réel aura su idéalement tiré parti du monochrome. L’épisode bénéficie toutefois de bons comédiens, dont un Dana Andrews convaincant dans le rôle du père, et de la présentation glaciale d’une dystopie administrative déshumanisée, hélas seulement entrevue. Tel quel, il ne peut cependant constituer qu’un léger amuse-bouche.

Anecdotes :

  • Certains bruitages de l’épisode seront ultérieurement repris dans L’Homme qui valait trois milliards, notamment quand Steve Austin active son œil bionique.

  • Plusieurs scènes décrivant la société future sont en fait des reprises de différents films, dont Fahrenheit 451 (1966) et Le cerveau d’acier (1970). 

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14-B. TELL DAVID...

Date de diffusion : 28 décembre 1971

Scénario : Gerald Sanford, d'après une nouvelle de Penelope Wallace

Mise en scène : Jeff Corey

Durée : 21’21’’

Résumé :

Après avoir traversé un étrange orage Ann Bolt parvient dans une maison très futuriste. Elle comprend progressivement qu’elle a fait un bond de 20 ans dans le futur et que le propriétaire des lieux n’est autre que son jeune fils, devenu adulte. Il lui révèle qu’elle va tuer son mari dans un accès de jalousie, puis se suicider. Ainsi avertie, Ann rentre chez elle.

Critique :

On devine que la nouvelle de Penelope Wallace se voulait une évocation du pouvoir aussi irrationnel qu’irrésistible que peut revêtir la jalousie. Le passage du texte à l’écran se perçoit néanmoins avant tout comme une histoire de voyage dans le temps intrigante dans un premier temps, puis tombant tout à fait à plat. L’histoire reste ainsi floue sur les divers déplacements temporels d’Ann, avec un premier développé sur un temps très long, puis un deuxième dont le modus operandi est par contre absent. Le récit se montre de plus particulièrement verbeux et tente maladroitement de faire passer l’absence de surprise finale comme constituant une surprise en soi.

Le procédé manque trop de subtilité pour fonctionner et le jeu caricatural des comédiens n’améliore guère des attitudes manquant singulièrement de crédibilité (comme l’absence de surprise chez le fils voyant sa mère arriver du passé). Avoir choisi le même acteur pour jouer le fils et le père révèle trop vite le pot aux roses. Avec le recul demeure toutefois une vision irrésistiblement amusante des années 90 par les années 70 tant elle se révèle fausse et d’un kitch ultra disco. L’humour involontaire de cette histoire rétro-futuriste nous vaut ainsi quelques gags divertissants. 

Anecdotes :

  • Sandra Dee (Ann Bolt) fut une jeune vedette durant les années 50, où elle connut la popularité grâce à de nombreux rôles d’ingénues (Gidget, 1959). Elle fut l’épouse du chanteur Bobby Darin. Elle est la référence de l’une des chansons de Grease : Look at Me, I'm Sandra Dee.

  • Les dialogues citent plusieurs fois Shakespeare comme associant la jalousie à la couleur verte. Il s’agit d’une référence à Iago (Othello, acte 3, scène 3) déclarant : Oh ! Attention, Monseigneur, à la jalousie ; c'est le monstre aux yeux verts qui tourmente la proie dont il se nourrit.

  • L’auteure Penelope « Penny » Wallace fut la fille du grand romancier  anglais de romans policier Edgar Wallace (King Kong). Elle veilla sur l’héritage de son père à travers l’Edgar Wallace Society Sa nouvelle Tell David fut publiée en juin 1967 dans l’Edgar Wallace Mystery Magazine, qui accueillit régulièrement des écrits d’Agatha Christie.

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14-C. LOGODA'S HEADS

Date de diffusion : 28 décembre 1971

Scénario : Robert Bloch, d'après une nouvelle d'August Derleth

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 13’05’’

Résumé :

En Afrique noire, le Major Crosby mène l’enquête après que l’un de ses compatriotes, un ethnologue, sait inexplicablement disparu. Crosby s’intéresses aux agissements du redoutable shaman Logoda, qu’il soupçonne d’avoir assassiné l’Anglais. Logoda tire sa magie d’une collection de têtes réduites lui assurant un grand pouvoir, mais Crosby va recevoir l’aide inattendue de la jeune Kyro.

Critique :

On reste sceptique devant l’adaptation très littérale de la nouvelle de Derleth par l’habituellement supérieurement talentueux Robert Bloch car toute l’aura mystérieuse de la Darkest Africa résulte hors d’âge en 1971 (sans même parler de 2017). Nous sommes en effet à l’orée de la période Blaxploitation, c’est dire comme de l’eau a coulé sous les ponts. De ce fait out sonne creux et ne va pas sans clichés racistes opposant l’homme civilisé bon teint au sauvage fatalement fourbe et sanguinaire. Mais les situations, postures et dialogues s’avèrent tellement outrés et au premier degré que l’épisode expérimente ainsi l’heureuse fortune de virer franchement au pur Nanar.

Il devient ainsi succulent au second degré, arborant fièrement plusieurs signes distinctifs relevant du Nanarland, comme une reconstitution fauchée aux blés de l’Afrique noire (panoramas californiens, décors minimalistes, tamtams et cris d’animaux enregistrés…) ou jeu mauvais jusqu’à susciter l’enthousiasme chez de nombreux seconds rôles, notamment Denise Nicholas (Kyro). D’ailleurs celle-ci prendra rapidement du galon, puisque, dès l’année suivante, elle deviendra la covedette féminine de l’inénarrable et grandiose Blacula (1972), féconde et cultissime intersection du Mythe de Dracula et de la Blaxpoitation . Le scénario est à l’avenant, ainsi quand Crosby s’avise de demander à Kyro à quoi rime au juste tout ceci, elle a cette majestueuse réponse, emblématique de tout un genre : « il vaut mieux pour vous que vous l’ignoriez ! ». Immense moment.

Certes Jeannot Szwarc se souvient parfois qu’il est le meilleur réalisateur régulier de l’anthologie et nous propose alors des vues réellement inquiétantes des têtes réduites, tout comme il sait souligner l’humour narquois de la chute, mais ce n’est pas cela qui va nous gâcher la fête. Une léthargie bienheureuse reprend vite ses droits. Patrick Macnee demeure quasiment le seul à défendre son rôle avec talent et métier. Il est attendrissant de le voir recruté par les Américains pour jouer un Anglais aussi caricatural, tout comme avant Chapeau Melon. Hollywood en majesté. Premier authentique Nanar de l’anthologie, Logoda's Heads fera les délices d’un public averti et exigeant.

Anecdotes :

  • Patrick Macnee (Major Crosby) était alors installé en Californie, avant de rejoindre l’Angleterre pour le tournage des New Avengers.

  • L’épisode est basé sur la nouvelle Logoda's Heads, d’August Derleth. Elle fut initialement publiée dans Strange Stories, en avril 1939.

  • Jeannot Szwarc a par la suite indiqué qu’il s’agissait de l’un de ses plus mauvais épisodes, échouant à recréer une atmosphère africaine et virant presque à la parodie. L’acteur Tim Matheson (le frère de l’anthropologique disparu) a également précise que même sa mère n’avait pas aimé l’épisode et que tout y était abominable. Sa propre performance l’incita à reprendre des cours d’interprétation.

  • L’épisode fut tourné en tout début de saison, mais le showrunner Jack Laird décida finalement d’attendre que celle-ci soit bien avancée avant de le diffuser. 

 

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15-A. GREEN FINGERS

Date de diffusion : 05 janvier 1972

Scénario : Rod Serling, d'après une nouvelle de R. C. Cook

Mise en scène : John Badham

Durée : 19’30’’

Résumé :

Afin d’édifier une usine, le riche Michael J. Saunders veut à tout prix acheter la demeure de la charmante et âgée à Mrs Bowen. Mais celle-ci reste très attachée à la maison où s’est déroulée sa vie, et plus encore à son merveilleux jardin. Grâce à ses fameux « pouces verts », tout ce qu’elle y met en terre y pousse de manière surprenante. Dépité par son refus, Saunders envoie son homme de main régler la question, ce qui va susciter un authentique cauchemar.

Critique :

Pur récit d’épouvante, Green Fingers n’a d’autre ambition que d’effrayer son public, mais y parvient admirablement. Ce succès provient en premier lieu de l’admirable adaptation du texte originel par Rod Serling. Ainsi celui-ci impulse un train d’enfer à l’action dès après la scène d’introduction, propulsant littéralement dans l’horreur finale. Il n’hésite pas à créer de toutes pièces le personnage de Saunders, idéal pour dramatiser l’action. Celle-ci aurait partie de demeurer essentiellement introspective comme dans le format littéraire, du fait de la courte durée de l’épisode, qui aurait rendue malaisée l’installation de l’atmosphère. La mise en scène et l’interprétation se montrent également irréprochables.

 Serling a également la diabolique malice de préparer le terrain à la chute du récit, en heurtant déjà le spectateur par plusieurs confrontations de plus en plus transgressives : entre les deux protagonistes que tout oppose (et qui recréent une thématique de méfiance envers la modernité, souvent vue dans The Twilight Zone), puis entre la vie et la mort, entre la raison et la folie et même ntre les deux règnes, animal et végétal, pour couronner le processus. Il reste difficile de ne pas songer à quelques-unes des histoires les dérangeantes développées autour de Poison Ivy, comme le terrifiant House & Garden, dans le formidable dessin animé Batman The Animated Series.

Anecdotes :

  • La chanson fredonnée à plusieurs reprises par Mrs. Bowen est Greensleeves. en clin d’œil au titre de l’épisode. Il s’agit d’un populaire chant traditionnel anglais, remontant au XVème siècle.

  • Cameron Mitchell (Michael J. Saunders) fut une figure de Broadway et l’un des créateurs de l’Actor’s Studio. Il joua dans de très nombreux films d’action, notamment des Westerns spaghettis durant les années 60. Il participa également plusieurs séries de Western, son rôle le plus connu demeurant celui de Buck Cannon dans Le Grand Chaparral (1967-1971).

  • Le décor extérieur représentant la maison est le même que celui utilisé dans l’épisode Dark Boy, cette saison. 

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15-B. THE FUNERAL

Date de diffusion : 05 janvier 1972

Scénario : Richard Matheson, d'après l'une de ses nouvelles

Mise en scène : John Meredyth Lucas

Durée : 14’25’’

Résumé :

Entrepreneur funéraire de haut vol, mais passablement vénal, Morton Silkline accepte comme client l’étrange Ludwig Asper. Celui-ci lui demande d’organiser de grandes funérailles, sans regarder à la dépense. Avide, Silkline, accepte le marché, même quand il devine enfin qu’Asper est en fait un Vampire.

Critique :

L’épisode ne manque certes pas d’humour, reposant en grande partie sur l’épatant numéros des deux comédiens principaux, très à leur affaire et parfaitement en phase. Joe Flynn sait ainsi apporter toute une veine comique théâtrale au cupide Silkline, tandis que Walter Klemperer nous régale d’une préciosité entremêlée d’orgueil seyant fort au Vampire. Le duo apporte une savoureux pittoresque à la première et meilleure partie de l’opus, quand les dialogues nous révèlent aussi habilement que progressivement la véritable nature d’Asper. Evidemment on cabotine à qui mieux-mieux, mais avec talent et brio. Cela permet de compenser une mise en scène atone.

Malheureusement, l’épisode tient mal la distance quand le déroulement de la cérémonie vire simplement à la farce pure. La procession des Monstres, Sorcières et Vampires dégage certes un humour bon enfant à l’Halloween, mais ne tient pas les promesses de l’intrigant préambule, d’autant que les nouveaux comédiens brillent moins. Si la chute résulte davantage astucieuse, la véritable déception suscitée par l’épisode reste bien qu’il est écrit par le grand Richard Matheson, qui nous a habitué à des intrigues allant bien au-delà d’une sympathique pochade. Dans la Galerie de Nuit, il s’était d’ailleurs révélé davantage percutant lors de Big Surprise.

Anecdotes :

  • Joe Flynn (Silkline) fut un acteur attitré des studios Disney durant les années 60 (Havershow dans Un amour de coccinelle, 1968), réalisant également plusieurs voix pour les longsd métrages d’animation. En 1974, il se noie accidentellement dans sa piscine, à l’âge de 49 ans.

  • Walter Klemperer (Ludwig Asper) est avant tout connu pour le rôle du Colonel Klink dans la série Papa Schultz (1965-1971), qui réalisa également un caméo dans l’inénarrable série Batman’66. Mais il tint également de multiples autres rôles au cinéma et à la télévision. Ses origines allemandes lui valurent ainsi de jouer régulièrement des personnages d’Europe de l’Est. 

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15-C. THE TUNE IN DAN'S CAFE

Date de diffusion : 05 janvier 1972

Scénario : Gerald Sanford & Garrie Bateson, d'après une nouvelle de Shamus Frazier

Mise en scène : David Rawlins

Durée : 16’03’’

Résumé :

Joe et Kelly Bellman, un couple au bord du divorce, roule de nuit avant de s’arrêter dans un café isolé. L’endroit semble désert, tout en comportant un étrange jukebox répétant sans cesse la même chanson. Le tenancier apparaît alors et révèle aux Bellman que c’est l’air d’un couple de gangsters ayant connu un fin tragique en ces lieux. Mais il apparaît que c’est tout l’établissement qui est hanté.

Critique :

L’épisode souffre d’un travers marqué : de manière bien trop visible le couple Bellman n’est là que pour faire découvrir les lieux et leur histoire au public mais ne deviennent jamais réellement partie prenante de l’action. De manière caractéristique la chute ne les concerne en rien, ils n’y sont encore une fois que simples spectateurs. En définitive très classique, cette histoire de maison hantée manque donc d’incarnation et demeure par conséquent superficielle, d’autant que le couple défunt n’est dépeint qu’à travers quelques clichés vite survolés. Sur un thème finalement assez similaire, l’épisode La Soirée de Sadie Hawkins de Buffy contre les Vampires avait d’ailleurs judicieusement fait un choix rigoureusement opposé, en impliquant totalement Buffy et Angel.

The Tune in Dan's Cafe se suit néanmoins avec intérêt grâce à l’inventivité de sa mise en scène. Celle-ci sait créer une atmosphère authentiquement étrange via une profusion d’effets visuels et sonores : angles biscornus, insertion ultra rapide d’images syncopées, ralentis très soignés, décor subtilement anxiogène, répétitions musicales, effets psychédéliques, etc. De fait, si l’exercice de style tourne quelque peu à vide, sa maestria formelle le rend réellement troublant par moments. Les acteurs apportent par ailleurs une précieuse humanité à leurs personnages schématiques.

Anecdotes :

  • Le décor du restaurant sera repris dans l’épisode Midnight Never Ends, cette saison, au récit à l’intersection entre deux réalités.  

  • Pernell Roberts (Joe Bellman) fut une figure régulière de séries américaines, notamment dans les domaines du policier et du Western. Il est particulièrement remémoré pour le rôle récurrent d'Adam Cartwright dans Bonanza (1959-1965).

  • La chanson diffusée par le juke-box est If You Leave Me Tonight I'll Cry, de Jerry Wallace. Ce grand tube de Country-music était en pleine exploitation lors du tournage de l’épisode.

  • L’épisode est basé sur la nouvelle The Tune in Dan's Café, de James Ian Arbuthnot Frazer. Le texte fut initialement publié dans l’anthologie Lie Ten Nights Awake, en 1967.

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16-A. LINDEMANN'S CATCH

Date de diffusion : 12 janvier 1972

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Jeff Corey

Durée : 21’09’’

Résumé :

Aigri et violent, le Capitaine Lindermann, patron d’un petit chalutier, est réputé avoir un cœur de pierre. L’impossible survient quand il découvre une sirène dans ses filets et en tombe amoureux. Le diseur de bonne aventure du village lui propose alors une potion, dont il affirme qu’elle  peut donner des jambes à la sirène. Les effets du breuvage vont se révéler étonnants.

Critique :

Grâce à chute pétillante d‘humour noir, l’épisode propose une lecture plaisamment horrifique du vieux mythe de la sirène tel que popularisé par Hans Christian Andersen (et, depuis, par l’inévitable Disney), douze ans avant Splash. L’effet est réussi d’autant que la reconstitution du port en studio témoigne une nouvelle fois du savoir-faire des Studios Universal mis au service de la galerie de Nuit. De plus la sirène dégage une véritable impression d’étrangeté, heureusement davantage grâce à la mise en scène savamment biscornue que via un maquillage fatalement daté. L’ensemble apporte un véritable impact au retournement de situation final, même si celui ne demeure pas tout à fait imprévisible.

Malheureusement l’épisode souffre d’avoir vieilli par ailleurs, du fait de dialogues trop élaborés pour ne pas en devenir théâtraux (notamment lors d’une scène de conclusion volontiers moralisatrice) et du jeu très déclamatoire des comédiens, à commencer par celui de Stuart Whitman. De manière caractéristique c’est finalement la jeune actrice incarnant la sirène qui s’en sort le mieux, alors que c’est elle qui a le moins de texte. Pour développer son idée de base, en soi assez circonscrite, la narration a également recours à une mise en place de la situation trop prolongée, ce qui met en relief ces défauts de manière fastidieuse. Salut, et encore merci pour le poisson.

Anecdotes :

  • Stuart Whitman (Capt. Lindemann) fut un grand acteur de western, aussi bien au cinéma (Les Comancheros, 1961) qu’à la télévision (Cimarron, 1967-1968). Après s’être retiré il s’est reconverti avec succès dans les affaires et les investissements en bourse. 

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16-B. A FEAST OF BLOOD

Date de diffusion : 12 janvier 1972

Scénario : Stanford Whitmore, d'après une nouvelle de Dulcie Gray

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 15’54’’

Résumé :

La belle et égocentrique Sheila est courtisée par le riche et inquiétant Mallory. Mais elle en aime un autre et rompt quand Mallory lui offre en guise de cadeau une broche en forme de souris peu ragoutante. Il l’informa alors qu‘elle n’épousera jamais un autre homme que lui.

Critique :

Cet épisode détonne au sein de l’anthologie, en tournant le dos à ses points forts traditionnels ; En effet, loin d’être inattendue, la chute de cesse d’être lourdement annoncée, de manière particulièrement soulignée, tout au long d’une narration des plus bavardes. De fait on l’a devine dès l’apparition de la broche, bien trop sinistre pour ne pas en devenir prévisible ; la caméra de Jeannot Szwarc ne parvient pas à animer des scènes de dialogues interminables et figées au sein de décors bien davantage quelconques qu’à l’accoutumée.

Quand l’horreur finit par poindre, l’effet s‘en voit alors gâché par une espèce de peluche résultant davantage grotesque qu’inquiétante (une faiblesse encore accentuée pour notre regard contemporain). Chacun des personnages résulte bien trop antipathiques pour que l’on s’y intéresse vraiment, y compris Sheila. Restent deux jolis numéros d’interprétation, ainsi que le charme de Sandra Locke, mais ce n’accroît que partiellement l’intérêt de cet opus ayant mal vieilli.

Anecdotes :

  • Norman Lloyd (Mallory) est aujourd’hui l’acteur répertorié le plus âgé, ayant atteint 101 ans. Sa carrière, débutée au théâtre, remonte aux années 30. Il fut un proche d’Alfred Hitchcock et l’un des producteurs d’Alfred Hitchcock Présente. Il participa régulièrement à cette anthologie, en tant qu’acteur ou de réalisateur.

  • Sandra Locke (Sheila). Durant les années 70 et 80 elle va connaître une belle carrière au cinéma, notamment en association avec Clint Eastwood, dont elle fut la compagne durant près de quinze ans. Elle s’est orientée depuis vers la réalisation. 

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16-C. THE LATE MR. PEDDINGTON

Date de diffusion : 12 janvier 1972

Scénario : Jack Laird, d'après une nouvelle de Frank Sisk

Mise en scène : Jeff Corey

Durée : 12’36’’

Résumé :

Un entrepreneur de pompes funèbres reçoit Cora Peddington, une femme énergique et particulièrement avare concernant les obsèques de son mari. Au cours de la conversation, il s’aperçoit que ce dernier était toutefois encore davantage pingre et détestable que son épouse.

Critique :

Outre son impeccable minutage, ce pur sketch d’humour noir et volontiers macabre repose  quasi exclusivement sur le fabuleux abattage de Kim Hunter en forte femme que l’argent obsède, mais dont il s’avère finalement difficile de déterminer s’il s’agit d’une victime ou d’une cynique. Laird intègre parfaitement ce fait en se constituant en stand-up, où l’entrepreneur de pompes funèbres, pourtant pittoresque, n’est là que pour lui servir de confident. Tout en dégageant progressivement une vérité de plus en plus hors normes, le dialogue abonde en considérations avaricieuses d’autant plus piquantes qu’elles concernent un enterrement.

Le spectateur né sous le signe d’Harpagon pourra y trouver comme un manuel des plus pratiques, le moment venu. La mise en scène du toujours habile Jeff Corey sait dynamiser le huis clos, tout en l’animant de nombreux gags visuels en phase avec cet étonnant entretien. La seule réserve concerne le public français, puisque la chute (au sens propre) sera quelque peu prévisible, tant on comprend vite que l’on se trouve face à une situation similaire à celle d’un des meilleurs films de Guitry, La Poison.

Anecdotes :

  • Kim Hunter (Cora Peddington) débuta à l’Actor’s Studio avant de se lancer au cinéma à la fin des années 30. Suspectée de sympathie envers le communisme pour avoir participé à des productions féministes, elle dut se cantonner au théâtre durant le Maccarthysme. En 1947 elle triomphe à Broadway aux côtés de Marlon Brando, dans Un Tramway nommé Désir, dont l’adaptation à l’écran en 1951 lui valut un Oscar. Même si elle participa à plusieurs séries télévisées et tint le rôle marquant du Dr. Zira dans la saga de La Planète des Singes, elle reste avant tout une comédienne de théâtre. 

  • Le tournage de l’épisode n’a nécessité qu’une demi-journée.

  • La nouvelle est basée sur la nouvelle The Fur Brooch, de Dulcie Gray. 

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17-A. THE MIRACLE AT CAMAFEO

Date de diffusion : 19 janvier 1972

Scénario : Rod Serling, d'après une nouvelle de C. B. Gilford

Mise en scène : Ralph Senesky

Durée : 21’19’’

Résumé :

Joe Melcor a escroqué une entreprise en se faisant faussement passer pour un handicapé. Malgré la présence d’un enquêteur, il se rend dans une petite ville mexicaine, Camafeo, réputée pour ses miracles. Il pourra ainsi profiter pleinement de son argent, grâce à une nouvelle arnaque. Mais rien ne va se passer comme prévu.

Critique :

L’épisode apparaît comme un remake indirect de The Gift, lui-même l’un des opus les plus faibles de La Quatrième Dimension, Sur un mode certes légèrement plus nuancé, on y trouve ainsi la même vison d’un Mexique hors de l’Histoire, plongé dans un perpétuel sous-développement et le même obscurantisme religieux. Serling déploie des efforts si manifestes et si outrés pour que son histoire n’apparaisse pas empreinte de commisération que c’est évidemment l’effet inverse qui se produit.

Par ailleurs le côté démonstratif de l’épisode et sa moralité si édifiante nuisent considérablement à son rythme. L’auteur délaye également avec tout un prologue théâtral et bavard au possible entre l’enquêteur er l’épouse de Melcor, relatant les faits antérieurs de manière très emberlificotée. Que la chute s’avère très prévisible et jouée avec un grand manque de naturel s’avère en définitive moins embarrassante que la naïveté de l’ensemble,

Anecdotes :

  • Ray Danton (Joe Melcor) tint souvent des rôles de séducteur ténébreux et de gangster, qui lui valurent valu de percer dans le cinéma hollywoodien des années 50 (Une femme en enfer, 1955). A partir des années 60, il va s’orienter vers les séries télévisées et les films d’espion. Il fut également l’un des acteurs réguliers de la série The Alaskans (1959-1960), aux côtés du regretté Roger Moore.

  • Julie Adams (Gay Melcor) réalisa plusieurs apparitions de charme dans le cinéma des années 50, où son rôle le plus fameux demeure celui de la jeune baigneuse de L'Étrange Créature du lac noir (1954). Elle se tourna ensuite vers la télévision, avec plusieurs rôles marquants, dont Eve Simpson dans Arabesque.

  • Lors du tournage Julie Adams et Ray Danton étaient mariés. 

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17-B. THE GHOST OF SORWORTH PLACE

Date de diffusion : 19 janvier 1972

Scénario : Alvin Sapinsley, d'après une nouvelle de Russell Kirk

Mise en scène : Ralph Senesky

Durée : 28’20’’

Résumé :

En Ecosse, un touriste américain fait la connaissance d’Ann, veuve d’un noble dégénéré et en tombe amoureux. Il s’aperçoit que le manoir où elle réside est hanté par le défunt. Il va entreprendre de la protéger, mais Ann est-elle aussi charmante qu’elle le semble ?

Critique :

Evidemment l’épisode doit en permanence lutter contre l’incrédulité suscitée par le paysage californien censé représenter l’Ecosse, de même qu’une superbe demeure de Pasadena représente le moins crédible château des Highlands que l’on sans doute jamais vu à l’écran. Mais, hormis pour un pub rapidement entrevu, la mise en scène a le bon goût de ne pas sombrer dans la reconstitution de pacotille pour tenter d’y pallier. Bien au contraire la parfaite facture classique, de The Ghost of Sorworth Place lui apporte une indéniable élégance formelle.

Celle-ci se voit mise au service de ce qui demeure avant tout un épisode d’atmosphère. La musique de Lalo Schiffrin apporte beaucoup çà cette ambiance particulière d’un temps suspendu, sur lequel plane une menace intangible, entre deux mondes. La narration échappe également aux clichés gothiques en se centrant sur un beau portrait de femme fatale, à la fois mystérieuse et ambivalente, victime et manipulatrice. Par sa subtilité d’une forte présence, le parfait casting de Jill Ireland apporte beaucoup au succès d’un épisode souffrant malheureusement d’une conclusion trop abrupte.

Anecdotes :

  • Jill Ireland (Ann) est notamment connue pour ses films tournés en association avec Charles Bronson, son second mari et le rôle de Leila dans Star Trek Classic, la seule femme dont Spock tombera amoureux. Son long combat finalement perdu contre le cancer du sein contribuera également à faire connaître ce fléau durant les années 80.

  • Plusieurs voitures sont vues en train de rouler quand Ralph et Ann discutent après le départ de Mrs Ducker, alors que le manoir est supposé être totalement isolé.

  • La musique de l’épisode fut initialement composée par Lalo Schifrin, pour le film La Créature des ténèbres (1965). Ce film comporte plusieurs références à Lovecraft, tout comme Night Gallery.

  • L’épisode est basé sur la novelle Sorworth Place, de Russell Kirk. Le texte fut initialement publié dans  London Mystery, en 1952.

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18-A. THE WAITING ROOM

Date de diffusion : 26 janvier 1972

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 27’08’’

Résumé :

Au Far West le bandit et assassin Sam Dichter pénètre de nuit dans une petite ville et se rend au saloon. Il se rend compte qu’il reconnaît les personnes présentes, sans toutefois les connaître. D’autres étranges évènements surviennent, qui vont l’amener à découvrir une terrifiante réalité.

Critique :

L’épisode soufre d’apparaître comme un évident remake d’épisodes de La Quatrième Dimension, où  des damnés étaient condamnés à revivre sans cesse les conditions de leur mort, dans une vision très psychologiste de l’Enfer. Cette énième version d’apporte rien de réellement nouveau et résulte prévisible dès la mise en place de la situation. C’est d’autant plus vrai que Rod Serling retombe ici dans péché mignon consistant à trop développer des dialogues prêcheurs et parfois lénifiants. L’épisode est de ce point de vue beaucoup trop long pour son bien, malgré les prestations convaincantes de comédiens rompus au Western, dont le solide Steve Forrest. Heureusement l’excellent réalisateur Jeannot Szwarc, aidé par une habile photographie, maintient un intérêt en reconstituant à la perfection l’atmosphère des grands Westerns classiques, un genre dont l’étoile comme à pâlir en ce début des Seventies. 

Anecdotes :

  • Steve Forrest (Sam Dichter) est le frère de l’acteur Dana Andrews. Il lui doit pour partie le lancement de sa carrière. Celle-ci le verra occuper de nombreux seconds rôles au cinéma (Le jour le plus long, 1962...) mais également à la télévision : Gunsmoke, Opération Danger, Les rues de San Francisco, Cannon, Dallas Arabesque, Columbo… Il demeure surtout connu pour le rôle principal de la série anglaise Le Baron (1966-1967) avec Sue Lloyd comme partenaire.

  • Jim Davis (Abe Bennett) est connu pour le rêle de Jock, patriarche des Ewing dans Dallas, de 1978 à 1981.

  • La longue durée de l’épisode excéda ce qui était programmé, mais le statut spécial de Rod Serling conduisit Jack Laird à plutôt supprimer l’une des scèns de l’histoire suivante (Last Rites for a Dead Druid), afin de rattraper la situation.

  • Par souci d’économie, Jack Laird souaitait avoir recours à un décor préexistant de Western, mais Szwarc et le décorateur Josep Alves obtinrent de pouvoir créer un design original, convenant mieux aux vues du metteur en scène. 

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18-B. LAST RITES FOR A DEAD DRUID

Date de diffusion : 26 janvier 1972

Scénario : Alvin Sapinsley

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 22’26’’

Résumé :

Chez un antiquaire, Carol Lyndey découvre une antique statue ressemblant trait pour trait à son mari Bruce. Elle l’acète et Bruce, d’abord indifférent, devient de plus en plus fasciné par la statue. Celle-ci lui apparaît dans des cauchemars, où elle semble se précipiter vers lui dès qu’il détourne le regard. Il apprend que l’objet représente en fait un sorcier du temps jadis, peut-être l’un de ses ancêtres.

Critique :

Ce genre d’histoire d’objet ou endroit maudit exerçant une subjugation toujours plus marquée du protagoniste n’apparait certes pas original. Mais la version ici proposée se caractérise par une narration efficace. Ainsi le récit ne cherche pas à élucider trop en avant le parcours de la statue et la réalité du rapport entre Bruce et le sorcier, ce qui serait fastidieux et contreproductif, le mystère demeurant toujours le meilleur allié de l’effroi. L’auteur joue également du contraste établi entre un jeune couple sympathique et aux dialogues pleins d’humour (un ton volontairement très sitcom) et l’épouvante dégagée par l’artéfact, afin d’accroître l’impact des manifestations horrifiques de celui-ci.

La mise en scène étonnamment élaborée de Jeannot Szwarc, jouant autant des formes que des couleurs, autorise d’ailleurs des moments réellement effrayants. Les amateurs de Doctor Who s’amuseront également des convergences parfois étonnantes existant entre la statue et les Anges pleureurs, l’une des plus grandes réussites de Steven Moffat. On regrettera toutefois que Bill Bixby très à l’aise, tout comme Carol Lynley, sur le registre de la comédie le soit clairement moins quand il s’agit d’incarner l’entité maléfique. Par ailleurs, la fin demeure confuse quant à ce qu’il advient en définitive à Jenny.

Anecdotes :

  • Bill Bixby (Bruce Tarraday) est très connu pour le rôle du Dr. Banner dans la série L’Incroyable Hulk (1977-1982). Il mène également une belle carrière de réalisateur.

  • Carol Lynley (Jenny Tarraday) fut une actrice populaire dans les années 60, notamment dans le domaine du Polar, où elle tient des rôles de blonde platine (Harlow, 1965); Elle fut par la suite la vedette de nombreuses séries B d’horreur et apparût également à la télévision (Alfred Hitchcock présente, les Envahisseurs, Kojak, …)

  • L’épisode est très librement basé sur la nouvelle Out of the Eons, d’Hazel Heald. Toutefois les différences sont tellement marquées avec l’original, que le scénario fut finalement considéré comme une création. 

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19-A. DELIVERIES IN THE REAR

Date de diffusion : 09 février 1972

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Jeff Corey

Durée : 28’19’’

Résumé :

A l’époque victorienne le prestigieux chirurgien Dr. John Fletcher utilise des cadavres volés pour mener à bien ses cours de dissection. Il ferme les yeux quand ces rabatteurs lui amènent des gens manifestement assassinés, car il s’agit de gens issus de la plèbe, qu’il méprise. Mais la situation va bientôt lui échapper.

Critique :

L’épisode résulte comme très à part au sein de l’anthologie. En effet il est l’un des rares opus de l’anthologie à ne comporter aucun élément fantastique, de quelque nature que cela soit. Par ailleurs il ne s’appuie que marginalement sur la chute de son récit, très prévisible et basée sur une énorme coïncidence, qui plus est manquant de logique (pourquoi les tueurs se seraient-ils risqués à s’aventurer dans la haute société ?). Au contraire, le scénario joue habilement la carte du portrait psychologique, avec un tableau réellement de ce médecin que l’orgueil de sa propre virtuosité conduit à traduire tous ses serments.

Ce personnage maudit s’inscrit dans une atmosphère adéquate glaciale et sinistre, d’ailleurs accompagnée d’une reconstitution historique de qualité. Cornel Wilde campe efficacement ce personnage à la fois abject et impressionnant d’autorité, mais ne peut que se réfugier dans la théâtralité pour assumer une conclusion rocambolesque. L’épisode aurait pu utilement aller jusqu’au bout de sa logique en en faisant l’économie, mais cela aurait sans doute résulté trop en rupture avec la charte de l’anthologie

Anecdotes :

  • Cornel Wilde (Dr. John Fletcher), acteur d’origine hongroise, se fit connaître grâce à ses talents pour l’escrime (il fut sélectionné pour les Jeux Olympiques de 1936). IL fut choisi par Laurence Olivier pour superviser les duels des représentations de Roméo et Juliette données à Broadway avant guerre. A partir de 1940, il mène une belle carrière d’acteur, tenant de nombreux rôles de séducteurs, souvent dans des films en costumes. 

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19-B. STOP KILLING ME

Date de diffusion : 09 février 1972

Scénario : Jack Laird, d'après une nouvelle d'Hal Dresner

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 14’01’’

Résumé :

Frances Turchin vient se plaindre auprès de la police, car son mari ne cesse de lui dire qu’il va la tuer et de simuler l’évènement.  Il espère que la nervosité de sa femme lui occasionnera un évènement fatal. Le policier en service va être considérablement impressionné par cette histoire.

Critique :

Les amateurs de Chapeau Melon et Bottes de Cuir se plairont à observer d’amusantes convergences entre ce récit et l’épisode particulièrement efficace qu’est Meurtres à épisodes. Les autres pourront s’amuser d’un véritable sketch, aux dialogues particulièrement réjouissants et variés. On débute ainsi sur un humour avant de passer à une charge caustique sur le mariage, de plus en plus teintée d’une misogynie assez mordante. Le ton totalement cynique de l’ensemble se montre souvent pétillant et nous vaut une chute réellement astucieuse, L’épisode capitalise également sur l’abattage et le métier de deux comédiens vétérans. Ceux-ci s’amusent visiblement beaucoup et n’hésitent pas à surjouer l’affaire à l’instar d’un sketch du Saturday Night Live, ce qui convient idéalement ici

Anecdotes :

  • Geraldine Page (Frances Turchin) fut une grande star de Broadway, connaissant également le succès au cinéma. Elle reçoit ainsi l’Oscar en 1986, pour Mémoires du Texas. Elle tint toujours des rôles particulièrement variés. Durant le années 80 elle devient une professeure d’art dramatique très influente sur les comédiens de l’époque.

  • L’épisode est basé sur la nouvelle Stop Killing Me d’Hal Dresner, initialement publiée dans Alfred Hitchcock's Mystery Magazine en Novembre 1963.

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19-C. DEAD WEIGHT

Date de diffusion : 09 février 1972

Scénario : Jack Laird, d'après une nouvelle de Jeffry Scott

Mise en scène : Timothy Galfas

Durée : 7’16’’

Résumé :

Poursuivi de près par la police, le gangster Landau fait appel à un exportateur crapuleux, afin d’être envoyé discrètement en Argentine, contre 15 000 dollars. Son partenaire semble sûr de lui, affirmant avoir toujours respecté ce type de contrat. Et il a effectivement mis au point une martingale très originale.

Critique :

Ce très bref sketch brille par son humour noir, versant in fine dans le pur macabre lors d’une conclusion réellement énorme. En soit l’idée de base manque de réelle originalité, sous des formes variées elle a en effet utilisé dans plusieurs séries d’aventures des Sixties, dont Le Saint et Chapeau Melon et Bottes de Cuir dans Remontons le Temps. Si la mise en scène  n’a guère l’occasion de briller lors de ce huis clos concis et très statique, les dialogues et le jeu pittoresque des comédiens induisent d’emblée un ton goguenard fort délectable. On devine d’emblée que le gangster assassin se met dans un fort mauvais pas, mais la menace sait rester totalement dissimulée jusqu’à la chute, un fort bel exercice de style.

Anecdotes :

 

  • Bobby Darin (Landau) accomplit quelques apparitions prometteuses à l’écran, mais il fut avant tout un musicien et chanteur de Rock et de Jazz très populaire aux USA durant les années 50 et 60. Tout en se produisant régulièrement à Las Vegas, il composa également de nombreuses bandes sons pour le cinéma. Malade du cœur depuis sa jeunesse, il décède en 1973, à l’âge de 37 ans. 

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20-A. I'LL NEVER LEAVE YOU - EVER

Date de diffusion : 16 février 1972

Scénario : Jack Laird, d'après une nouvelle de Rene Morris

Mise en scène : Daniel Haller

Durée : 26’32’’

Résumé :

En Angleterre, au XIXe siècle, la fermière Moira a pris en horreur son époux, qui agonise longuement d’une maladie l’ayant privé d tout charme. Elle fait appel à une sourcière afin d’abréger la vie de son époux, d’autant qu’elle a pris un amant. Mais rien ne va se passer comme prévu.

Critique :

Jack Leard opte ici pour un surprenant virage à 180°. En effet il délaisse l’humour se voulant décalé qu’il projette le plus souvent sur l’épouvante gothique, pour en venir à l’expression la plus primale du genre. Si l’histoire ne comporte guère de surprise en soi, elle rejoint ainsi idéalement les thématiques des anciens films de la Hammer à son meilleur niveau, avec plusieurs figures archétypales, comme la femme fatale, la sorcière décatie où le mâle cynique et dominateur. Le grand mérite de I'll Never Leave You - Ever repose sur la parfaite cohérence de son propos. A travers le décor emblématique et sinistres à souhait, les dialogues et postures paroxystiques, le jeu ultra théâtralisé des acteurs, les maquillages effrayants ou la musique suggestive, l’épisode sait saisir toute l’essence d’un style. Grâce au gran savoir-faire de Daniel Haller, sa réussite est telle que sa conclusion pourtant des plus prévisibles, se montre réellement effrayante. Lois Nettleton exprime avec talent les diverses facettes de Moira, à la fois instigatrice d’un meurtre mais aussi victime du désir sexuel des hommes.

Anecdotes :

  • Lois Nettleton (Moira) mena une active carrière au théâtre comme à la télévision, ce qui lui valut de remporter deux Emmy Awards. Elle participe à La Quatrième Dimension, Alfred Hitchcock présente, Le Fugitif, Bonanza, Cannon, Hawaii Police d'État, Kung-fu, Les rues de San-Francisco, Le Caméléon...

  • Le metteur en scène Daniel Haller effectue ici  son unique participation à l’anthologie. Il est un grand spécialiste de l’horreur gothique, ayant notamment créé les décors des fameuses adaptations de Poe au cinéma par Roger Corman : House of Usher (1960), The Pit and the Pendulum (1961), etc. Il dirige également plusieurs adaptations de Lovecraft à l’écran, dont The Dunwich Horror (1970).

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20-B. THERE AREN'T ANYMORE MACBANES 



Date de diffusion : 16 février 1972

Scénario : Alvin Sapinsley, d'après une nouvelle de Stephen Hall

Mise en scène : John Newland

Durée : 23’07’’

Résumé :

Le jeune Andrew MacBane se passionne pour la sorcellerie, ce qui le fait négliger ses études. Quand son oncle menace de le déshériter, il invoque un démon pour l’assassiner. Mais l’entité s’attaque ensuite aux amis d’Andrew, sans que celui-ci puisse l’en empêcher.

Critique :

La mise en bouche de l’épisode se montre prometteuse, avec une mise en place très rapide de la situation et l’instauration d’un vrai suspense autour du rapport d’Andrew à la magie noire : mythomanie ou véritable talent ? La mise en scène se montre efficace et la narration se voit soutenue par l’interprétation très intense de Joel Grey, idéale pour positionner le protagoniste à mi-chemin entre folie et don visionnaire. Malgré ses atours et sa coiffure si 70’s, les amateurs de Buffy contre les vampires s’amuseront en retrouvant le futur interprète de Doc, démon autrement blasé vis-à-vis de la sorcellerie. Malheureusement la seconde partie de l’intrigue en revient à des schémas narratifs beaucoup plus balisés, conduisant d ‘ailleurs à une conclusion ultra classique. Du plus le récit délaye durant toute une longue scène où Andrew rabâche tout ce que l’on a déjà appris ou compris, sans aucune plus-value autre qu’un drama familial superflu. Inquiétant quand il demeurait dissimulé, le démon devient grotesque quand il apparaît, l’anthologie trahissant ici son âge.

Anecdotes :

  • Joel Grey (Andrew) est un important acteur de cinéma, notamment réputé pour son rôle de maître de cérémonie dans Cabaret (1972), qui lui valut de remporter l'Oscar. Joel Grey interprète également le Diable, rencontrant J. R. à la fin de Dallas et incarna Doc dans Buffy contre les vampires. Il est le père de Jennifer Grey (Dirty Dancing).

  • L’épisode est basé sur la nouvelle By One, By Two and By Three, de Stephen Hall.

  • Un jeune Mark Hamill accomplit une très brève apparition en cours de récit. Il deviendra Luke Skywalker en 1977.

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21-A. THE SINS OF THE FATHERS 



Date de diffusion : 23 février 1972

Scénario : Halsted Welles, d'après une nouvelle de Christianna Brand

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 29’22’’

Résumé :

Au Moyen-âge, dans une contrée ravagée par la peste, la famille d’un riche fermier décédé fait appel à un mangeur de péchés. Ce dernier est censé festoyer en compagnie du mort et ainsi avaler ses péchés afin qu’il aille au paradis. Mais le Mangeur de péchés est lui-même malade, et sa femme, tourmentée par la faim, envoie leur fils à sa place.

Critique :

 Cet épisode se montre d’abord formellement impeccable, se structurant en tableaux médiévaux qui pourront, toutes proportions gardées, évoquer Le Retour de martin Guerre au public français, par sa description d’un Moyen-âge cruel, dépourvu de toutes enluminures. Le talent de Jeannot Szwarc et son sens aigu de l’image apportent beaucoup à l’impact visuel de ces différents scènes successives, de même que des plateau plateaux particlièrement suggestifs, qui seront réutilisés lors du tournage de I'll Never Leave You – Ever, cette saison. La distribution réalise également une formidable prestation, encore rehaussée par la présence d’une icône du film d’épouvante comme Barbara Steele, ici parfaitement dans son emploi dans le rôle de la veuve fortunée.

 Michael Dunn ase montre également étonnant en laquais, bien loin du plastronnant Loveless des Mystères de l’Ouest. Sa présence nous rappelle d’ailleurs que la dernière partie de sa carrière, durant les années 70 fut principalement dédiée aux films d’horreur. Mais c’est bien son propos qui distingue cet opus singulier, à la chute aussi sinistre qu’astucieuse. En effet il peut se lire à deux niveaux, sous l’optique traditionnelle des contes et légendes de nos terroirs mais aussi dépouillé de tout atour fantastique, en considérant qu’il ne s’agit ici que de superstitions archaïques. Dès lors il devient une condamnation à la force rare de l’aliénation sociale, conduisant les pauvres à abdiquer leur dignité pour survivre.

Anecdotes :

  • Michael Dunn et Alan Napier apparaissent dans des seconds rôles. Ils sont respectivement connus pour les rôles de Loveless dans Les Mystères de l’Ouest et d’Alfred ans Batman 1966.

  • Barbara Steele (la veuve) fut une grande vedette des films d’épouvante italiens des années 60, souvent tournés à Cinecitta (Le Masque du Démon, 1960). En 1963, elle participe également au 81/2 de Federico Fellini. 

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21-B. YOU CAN'T GET HELP LIKE THAT ANYMORE 



Date de diffusion : 23 février 1972

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Jeff Corey

Durée : 20’20’’

Résumé :

Dans un futur proche, une société commercialise des robots spécialisés dans les différents métiers de la domesticité. Mais certains clients fortunés se servent de la passivité de ce qui demeure à leurs yeux des objets pour pouvoir se défouler à leur encontre. Mais les robots apprennent progressivement des humains.

Critique :

Cet épisode apporte une tonalité commune à la première partie du même programme que constituait The Sins of the Fathers. Par des voies différentes, les deux segments condamnent en effet pareillement la tyrannie déshumanisante d’une société bâtie entre dominants et dominés et surplombée par l’argent comme vecteur de puissance. Ces deux discours se tiennent avec un stupéfiant tranchant pour un Network des années 70. Mais le fantastique aussi bien qu’ici la Science-fiction partagent la même vertu de pouvoir contourner bien ces censures les considérant comme des styles mineurs. Il en va de la Galerie de Nuit comme auparavant de la Quatrième dimension.

Toute la première partie de You Can't Get Help Like évoque d’ailleurs clairement l’un des meilleurs opus de la précédente anthologie de Serling, The Trade-Ins, quand le vendeur présente les différents modèles de robots aux acheteurs. Toutefois si l’opus demeure visuellement très efficace, son propos devient malheureusement quelque peu caricatural, tant le couple des propriétaires de la servante se montre haïssable. Mais là aussi la réalité rattrape la fiction quand l’actualité nous montre des domestiques traités en esclaves, y compris avec violence. Le récit peut s’appuyer sur la composition très sensible Lana Wood dans le rôle de la martyre finissant par se rebiffer, car elle lui apporte la même sympathie qu’avait suscité la malheureuse Plenty des Diamants sont éternels. On regrettera par contre une conclusion bien trop soudaine et comme sortie de nulle part, qui affaiblit le propos global de l’épisode.

Anecdotes :

  • Lana Wood (la servante robotique) fut la sœur cadette de la grande star Natalie Wood. Si au cinéma, elle est surtout connue comme l’avenante Abondance Delaqueue (Plenty O'Toole) de Les diamants sont éternels (1971), elle participa également à de très nombreuses séries télévisées des années 60 et 70 (Le Fugitif, Peyton Place, Les Mystères de l’Ouest, Mission imposible, Baretta…).

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22-A. THE CATERPILLAR



Date de diffusion : 01 mars 1972

Scénario : Rod Serling, d'après une nouvelle d'Oscar Cook

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 33’08’’

Résumé :

Au XIXe siècle, Steven Macy est recruté comme régisseur d’une plantation de tabac, à Bornéo. Mais il prend le pays et son climat en horreur et se consume de désir pour l’épouse du propriétaire, Rhona Warwick. Il décide de faire appel à un malfrat local, qui propose d’occire le mari grâce à une méthode locale, un perce-oreille introduit dans le conduit auditif et progressant ensuite jusqu’au cerveau.

Critique :

L’épisode apparaît comme l’un des plus longs de l’anthologie et de fait souffre de plusieurs longueurs, notamment dans la mise en place de la situation, très délayée. Par ailleurs les dialogues résultent trop théâtraux, de même que certains effets de caméra, comme la lumière sans cesse accentuée sur le y eux de Macy, ou l’entendre hurler hors champ à deux reprises, au point d’évoquer certaines pages de la Rubrique-à-Brac de Gotlib.

On an connu Jeannot Szwarc mieux inspiré, et il semble ici en partie butter sur la difficulté à rendre horrifique une menace en soi totalement invisible pour le téléspectateur. Il reçoit fort heureusement le soutien des acteurs, avec une Joanna Pettet toujours aussi convaincante pour cette nouvelle participation à l’anthologie, et surtout Laurence Harvey, dont la propre maladie insuffle un réalisme soudainement troublant aux tourments vécus par Macy. Le public français pourra également voir dans ce récit une version horrifique de la nouvelle de Maupassant, La Bête à Maît' Belhomme.

Anecdotes :

  • Joanna Pettet (Rhona Warwick) se fit connaître dans le cinéma de son Angleterre natale au cours des années 60, ainsi qu’à Broadway. Elle est ainsi la Mata Bond de Casino Royale (1967). A partir des années 70 elle apparaît davantage dans les séries télévisées américaines (Banacek, Mannix, L’Île fantastique, La croisière s’amuse, Arabesque...). Elle va également participer quatre fois à Night Gallery. Elle se retire au début des années 90, après la mort de son unique enfant suite à une overdose.

  • Lors du tournage de l’épisode, Laurence Harvey (Steven Macy) était déjà traité pour le cancer qui devait l’emporter quelques mois plus tard. Afin de pouvoir au mieux dépeindre les souffrances de son personnage à l’agonie, il arrêta temporairement de prendre ses antidouleurs.

  • L’épisode est basé sur la nouvelle Boomerang, d’Oscar Cook. Le texte est paru initialement dans la nouvelle Switch on the Light (1931).

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22-B. LITTLE GIRL LOST



Date de diffusion : 01 mars 1972

Scénario : Stanford Whitmore, d'après une nouvelle d'E.C. Tubb

Mise en scène : Timothy Galfas

Durée : 16’38’’

Résumé :

La fille du Pr. Putman meurt, renversée par un chauffard. Putman sombre alors dans une profonde dépression, s’imaginant que sa fille est toujours vivante. Cela l’empêche de mener à bien son important travail au service du programme atomique de l’armée américaine. Un psychiatre est chargé de le guérir. 

Critique :

Cette histoire apparaît singulière au sein de l’œuvre d’Edwin Charles Tubb, grand auteur britannique de Science-fiction le plus souvent attiré par les récits se déroulant dans un lointain futur (cycle de L’Aventurier des Etoiles) et non à l’époque contemporaine. Mais elle l’est aussi par sa structure narrative, qui résulte comme un empilement de scènes plus improbables les unes que les autres (immersion complète dans la folie interrompue au moindre incident, scènes de jeu avec la fille absente, collègue de Putman tout d’un coup clairvoyant sur son cas sans aucune raison, conclusion choc irréaliste…). Ce qui pourrait sembler rédhibitoire finit toutefois par conférer à l’ensemble une dimension de cauchemar éveillé impactant directement le spectateur. Il est à regretter que la mise en scène, trop sage, ne participe pas davantage à ce mouvement. Mais le talent et la sensibilité de William Windom rendent réellement troublantes les scènes où le père s’adresse à l’absente.

Anecdotes :

  • William Windom (Pr. Putman) est un vétéran des séries américaines, dont le demi-siècle de carrière s'étend des années 50 aux 2000. Il participe ainsi à : La Quatrième Dimension, Les Envahisseurs, Les Mystères de l'Ouest, Le Fugitif, Star Trek, Columbo, Gunsmoke, Banacek, Mission Impossible, Les Rues de San Francisco, Super Jaimie, Kojak, Magnum, JAG, etc. 

  • L’épisode est basé sur la nouvelle Little Girl Lost, d’Edwin Charles Tubb. Le texte fut initialement publié dans New Worlds, en Octobre 1955.

  • Un roman d’Edwin Charles Tubb, Le Navire étoile, fut adapté par l’ORTF en 1962. Réalisé par Alain Boudet et notamment interprété par René Arrieu et François Mestre, ce téléfilm est répertorié comme la première œuvre de Science-fiction produite par la télévision française. 

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There Aren't Anymore MacBanes 

PrésentationSaison 2

Night Gallery

Saison 1


L'ENVERS DU TABLEAU - PILOTE
(NIGHT GALLERY - PILOT)

Date de diffusion : 8 novembre 1969

La présentation des divers tableaux par Rod Serling bénéficie d’un texte suggestif en diable, concocté avec soin par l’auteur, ainsi que, bien entendu, de toute l’expérience narrative acquise durant son long séjour au sein de La Quatrième Dimension. Le décor apparaît bien plus sommaire qu’il ne le deviendra lors de la série, mais les cadres voilés s’avèrent parfaitement mis en valeur par l’obscurité environnante et suscitent déjà une étrangeté bienvenue. On peut toutefois regretter que la révélation des peintures survienne immédiatement après la conclusion choc de leur histoire, du coup elles passent relativement inaperçues (elles sont aussi déjà aperçues en cours de récit). La série procédera plus efficacement en les montrant en prologue du récit, telles des portes ouvrant sur l’Ailleurs. 

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PILOTE : A) THE CEMETERY 

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Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Boris Sagal

Résumé :

Un peintre richissime est mourant, une agonie d’ailleurs accélérée par son neveu, le cynique cupide et Jeremy. Le défunt est enterré dans le cimetière familial, à proximité de la somptueuse demeure désormais habitée par un Jeremy entendant bien profiter de son forfait. Mais une peinture située dans le hall d’entrée et représentant le cimetière semble évoluer sans aucune explication. Sous les yeux d’un Jeremy sombrant dans la folie, son oncle défunt est peint comme se rapprochant progressivement de la maison ! Soudain, on frappe à la porte.  

Critique :

La remarquablement sinistre histoire de Rod Serling impressionne par sa noirceur absolue. Avant même tout phénomène paranormal, ou supposé tel, elle nous entraine dans un drame psychologique cruel et oppressant, avec ce huis clos où s’épanouit l’âme veule de Jeremy. Celui-ci se révèle un être absolument répugnant, remarquablement  interprété par un Roddy McDowall parfaitement dans son emploi. La cruauté des dialogues et des individus s’insère judicieusement au sein d’une parfaite reconstitution d’un environnement gothique, entre cimetière archétypal et sinistre grande demeure. La mise en scène du vétéran Boris Sagal prolonge cet effet, avec d’oppressantes contreplongées et une photographie finement travaillée. La brièveté de cette première partie empêche la montée de l’angoisse de devenir suffisamment progressive, mais apporte un indéniable impact à la chute finale. Elle évite aussi de rendre trop visible la faiblesse scénaristique d’un Jeremy continuant à résider inexplicablement dans cette maison maudite, alors que rien ne l’y contraint.

Anecdotes :

  • L’enregistrement de la phrase What in God's name is happening ?, prononcée par Jeremy devant la tombe s’avéra défectueux, du fait du bruit causé par les machines simulant le vent. Roddy McDowall n’étant plus disponible, ce fut le coproducteur John Badham qui réenregistra la réplique.

  • En 2008, le film Hellboy II - Les légions d'or maudites montrera le passage culminant de l’opus, car passant à la télévision dans l’appartement du héros.

  • Roddy McDowall (Jeremy Evans) débuta dans quelques films de son Angleterre natale, avant de se faire connaître à Hollywood pour son personnage dans Qu'elle était verte, ma vallée (1941). Il s'y lie d'amitié avec Elizabeth Taylor, aux côtés de laquelle il connaîtra plusieurs rôles marquants (Octave dans Cléopâtre, 1963). Sa longue carrière au cinéma fut également marquée par les quatre films de la Planète des Singes. Outre la série en découlant (1974), il apparut également à la télévision dans La Quatrième Dimension, Les Envahisseurs, Columbo, L'Île Fantastique, Wonder Woman, Code Quantum

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PILOTE : B) THE EYES 

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Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Steven Spielberg

Résumé :

 La richissime Claudia Menlo est aveugle de naissance, ce qu’elle vit comme une profonde injustice. Elle apprend qu’un médecin parvient à opérer des greffes de nerf optique chez des animaux, mais, si le donneur perd définitivement la vue, le bénéficiaire ne regagne la sienne que pour quelques heures. Décidée à tirer partie de ce délai, elle s’entoure de merveilleux objets d’arts, tout en faisant chanter le scientifique pour qu’il prélève le nerf optique d’un malheureux ayant des dettes de jeu auprès d’un truand menaçant de l’assassiner. L’opération est menée à bien, mais le destin va réserver une cruelle déconvenue à l’impérieuse et égoïste Claudia Menlo.

Critique :

Là où The Cemetery développait une épouvante gothique particulièrement affutée et imaginative, annonçant ainsi l’anthologie à venir, The Eyes évoque davantage La Quatrième Dimension,  pour son récit à chute, au tempo rapide menant à une renversante conclusion. Le discours moral se montre également au rendez-vous : à l’ironie cinglante venant châtier l’égoïsme de l’héroïne, vient s’ajouter une critique acerbe de la commercialisation à outrance de la société, jusqu’à réduire le corps humain à l’état de marchandise. La thématique du récit évoque d’ailleurs celle de l’épisode The Trade-Ins de La Quatrième Dimension, Claudia Menlo prenant le parti pris exactement opposé à celui du sympathique couple de personnes âgées, avant d’en payer le prix. De point de vue du trafic de greffons, l’opus se montre de plus tristement prémonitoire quant à ce que le progrès technologique autorise aujourd’hui. Les dialogues ne sont pas parfois avoisiner une certaine emphase, mais la personnalité et la l’aura naturelle de Joan Crawford font accepter la théâtralité de son personnage. Tom Bosley se montre de plus très émouvant dans on incarnation du malheureux contraint au sacrifice. La mise en scène dynamique et inventive du déjà supérieurement doué Steven Spielberg aère également le récit, tout en quelques étonnantes prouesses, comme l’opération évoquée de manière quasi onirique ou le panorama de Claudia se débattant dans sa nuit, suscitant presque la pitié.

Anecdotes :

  • Le rôle de Claudia fut d’abord proposé à Bette Davis, qui déclina la proposition.

  • Joan Crawford déambula longuement dans son appartement avec un bandeau sur les yeux, afin de reconstituer le mouvement d’une aveugle.

  • On apprend que l’appartement de Claudia se situe sur le Cinquième Avenue, artère très huppée de Manhattan, mais la vue extérieur montre en fait Park Avenue, autre rue cotée de l’île.

  • Après une première rencontre malaisée, la star s’inquiétant de l’inexpérience du jeune réalisateur, Joan Crawford et Steven Spielberg finirent par sympathiser. Après le tournage, ils entamèrent une correspondance qui perdura jusqu’au décès de l’actrice.

  • The Eyes représente le premier travail authentiquement professionnel réalisé par Spielberg pour Hollywood. Sa mise en scène remarquée par MGM et grand succès rencontré par le téléfilm assurèrent le lancement de sa carrière.
  • La gigantesque panne d’électricité à laquelle fait allusion le récit s’est déroulée dans la nuit du neuf novembre 1965. A la suite d’une vaste disjonction, tout le nord est des Etats-Unis, représentant  plus de 30 millions de personnes, est plongée dans l’obscurité. Le réseau ne pourra être remis en fonctionnement que treize heures plus tard. Passé dans la culture populaire, l’évènement est référencé dans de nombreuses séries télévisées, notamment dans Ma Sorcière bien-aimée (The Short Happy Circuit of Aunt Clara) et Code Quantum (Double Identity - November 8, 1965). Des légendes urbaines veulent que des vols d’OVNI aient été repérés durant l’évènement, mais aussi que le nombre de naissances connaisse un pic neuf mois plus tard.

  • Joan Crawford (Miss Claudia Menlo) fut l’une des plus grandes stars de l’âge d’or d’Hollywood, et l’une des rares à avoir franchi avec le succès le cap de l’avènement du parlant. Sa carrière s’étend des années 20 au début des 70 et elle fut successivement l’une des grandes étoiles de la MGM, puis de la Warner Bros, où une célèbre rivalité l’opposa à Bette Davis. Bisexuelle, elle défraya également la chronique d’Hollywood, où l’on évoqua notamment une liaison avec Marilyn Monroe. Elle fut également la veuve du propriétaire de Pepsi Cola, qui lui légua la société à sa mot, en 1959. Ce monstre sacré, qui a inspiré la Méchante Reine de Blanche Neige à Walt Disney, fit paraître deux recueils de souvenirs, A portrait of Joan (1962) et My way of life (1971).

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PILOTE : C) THE ESCAPE ROUTE

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Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Barry Shear

Résumé :

Josef Strobe, ancien officier nazi ayant sévi à Auschwitz, est désormais réfugié en Amérique latine sous une fausse identité.  Il est hanté par les fantômes de son passé et trouve comme unique réconfort la contemplation d’une des peintures du musée local. Celle-ci représente un paisible scène de pêche en forêt, dans laquelle il lui semble pouvoir pénétrer. Reconnu par un ancien déporté venu contempler un autre tableau, représentant l’horreur des camps de concentration, Stobe est désormais traqué par les chasseurs de Nazis. Il essaie de se réfugier dans son tableau, mais une cruelle déconvenue l’attend. 

Critique :

On retrouve ici les qualités et les défauts de La Quatrième Dimension  quand elle traite du Nazisme et de la solution finale, comme lors de Deaths-Head Revisited. Le récit se voit porté par la sincérité et la conviction communicative d’un Rod Serling condamnant avec véhémence cette horreur. Mais le scénario sacrifie la narration d’une histoire à cette recherche de démonstrabilité. Ce troisième volet résulte comme le plus étendu du téléfilm et toute une longue première partie se résume aux allées et venues répétitives de Strobe devant son tableau d’addiction  et à des rencontres avec le rescapé des camps. On comprend que Serling ait voulu exprimer que Stobe était autant, sinon davantage,  poursuivi par le souvenir de ses actes que par les personnes le traquant, mais cette itération devient fatalement fastidieuse. Par ailleurs les dialogues avec la prostituée semblent trop théâtralisés pour demeurer crédibles.  De plus, si l’opus peut compter sur le talent de Richard Kiley, la mise en scène apparait longtemps moins imaginative que lors des deux premiers volets, avant de recourir à quelques clichés faciles, comme les images figées. En définitive le scenario mise trop sur l’effet final, certes absolument terrifiant. Mais camper l’action au sein d’une galerie de tableaux permet de boucler astucieusement la boucle en fin de téléfilm.

Anecdotes :

  • La chanson traditionnelle mexicaine entendue dans la taverne sud-américaine est Cielito lindo (1882), un standard des orchestres de mariachi, inspiré par la Copla espagnole. Elle est devenue un symbole de Mexico.

  • Richard Kiley (Josef Strobe) fut avant tout un acteur de scène et une grande figure de Broadway, pour le théâtre comme pour les comédies musicales. Sa superbe voix de baryton lui valut de grand succès, comme lors de la version musicale de Don Quichotte, en 1965 il fut également un grand acteur de voix, réalisant de nombreux commentaires et autres interventions  hors champ. Il apparaît néanmoins régulièrement à la télévision, au cours d’une carrière lui apportant trois  Emmy Awards et deux Golden Globe Awards.

  • Le téléfilm fut diffusé en France indépendamment de l’anthologie lui succédant. Il demeure l’unique partie de Rod Serling’s Night Gallery a avoir bénéficié d’une version française, l’anthologie étant quasi inédite chez nous jusqu’à la publication récente des DVD.

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1-A. THE DEAD MAN 


Date de diffusion : 16 décembre 1970

Scénario : Douglas Heyes, d’après une nouvelle de Fritz Leiber

Mise en scène : Douglas Heyes

Durée : 29’55’’

Résumé :

Le docteur Talmadge répond à l’invitation de son collègue et ami Max Redford, qui le reçoit dans sa clinique. Redford lui révèle l’existence de Michael Fearing, un homme ayant la faculté de somatiser aussi bien les maladies les plus diverses que la bonne santé.  Redford étudie cette faculté dans le but de découvrir une panacée, mais aussi d’explorer ce qui s’étend après la mort, le pouvoir de Fearing pouvant culminer jusqu’à la résurrection. Afin de convaincre ce dernier de se prêter à ses expériences Redford, n’hésite pas à laisser se développer une idylle entre Feraing et sa propre épouse. Une expérience tourne mal et Fearing décède. Talmadge va mettre à jour une atroce vérité.  

Critique :

Night Gallery réalise une fracassante entrée en matière, avec ce grand classique de l’épouvante télévisuelle. De fait l’anthologie débute en mobilisant la grande signature de Fritz Leiber,  écrivain de Science–fiction et de Fantasy comptant parmi les plus talentueux et imaginatifs. L’opus ne fait pas appel à la verve picaresque de son célèbre Cycle des Epées, mais bien davantage à la veine horrifique de celui qui fut également l’un des proches de Lovecraft, avec lequel il entretint toute une correspondance passionnée durant les années 30. Le grand mérite de l’épisode est laisser transparaître toute l’influence du Maître de Providence sur son disciple le plus doué, grâce à plusieurs thèmes et figures de style caractéristiques : grande demeure recélant de ténébreux secrets, condamnation de l’orgueil scientifique de l’homme face aux insondables mystères de l’Inconscient et de la Mort, rôle clef du narrateur rescapé comme lien entre nous et l’Indicible (rôle ici clairement imparti à Talmadge), chute brutale et horrible (l’amateur de Lovecraft imaginera l’écriture en italiques lors de la révélation finale de l’abomination). La conclusion demeure l’une des plus effrayantes et macabres de toute l’anthologie.

Douglas Heyes s’avère un adaptateur intelligent de Leiber, sachant exposer de manière ludique un présupposé relativement complexe, puis faisant savamment monter la pression jusqu’au choc dernier. Il a la grande habileté de laisser le spectateur libre d’anticiper toutes les options possibles. En outre l’opus indique d’ailleurs que Rod Serling ne sera pas l’unique scénariste talentueux à œuvrer dans la Galerie de Nuit. Douglas Heyes, qui fut l’un des grands réalisateurs de La Quatrième Dimension (avec neuf épisodes à son actif, dont The After Hours et Eye of the Beholder) excelle pareillement derrière la caméra. Il accompagne idéalement le crescendo du récit, filmant ainsi de prime abord la clinique de manière froide, avant de progressivement insérer toute une tonalité gothique à la Hammer. La distribution, Jeff Corey en tête, sait surjouer intelligemment les différents rôles. C’est notamment le cas de la jeune Louise Sorel, future figure régulière des soap-operas, qui étonne ici par une composition en roue libre, évoquant là  aussi les personnages féminins si emblématiques de la Hammer. La musique de Robert prince participe puissamment à l’ambiance, en recourant notamment à l’orgue.

Anecdotes :

  • Nous découvrons ici le décor central de la Galerie de Nuit, composé de toutes les toiles de la première saison, apparaissant comme suspendues dans l’obscurité. Le plateau s’agrémente également de quelques sculptures abstraites et Rod Serling passe d’un tableau à l’autre en effectuant ses présentations.

  • L’épisode est basé sur la nouvelle du même titre, écrite par Fritz Leiber et publiée dans Weird Tales en novembre 1950. L’épisode préfigure ainsi la suite de Night Gallery, qui va souvent s’inspirer de l’esthétique des Pulps fantastiques.

  • Jeff Corey (Dr. Miles Talmadge) connut un brillant début de carrière dans le Hollywood des années 40, avant d’être inscrit sur la liste noire du Maccarthysme, après avoir refusé de dénoncer des comédiens communistes. Connaissant une traversée du désert durant les années 50, il devint un professeur dramatique parmi les plus influents d’Hollywood. Il vint à la télévision durant les années 60, participant à de très nombreuses séries (Star trek, The Outer Limits, Super Jaimie...).

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1-B. THE HOUSEKEEPER 


Date de diffusion : 16 décembre 1970

Scénario : Matthew Howard (pseudonyme de Douglas Heyes)

Mise en scène : John Meredyth Lucas

Durée : 19’18’’

Résumé :

Cédric Acton embauche Miss Wattle comme gouvernante, une vielle dame privée de toutes ressources, mais ayant un cœur d’or. Il envisage d’utiliser la magie pour échanger la personnalité de Miss Wattle avec celle de son épouse Carlotta, richissime mais acariâtre et désirant le quitter. Le sortilège fonctionne et Cédric élimine alors son épouse. Mais ses difficultés ne sont pas terminées.

Critique :

Cette brève histoire aura le mérite d’évoquer une situation similaire à celle de Whos Who ? aux amateurs des Avengers, d’autant que l’humour apparaît également au rendez-vous. The Housekeeper apparaît en effet comme le tout premier épisode de l’anthologie à s’aventurer dans le domaine comique, là-même où The Twilight Zone connut quelques déconvenues (comme le calamiteux Cavender is coming). L’essai est transformé, grâce à une durée autorisant malgré tout l’installation d’un vrai scénario, contrairement aux pastilles qui suivront, mais aussi par le choix de l’humour noir (y compris lors de la chute très astucieuse), en phase avec la tonalité de Night Gallery.  

La distribution présente aussi un vif intérêt, avec un Larry Hagman barbu et méphistophélique en diable, s’extirpant de son rôle gentillet de Jeannie de mes rêves pour roder celui de J. R., cynique, vénal et amateur de coups tordus, il y excelle déjà. Suzy Parker lui procure une opposition de charme et d’énergie, tout en faisant retrouver un visage connu de La Quatrième Dimension (Number Twelve Looks Just Like You). La mise en scène demeure simplement fonctionnelle, mais peut s’appuyer sur de forts jolis décors. Avec sa féroce drôlerie aux antipodes du macabre The Dead Man, The Housekeeper valide l’original pari de l’anthologie de proposer des épisodes composés d’histoires très diverses.

Anecdotes :

  • Matthew Howard est un pseudonyme de Douglas Heyes. Celui-ci aimait à l’utiliser quand il intervenait uniquement en tant que scénariste et non comme réalisateur.

  • Douglas Heyes a indiqué que la réplique concluant l’épisode lui fut suggérée par Larry Hagman.

  • Le décor du laboratoire où Cédric met au point son enchantement a été récupéré parmi ceux de The Munsters (1964-1966), série de CBS rivale de La Famille Addams, sur ABC. Le laboratoire est celui du grand-père de la famille Munster, Vampire de son état.

  • Larry Hagman (Cédric Acton) reste bien entendu l’interprète de l’un des méchants les plus célèbres des séries télé, l’ignoble J.R. Ewing de Dallas et de Côte Ouest. Outre plusieurs apparitions sur petit et grand écran, au moment du tournage de l’époque il est connu pour avoir incarné le protagoniste masculin de Jeannie de mes rêves, (1965-1970), la série rivale de Ma sorcière bien aimée.

  • Suzy Parker (Carlotta) tint quelques rôles au cinéma (Kiss them for me, 1957), mais fut avant tout un célèbre top model, de 1947 à 1964. Ambassadrice de Revlon puis d'Estée Lauder, amie de Coco Chanel, elle fut l'un des premiers mannequins a dépasser les 100 000 dollars d'alors de gain annuel et à devenir une vraie vedette médiatique. Les Beatles lui dédièrent une chanson, portant son nom. Elle interpréta la mère de l’épisode Number Twelve Looks Just Like you de La Quatrième Dimension et tient ici son dernier rôle référencé.

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2-A. ROOM WITH A VIEW


Date de diffusion : 23 décembre 1970

Scénario : Hal Dresner, d’après l’une de ses nouvelles

Mise en scène : Jerrold Freedman

Durée : 11’03’’

Résumé :

Le très riche Jacob Bauman est cloué au lit par la maladie. Son seul passe-temps est d’épier ses proches par la fenêtre, grâce à des jumelles. Il découvre ainsi que son épouse le trompe avec le chauffeur. En discutant avec sa jeune infirmière, Frances, il apprend que celle-ci est fiancée à son rival, mais aussi qu’elle est d’une jalousie maladive. Dès lors un plan diabolique lui vient à l’idée.

Critique :

L’astucieuse idée du scénario consiste clairement à retourner celle de Fenêtre sur cour (1954), célèbre film d’Alfred Hitchcock, en transformant l’observateur immobile en esprit diabolique. Le court espace imparti au développement de l’intrigue ne permet toutefois pas à celle-ci de réellement s’épanouir. Le plan élaboré par Bauman demeure sommaire et doit reposer sur un profil psychologique de l’infirmière bien trop pratique, idem pour le concours de circonstances. De même la mise en scène ne parvient que partiellement à animer ce huis-clos, consistant pour l’essentiel en une unique discussion entre Frances et son patient alité.

Toutefois l’auteur Hal Dresner se montre habile en distillant des dialogues affutés et pétillants d’humour cynique, illustrant à la fois la malice de Bauman, mais aussi rendant très sympathique Frances, ce qui apporte encore plus d’impact au monstrueux dénouement. Le casting s’avère également parfait, avec un Joseph Wiseman très classieux et vieille école, en opposition avec une juvénile Diane Keaton, chez qui on trouve déjà la fraicheur et la vivacité d’Annie Hall. De fait l’entrain du dialogue et le contraste entre les personnages forment l’un de ces duos composant souvent le socle de plaisantes comédies hollywoodiennes… Hormis dans la Galerie de Nuit.

Anecdotes :

  • Le plateau où est servi le petit déjeuner de Bauman disparaît puis réapparait inexplicablement.

  • Le segment de développe aucun aspect relevant du Fantastique ou de la Science-fiction.

  • Joseph Wiseman (Jacob Bauman) reste célèbre pour avoir incarné le Dr. No, premier adversaire de James Bond au cinéma (1962). Outre une belle carrière au théâtre, il apparut  dans plusieurs séries : La Quatrième Dimension, Les Incorruptibles, Les Rues de San Francisco, Law & Order

  • Diane Keaton (Frances) est alors en provenance du théâtre, où elle a déjà rencontré Woody Allen durant les Sixties. Sa carrière à l’écran se limite à quelques participations à des séries télévisées, mais elle va percer au cinéma dès 1972, en obtenant le rôle de Key dans Le Parrain. Elle devient la partenaire et la muse de Woody Allen lors de films particulièrement mémorables : Guerre et amour, Manhattan, Interiors, ou encore Annie Hall, qui lui vaut l’Oscar et le Golden Globe en 1978. Elle mène par la suite une belle carrière d’actrice et de réalisatrice.

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2-B. THE LITTLE BLACK BAG 


Date de diffusion : 23 décembre 1970

Scénario : Rod Serling, d’après une nouvelle de C.M. Kornbluth

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 29’35’’

Résumé :

En 2098, lors d’une expérience sur les voyages dans le temps, une mallette médicale contenant de prodigieux remèdes est malencontreusement envoyée en 1971. Elle y est découverte par l’ancien médecin William Fall, que l’alcoolisme a réduit à l’état de clochard. Celui-ci entreprend de réaliser des miracles, tout en espérant retrouver son rang social passé. Mais son associé cupide ne l’entend pas de cette oreille.

Critique :

Grande signature des Pulps, Kornbluth fut un auteur hautement excentrique et imaginatif, ébouriffant la Science-fiction américaine des années 40 et 50, avant d’hélas décéder prématurément à l’âge de 34 ans. Rod Serling adapte intelligemment la nouvelle de Kornbluth, conservant sa fantaisie autour du thème inépuisable du déplacement temporel, ainsi que son humour grinçant, mais aussi en l’élargissant à des thématiques plus personnelles.

Dans la droite lignée de La Quatrième Dimension, il élargit ainsi le texte à une considération en définitives très pessimiste sur la faculté humaine a gâcher toute don du Destin du fait de son avidité ou de son appétit de gloire. Sans même parler de son associé vénal, Fall lui même apparaît ainsi avant guide par une soif de revanche sociale que par une sincère volonté de sauver son prochain. Avec la sécheresse d’un couperet, la chute indique qu’il ne restera que cendres des œuvres humaines si nous ne parvenons pas à nous sublimer. Le segment reste aussi l’occasion d’un nouveau récital de ce caméléon surdoué de Burgess Meredith, impayable de bout en bout en clochard érudit et malicieux. Serling veille d’ailleurs judicieusement à accorder le plus d’espace possible à son complice régulier de La Quatrième Dimension, de belles retrouvailles.

Anecdotes :

  • Jeannot Szwarc dirige ici le premier des 19 segments dont il assurera la mise en scène pour Night Gallery. Toujours actif, ce grand réalisateur de la télévision américaine tourne encore en 2016 pour Castle.

  • Le calendrier aperçu dans le laboratoire du futur indique que le 17 septembre 2098 est un jeudi, alors qu’il s’agit en fait d’un mercredi.

  • Publiée en 1950 dans Analog (alors intitulé Astounding Science Fiction), Pulp magazine de Science-fiction au long cours (lancé en 1930 et toujours actif), la nouvelle initiale constitue l’un des textes les plus remémorés de Kornbluth. En 2001, elle fut couronnée par un Prix Hugo rétrospectif. Cas rare, elle a été adaptée dans deux autres anthologies en plus de Night Gallery : Tales of Tomorrow (1952, ABC) et Out of the Unknown (1969, BBC).

  • La première contribution de Serling à l’anthologie fut aussi l’occasion d’un premier accrochage avec le producteur Jack Laird. Celui-ci récrivit le script, préférant supprimer les scènes dans le futur et laisser totalement inexpliquée l’apparition de la mallette miracle. Cela lui valut un retour enflammé de la part de Serling et il préféra renoncer de suite à ses modifications, pour cette fois.

  • Burgess Meredith (Dr. William Fall) connaît un début de carrière prometteur au théâtre et au cinéma (Des souris et des hommes, 1939), avant d'être inscrit sur la liste noire du Maccarthysme. Revenu à la fin de cette triste période, il apparaît dans de très nombreux films, dont la série des Rocky où il interprète le vieil entraîneur de Balboa. À la télévision il incarna le Pingouin, l'un des pires ennemis de Batman (1966-1968). Il apparaît également dans Les Mystères de l'Ouest, Bonanza, Mannix, L'Homme de Fer… Avec quatre rôles, il détient le record de participations à La Quatrième Dimension, à égalité avec Jack Klugman. En 1983 il se substitue d'ailleurs à Rod Serling, décédé, pour devenir le narrateur du film. 

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2-C. THE NATURE OF THE ENEMY


Date de diffusion : 23 décembre 1970

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Allen Reisner

Durée : 8’28’’

Résumé :

A Houston, la NASA suit le déroulement d’une mission portant secours à des colons  ne donnant plus signe de vie après leur alunissage. L’équipe constate qu’avant de périr,  leurs prédécesseurs ont eu le temps  construire une arme contre un ennemi inconnu. Le dispositif a la forme d’un immense piège à souris.

Critique :

The Nature of the Enemy constitue la première de ces très brèves vignettes humoristiques auxquelles le producteur Jack Laird accordera un grande prix. Censées être expérimentales elles devaient apporter une vraie singularité à l’anthologie par leu absurdité, mais elles révéleront le plus souvent représenter autant de pétards mouillés au sujet très mince, de plus brouillant l’image du programme auprès du public. Ici même Rod Serling apparaît singulièrement peu inspiré, contraint de délayer son argument minimaliste par des dialogues creux. Accumuler autant de trous béants dans le scénario sur une durée aussi brève relève de l’exploit.  De plus l’ultime image vient concrétiser ce qui aurait dû demeurer suggéré, avec en sus l’emploi d’un effet spécial de mauvaise qualité. Le segment veut faire du neuf mais rejoint en fait l’un des poncifs des séries de Science-fiction des années 50, les animaux devenus d’une taille monstrueuse.

Anecdotes :

 

  • James Sikking (le reporter) est avant tout connu pour le rôle du Lieutenant Hunter, chef de l’équipe d’intervention du commissariat décrit dans la célèbre série policière Capitaine Furillo (Hill Street Blues), de 1981 à 1987. Il participa à plusieurs autres séries de Steven Bochco et apparaît également dans Honey West Perry Mason, Rawhide, Bonanza, The Outer Limits, General Hospital... 

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3-A. THE HOUSE 


Date de diffusion : 30 décembre 1970

Scénario : Rod Serling, d’après une nouvelle d’André Maurois

Mise en scène : John Astin

Durée : 25’30’’

Résumé :

Elaine Latimer séjourne ans une maison de repos, car elle est préoccupée par un rêve récurrent. Elle s’y voit rouler sur une route ensoleillée, atteindre une super maison y frapper à la porte et repartir sans que personne n’ait répondu. A sa sortie, elle a la surprise de découvrir la route, puis la maison de son rêve. Un agent immobilier lui apprend qu’elle est en vente, mais aussi qu’elle a la réputation d’être hantée. Elaine l’achète immédiatement et s’y installe. Elle entrevoit qu’elle pourrait être le fantôme et entend alors quelqu’un frapper à la porte.

Critique :

On oublie parfois que le très respect et prolifique écrivain André Maurois, de l’Académie française, s’acoquina parfois avec le Fantastique et le Science-fiction au cours des Années trente, écrivant notamment toute une histoire du Futur où il fustigeait le culte voué à la Science. Sa nouvelle donne lieu à l’un des épisodes les plus troublants et esthétiquement aboutis de Night Gallery. Rod Serling y exploite avec maestria l’étrange et l’ambigu, afin de déstabiliser totalement le spectateur quant à ce qu’il est en train de regarder. Serling renouvelle totalement le thème archi rebattu de la maison hantée en le détournant vers un questionnement de la notion même de réalité. On ressent avec acuité qu’un piège se referme sur Elaine, sans pour autant pouvoir jamais le définir tout à fait, qu’il soit onirique, surréaliste ou psychologique.

On peut songer à un enfermement dans les cycles successifs d’un rêve sans fin. Mais, là où La Quatrième Dimension avait dépeint d’inquiétants ou macabres univers oniriques (La poursuite du rêve, Peine capitale), la Galerie de Nuit pousse l’habileté, ou la perversité, jusqu’à montrer celui-ci sous des atours souriants et ensoleillés, avec une maison des plus accueillantes. Notre effroi résulte d’autant plus profond qu’il demeure diffus, sans menace immédiate sur laquelle se focaliser. Mais une lecture classiquement fantastique reste tout à fait possible, de même qu’une approche psychanalytique, selon laquelle l’être humain se hanterait lui-même, par ses obsessions et ses névroses.

Au contraire d’un André Maurois concluant sa nouvelle par une explication rationnelle claire (et quelque peu emberlificotée), Rod Serling porte au paroxysme l’énigme du récit par une issue soudaine et totalement ouverte. De la sorte, à une banale histoire de maison hantée, il en privilégie une hantant longuement le spectateur lui-même. L’étonnante mise en scène de John Astin accompagne à merveille cette narration éthérée, recourant à d’habiles ralentis, un somptueuse photographie et une caméra des plus fluides. On comprend que Fellini  se soit intéressé à son travail, tant on songe ici, toute proportion gradée, à Huit et demi, au protagoniste dérivant pareillement entre réel, illusion et réminiscences. L’ultime atout de l’opus réside dans l’inoubliable Joanna Pettet, évanescente et sublime, radieuse et émouvante, comme déjà hors monde.

Anecdotes :

  • La nouvelle d’André Maurois fut initialement publiée en juin 1931, dans la revue new-yorkaise Harper’s Magazine.

  • La version initiale du script de Rod Serling situait l’action et, comme c’est souvent le cas dans ce type de situation, comportait de nombreuses références à notre pays (monnaie, décors, voitures, lieux célèbres…). L’héroïne se nommait Chambrun, en hommage au comte de Chambrun, descendant de Lafayette qui traduisit l’œuvre d’André Maurois en anglais. Pour des raisons budgétaires le cadre demeura finalement américain (le décor intérieur de la maison reprend celui de The Cementery). Reste le nom français de l’agent immobilier, Peugeot, assez logique dans cette histoire où une voiture tient une place centrale !

  • Le metteur en scène est John Astin, acteur notamment connu pou le rôle de Gomez Addams ans la série La Famille Addams (1963-1966), ainsi que pour de nombreux rôles d’Excentriques. Il ralisera deux autres épisodes pour Night Gallery, où il officiera également comme comédien.  Au début des années 70 il évolue vers la mise en scène, The House est sa deuxième réalisation après Prelude (1968), téléfilm très remarqué lui valant les encouragements de Fellini.

  • La superbe maison est en fait Mandeville Canyon Estate, située à Brentwood, dans la périphérie de Los Angeles. Cœur d’une vaste propriété, elle fut construite dans les années 40 pour le célèbre baryton John Charles Thomas. Elle est depuis devenue la résidence de plusieurs vedettes hollywoodiennes, dont June Allyson et Dick Powell. La maison figure également celle de Jonathan et Jennifer Hart le couple de justiciers milliardaires de la série Pour l'amour du risque (1979-1984). Lors d’une vente effectuée en 2013, elle fut valorisée à 40 millions de dollars.

  • Les tenues ondoyantes et quasi oniriques (et si 70’s) d’Elaine Latimer proviennent de la garde-robe personnelle de Joanna Pettet. Elle les proposa au réalisateur John Astin, qui les accepta d’enthousiasme.

  • Joanna Pettet (Elaine Latimer) se fit connaître dans le cinéma de son Angleterre natale au cours des années 60, ainsi qu’à Broadway. Elle est ainsi la Mata Bond de Casino Royale (1967). A partir des années 70 elle apparaît davantage dans les séries télévisées américaines (Banacek, Mannix, L’Île fantastique, La croisière s’amuse, Arabesque...). Elle va également participer quatre fois à Night Gallery. Elle se retire au début des années 90, après la mort de son unique enfant suite à une overdose. 

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3-B. CERTAIN SHADOWS ON THE WALL 


Date de diffusion : 30 décembre 1970

Scénario : Rod Serling, d’après une nouvelle de Mary E. Wilkins-Freeman (The Shadows on the Wall

Mise en scène : Jeff Corey

Durée : 23’34’’

Résumé :

Depuis des années le Dr. Mitchell dédie sa vie à soigner sa sœur Emma, victime d’une longue maladie. Emma a été la seule héritière de la demeure et de la fortune familiales, ce qui rend Mitchell captif, ainsi que deux autres sœurs. Alors que Mitchell ne supporte plus la situation, Emma décède brusquement. Mais, après les obsèques, l’ombre d’Emma s’incruste inexplicablement sur le mur du salon. Un doute s’éveille chez les deux sœurs survivantes quant à la véritable cause du décès d’Emma.

Critique :

Après The House, Certain Shadows on the Wall propose une nouvelle histoire de maison hantée, ce qui vaut à leur épisode commun de bénéficier d’une véritable thématique. Toutefois, là où The House brillait par son étrangeté et son originalité, le présent segment rejoint des chemins plus balisés. L’ombre de la défunte n’apporte en définitive qu’ne variation simplement graphique au marronnier du fantôme accusateur. Si elle surprend lors de sa découverte, l’image totalement figée, ne réussit pas réellement à inquiéter et finit même par lasser tant la caméra y revient encore et toujours en guise de moteur de la mise en scène. C’est d’autant plus dommageable que le rythme du récit demeure lent.

Toutefois, si le volet fantastique du segment ne convainc que modérément, il en va tout autrement du portait psychologique des personnages et de leur confrontation froide et empoisonnée. Porté par un huis clos évoquant, toutes proportions gardées, celui de Jean-Paul Sartre et par un excellente interprétation, ce déchirement d’une famille du fait  de l’argent mais aussi d’une haine recuite se montre particulièrement intense. La caractérisation des personnages s’effectue avec tranchant et véracité, exprimant une théâtralité dépourvue d’emphase. Si son apparition reste brève, la prestation d’Agnès Moorehead en agonisante se montre remarquable, aux antipodes de la tonique Endora. La conclusion vaut par son ironie glaçante, apportant in fine une véritable justification à une ombre devenue suggestive.

Anecdotes :

  • La nouvelle de Mary Eleanor Wilkins Freeman fut publiée en juillet 1902, dans Everybody's Magazine.

  • Agnès Moorehead (Emma Brigham) reste bien entendu dans les mémoires pour la terrible Endora de Ma Sorcière Bien-Aimée (1964-1972). Précédemment elle connut une très belle carrière à Broadway et Hollywood. À l'écran comme sur les planches, elle travailla souvent avec Orson Welles (Citizen Kane, La Splendeur des Anderson…). Elle fut sélectionnée quatre fois à l'Oscar du second rôle féminin mais ne parvint jamais à le remporter. Elle accomplit également une mémorable apparition dans Les Mystères de l'Ouest en tant qu'Emma Valentine, une arrangeuse de mariages mortels pour époux fortunés, un rôle très proche du Mr Lovejoy des Avengers ! (The Night of The Vicious Valentine, 1967).

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4-A. MAKE ME LAUGH

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Date de diffusion : 06 janvier 1971

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Steven Spielberg

Durée : 25’57’’

Résumé :

Depuis 16 ans la carrière de comique de Jackie Slatter est au point mort, se composant d’apparitions dans des cabarets de troisième zone, devant des publics qu’il laisse de marbre. Dans un bar il croise un étrange individu enturbanné, prétendant être un thaumaturge capable de réaliser des miracles. Jackie lui demande le don de faire rire et devient bientôt une vedette. Mais il va bientôt souhaiter davantage. 

Critique :

Outre qu’il ne constitue qu’une une version supplémentaire du thème bien connu selon lequel il faut se méfier des souhaits qui pourraient se réaliser, l’épisode souffre d’être une réécriture évidente d’un épisode de La Quatrième Dimension, Je sais ce qu’il vous faut. Qui plus est la copie s’avère moins grinçant et originale que l’original (avec un énième génie remplaçant les le jeu original des artefacts, en supprimant tout mystère) et des personnages bien moins marquants. L’interprétation s’avère également moins relevée : même si Godfrey Cambridge insuffle beaucoup de sincérité à son personnage, son talent naturel réside davantage dans le stand-up. La tonalité de Série noire se voit remplacée par une tragi-comédie trop démonstrative.

Demeurent quelques dialogues amusants (notamment durant la scène du bar) et l’intéressante comparaison de l’évolution du mode de vie entre la fin des années 50 et les années 70, d’autant que l’opus se montre beaucoup plus contemporain que nombre d’épisodes gothiques de l’anthologie De fait Make Me laugh résulte comme quasiment hors sujet au sein de Night Gallery. Surtout Spielberg, certes moins inspiré que lors de l’Envers du tableau, réalise des plans imaginatifs mettant en valeur le protagoniste et son rapport au public, auquel se substitue le spectateur. Le metteur en scène sait également préserver tout l’impact de la cinglante conclusion, malheureusement là aussi très similaire à celle de la première version de l’histoire.

Anecdotes :

  • Outre le segment Eyes du pilote, il s’agit de l’unique épisode réalisé par Steven Spielberg pour l’anthologie.

  • Les responsables des studios trouvèrent la réalisation de Spielberg trop ambitieuse et alambiquée, susceptible de trouble le public. Ils exigèrent que fussent retournées les deux scènes de dialogues entre le protagoniste et son agent, devenues totalement insipides  à l’écran. Déçu par l’expérience, Spielberg s’éloigna en 1971 de l’anthologie mais aussi du monde des séries télé, où il se sentait par trop bridé. Le téléfilm Duel allait lui permettre de relancer sa carrière, en évoluant vers le cinéma.

  • Godfrey Cambridge (Jackie Slatter) fut un comique de stand-up très populaire. Il perça à Broadway après avoir exercé de nombreux métiers et effectua des nombreuses apparitions dans les comédies des années 60 et 70, jouant souvent des personnages new-yorkais. Cambridge décéda prématurément d’un infarctus en 1976, à l’âge de 43 ans. 

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4-B. CLEAN KILLS AND OTHER TROPHIES 

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Date de diffusion : 06 janvier 1971

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Walter Doniger

Durée : 23’15’’

Résumé :

Le Colonel Dittman a dédié sa vie à la chasse en Afrique. Ecœuré par la non violence, il fait venir chez lui un avoué afin de placer le jeune homme devant un choix : ou il parvient à tuer un animal, ou alors il sera déshérité. Dittman, raciste et méprisent, traite également en domestique Tom, fils d’un chef de tribu. Ce dernier va rendre conduire les évènements jusqu’à une conclusion inattendue.

Critique :

Le scénario de Clean Kills and Other Trophies s’avère malheureusement de ceux où Rod Serling laisse la part trop belle aux bons sentiments, sa sincérité laissant un ton prêcheur l’emporter sur son sens habituel de la narration.  L’essentiel du récit se voit ainsi consacré au portrait sans nuances du Colonel, où l’auteur à la main lourde, le personnage se révélant tour à tour sanguinaire, raciste, machiste, réactionnaire, égocentrique, etc. La barque se remplit trop pour demeurer à flot, d’autant que les dialogues virent à l’emphatique. On comprend qu’a travers la chasse, Serling condamne l’addiction américaine à l’arme à feu, encore tristement d’actualité aujourd’hui, mais le réquisitoire demeure indigeste. La situation se résout ensuite quasi immédiatement, donnant au moins lieu à une image finale choc, mais largement anticipée par le spectateur. De plus la conclusion semble justifier paradoxalement la violence, voire la peine de mort. L’interprétation reste toutefois de grande qualité et les décors du salon des trophées démontrent une nouvelle fois le savoir faire des artistes de l’anthologie.

Anecdotes :

 

  • Raymond Massey (Colonel Archie Dittman), acteur canadien se fait connaître au West End, ayant découvert la Grande-Bretagne durant la première guerre mondiale. Il devint une figure du Film noir en vogue dans les années 30, puis se spécialisa dans la recréation de figures historiques américaines. Durant les années 50 et 60 il travailla pour la télévision, où son rôle le plus connu demeure celui du Dr. Gillespie, dans la série médicale Dr. Kildare (1961-1965). Sa double participation à l’anthologie compte parmi ses derniers rôles. 

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5-A. PAMELA’S VOICE 


Date de diffusion : 13 janvier 1971

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Richard Benedict

Durée : 9’13’’

Résumé :

Pamela l’épouse acariâtre de Jonathan l’a sans cesse persécuté de ses critiques, assénées d’une voix criarde. Il finit par l’assassiner, mais, alors qu’il médite devant son cercueil, le fantôme de Pamela lui apparaît. Sa femme est plus vindicative que jamais, mais d’autres mauvaises surprises attendent Jonathan.

Critique :

Cette nouvelle pastille de l’anthologie se construit inévitablement sur un sujet bien mince, mais se montre nettement plus aboutie que la plupart. Rod Serling sait dévoiler progressivement la situation de Jonathan, ménagement un crescendo et un rebondissement inattendu. Les dialogues se montrent joliment féroces tout au long de cette scène de ménage très particulière. Avec peu de moyens, Richard Benedict parvient à filmer l’ensemble comme un véritable cauchemar éveillé, grâce à une photographie finement travaillée et des couleurs saturées. Ce bref segment sert également de parfait véhicule à ses interprètes. Phyllis Diller brille de son entrain et de sa voix haut perchée, justifiant avec humour le choix du titre, tandis que John Astin trouve le ton juste, loin de ses personnages excentriques coutumiers. On pourra également s’amuser d’un rôle aux antipodes de son Gomez Addams : proie du surnaturel et malheureux en ménage.

Anecdotes :

  • Le showrunner Jack Laird laissait une grande liberté à ses metteurs en scène mais posait comme obligation stricte que leur travail soit achevé dans les temps. Pour avoir conclu le segment en retard, le metteur en scène en scène Richard Benedict ne fut plus jamais convié dans la Galerie de Nuit.

  • Phyllis Diller (Pamela) fut une humoriste, chanteuse et imitatrice très populaire aux Etats-Unis, réputée pour sa voix perçante et son excentricité. Elle participe à plumeurs séries, mais fit surtout carrière à Broadway et dans les cabarets de stand up, ainsi que dans plsuieurs shows télévisés. Elle est considérée comme avoir été pionnière pour les femmes humoristes américaines contemporaines.

  • John Astin (Jonathan) reste célèbre pour son interprétation de Gomez Addams dans La Famille Addams (1964-1966) et du Professeur Wikwire dans Les Aventures de Brisco County Jr (1993-1994). Tout au long de sa carrière il se spécialisa dans les rôles d'excentriques, souvent humoristiques, parfois menaçants. Il joua dans La Quatrième Dimension Les Mystères de l'Ouest, Bonanza, Le Virginien, Police Woman, L'Île Fantastique, Love Boat, Arabesques, Killer Tomatoes... Menant également une carrière de metteur en scène, il fit ses premières armes avec Night Gallery, en réalisant trois segments d’épisode. 

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5-B. LONE SURVIVOR 


Date de diffusion : 13 janvier 1971

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Gene Levitt

Durée : 20’07’’

Résumé :

En 1915, l’équipage du Lusitania recueille un naufragé se trouvant à bord d’un esquif. Une énigme l’accompagne, car ce canot de sauvetage est l’un de ceux du Titanic, coulé trois ans plus tôt. Tout indique que l’homme aurait inexplicablement dérivé durant ces trois années. L’homme révèle que le Lusitania va bientôt sombrer lui aussi, touché par une torpille allemande.  Mais une vérité encore plus sinistre se fait jour.

Critique :

Tout comme précédemment Make Me Laugh,Lone Survivor ne constitue qu’une réécriture d’un épisode de La Quatrième Dimension, en l’occurrence La Nuit du Jugement. Toutefois, au lieu d’apporter des nouveautés peu convaincantes, il demeure cette fois extrêmement fidèle à l’original, autour d’une approche similaire du mythe du Hollandais volant. La seule variation réelle apportée à la damnation du protagoniste consiste à modifier sa nature répétitive. Au lieu d’aborder sans cesse le même navire fantôme, il passe d’un bateau à l’autre, à chaque fois historiquement victime d’un naufrage. Au total cela ne change rien, ni à son devenir, ni à la conclusion du récit. Sobrement efficace, la mise en scène de Gene Levitt doit composer avec des moyens à l’évidence très faibles : décors sommaires, fumée d’ambiance réduite au strict minimum. On n’échappe pas à une impression de théâtre filmé

 Impossible à filmer, l’opération de récupération du canot est ainsi entièrement reconstituée par les ordres donnés par le capitaine, ce qui, pour les amateurs de marine, se transforme cependant en un intéressant documentaire sur le fonctionnement d’une passerelle de l’époque. Une nouvelle fois la musique d’ambiance de Robert Prince se montre précieuse. Tout comme La Nuit du Jugement avec le formidable Nehemiah Persoff, Lone Survivor bénéficie avec John Colcios d’un comédien suffisamment talentueux pour restituer les tourments du malheureux et insuffler une dimension réellement horrifique  à l’histoire. Les quelques minutes de moins de la nouvelle version sont habilement mises à profit pour accélérer la mise en place de la situation, initialement trop longue. Mais l’impression perdure d’un doublon globalement inutile, quoique correctement réalisé.

Anecdotes :

  • Après le Titanic et le Lusitania, le récit évoque l’Andrea Doria, autre paquebot à connaître un désastre. Mis en service en 1953, cet orgueil de la marine italienne sombre le 25 juillet 1956 près de la côte nord est des Etats-Unis, après avoir heurté un autre navire. Vis-à-vis des deux autres catastrophes, le progrès technique limita toutefois singulièrement les pertes humaines, avec l’arrivée rapide de navires venus à la rescousse. L’intervention déterminante de l’Île-de-France (construit à Saint-Nazaire en 1926), suite à un demi-tour hardi, est une manœuvre demeurée fameuse.

  • John Colicos (le survivant) fut avant tout un grand acteur de théâtre, mais joua dans un grand nombre de séries où il tint souvent des rôles d’antagonistes de Science-fiction. Il fut ainsi le Commandeur Kor, tout premier Klingon à apparaître dans Star Trek Classic, ou le félon Comte Baltar de Battlestar Galactica (1978-1979).

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5-C. THE DOLL 


Date de diffusion : 13 janvier 1971

Scénario : Rod Serling, d’après une nouvelle d’Algernon Blackwood

Mise en scène : Rudi Dorn

Durée : 19’48’’

Résumé :

A l’époque victorienne, le Colonel Hymber Masters retourne à Londres après un .long service accompli aux Indes. Il a la surprise de constater qu’une hideuse poupée a été expédiée à son domicile depuis Hyderabad. La gouvernante à cru qu’il s’agissait d’un cadeau envoyé par le Colonel a sa jeune nièce et pupille. Mais Marsters comprend qu’il s’agit d’un objet maudit, destiné à accomplir une vengeance, après l’exécution d’un rebelle. Sa nièce étant dangereusement subjuguée par la poupée maléfique, le Colonel se sacrifie pour la sauver, mais il réserve une surprise à l’expéditeur.

Critique :

Après plusieurs réécritures d’épisodes de La Quatrième Dimension, on pouvait craindre qu’il n’en aille de la sorte pour cet opus, avec le grand souvenir de Living Doll. Mais il n’en est fort heureusement rien, car ici, si Rod Serling conserve le thème de la poupée vivante et maléfique, il tourne résolument le dos au Fantastique contemporain. Il nous fait au contraire replonger dans l’époque édouardienne, où les lointaines contrées de l’Empire étaient perçues comme abritant d’obscures magies, sous la plume des auteurs du temps. Cet effroi né de l’opposition entre le rationalisme occidental et les mystères d’antiques civilisations est fidèlement reconstitué par Serling, à travers une adaptation fidèle et intelligente d’Algernon Blackwood. Cet auteur anglais, passionné par les sciences occultes, écrivit au début du XXème siècle plusieurs nouvelles dont la puissance d’évocation du Surnaturel impressionna jusqu’à Lovecraft lui-même.

L’épisode renoue avec ce souffle et ce sens exacerbé de l’atmosphère, lors d’une longue et passionnante première partie. Le mystère de la poupée et de son origine se montre palpitant, et l’effroi nait par l’ombre s’étendant sur l’enfant et par une narration à travers l’œil du digne Colonel anglais, impeccablement interprété par un John Williams parfaitement dans on emploi. Le soufflé retombe légèrement quand les ressorts de l’intrigue sont dévoilés, mais l’histoire est alors presqu’achevée et sait rebondir par une chute aussi ironique qu’horrifique, l’une des images les plus effrayantes de l’anthologie. Si le manque de moyens limite la reconstitution historique, décors d’un gothique très Edouardien) et costumes s’avèrent de qualité, agrémentés par quelques inserts, il est vrai minimalistes. La poupée illustre le savoir-faire des studios, car littéralement épouvantable et suscitant immédiatement le malaise, à rebours là aussi de celle de La Quatrième Dimension.

Anecdotes :

  • La nouvelle d’Algernon Blackwood parut en 1946 dans un recueil intitulé The Doll and One Other. L’ouvrage fut publié par Arkham House, maison d’édition fondée en 1934 par August Derleth, disciple et continuateur de Lovecraft. Derleth diffusa les écrits du Maître, mais aussi d’autres écrivains situés dans la même mouvance, comme Clark Ashton Smith, Robert E. Howard, Sheridan Le Fanu ou encore lui-même.

  • Le réalisateur Rudi Dorn a indiqué conserver un souvenir épouvantable de ce tournage, ponctué de nombreuses difficultés (départ imprévu d’une actrice, John Williams ne connaissant pas son texte, pressions constantes des studios…), alors qu’il ne disposait que de deux jours pour le mener à bien. Eprouvé par l’expérience,  il quitta Hollywood et se consacra par la suite essentiellement à des retransmissions télévisées.

  • John Williams (Colonel Hymber Masters), acteur d’origine anglaise, fut une figure de Broadway, où sa classe toute britannique lui valut de nombreux succès. Il tint quelques rôles marquants au cinéma, dont celui de l’inspecteur chef Hubbard dans Le crime était presque parfait, d’Alfred Hitchcock (1954). Il participa d’ailleurs à sept épisodes d’Alfred Hitchcock présente, dont trois réalisés par le Maître du Suspense lui-même. Il reste également remémoré pour sa participation à la publicité d’un disque de musique classique édité par Columbia House, 120 Music Masterpieces, soit le spot demeuré le plus longtemps en diffusion, de 1971 à 1984.

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6-A. THEY’RE TEARING DOWN TIM RILEY’S BAR 


Date de diffusion : 20 janvier 1971

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Don Taylor

Durée : 40’10’’

Résumé :

Alors qu’il a désormais atteint l’âge mûr, Randy Lane part à la dérive. Miné par son veuvage, il sombre dans l’alcoolisme et néglige son travail de cadre commercial, tout en s’enfermant toujours plus dans la nostalgie ses vertes années. Alors qu’il passe devant le bar où il vécu ses meilleures années, en cours de construction, il se retrouve soudainement dans les années 40, à l’époque de sa jeunesse. Dès lors il ne cesse d’osciller entre son triste présent et son heureux passé. Sa dévouée secrétaire, secrètement amoureuse de lui, parviendra-t-elle à lui faire reprendre pied dans la réalité ?

Critique :

L’épisode apparaît  de nouveau cette saison comme une réécriture partielle d’un épisode de La Quatrième Dimension, Arrêt à Willoughby. On y trouve en effet cette fuite du protagoniste dans un univers de nostalgie, face au sinistre monde contemporain. Mais Rod Serling sait ici en partie renouveler sa thématique. A la dénonciation de l’hyper compétitivité et du matérialisme de notre société  vient s’ajouter une peinture plus intimiste, celle d’un homme à l’heure des bilans, s’apercevant que les promesses de sa jeunesse n’ont pas été tenues par s a destinée (Il est vrai que l’on se rapproche alors de Souvenir d’enfance). Cette conscience cruelle du temps qui passe sans retour, bien plus présente ici, rejoint sans doute celle du propre Rod Serling, en cette nouvelle décennie, plus aspre que la précédente. Si le récit frôle parfois un certain pathos, il parvient à éviter ce piège grâce à la bouleversante composition de William Windom, qui réalise sans doute ici la performance d’acteur la plus marquante de la saison. Il suscite une véritable empathie entre le héros malheureux et le spectateur (qui sera évidemment ressentie plus fortement encore par les personnes du même âge que Randy).

La relation entre ce dernier et sa touchante secrétaire, magnifique de courage et de refus d’abandonner son combat pour le sauver, apporte une émotion supplémentaire. Diana Baker lui apporte une précieuse crédibilité, sans excès préjudiciable. Cet attachement porté aux personnages permet de faire accepter le choix d’un happy ending, même si quelque peu forcé et moins audacieux que la conclusion sonore retenue dans La Quatrième Dimension. On apprécie également que l’opus évite d’employer un ton prêcheur envers l’alcoolisme, comme trop souvent dans les séries américaines, celui-ci se voyant décrit comme le symptôme d’un mal être profond et non comme un vice. Le basculement opéré entre les années 60 et 70 en passant d’un épisode à l’autre permet de comparer de manière amusante l’évolution du style de vie, tout en soulignant certaines permanences. Ainsi tous les cadres de la société sont exclusivement masculins et les secrétaires, féminines : rien n’a changé ! Vivement les années 80.

Anecdotes :

  • C’est au titre de cet épisode que Night Gallery fut proposée aux Emmy Awards de 1971. Ce fut finalement The Andersonville Trial qui remporta le prix.

  • William Windom (Randy Lane) est un vétéran des séries américaines, dont le demi-siècle de carrière s'étend des années 50 aux 2000. Il participe ainsi à : La Quatrième Dimension, Les Envahisseurs, Les Mystères de l'Ouest, Le Fugitif, Star Trek, Columbo, Gunsmoke, Banacek, Mission Impossible, Les Rues de San Francisco, Super Jaimie, Kojak, Magnum, JAG, etc. 

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6-B. THE LAST LAUREL


Date de diffusion : 20 janvier 1971

Scénario : Rod Serling, d’après une nouvelle de Davis Grubb

Mise en scène : Daryl Duke

Durée : 8’56’’

Résumé :

Marius Davis, ancien athlète de haut niveau, est devenu paraplégique à la suite d’un accident de voiture. Cloué sur son lit, il est obnubilé par l’idée (erronée) que sa femme Susan le trompe avec son médecin. Il développe la faculté de libérer son esprit de son corps, Il décide alors d’assassiner celui qu’il estime être son rival, tout en faisant porter le chapeau à son épouse. Mais rien ne va se passer comme prévu.

Critique :

Cette première saison s’achève malheureusement par une pastille minimaliste, à l’indigent argument. La chute se veut effrayante et cruellement ironique, elle s’avère surtout ridicule tant les ficelles sont grosses.  La mise en scène s’appuie principalement sur des effets spéciaux déjà de second ordre à l’époque, accusant terriblement leur âge aujourd’hui. Si Jack Cassidy cabotine sans génie particulier, les seconds rôles se montrent davantage intéressants, avec la présence toujours sensuelle de Martine Beswick et une apparition fugace du regretté Martin E. Brooks en médecin. Le futur Rudy Wells des séries bioniques ne porte pas encore moustache mais se montre déjà talentueux. Le segment demeure néanmoins très dispensable, sur un thème similaire on lui préférera  largement l’épisode Corps Astral des X-Files.

Anecdotes :

  • Jack Cassidy (Marius Davis) connut une très belle carrière à Broadway (nombreuses nominations aux Tony Awards, qu'il remporta une fois), comme au cinéma, où il fut récompensé par deux Emmy Awards, en 1968 et 1971. Très présent à la télévision, Cassidy fut également un adversaire régulier de l'Inspecteur Columbo, participant à pas moins de trois épisodes de la série. La fin de sa vie fut obscurcie par des désordres psychologiques et l'alcoolisme. Il décède en 1976, une cigarette ayant mis le feu à son matelas alors qu'il était en état d'ivresse.

  • Martine Beswick (Susan Davis) est remémorée pour une double apparition dans les films de James Bond, étant Zora, l’une des deux gitanes de Bons Baisers de Russie (1963), puis la Paula Caplan d’Opération Tonnerre (1965). Durant les années 60 elle effectue plusieurs apparitions de charme dans des Westerns spaghettis ou des productions de la Hammer. Elle est notamment la Sister Hyde Dr. Jekyll and Sister Hyde (1971), écrit et produit par Brian Clemens pour la Hammer.  Durant les années 70 elle s’installe à Hollywood et se concentre sur la télévision (Mannix, L’homme qui valait trois milliards, Falcon Crest...). 

Saison 2 - Partie 2Présentation

Night Gallery

Saison 3



1. THE RETURN OF THE SORCERER 



 

Date de diffusion : 24 septembre 1972

Scénario : Halsted Welles, d'après une nouvelle de Clark Ashton Smith

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 26’13’’

Résumé :

Noël Evans est recruté par le riche occultiste John Carnby, afin de traduire le Nécronomicon un grimoire mystique écrit en arabe ancien. Evans va progressivement s’apercevoir que Carnby et Fern, sa mystérieuse compagne, s’adonnent à la magie noire. Tous deux s’efforcent de faire face à une effroyable menace.

Critique :

Sous bien des aspects la narration apparait bancale tout au long de l’épisode. On ne comprend jamais réellement la motivation profonde des évènements, car noyée dans un discours en permanence théâtral et sensationnaliste dissimulant un flou constant. Si on entraperçoit malgré tout une partie du but recherché par Carnby et Fern, Evans résulte à l’inverse à peu près totalement incohérent danses attitudes, ne cessant de changer de position vis-à-vis du duo à peu près à chaque scène. Mais l’opus à la bonne idée de compenser ce manque de fond par le rythme des péripéties, ce qui évite au spectateur de trop réfléchir à ce qu’on lui raconte ici. Surtout, il présente le mérite de reconstituer le duo gagnant de Class of 99, l’un des sommets de l’anthologie, en faisant se retrouver Vincent Price et Jeannot Szwarc.

 Si ce dernier n’évite pas quelques passages davantage grotesques qu’effrayants (le bou, le pied se déplaçant comme la Chose de la famille Addams), il sait fort bien mettre en valeur des décors étonnants, improbables alliages de Gothique et de Disco. Sa mise en scène dédie talentueusement à la mise en valeur de l’incroyable numéro de Vincent Price, auquel l’unit toujours une parfaite complicité. Price se donne totalement dans cette recréation 70’s de la grande époque de l’épouvante à la Hammer, la sublimant jusqu’à renouer avec l’intensité des œuvres de Clark Ashton Smith. L’épisode devient de la sorte un pur hommage au grand acteur, ceci constitue à la fois son intérêt et sa limite. Si Tisha Sterling se montre iconique à souhait dans son rôle de femme fatale, la fadeur de Bixby n’apporte rien à l’ensemble.

Anecdotes :

  • Vincent Price (John Carnby) fut l’une des plus grandes figures du cinéma d’épouvante, genre qu’il marqua par sa présence élégante, son rire diabolique et son timbre de voix particulier, à la fois inquiétant et caressant. Il devient ainsi un acteur fétiche de Roger Corman et participe à de nombreux classiques du genre : La Chute de la Maison Usher, Le Corbeau, la Mouche, L'Abominable Docteur Phibes, Je suis une légende... . Il se parodie dans Batman 1966 avec l’inénarrable Crâne d’œuf, mais aussi dans Le théâtre de sang aux côtés de Diana Rigg (1973). Egalement un important acteur de voix, il assura celle du clip Thriller de Michael Jackson, mais aussi celle de l’attraction Phantom Manor, à Disneyland Paris. 

  • Bill Bixby (Noël Evans) a été l’interprète du Docteur Banner dans la série L'Incroyable Hulk (1977-1982). Également réalisateur, il a travaillé pour Mannix, Drôles de Dames et de nombreux téléfilms.

  • Avec cet épisode, la troisième saison introduit plusieurs modifications dans le rituel de la Galerie de Nuit, avec des tableaux désormais mobiles, une nouvelle musique, et les acteurs du jour apparaissant non plus dans le générique, mais dans un cadre fixé au mur.

  • L'épisode est basé sur la nouvelle The Return of the Sorcerer, de Clark Ashton Smith. Elle fut d'abord publiée dans le Pulp Strange Tales of Mystery and Terror, en septembre 1931.

  • Noël Evans est chargé de traduire le Nécronomicon. Cet ouvrage ésotérique et sulfureux, volontiers présenté comme fictif, occupe une place majeure dans l'univers de Lovecraft. En effet il révèle plusieurs éléments majeurs du Mythe de Cthulhu et des autres Grands Anciens. Il fut repris par les divers disciples du Maître de Providence poursuivant ses travaux (dont Clark Ashton Smith) et il est désormais passé dans la culture populaire. Il figure ainsi dans la saga des films Evil Dead, de Sam Raimi et est devenu une référence pour de nombreux groupes de Métal.

  • Sous différentes versions, le Nécronomicon se retrouve dans de multiples Univers, sa nature mystique et profanatrice transgressant la Réalité. Sous le titre de Nécrotelicomnicon, l'aventurier érudit pourra ainsi en trouver un exemplaire conservé dans la section la plus secrète et interdite de la Bibliothèque de l'Université de l'Invisible, siège des Mages d'Ankh-Morpork, la grande cité humaine du Disque-Monde. La lecture de la moindre de ses pages est réputée rendre complètement fou, mais semble curieusement n’avoir aucun effet particulier sur les Mages.  

 

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2. THE GIRL WITH THE HUNGRY EYES

Date de diffusion : 01 octobre 1972

Scénario : Robert Malcolm Young

Mise en scène : John Badham

Durée : 25’20’’

Résumé :

Le photographe de publicité Philip Faulkner s’associe avec une séduisante et mystérieuse modèle « Hungry Eyes », dont le charme promet à ses photos de connaître un immense succès. Mais la dame demeure inaccessible jusqu’à lui dissimuler son nom. Faulkner découvre également que les hommes se montrant trop pressants envers la jeune femme, dont un important client, sont retrouvés morts. Mais qui est-elle vraiment ?

Critique :

The oldest and strongest emotion of Mankind is fear, and the oldest and strongest kind of fear is fear of the Unknown. (H.P. Lovecraft)

L’épisode reconstitue fort bien le merveilleux horrifique propre à l’œuvre de Fritz Leiber Jr, sous son aspect de continuateur de Lovecraft, avec lequel il tint une correspondance passionnée durant les années 30. Toute la première partie du récit se montre ainsi captivante, avec la montée d’une insidieuse épouvante autour de l’énigmatique Hungry Eyes. L’intrigue accompagne par ailleurs son progressif dévoilement de l’Indicible par toute une critique sociale des mœurs machistes du monde de la publicité dans les années 70, que l’on peut volontiers élargir à l’ensemble de la condition féminine. Outre la mise en scène électrique de John Badham, l’épisode bénéficie de l’impact des œuvres d’Harry Langdon, Jr, ce grand photographe sachant à merveille mettre en valeur la fascinante beauté de Joanna Pettet, dans des atours irrésistiblement 70’s.

L’actrice effectue d’ailleurs une formidable prestation à l’issue de sa quatrième et ultime participation à une anthologie dont elle demeure l’un des visages les plus séduisants et inoubliables. La voir croiser John Astin, autre grand habitué de la Galerie de Nuit, suscite d’ailleurs une amusante curiosité. La solidité de James Farentino dans le rôle de Philip Faulkner complète une idéale distribution. On peut certes regretter que la situation se dénoue trop brusquement et que la seconde partie de l’intrigue ne dévoile pas tout à fait assez de la véritable nature et surtout des motivations de la créature semi vampirique, mais, après tout, le mystère sied si bien à Joanna Pettet… John Badham sait également doper la conclusion par un montage hyper nerveux et quelques étonnants trucages. L’un des ultimes chefs d’œuvre de Night Gallery.

Anecdotes :

  • Grâce à l’entremise du réalisateur John Badham, les différents clichés de Joanna Pettet ont été pris au studio du photographe Harry Langdon, Jr. Ce dernier a été l’un des plus grands photographes professionnels d’Hollywood et de Los Angeles durant quatre décennies, des années 70 aux 2010, assurant de grandes campagnes publicitaires et les portraits de nombreuses stars.

  • Joanna Pettet (la modèle) se fit connaître dans le cinéma de son Angleterre natale au cours des années 60, ainsi qu’à Broadway. Elle est ainsi la Mata Bond de Casino Royale (1967). A partir des années 70 elle apparaît davantage dans les séries télévisées américaines (Banacek, Mannix, L’Île fantastique, La croisière s’amuse, Arabesque...). Elle va également participer quatre fois à Night Gallery. Elle se retire au début des années 90, après la mort de son unique enfant suite à une overdose.

  • L’épisode adapte la nouvelle The Girl with the Hungry Eyes, de Fritz Leiber. Elle a été initialement publiée dans l’anthologie The Girl With the Hungry Eyes, and Other Stories (1949).

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3. RARE OBJECTS 

Date de diffusion : 22 octobre 1972

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 24’54’’

Résumé :

Le gangster August Kolodney a été condamné à mort par ses rivaux. Aux abois, il fait appel à un certain Dr. Glendon, qui lui propose un sanctuaire contre forte rémunération. Mais une grande surprise attend Kolodney quand il découvre la très particulière collection de trophées du Dr. Glendon.

Critique :

L’épisode vaut pour la sensible composition de Mikey Rooney en personnage à la fort et au bout du rouleau, qui n’est d’ailleurs pas sans évoquer celui qu’il a interprété pour La Quatrième Dimension, lors de The Last Night of a Jockey. La présentation du protagoniste s’accompagne par ailleurs d’un long plan magistralement ordonnancé par Jeannot Szwarc. De son côté, Raymond Massey apporte un agréable charme suranné au docteur. Mais le scénario compte parmi les plus malhabiles de Rod Serling.

En effet, dès que le pacte se noue entre le bon docteur et le gangster, on devine d’emblée que ce dernier commet une terrible erreur. Dès lors la conclusion devient en soi très prévisible, quelque soit son modus operandi. De plus sa chute se montre également maladroite, sa soudaineté manquant d’explications et jouant tout sur la simple image au lieu de se profiler en écho ironique à la vie de  Kolodney. L’ensemble manque également de logique : on ne perçoit pas clairement pourquoi un « collectionneur » s’étant jusqu’ici consacré à des figures histoires s’intéresserait d’un coup à un gangster de seconde zone.

Anecdotes :

  • Mikey Rooney (August Kolodney) est un très populaire acteur, réputé pour la longévité de sa carrière. Celle-ci fut lancée dans les années 30, notamment en association avec Judy Garland. En 2009, il participe encore à Une nuit au musée, succédant à un nombre particulièrement imposant de films très divers. Il rivalise également avec Liz Taylor, puisqu'il défraya la chronique avec un total de 8 mariages. En 1983, il reçut un Oscar pour l'ensemble de sa carrière.

  • Les membres de la collection du docteur se composent de personnalités célèbres mystérieusement ou supposément disparues, (Anastasia, Hitler, Roald Amundsen) mais aussi d’autres peut-être moins connues du public français.

  • Amelia Earhart (1897-1937) fut une légendaire pionnière de l’aviation. Elle fut la première femme à traverser l’Atlantique en solitaire aux commandes d’un avion et disparut dans le Pacifique lors d’une tentative de tour du monde. Elle fut une ardente militante du droit de vote pour les femmes.

  • Joseph Crater (1889-1930) fut un juge new-yorkais aux troubles connexions politiques. Sa soudaine disparition demeurée inexpliquée devint l’un des cas de personnes escamotées lds plus fameux aux USA et est désormais entrée dans la culture populaire du pays.

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4. SPECTRE IN TAP SHOES 

Date de diffusion : 29 octobre 1972

Scénario : Jack Laird et Gene R. Kearney

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 25’02’’

Résumé :

Marion, une danseuse de claquettes, se suicide par pendaison. Sa sœur jumelle Millicent entend la défunte danser au-dessus de sa chambre, précisément dans la pièce où celle-ci s’est pendue. Elle entend cette danse à plusieurs reprises, ce qui la plonge progressivement dans une dépression suicidaire. Pendant ce temps un entrepreneur tente d’acquérir la propriété familiale.

Critique :

L’intrigue de Jack Laird a la bonne idée de croiser deux thèmes fantastiques en eux-mêmes très classiques, les liens psychiques entre jumeaux et la maison hantée, afin d’obtenir une histoire solide et raisonnablement dense. Les évènements se succèdent de manière assez attendue, mais produisent néanmoins leur effet. Une conclusion un rien tarabiscotée (tout n’est pas réellement explicité), et surtout quasiment dépourvue de tout surnaturel, pourra décevoir les aficionados du genre.

Mais, si dans la grande tradition de Scooby-Doo la chute s’avère prévisible, elle parvient malgré tout à susciter la surprise lors de son ultime prolongement. Sandra Dee fait de son mieux pour animer le récit dans son double rôle de jumelles et s’en sort honorablement, même si l’épisode se repose trop sur son talent. Derrière la caméra, Jeannot Szwarc, l’inépuisable mettre en scène, parvient à insuffler un surcroît d’énergie à cet épisode de bonne facture, à défaut d’être inoubliable.

Anecdotes :

 

  • Sandra Dee fut une jeune vedette durant les années 50, où elle connut la popularité grâce à de nombreux rôles d’ingénues (Gidget, 1959). Elle fut l’épouse du chanteur Bobby Darin. Elle avait déjà participé à l’épisode tell David, la saison précédente.

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5-A. YOU CAN COME UP NOW, MRS. MILLIKAN

Date de diffusion : 12 novembre 1972

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : John Badham

Durée : 23’21’

Résumé :

Désireux de rétablir son crédit auprès de collègues doutant de la pertinence de ses travaux, le scientifique Henry Millikan décide de frapper un grand coup en ressuscitant son épouse, tout en la rendant plus vive d’esprit au passge. Seul problème :  celle-ci n’est pas encore décédée.

Critique :

Sans bénéficier des résonnances caractérisant les grands scénarios de Rod Serling, l’opus se montre plaisant. En effet, il opère un astucieux contrepoint humoristique sur une situation potentiellement sinistre, et qui évoque d’ailleurs plusieurs classiques de l’épouvante, de Réanimator à L’Expérience interdite. Le pari de la comédie fonctionne globalement, même si l’épisode aurait pu gagner à être légèrement plus bref. Le récit capitalise à plein sur la complicité du couple réel formé par Ozzie et Harriet Nelson, tout en incorporant d’efficaces rouages de vaudeville grinçant, comme l’intervention du neveu du scientifique. La conclusion relève du même registre se montrant astucieuse dans son déroulement car puisant sa source dans le récit antérieur au lieu de tomber comme un cheveu sur la soupe comme lors du précédent scénario de Serling, Rare Objects.  L’inventive mise en scène de Badham vient encore agrémenter cet épisode aussi léger que distrayant.

Anecdotes :

  • Ozzie et Harriet Nelson interprètent le scientifique et son épouse. Ce véritable couple est très populaire aux USA pour avoir joué les protagonistes de la sitcom The Adventures of Ozzie and Harriet, sur ABC, de 1952 à 1966 (après avoir été lancée durant les années 40 sous forme radiodiffusée). Les Nelson sont entrés dans la culture populaire américaine comme incarnant la famille idéale des années 50. Avec 14 saisons et 434 épisodes, il s’agit encore de la plus longue sitcom américaine recensée à ce jour.

  • L’épisode est basé sur la nouvelle The Secret of the Vault, de J. Wesley Rosenquist. Il devait initialement s’intituler The Vault.

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5-B. SMILE, PLEASE 

Date de diffusion : 12 novembre 1972

Scénario : Jack Laird

Mise en scène : Jack Laird

Durée : 1’30’’

Résumé :

Une jeune photographe veut être la première à photographier un Vampire endormi. Un guide la conduit dans une crypte, mais le cercueil s’avère vide !

Critique :

L’épisode marque le retour des vignettes ourdies par un Jack Laird prétendant jeter un regard moderne et humoristique sur les figures classiques de l’épouvante gothique. Bien davantage creuses que divertissantes, elles encombrèrent le plus souvent inutilement la saison 2, mais vont heureusement demeurer bien plus rares dans la présente. Celle-ci ne déroge pas à la règle avec son traitement expéditif et sa chute ultra prévisible tombant plat, mais les comédiens parviennent à lui apporter un semblant d’intérêt. Il en va ainsi du charme de la présence toujours suave de Cesare Donova, mais aussi et surtout de la pimpante prestation d’une Lindsay Wagner très expressive et piquante avec son chapeau rouge et son accent anglais joyeusement caricatural. L’actrice va bientôt devenir Super Jaimie et l’opus revêt de ce fait une valeur documentaire pour les amateurs de la Femme bionique.

Anecdotes :

 

  • Lindsay Wagner accomplit ici sa seconde et ultime brève apparition au sein de l’anthologie, après avoir participé à The Diary en saison 2. Trois ans après la diffusion de l’épisode, elle va accéder à la gloire en devenant Jaimie Sommers, la Femme bionique. 

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6. THE OTHER WAY OUT 

Date de diffusion : 19 novembre 1972

Scénario : Gene R. Kearney, d'après une nouvelle de Kurt van Elting

Mise en scène : Gene Kearney

Durée : 25’30’’

Résumé :

Le riche homme d’affaires Bradley Meredith est responsable de la mort d’une jeune danseuse, sans être inquiété par la justice. Le grand père de la victime l’attire dans une maison déserte, où il va exercer une terrible vengeance.

Critique :

L’anthologie renonce ici une nouvelle fois au Fantastique pour puiser l’horreur au sein de l’âme humaine, une nouvelle fois avec une totale réussite. Le côté démentiellement cruel de cette vengeance saisit d’autant plus le spectateur qu’elle passe par une habile inversion de postures, le justicier devenant un bourreau monstrueux bourreau et l’initialement égoïste protagoniste se mue en victime pour qui le spectateur prend fait et cause.

L’amateur des Avengers pourra ici discerner comme un écho de L’Héritage diabolique, le récit perdant en sophistication ce qu’il gagne en impact brut. La mise en scène de Gene Kearney choist d’ailleurs de renoncer à toute afféterie, pour filmer au plus près le jeu terriblement réaliste de Burl Ives dans le rôle du vengeur et d’un Ross martin étonnant de crédibilité tout au long du cauchemar vécu par son personnage, bien loin des irrésistibles pitreries d’Artemus Gordon. Un récit d’une force rare, ayant le mérite de n’opérer aucune concession, jusqu’à sa terrible chute.

Anecdotes :

 

  • Ross Martin (Bradley Meredith) reste bien entendu l'interprète du célèbre Artemus Gordon des Mystères de l'Ouest (1965-1969). Ce comédien polyglotte eut également une belle carrière au cinéma, jouant notamment régulièrement dans les films de Blake Edwards (La Grande Course autour du monde, 1965...). Il participa également à de nombreuses séries télé des années 60 et 70 : La Quatrième Dimension, Wonder Woman, Columbo, Hawaï Police d'État, Drôles de Dames… Il décède d'une crise cardiaque survenue durant une partie de tennis. 

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7. FRIGHT NIGHT

Date de diffusion : 10 décembre 1972

Scénario : Robert Malcolm Young d'après une nouvelle de Kurt van Elting

Mise en scène : Jeff Corey

Durée : 24’58’’

Résumé :

L’écrivain Tom Ogilvy et son épouse Léona s’installent dans une grande maison isolée, dont ils ont hérité d’un cousin, Zachariah. Sur le départ, une domestique les conjure de ne pas ouvrir un coffre se trouvant au grenier. Plusieurs étranges évènements surviennent et le coffre semble se déplacer tout seul.

Critique :

L’épisode introduit une énième histoire de maison hantée au sein d’une anthologie ayant déjà eu amplement recours à ce thème. Toutefois pour redondant et classique que demeure le déroulement de l’histoire, il s’effectue de manière efficace. La litanie des évènements explicables et la tension psychologique s’exerçant sur le couple vont croissant et stimulent la curiosité du spectateur envers la clef de l’énigme. C’est d’autant plus vrai que le récit sait intégrer différents éléments ludiques, tels le mystère du coffre où la sensibilité d’écrivain du protagoniste, éventuellement dévoré par son œuvre.

Cela permet au scénario d’introduire un trouble plaisant quant à la véritable nature de ce qui est en train de se dérouler, évènement purement paranormal ou dédoublement de la personnalité (une dualité explorée avec brio par Stephen King dans La Part des Ténèbres). La distribution et la mise en scène s’avèrent corrects mais guère plus relevés que cela. Mais l’ensemble se voit gâché par une conclusion précitée et trop floue dans ce qu’elle révèle du dessous des cartes.

Anecdotes :

  • Stuart Whitman (Tom Ogilvy) fut un grand acteur de western, aussi bien au cinéma (Les Comancheros, 1961) qu’à la télévision (Cimarron, 1967-1968). Après s’être retiré il s’est reconverti avec succès dans les affaires et les investissements en bourse.

  • La résidence des Ogilvy est très reconnaissable, puisqu’il s’agit de la maison des Bates dans Psychose. Ce décor des Studios Universal a été utilisé à diverses reprises au cours du tournage de l’anthologie, notamment lors de A Question of Fear et du précédent opus, The Other Way Out.

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8. FINNEGAN'S FLIGHT 

 

Date de diffusion : 17 décembre 1972

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Gene Kearney

Durée : 25’03’’

Résumé :

Charlie Finnegan a été condamné à la prison à vie et souhaite désespérément s’échapper. Mais son compagnon de cellule Pete Tuttle, ancien artiste de cirque, lui propose un original moyen d’évasion, via des séances d’hypnose très particulières, où son pouvoir de suggestion fait vivre d’autres expériences à Finnegan.

Critique :

Après The Little Black Bag, en saison 1, l’épisode marque de nouvelles retrouvailles entre Rod Serling et Burguess Meredith, son acteur fétiche de La Quatrième Dimension. Ceci se ressent  d‘autant plus fortement que l’on perçoit que le sujet de l’opus consiste à exalter l’imagination humain comme pouvant surplomber tous les contraintes. Soit une résonance du fameux exergue de cette précédente anthologie (you unlock this door with the key of imagination), ou encore du sujet de Time Enough at Last, le plus célèbre des épisodes avec Meredith, malgré son épilogue cruel. Par ailleurs l’acteur se contre toujours aussi irrésistiblement caméléon et son talent assure une indéniable valeur ajoutée à Finnegan's Flight.

Malheureusement Serling ne parvient pas ici à exploiter efficacement son idée initiale. En effet le récit achoppe sur les motivations des divers protagonistes de l’action. Ainsi l’on ne comprend pas vraiment pourquoi Finnegan accepte de se plier à des séances virant infailliblement à la torture (doigts brisés en cognant un mur, expérience d’un crash aérien). Par ailleurs les différentes reconstitutions des expériences passent à l’écran, avec quelques effets visuels s’avérant assez ridicules, comme le visage de héros changeant de couleurs. L’opus confirme un certain essoufflement créatif de Serling dans cette ultime étape de Night Gallery, alors qu’il s’épuise à faire face à l’hostilité de Jack Laird.

Anecdotes :

  • Burgess Meredith (Finnegan) connaît un début de carrière prometteur au théâtre et au cinéma (Des souris et des hommes, 1939...) avant d'être inscrit sur la liste noire du MacCarthysme. Revenu à la fin de cette triste période, il apparaît dans de très nombreux films, dont la série des Rocky où il interprète le vieil entraîneur de Balboa. À la télévision, il incarna le Pingouin, l'un des pires ennemis de Batman (1966-1968). Il apparaît également dans Les Mystères de l'Ouest, Bonanza, Mannix, L'Homme de Fer… Avec quatre rôles, il détient le record de participations à La Quatrième Dimension, à égalité avec Jack Klugman. En 1983, il se substitue d'ailleurs à Rod Serling, décédé, pour devenir le narrateur de l'adaptation filmique de la série.  

 

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9. SHE'LL BE COMPANY FOR YOU 

Date de diffusion : 24 décembre 1972

Scénario : David Rayfield

Mise en scène : Gerald Perry Finnerman

Durée : 25’02’’

Résumé :

Après s’être occupé de sa femme invalide durant des années, Henry Auden apprécie sa solitude une fois devenu veuf. La situation n’est pas au goût de la meilleure amie de la disparue. A l’occasion  d‘un départ en vacances elle confie son chat à Auden, pour qu’il lui tienne compagnie.

Critique :

L’écrivaine anglaise Andrea Newman s’est souvent adonnée à la description de relation amoureuses hors normes ou à des récits de désagrégation de couples (A Bouquet of Barbed Wire, 1969) . Il s’agit ici de l’une de ses très rares incursions dans le domaine du Fantastique et cela se ressent avec force tout au long de ce qui constitue l’un des opus les plus faibles de l’anthologie. Ainsi les quelques ressorts surnaturels résultent-ils plus ridicules qu’effrayants (les transformations du chat), au sin d’un récit virant le plus souvent au mauvais mélodrame.

Le scénario demeure en permanence particulièrement confus, jusqu’à une chute particulièrement pesante. Celle-ci vient aussi en contradiction définitive d’un trouble psychologique vécu par le protagoniste, avec un refoulé et des remords le conduisant à des hallucinations. A contrario, si le chat est réellement surnaturel rien n’indique que sa maîtresse soit au courant, ce qui semble malgré tout étonnant. Avec énergie et talent, Leonard Nimoy s’efforce de sauver ce mauvais script, mais ne peut rien contre son inanité, doublée d’une mise en scène très mécanique.

Anecdotes :

  • Leonard Nimoy (Henry Auden) incarna le célèbre M. Spock dans Star Trek Classic (1966-1969), mais participa également à bien d'autres séries (Mission : Impossible, Bonanza, Night Gallery, Columbo…). Il annonce sa retraite en 2010 alors qu'il participe encore à Fringe, mais apparaît encore dans le film Star trek Into Darkness (2013).

  • L’épisode est basé sur la nouvelle She'll Be Company for You, d’Andrea Newman. Le texte fut initialement publié dans l’anthologie More Tales of Unease (1969).

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10. THE RING WITH THE RED VELVET ROPES

Date de diffusion : 07 janvier 1973

Scénario : Robert Malcolm Young

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 25’01’’

Résumé :

Jim Figg prend une douche après le combat l’ayant vu devenir champion de monde de boxe. En en sortant il se retrouve dans un endroit totalement différent, une luxueuse et insolite demeure. Il apprend que ses hôtes inattendus ont organisé une rencontre entre lui et un adversaire particulièrement redoutable, invaincu depuis… toujours.

Critique :

Comme trop souvent cette saison, l’épisode se montre formellement réussi grâce au savoir-faire de studios, mais il souffre néanmoins d’une histoire tournant à vide, avec une chute en grande partie ventée et dépourvue de toute résonance morale. Le basculement initial produit ainsi un effet insolite réussi, d’autant que le côté savamment étrange du luxueux décor induit bien que nous nous situons désormais dans une autre réalité, de l’autre côté du Miroir. La distribution s’avère également de qualité, avec Gary Lockwood et Chuck Connors se montrant convaincants en adversaires déterminés, même si le show est largement volé par une très sexy Joan Van Ark pré Valérie Ewing, joliment perverse en organisatrice du combat.

La réussite de l’épisode demeure toutefois insatisfaisante. Ainsi Jeannot Szwarc s’escrime-t-il en vain pour filmer le combat en dissimulant le fait que les acteurs sont remplacés par des doublures, un problème bien connu des amateurs de Chapeau Melon. De plus la résolution de l’affaire reste Très paresseuse, se contentant de vagues réminiscences du mythe de Sisyphe. Aucun effort ne se voit mené afin d’expliciter le volet surnaturel de l’intrigue et la chute ne développe aucune ambition moraliste, a contrario des épisodes de La Quatrième Dimension dédiés à la boxe (Steel, The Big Tall Wish).

Anecdotes :

  • Gary Lockwood (Jim Figg) a débuté sa carrière à la fin des années 50, en tant que cascadeur. Par la suite il a tenu une multitude de seconds rôles, aussi bien à la télévision qu’au cinéma, dans des domaines très divers. Son rôle le plus connu demeure celui de l’astronaute Franck Poole, dans 2001, Odyssée de l’Espace (1968). il est une figure régulière des conventions Star Trek, pour sa participation à Where No Man Has Gone Before, épisode considéré comme le second pilote de la série. De 1966 à 1972, il a été l’époux de Stefanie Powers.

  • Joan Van Ark (Sondra) est connue pour sa belle carrière à Broadway (elle est membre à vie de l’Actors Studio) mais aussi pour le rôle de Valérie Ewing dans les séries Dallas et Côte Ouest. Au fil de ces productions, Valérie s’est ainsi mariée trois fois à Gary Ewing, sans oublier deux autres mariages. Couronnée de nombreux prix pour le rôle de Valérie (de 1978 à 1993 et dans la reprise de Dallas en 2013), Joan Van Ark est considérée comme l’une des reines des Soap-operas américains.

  • L’épisode est basé sur la nouvelle The Ring with the Velvet Ropes, d’Edward D. Hoch. Le texte est initialement paru dans l’anthologie With Malice Toward All (1968).

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11. SOMETHING IN THE WOODWORK 

Date de diffusion : 14 janvier 1973

Scénario : Rod Serling

Mise en scène : Edward M. Abroms

Durée : 24’58’’

Résumé :

Femme alcoolique et divorcée, Molly achète une superbe maison en forêt, pour une bouchée de pain. La maison est en effet réputée hantée par l’esprit d’un criminel, avec lequel Molly établit d’ailleurs bientôt un contact. En menaçant de mettre le feu à la maison, elle va obtenir du fantôme qu’il se prête à un piège qu’elle va tendre à son ex-mari, par vengeance.

Critique :

L’épisode présente le mérite de permettre à Rod Serling de quitter l’anthologie sur un ultime succès. On peut certes regretter un certain manque d’originalité du sujet, le thème de la maison hantée comptant certainement parmi ceux les plus explorés par la Galerie de Nuit. Mais c’est avec talent et sensibilité que Serling adapte un intéressant texte de R. Chetwynd-Hayes, l’un des maîtres anglais de la nouvelle horrifique. Ce dernier s’est en effet particulièrement complu à écrire des histoires renouvelant l’approche du Fantôme et il y parvient ici totalement en faisant in fine provenir l’épouvante non pas de la créature surnaturelle mais au contraire de l’inépuisable capacité de l’être humain à haïr. Le portrait psychologique de Molly s’avère ainsi particulièrement éprouvant et porté avec force par Geraldine Page. Il accompagne naturellement la marche des évènements jusqu’à une conclusion particulièrement sombre. La mise en scène d’Abroms dynamise le huis clos tout en insérant d’astucieux trucages, sans pour autant oublier de mettre au premier plan le jeu de l’actrice.

Anecdotes :

  • Geraldine Page (Molly) fut oscarisée en 1985 pour Mémoires du Texas, après avoir été proposée sept autres fois à cette distinction au cours de sa longue carrière. Elle reste néanmoins surtout remémorée comme une importante professeure d’art dramatique et découvreuse de nombreux talents.

  • L’épisode est basé sur la nouvelle Housebound, de  R. Chetwynd-Hayes 

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12. DEATH ON A BARGE

Date de diffusion : 04 mars 1973

Scénario : Halsted Welles

Mise en scène : Leonard Nimoy

Durée : 25’03’’

Résumé :

La sublime Hyacinthe réside dans une barge amarrée le long d’un paisible canal. Toutefois elle craint l’eau vive et passe ses journées à dormir dans un cercueil. Reconnaissons-le : Hyacinthe est une Vampire. Mais elle va néanmoins connaître une belle (mais tragique) histoire d’amour avec un jeune homme des environs.

Critique :

Plusieurs éléments ne fonctionnent pas du tout au sein de cet épisode inégal. Ainsi, durant sa traditionnelle présentation, Rod Serling a beau jeu de mentionner de prestigieuses références horrifiques en matière de Vampires (Bela Lugosi, Christopher Lee) mais Hyacinthe n’en demeure pas moins fondamentalement une créature émotive et romantique. Pourquoi ? bien évidemment parce qu’il s’agit d’une femme et à ce titre se voit cantonnée dans un registre lénifiant et inoffensif. Cela date terriblement le récit, d’autant que nous avons depuis appris à apprécier Darla et Drusilla. Par ailleurs l’amoureux de Hyacinthe se montre tellement fade et ennuyeux (et lesté de dialogues empesés), que l’on peine à croire à cette relation. Au lieu de donner lieu à une romance enténébrée et passionnée à la Anne Rice, celle-ci verse d’ailleurs vite dans le mélodrame outré, aboutissant à une conclusion dépourvue de toute finesse.

Et pourtant, malgré toutes ces réserves, l’opus demeure l’une des belles réussites du crépuscule de l’anthologie. Le critique n’est qu’un homme mais se doit d’être honnête, aussi indiquera-t-il ici que le succès de Death on a Barge tient avant tout en un nom : Lesley Anne Warren. Sublime, solaire (paradoxalement), merveilleusement charnelle… Et excellente actrice, elle tient réellement à bout de bars l’ensemble de l’entreprise. D’ailleurs Leonard Nimoy, son ancien complice de Mission Impossible (1970-1971), a parfaitement compris l’atout qu’elle représente et met à son service un sens accompli de l’esthétisme, lors de ce qui demeure pourtant sa toute première réalisation. Il sait également par moments instiller une vraie atmosphère étrange autour de l’héroïne. L’une des plus mémorables compositions de l’anthologie, malheureusement au sein d’une version guère enthousiasmante du mythe du Vampire.

Anecdotes :

  • Il s’agit de la toute première réalisation de Leonard Nimoy, qui va par la suite mettre en scène deux films de la saga Star Trek, entre autres. Nimoy sut convaincre Jack Laird de lui donner sa chance, le producteur étant toujours à l’affut de nouveaux talents. Laird fut ravi du résultat et proposa à Nimoy de tourner un autre épisode, mais l’acteur dut renoncer, du fait d’un engagement au théâtre.

  • En charge du casting, Nimoy proposa d’emblée le rôle de la belle Hyacinthe à Lesley Anne Warren, avec laquelle il avait sympathisé sur le tournage de Mission Impossible.

  • Lesley Anne Warren débuta au Broadway et à 17 ans, devient la plus jeune comédienne à avoir intégré l’Actors Studio. Après être devenu une actrice de Disney durant les années 60, elle change totalement de registre et accède au vedettariat en intégrant Mission Impossible après le départ de Lee Meriwether. Par la suite elle connaît une très belle carrière au cinéma et à la télévision, riche rn rôles très divers. En 1982 elle est proposée aux Oscars pour Victor, Victoria. En 1975 elle devint Lois Lane dans le remarquable Nanar musical It’s a Bird... It's a Plane... It's Superman ! Elle fut ensuite pressentie pour reprendre le rôle aux côtés de Christopher Reeve dans le film de 1978, mais Margot Kidder lui fut préférée.

  • L’épisode est basé sur la nouvelle The Canal, d’Everil Worrell. Le texte fut initialement publié dans Weird Tales, en décembre 1927.

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13. WHISPER

Date de diffusion : 13 mai 1973

Scénario : David Rayfiel

Mise en scène : Jeannot Szwarc

Durée : 25’02’’

Résumé :

Irène est une medium, à qui s’adressent de plus en plus souvent les morts.  La jeune femme s’efforce de comprendre ce qu’ils déclarent à travers elle, ce qui inquiète son mari Charlie, craignant qu’un jour elle ne revienne pas de l’une de ses transes.

Critique :

Une femme extralucide ne prenant pas l’initiative de contacts venus de l’Au-delà pouvant la déstabiliser, un mari attentionné… Avec le recul, l’épisode préfigure de manière amusante le futur succès de la série Medium (2005-2011). On apprécie également qu’avec les moyens du bord, le talent de metteur en scène de Jeannot Szwarc suscite quelques moments authentiquement étranges, à l’occasion de cette ultime participation à l’anthologie. Et pourtant l’opus s’avère moins fort qu’il aurait pu l’être.

De fait le talent d’une jeune Slly Field demeure encore en devenir et sa prestation résulte en deçà de ce que proposeront Patricia Arquette ou Kristen Cloke dans le The Field Where I Died des X-Files (1996). Le jeu de Dean Stackwell semble également très en retrait, comme si son personnage était insuffisamment concerné. L’acteur se voit également défavorisé par un mode de narration inadéquat, voyant Charlie s’adresser régulièrement au spectateur à travers le Quatrième Mur, à l’occasion d’une relation très cérébrale de ce qui survient. Le procédé se veut sans doute expérimental, mais s’avère surtout anti climatique au possible.

Anecdotes :

  • Sally Field (Irène) interprétera en 1976 une femme pareillement aux multiples personnalités, lors du téléfilm Sybil, connaissant un grand succès. Cela propulse une prolifique carrière, qui la verra notamment obtenir deux Oscars et une Palme cannoise. Elle fut la compagne de l’acteur Burt Reynolds.

  • Dean Stockwell (Charlie) fut un enfant star d'Hollywood durant les années 40 (Les vertes années, 1946...). Hormis quelques rôles marquants chez David Lynch (Blue Velvet, 1986) et dans Veuve mais pas trop (1988), il reste principalement connu pour son rôle de Al dans Code Quantum (1989-1993).

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14. THE DOLL OF DEATH

Date de diffusion : 20 mai 1973

Scénario : Jack Guss

Mise en scène : John Badham

Durée : 25’02’’

Résumé :

De nos jours, aux Antilles britanniques, Alec Brandon, un riche planteur se voit ravir sa fiancée Sheila au pied de l’autel, celle-ci lui préférant Raphael, un aventurier. Afin de se venger de son rival, Brandon va faire appel à un praticien du Vaudou.

Critique :

Après The Doll puis Lagoda’s Heads, Night Gallery en revient ici aux histoires de vaudou, un genre particulièrement balisé. Cela se ressent d’autant plus fortement que le scénario du jour demeure particulièrement enferré dans les poncifs de ce type d’histoire, jusque dans sa chute (qui d’ailleurs n’est pas sans évoquer celle de The Caterpillar, la saison passée). De plus l’adaptation du texte initial (1927) dans la période contemporaine n’a été que superficiellement traitée, d’où des tournures de phrases et autres exaltées ou mélodramatiques ne fonctionnant pas du tout dans le contexte. L’actrice Susan Strasberg dut reprendre inopinément le rôle du Sheila et cela se ressent à l’écran, tandis que ses deux partenaires masculins ne brillent pas particulièrement non plus. John Badham signe au moins une mise en scène élégante à défaut de réellement imaginative. Au total l’épisode ne résulte certes pas honteux, mais ne soulève guère d’enthousiasme.

Anecdotes :

  • L’épisode est adapté d’une nouvelle de Vivian Meik, parue en 1927.

  • Le rôle de Sheila devait être initialement tenu par Barbara Perkins, mais celle-ci fut remplacée au dernier moment par Susan Strasberg, après une mauvaise chute de cheval survenue au début du tournage.

  • Apparue dans de nombreuses séries télévisées, Susan est la fille de Lee Strasberg, l’un des fondateurs de l’Actors Studio et grand artisan de la Méthode, selon laquelle l'acteur doit créer son personnage par sa mémoire affective et son vécu propre. Elle est l’auteure de mémoires où elle relate les relations, parfois conflictuelles mais toujours passionnelles, ayant existé entre ses parents et de nombreuses stars d’Hollywood.

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15-A. HATRED UNTO DEATH 

Date de diffusion : 27 mai 1973

Scénario : Halsted Welles

Mise en scène : Gerald Perry Finnerman

Durée : 23’04’’

Résumé :

Deux anthropologues, Grant et Ruth, ramènent un puissant gorille du Kenya. L’animal semble très sensible à la présence de Ruth mais aussi percevoir Grant comme un rival. De retour à l’institut, le gorille s’échappe suite à une erreur de Ruth et dès lors une lutte à mort s’engage entre les deux mâles.

Critique :

Formant très probablement le nadir d’une anthologie désormais entrée en agonie, Hatred unto Death se résume à une mise en place laborieuse, suivie d’une interminable course poursuite entre le singe et l’humain. Les événements se voient filmés sans génie particulier et, surtout, rendus particulièrement grotesques par l’évident déguisement de gorille dont est affublé un acteur aussi valeureux que malhabile. Le rendu s’avère encore plus ridicule que lors du Slay, Gipsy, Slay, d’Honey West, où cette séquence restait assez courte et où l’on se prenait autrement moins au sérieux qu’ici. Ni les comédiens, ni le metteur en scène ne semblent particulièrement concernés par cette farce et on les comprend. Afin d’améliorer le niveau on se sent parfois tenté de couper le son et de visionner l’épisode en écoutant le truculent Gare au Gorille, de Brassens.

Anecdotes :

 

  • Steve Forrest (Grant) a tenu le rôle-titre d’Alias le Baron (1966-1967). Il est le frère cadet de l’acteur Dana Andrews.

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15-B. HOW TO CURE THE COMMON VAMPIRE

Date de diffusion : 27 mai 1973

Scénario : Jack Laird

Mise en scène : Jack Laird

Durée : 1’50’’

Résumé :

Des gens entreprennent de planter un pieu dans le cœur d’un Vampire endormi. Mais à quelle fin ?

Critique :

Night Gallery, anthologie fantastique-horrifique ayant connu de grandes heures, s’achève malheureusement sur une ultime vignette de Jack Laird, sketch indigent ne se montrant pas davantage humoristique que nombre de ces prédécesseurs. Les Avengers ne connaissent pas leur chance de d’avoir pris congé avec Emily.

Anecdotes :

  • Les décors sont absolument les mêmes que ceux utilisés lors du précédent Smile Please, cette saison.

  • Ces deux sketchs furent en fait tournés en saison 2, mais ne trouvèrent alors pas d’espace où se placer. Laird les intégra en saison 3, afin de compléter des épisodes un peu trop brefs.

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There Aren't Anymore MacBanes 

Saison 3Saison 1

Night Gallery

Présentation 


Rod Serling s’avance dans une galerie plongée dans l’ombre et exhibant d’étranges tableaux. Nous servant de guide au sein de cet environnement insolite, il nous présente diverses peintures illustrant des récits relevant du Fantastique, de l’Epouvante ou encore du Macabre, que nous découvrons à leur suite. Nous pénétrons ainsi dans la Galerie de Nuit. Après un téléfilm pilote diffusé en novembre 1969, l’anthologie Night Gallery va prendre place les mercredi soir sur NBC et nous narrer 95 histoires, réparties en 43 épisodes (plus le téléfilm pilote) et trois saisons, de 1970 à 1973.

Dès le non renouvellement de La Quatrième dimension par CBS, en 1964, Rod Serling eut à cœur de lancer une nouvelle anthologie, basée sur le Fantastique. Des pourparlers se déroulèrent avec ABC à propos d’un projet évoquant déjà la future Galerie de Nuit, mais se déroulant au sein d’un musée de cire. Les œuvres y auraient été pareillement présentées par Serling et devenant le sujet d’histoires. Le projet n’aboutit pas, notamment du fait que l’âge d’or des anthologies était désormais achevé Le public et les diffuseurs tournaient désormais le regard vers les séries télévisées et leurs univers et personnages permanents. Pour l’auteur, détenteur de six Emmy Awards (record encore inégalé à ce jour) et boulimique de travail, débutait alors une parenthèse de sa carrière, consacrée à l’enseignement universitaire, à la littérature et à quelques tentatives infructueuses de retour inabouties (dont la série de Western réaliste The Loner, rapidement stoppée en 1966). 

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En 1967, des éditeurs new-yorkais publièrent un recueil de trois nouvelles fantastiques de Rod Serling, The Escape Route, Color Scheme et Eyes. Si les ventes demeurèrent médiocres, l’auteur y vit l’opportunité d’un nouveau format télévisuel, sous la forme d’un téléfilm regroupant ces trois histoires de manière distincte et constituant l’éventuel pilote d’une anthologie bâtie sur le même modèle. Il substitua The Cemetery à Color Scheme, afin que l’ensemble relève d’une similaire tonalité d’épouvante semi-gothique, puis réécrivit ses textes sous une optique cette fois télévisuelle, accentuant la caractérisation des personnages et peaufinant les dialogues. Il attribua le titre de Night Gallery au projet, avec l’idée d’une présentation de tableaux en fil rouge du récit. Se saisissant de son ample carnet d’adresses, il approcha alors les différents studios hollywoodiens, afin de les convaincre de l’intérêt de son projet.

Malgré des réticences initiales dues au format anthologique passé de mode, Universal donna son feu vert, de même que NBC pour la diffusion. L’enthousiasme du producteur William Sackheim pour les scripts de Serling fut déterminant dans la décision d’Universal. Au début de 1969, les deux hommes entamèrent de concert la concrétisation du projet, efficacement secondés par John Badham, qui devait ultérieurement réaliser six segments de l’anthologie et plusieurs films marquants (La Fièvre du samedi soir, WarGames, Short Circuit, etc.). Pour des raisons de délai, il fut décidé que les trois tronçons seraient filmés simultanément, par des metteurs en scène différents. Si deux vétérans furent retenus pour The Escape Route et The Cemetery, pour The Eyes Sackheim tint à donner sa chance à un prometteur réalisateur dont il avait admiré l’une des premières œuvres, l’année précédente, le court-métrage Amblin : Steven Spielberg, alors à peine âgé de 22 ans. Celui-ci relata avoir été chaleureusement accueilli par Serling, qui lui accorda une totale liberté de création, ayant pour unique consigne le respect de ses dialogues. 

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Le téléfilm, fut diffusé sur NBC le 08 novembre 1969. L’enjeu était crucial pour Serling car le studio et le diffuseur ne s’étaient nullement engagés sur une éventuelle anthologie dont Night Gallery serait le pilote, préférant attendre l’écho rencontré auprès des téléspectateurs. Universal n’avait consacré qu’un modeste budget au projet, mais Sackheim et Badham surent s‘entourer de nombre des meilleurs talents du studio et d’une distribution de qualité. Le téléfilm rencontra un immense succès, avec un indice Nielsen de 23,3, laissant loin derrière les autres networks. L’accueil du public triompha des réticences autour du format anthologique et propulsa la carrière télévisuelle de Spielberg, désormais sous contrat avec Universal. Le scénario fut également primé par la prestigieuse guilde des Mystery Writers of America, qui lui décerna l’Edgard Award. Rod Serling obtint le feu vert pour son anthologie fantastique, mais Sackheim, désireux ne de pas se lier à un projet au long cours, ne le suivit pas dans cette aventure.

Universal le remplaça par l’auteur et producteur Jack Laird, alors notamment connu pour Ben Casey (1961-1966) et qui œuvrera par la suite pour Kojak. Si Serling fut engagé comme contributeur en scénarios et pour d’assurer les présentations, c’est bien Laird qui fut en charge du programme, exerçant de fait une part largement majoritaire des pouvoirs de showrunner. D’emblée Rod Serling bénéficia d’une latitude bien moindre que pour La Quatrième Dimension. Cela ne lui posa pas initialement problème, bien au contraire, car exercer l’intégralité de cette responsabilité pour La Quatrième Dimension l’avait épuisé et il ne souhaitait pas renouveler l’expérience. Par ailleurs il pensait que, du fait d’avoir créé le concept de Night Gallery et de par sa réputation personnelle, il aurait voix au chapitre au-delà de ce que prévoyait les contrats, ce en quoi il errait. De plus la collaboration avec Laird, flamboyant et talentueux, mais travaillant en solitaire et jaloux de ses prérogatives, allait progressivement s’avérer malaisée. 

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Universal, encore réticente, n’acheta initialement que six épisodes de 50 minutes pour la saison 1970-1971, Rod Serling’s Night Gallery devant occuper la case du mercredi soir en alternance avec trois autres séries, dans le cadre du programme Four in One de NBC. Tout ceci n’empêcha pas Rod Serling de se jeter à cœur perdu dans le travail, comme à son accoutumée, d’autant qu’il espérait sans doute revivre les heures rayonnantes de La Quatrième Dimension. La première saison se caractérisa par une grande majorité de textes issus, directement ou non, de Rod Serling, avec 11 histoires sur les 14 contenues dans les six épisodes, l’auteur débutant également cette adaptation de grands auteurs caractérisant le programme. Laird et son équipe furent mobilisés par les problèmes de production, ne disposant que d’un budget modeste (moins de 200 000 $ par épisode en moyenne), alors même que par la variété et la teneur de ses thèmes, l’anthologie exigeait un grand nombre de décors variés et stylisés.

Son entregent et son dynamisme permirent à Laird de mobiliser plusieurs talents cruciaux, dont celui du chef décorateur Joseph Alves, aussi doué que débrouillard, ou le dessinateur Tom Wright, présent tout au long d’une anthologie dont ses œuvres allaient devenir la griffe (jusqu’à parfois se revendre fort cher). Wright et Serling s’entendirent fort bien, ce dernier préparant ses présentations à l’aide de polaroïds des tableaux. Alors installé au studio 12 d’Universal, le décor de la Galerie fut l’œuvre commune d’Alves et de Wright, apportant toute une atmosphère d’étrangeté au programme, avec un jeu d’ombres et lumières mettant en valeur les peintures. Réputé pour son oreille musicale, Laird retient également Gil Mellé pour la musique, dont les compositions hors monde parachevèrent l’atmosphère à la fois intrigante et menaçante caractérisant Night Gallery. Serling et Laird œuvrèrent ainsi chacun dans son domaine et la qualité obtenue, certes parfois inégale (le programme soufrent déjà d’histoires courtes déjà en dessous), permirent d’obtenir des indices satisfaisants, ainsi qu’une prestigieuse proposition à l’Emmy Award (catégorie Outstanding Single Program). Même si celui revint en définitive à The Andersonville Trial, NBC, satisfaite, renouvela le programme pour une deuxième saison, cette fois pour 22 épisodes et 62 histoires. 

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Laird occupa une part grandissante dans la réalisation de cette saison 1971-1972. Il s'impliqua toujours autant dans le travail de production mais se passionna également pour l’adaptation de grandes plumes fantatsiques, américaines ou anglaises. Ce retour aux sources littéraires s'accompagna d'un appel d'air à la jeunesse, via les scénaristes adaptant les textes. Surtout, des réalisateurs débutants se virent donner leur chance et saisirent pleinement cette occasion de briller. Laird poussa également à l'extrême la structure en puzzle des épisodes de Night Gallery. Ceux-ci, de manière tout à fait variable, se mirent à osciller entre deux et quatre segments d'inégale longueur. Laird écrivant parfois les plus brefs d'entre eux, de simples vignettes abordant de manière humoristiques les grandes figures de l'épouvante. Cette grande variété, aussi bien dans les thèmes que dans des structures narratives originales, favorisa la création mais troubla un public ne percevant pas d'identité au sein de cette anthologie patchwork, fatalement inégale. Le laboratoire de Laird eut également comme conséquence de réduire l'apport de Rod Serling, qui ne représenta plus qu'un tiers des textes. Jamais réellement cordiale, la relation entre les deux hommes se tendit.

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Des problèmes étaient déjà apparus entre ces deux fortes personnalités, Rod Serling se plaignant de ne pas avoir son mot à dire quant à l’évolution du programme, et >Laird s’irritant que, bien que ce soit lui le plus impliqué dans la bonne marche du projet, bien des personnes, y compris dans les médias, continuaient à associer Night Gallery au prestigieux Rod Serling. Cette situation, faussée dès de départ, s’exacerba quand Laird entrepris sans diplomatie de réécrire plusieurs scripts de Serling, qu’il trouvait trop longs et pas assez directs. Serling fut mis devant le fait accompli. Une crise éclata alors, où chacun gâcha beaucoup d’énergie à combattre l’autre auprès des studios et à l’issue de laquelle l’aura de Serling prévalut. Laird n’eut plus le droit de retoucher les scripts du présentateur et incarnation de l’anthologie, mais veilla par la suite à limiter son apport, en refusant plusieurs de ses histoires. 

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Cette zizanie dégénérant en lutte de pouvoir n’empêcha toutefois pas Laird de mener à bien sa vision à la fois  expérimentale et passionnée de l’anthologie, en mobilisant avec énergie une équipe de production à laquelle Universal n’attribuait toujours que de chiches ressources. Malgré une exposition accrue, Rod Serling’s Night Gallery constituant désormais un programme à part entière, et une concurrence de choc (avec Mannix, grand succès de CBS), le programme continua à connaître une audience correcte, avec, en moyenne, un indice Nielsen de 18,3. Satisfaite, NBC renouvela le programme, même si des critiques étaient apparues concernant  l’hétérogénéité de la durée des histoires et leur style de narration donnant parfois lieu à des fins ouvertes. La jeunesse se montra particulièrement sensible aux émotions fortes suscitées par ces récits horrifiques, très singuliers au sein des programmes d’alors, et plusieurs fans club se créent à travers le pays, y compris à Yale et Harvard.

La troisième et ultime saison (1972-1973) va comporter 15 épisodes, décomposés en 19 histoires. Cette période va rapidement connaître une évolution très négative, provenant de divers facteurs. Les studios vont ainsi exiger que les scénarios soient désormais américanisés, vis-à-vis d’une certaine fantaisie macabre considérée comme « anglaise ». Outre un Laird refusant plusieurs scripts de Serling, cette orientation va se traduire par un affadissement notable des récits, au sein d’un programme subissant par ailleurs l’usure du temps, comme tout autre. La nature composite des épisodes de Night Gallery va dès lors rendre difficile d’obtenir un opus pleinement satisfaisant, puisque fatalement, au moins l’une des histoires sera toujours en dessous. De plus Night Gallery est reléguée à l’horaire traditionnellement sinistré du dimanche soir, et son audience en souffre. Universal et NBC vont prendre argument de cette situation pour annuler dès la mi-saison une anthologie tout à fait singulière, dont les dirigeants s’étaient toujours méfiés du fait de leur difficulté à la ranger dans les cases préétablies de programmation (quelques épisodes déjà tournés seront néanmoins diffusés en mai 1973). 

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Profondément blessé, Serling aura une réaction de fierté le conduisant à partiellement renier un programme, où il ne fut jamais réellement décisionnel, même s’il en reste de loin le  contributeur en scénarios le plus important, avec 35 histoires, près d’un tiers du total. Atteint de faiblesse cardiaque, ce grand auteur, cet inépuisable conteur, devait s’éteindre en 1975, à l’âge de 50 ans, après avoir encore eu le temps de coécrire le scénario de La Planète des Singes. La réputation de Rod Serling’s Night Gallery reste également entachée par une syndication catastrophique. Celle-ci se déroula sur le format d’une demi-heure, l’autre moitié de la case horaire se voyant dédiée à Le Sixième Sens (1972), ce qui compte tenu de la durée totalement anarchique des histoires, obligea à les compresser à marche forcée, jusqu’à souvent les dénaturer. 

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Mais Night Gallery demeure avant tout écrasée par le souvenir de La Quatrième Dimension, il est vrai plus cohérente et ambitieuse que l’anthologie de 1970, destinée avant tout à faire peur, en parcourant les multiples contrées de ce royaume particulièrement vaste qu’est le Fantastique horrifique ou gothique. Mais la place essentielle qu’elle occupe dans la fondation de l’univers télévisuel fait que l’on oublie parfois que La Quatrième Dimension compta, elle aussi, plusieurs épisodes décevants. Surtout, là où Serling eut sans doute développé une extension de sa Zone crépusculaire, on doit à Laird et à sa mobilisation obstinée des talents d’avoir permis à Night Gallery de se forger une identité propre, davantage basée sur l’ambiance et l’esthétisme que sur la profondeur morale des scénarios. Dès lors la comparaison paraît bien moins efficiente.

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Laird et Serling, malgré leur incompatibilité d’humeur, auront ainsi tous deux apporté leur écot à cette anthologie du Bizarre souvent de haut vol, encore rehaussée par une distribution de prestige. La sortie en DVD permet enfin de renouer avec la qualité originelle du programme, préservée du charcutage de la syndication. Une découverte qui pourra  s’accompagner avec profit de la lecture de l’excellent livre Rod Serling’s Night Gallery : An After-Hours Tour (Syracuse University Press, 1999), de Scott Skelton et Jim Benson. Mais voici que Rod Serling sort de l’ombre prêt à nous révéler trois peintures ouvrant sur autant d’étranges histoires. La Galerie de Nuit est sur le point de nous ouvrir ses portes.

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