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Dracula, prince des ténèbres (1966)Une messe pour Dracula (1970)

Saga Hammer

Le retour de Frankenstein (1969)


LE RETOUR DE FRANKENSTEIN
(FRANKENSTEIN MUST BE DESTROYED)

Résumé :

Déterminé à poursuivre ses expériences, Frankenstein s’installe dans une pension de famille dont il ne tarde pas à prendre le contrôle. Il enrôle de force le jeune Karl pour que celui-ci l’aide à libérer le professeur Brandt, un dément qui détient la clé de recherches effroyables. Pour y accéder, le baron aura recours à la transplantation cérébrale !

Critique :

C’est le plus noir et le plus violent de tous les films consacrés au terrifiant baron Frankenstein, dont le prénom est désormais complètement oublié ! Le docteur et/ou le baron est devenu un archétype ; celui du savant fou, une caricature du scientifique ainsi que le proclame un dessin de presse dans le film. De films en films, c’est une progression implacable qui a lieu ; du savant passionné et obsédé au monstre froid.

Dès l’ouverture du film, la violence saute à la gorge du spectateur avec une décapitation ! Certes hors champ, elle renvoie à l’ouverture du film précédent et c’est une image volontairement obsédante puisque tout le sujet « scientifique » du film tourne autour de la possibilité de transférer un cerveau d’un corps à un autre et de préserver les facultés intellectuelles et la personnalité du patient transplanté. Dans Frankenstein créa la femme, c’était un peu le même sujet mais, ici, c’est la science pure et dure qui est à l’œuvre. Foin de l’âme ! Dans ce film, si une scène semble faire référence à la créature du premier film (qui s’échappe d’ailleurs aussi), le sujet d’expérience n’est plus qu’un moyen. Curieusement, alors que le baron tient le discours le plus rationaliste et matérialiste, on assiste brièvement au retour des cornues dans le laboratoire ! Autre curieux élément de continuité : l’assistant s’appelle à nouveau Karl !

La dimension scientifique de ce film flirte pourtant avec la fringe science ; ces concepts que la science du moment ne peut valider mais ne peut rejeter non plus et qu’on remet à plus tard en quelque sorte. C’est ici le cas dans cette volonté de « guérir » la folie. Laquelle est d’ailleurs un concept rejeté par le corps médical au profil des « névroses » et « psychoses » bien plus documentées scientifiquement mais l’histoire prend place sans doute au XIXème au vu des costumes. Pour l’anecdote, Frankenstein a quitté l’Allemagne pour l’Autriche-Hongrie comme le montre le portrait de l’empereur François-Joseph dans le poste de police. Police toujours aussi inepte et même carrément bouffonne ! Elle n’est cependant pas complètement inutile car sourire allège la noirceur du propos.

Noir, le film l’est quand il use des ficelles de l’horreur. Le sang est nettement plus présent mais, non pas fluide et bien rouge comme dans les Dracula où il symbolise la vie mais sale, tachant et couvrant les mains comme celles de lady MacBeth. Ici, le sang est symbole de mort et on tue dans ce film plus souvent qu’à son tour ! En outre, les opérations du baron sont davantage explicitées comme la transplantation cérébrale où l’on entend bien le bruit de la scie sur la peau ! C’est absolument atroce. Et la musique de James Bernard n’aide pas à soulager les nerfs !

Noir et violent, le film l’est avec Frankenstein. Jamais Peter Cushing n’a si bien représenté la folie scientiste et criminelle, l’amoralité poussée à son extrémité, l’égoïsme élevé au rang d’art ! Une froideur jamais prise en défaut, jamais la moindre repentance, la moindre excuse. Le baron est dévoré par sa volonté de puissance. Quand il consent à se montrer courtois, c’est une ruse. La violence, présente tout le temps, soit sous la forme de l’aliénation, réelle ou symbolique, soit sous la forme physique, explose soudainement quand Frankenstein se jette sur Anna tel un fauve sur sa proie. On pense soudain au comte Dracula de Dracula, prince des ténèbres ; la bête sous forme humaine ! Au terme d’une évolution abominable, Frankenstein est devenu un manipulateur, un maître chanteur, un violeur et un assassin ; tout cela pour atteindre son but. Peter Cushing est impressionnant de cruauté.

Face à ce monstre, les autres personnages peinent à exister. Simon Ward est un peu lisse et peu convaincant dans l’émotion mais il se défend plus que bien et l’acteur est bien meilleur quand il rend compte de l’étouffement du jeune homme à qui l’avenir s’annonçait prometteur et qui perd tout. C’est le premier assistant contraint du baron. Le premier était volontaire et a flanché. Le second était volontaire et est resté. Le troisième était un imbécile dans l’opus finalement le plus « léger » de la saga. Grande réussite que Veronica Carlson qui retrouve la Hammer. Elle n’est plus une jeune fille naïve mais une jeune femme à qui elle aussi tout réussissait et qui se retrouve piégée dans les rets du sinistre baron. « Amusant » qu’à la toute fin, le professeur Brandt fasse référence à l’araignée et à la mouche. C’est toute la situation des personnages ! Dans le rôle d’Anna, l’actrice fait montre de sensibilité mais nullement de sensiblerie. Elle est une lueur d’humanité dans un univers de cauchemar.

Anecdotes :

  • Sortie anglaise : 8 juin 1969 Sortie américaine : 11 février 1970 Sortie française : 3 décembre 1969

  • Scénario : Brett Batt d’après Anthony Nelson Keys et Brett Batt

  • La séquence du viol n’avait été tournée que pour le Japon. Les Français ont pourtant pu la voir mais pas les Anglais.

  • Le marketing proclamait « Plus monstrueux que le monstre qu’il a créé »

  • Le film connut un échec public.

  • Simon Ward/Karl : acteur britannique (1941-2012), vu au cinéma dans Les Trois mousquetaires (1973), Le Tigre du ciel (1976), Supergirl (1984), Les Hauts de Hurlevent (1992) et à la télévision dans Les Tudors (2009-2010)

  • Freddie Jones/Richter : acteur britannique, vu au cinéma dans Antoine et Cléopâtre (1972), Dracula habite toujours à Londres (1973), Elephant Man (1980), Firefox, l’arme absolue (1982), Et vogue le navire (1983), Dune (1984), Sailor et Lula (1990), Les Dames de Cornouailles (2004). Il a aussi travaillé pour la télévision : Chapeau melon et bottes de cuir (épisode « Qui suis-je ? »1967), Cosmos 1999 (1976), Le retour de Sherlock Holmes (1988), Inspecteur Barnaby (2004),

  • Veronica Carlson avait précédemment joué dans Dracula et les femmes. Thorley Walters est un habitué de la Hammer.

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