Paranoïaque (1963) Résumé : Criblé de dettes, Simon Ashby tente de faire passer sa sœur Eleanor pour folle. Surgit soudain un homme qui se prétend leur frère disparu, Tony, censé être mort. Eleanor le croit tout de suite et s’attache beaucoup à lui mais Simon pas du tout.
Critique : LPorté par Jimmy Sansgter, ce thriller horrifique se suit sans soucis même si le scénario présente un léger « coup de fatigue » puisqu’on y retrouve des éléments comme la musique qui semble venir de nulle part (Hurler de peur) ou le complot pour rendre un personnage fou (Meurtre par procuration). Néanmoins, Jimmy Sansgter montre qu’il a encore pas mal de ressources. Tout d’abord, il déplace légèrement la focale. Ainsi, même si le personnage d’Eleanor reste quelque part le moteur de l’action, celle-ci se concentre davantage sur Simon. L’arrivée du frère, dont on va se demander pendant un temps s’il est bien celui qu’il prétend être (un classique mais très efficace), lance véritablement le film et bouleverse la trame. En effet, soudain, on ne se demande plus si Eleanor est folle parce qu’elle croit voir son frère mort mais qui est l’inconnu. Alexander Davion s’applique à jouer Tony et, à partir de son entrée en piste, tout est différent. Simon, joué avec maestria par Oliver Reed, devient le personnage principal et ses actions et motivations vont être à la base des développements ultérieurs. A l’instar d’une Marion Crane en mode mineur, Eleanor, qu’on aurait cru être le personnage principal, dont on allait suivre la vie menacée, passe au second plan. C’est toujours mieux que de mourir !
Pour sa première réalisation pour la Hammer, Freddie Francis réussit un coup de maître. Son art culmine dans la seule scène d’action, mais ô combien importante puisqu’elle va modifier les rapports entre Eleanor et Tony, où Eleanor s’échappe in extremis d’une voiture sabotée qui va tomber dans le vide. Il réussit également à saisir le spectateur avec l’apparition de l’enfant de chœur masqué dans la chapelle désaffectée. Cette désaffection d’un édifice sacrée était une concession de Sansgter à la censure qui avait trouvé que son script était « une immondice atroce » ! Les acteurs ne manquent pas de talent même si le rôle de Janette Scott est un peu cliché et celle-ci, quoique charmante et touchante (notamment la scène où elle confesse qu’elle était heureuse avec Tony autrefois ; ce qui est à double sens), n’a pas suffisamment de personnalité pour dépasser le rôle de « demoiselle en détresse ». En revanche, Oliver Reed joue probablement son meilleur rôle pour la Hammer. Ce rôle de jouisseur, de manipulateur, d’alcoolique surtout lui allait d’une part comme un gant (l’acteur étant à la sobriété ce que Fantômas est à l’honnêteté), mais il parvient à rendre compte à la fois de la fragilité mentale de Simon, de son déséquilibre mental qui va en s’aggravant et de la séduction et de la violence sous-jacente de Simon. La scène du bar où, totalement ivre, Simon passe soudain du joyeux compagnon à assassin en puissance est saisissante et révélatrice.
Anecdotes :
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