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La communauté de l'anneaúLe retour du roi

Saga Tolkien au Cinéma

Le Seigneur des anneaux : Les Deux Tours (2002) 


 LE SEIGNEUR DES ANNEAUX : LES DEUX TOURS
(THE LORD OF THE RINGS : THE TWO TOWERS)

classe 4

Résumé :

Sur le chemin du Mordor, Sam et Frodon croisent la route de Gollum. Pendant ce temps, Saroumane réunit une immense armée pour frapper le royaume de Rohan où Aragorn et ses compagnons arrivent. Non sans avoir reçu une visite imprévue mais pleine d’espoir.

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Critique :

« Il n’y aura pas d’aube pour les Hommes »

Saroumane

Si cette seconde partie est celle qui accuse le plus de longueurs, aucune n’est véritablement inutile puisqu’elles participent soit de la poétique soit de l’héroïque du récit. Le Seigneur des Anneaux n’est pas un vulgaire film d’aventure avec des effets spéciaux ; c’est une fresque. Une épopée avec ses temps propres ; temps de guerre pour l’héroïsme, temps de méditation pour la sagesse, temps de tendresse pour l’espoir.

D’autant que, question paysages, nous sommes gâtés et, cela, d’entrée de jeu. Un beau contraste nous fait ainsi passer de cols enneigés à un paysage de roches où errent Sam et Frodon. Dans ce moment d’égarement, nous pouvons apprécier la personnalité solaire de Sam à qui Sean Astin donne une mine certes bonhomme mais loin d’être naïve ou simple. En comparaison, Frodon est lunaire, il devient de plus en plus froid, agressif aussi. Les grands yeux bleus d’Elijah Wood reflète une âme qui se sait atteinte. Si l’acteur n’est pas le plus expressif au monde, c’est ici une chance puisque l’Anneau modifie justement la personnalité en la nivelant. Il faut donc en montrer le moins possible. C’est peu après que surgit un des personnages dont l’importance est égale au dégoût qu’il procure, Gollum. Physiquement, il est répugnant et sa voix geignarde et aiguë ne le classe pas parmi les oiseaux chanteurs. L’apprivoisement de Sméagol (son premier nom, « Gollum » étant une interjection) par Frodon est un moment capital. Il paraît réussi et la créature visqueuse accepte de les conduire en Mordor. Après la traversée d’un marécage répugnant (superbe travail de photographie avec cette atmosphère pâle et brumeuse) où marinent les morts, ils arrivent devant le Mordor. La Porte noire étant infranchissable (le film en rajoute dans la dramaturgie par rapport au livre), ils devront passer par la montagne. En chemin, ils tomberont sur des guerriers du Gondor menés par Faramir, frère de Boromir. S’il trouve l’Unique, le cadet ne succombe pas comme son aîné et, après quelques péripéties, les laissera partir, non sans inquiétude car le col de Cirith Ungol est déconseillé. Le final semble d’ailleurs lui donner raison.

Pendant ce temps, l’Isengard affûte ses armes. La vue de ses forges en fusion, de ce contraste entre le noir de la pierre de la tour d’Orthanc et la lueur proprement infernale des ateliers du magicien dévoyé est saisissante. Qui mieux que Christopher Lee pouvait prononcer avec une arrogance souveraine cette terrible sentence : « L’ancien monde brûlera dans les flammes de l’industrie ». Tolkien détestait cette industrie ; le film est en cela fidèle à la pensée de l’auteur. Pour alimenter les forges, il faut du bois et Saroumane ordonne de brûler la forêt de Fangorn. Quand on sait qu’en vieil-anglais, Saruman, signifie « Homme rusé », on ne peut qu’applaudir au choix de Peter Jackson concernant Christopher Lee. Nouveau Dracula, Saroumane a remplacé la soif de sang par celle du pouvoir, une Terre du Milieu à soumettre aux jeunes femmes soumises. Plus terrible encore est le discours hallucinant, froid et orgueilleux qu’il tient à Sauron à travers le Palantir – la pierre de vision – : il ne parle rien de moins que de cogestion de la Terre du Milieu par les Deux Tours ! Il faut avoir perdu la tête pour penser à une folie pareille. Mais la folie des Grands retombe sur les plus humbles ; les troupes de l’Isengard commencent à ravager le Rohan.

ladoublure 3

Le Rohan est une région au nord du Gondor dont il formait une marche extérieure. Ses habitants sont les Rohirrim et ce sont de merveilleux éleveurs de chevaux. Ils ont un roi, Théoden, mais celui-ci n’est plus qu’un vieillard décati, une véritable momie. On saluera le travail des maquilleurs car la première vision de Théoden n’a vraiment rien de royale. Son fils est blessé (il mourra peu après) mais son conseiller, Grima – affectueusement surnommé « Langue de Serpent » par tout le monde – affirme que Saroumane est l’ami du Rohan et fait bannir le trop perspicace maréchal Eomer. Ces trois personnages sont capitaux pour la suite de l’histoire. Grima, interprété par Brad Dourif qui est l’image même de l’obséquiosité malsaine, est un pion de Saroumane qui a pris possession de l’esprit du roi. Comme son maître, le pouvoir de Grima réside dans sa voix. Ses paroles sont doucereuses et il n’élève jamais la voix mais l’homme sain est proche de la nausée quand il approche. Karl Urban donne une allure très raide à Eomer. En guerrier, il est convaincant. Mais Bernard Hill se montre véritablement fantastique. Complètement avachi sur le trône, il donne corps à la résurrection de Théoden. On voit littéralement l’homme retrouver la vue, la santé, se redresser. Dans la suite du film, il sera l’image de l’autorité, non sans laisser voir les doutes qui habitent le souverain.

La résurrection de Théoden est un miracle et qui mieux qu’un ressuscité pour dire (métaphoriquement) à quelqu’un : « Lève-toi et marche » ? Ce ne sont pas les paroles certes mais c’est ce qu’accomplit Gandalf. Le magicien que l’on croyait mort est revenu, blanc cette fois. Sa chute – vue comme un cauchemar de Frodon, excellente idée et très bon montage – puis son récit compose une action de grâce et lorsqu’il apparaît à Aragorn, Gimli et Legolas, c’est dans un corps de lumière. Tolkien était catholique et cette apparition semble faire écho à l’apparition pascale du Christ ; c’est un « corps de gloire ». Mais, le monde du Seigneur des Anneaux est un monde païen et Gandalf reprend chair. Le verbe se fit chair si l’on veut filer la métaphore. Le personnage de Gandalf est clairement un archétype du magicien comme Merlin pour Arthur : débordant de vie, voyageur, détenteur d’un vaste savoir, portant une longue barbe blanche et indifférent au pouvoir. Le costume est également identique (ample robe chapeau à larges bords). Gandalf, impuissant à empêcher Théoden d’aller s’enfermer au Gouffre de Helm – la grande forteresse du Rohan – part à la recherche d’Eomer. Il revient à Aragorn de permettre aux Rohirrim de tenir jusqu’à son retour.

Parmi la cour du roi Théoden, il est une gente dame que convoitait Grima. On comprend en voyant Eowyn – dont le nom signifie « cavalière » en vieil-anglais - qu’elle lui plaise tout comme on comprend le dégout qu’il lui inspire. Leur seule scène en commun amène le cœur près des lèvres. Mais si Miranda Otto donne une grâce et une beauté à Eowyn, elle ne la joue pas comme une faible femme et elle a bien raison ! Une femme qui tombe vite amoureuse d’Aragorn mais qui comprendra qu’elle arrive trop tard. C’est un moment de paix dans le récit que de nous parler d’Arwen sans qu’il en soit moins grave. Les Elfes quittent la Terre du Milieu et Elrond rappelle à sa fille qu’elle est immortelle et qu’Aragorn non. Qu’il survive à la guerre et devienne roi ne changera pas cet état de fait. Le choix ne semble pas encore fait mais en peu de temps Liv Tyler et Viggo Mortensen ont donné corps à un amour d’autant plus fort qu’il transcende les peuples.

Le morceau de bravoure de ce film c’est la bataille du Gouffre de Helm. Une forteresse massive, imprenable s’en gargarise le roi. A son exclamation bravache et imprudente - « Est-ce tout ce que votre magie peut faire, Saroumane ? » - celui-ci avait répondu par avance dans une harangue à ses troupes : « Un nouveau pouvoir se lève ». L’image est effrayante : cet homme vu de dos devant une foule qui l’acclame. Il y a comme une réminiscence du Troisième Reich dans cette façon de soulever l’enthousiasme pour demander la guerre. La guerre qui concerne tout le monde. A Helm, les vieux et les jeunes s’arment. Mais, plus loin, Merri et Pippin, qui ont échappé aux Hourouk-Haï, ont découvert les Ents, des géants ressemblant à des arbres. On a quelques sourires dans ces moments, qui sont comme des virgules de légèreté entre les scènes de combats. Les Ents ne voulaient pas faire la guerre mais lorsqu’ils voient les ravages de l’Isengard – une brillante intuition de Pippin qui se rattrape de sa gaffe dans la Moria – ils lancent leur dernière marche : « Ce n’est pas digne d’un magicien ». Et les Elfes entrent aussi dans la bataille : une compagnie  venue de Fondcombe prêtera main forte aux hommes. Eomer apportera les derniers renforts et la forêt massacrera les orques en fuite. Théoden ne croyait plus aux vieilles alliances mais ce sont justement ces alliances des différents peuples de la Terre du Milieu qui font échec au magicien, désormais emprisonné dans sa tour. On ne peut conclure sans citer Sam qui résume tout le pourquoi et l’importance de la lutte : « Il y a du bon en ce monde. Il faut se battre pour cela ». 

Anecdotes :

  • Sortie US et sortie France : 18 décembre 2002. Sortie Nouvelle-Zélande : 19 décembre 202

  • Le film a coûté 92 millions et en a rapporté 923.

  • La chute de Gandalf avec le balrog est une initiation qui lui permet de revenir tel un Saroumane qui n’aurait pas dévié.

  • La forêt est un peuple pour Tolkien. Pour le passage où les Ents s’en prennent à Saroumane, il s’est inspiré d’un passage de Shakespeare dans Macbeth qui voit la forêt de Dunsiname avancer pour en finir avec ce dernier. De même, le roi des Nazguls est une version de ce roi.

  • Le mot « Ent » vient de l’anglo-saxon « eald enta geweara » signifiant « géant »

  • Dans Les Deux tours, Peter Jackson incarne un soldat défendant le gouffre de Helm.

  • Créer le personnage de Gollum fut l'un des défis de la trilogie du Seigneur des anneaux. Créé via des logiciels d'animation de synthèse de pointe, ce personnage devait avant tout être le plus crédible possible, notamment de par ses nombreuses interactions avec Frodon et Sam. Une réussite, qui tient pour beaucoup à la performance d'Andy Serkis. Tournant avec les autres acteurs dans un costume bleu/vert/blanc ensuite effacé au montage, il retourna ensuite toutes ses scènes en studio, couvert de capteurs de mouvements, puis les reprit une nouvelle fois derrière le micro pour doubler la créature et numériser ses expressions faciales.

  • La transposition au cinéma des scènes de bataille a été possible grâce à un logiciel d'animation capable de transposer à l'écran. Ainsi, les techniciens du studio Weta Workshop ont mis au point le logiciel Massive, qui offre la possibilité de créer d'innombrables entités numériques, chacune dotée de sa propre personnalité. En résultent des scènes de combat où les combattants artificiels ne répètent plus des mouvements préprogrammés mais agissent et réagissent en fonction de leur environnement. 

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