Jersey Boys (2014) Résumé : L'histoire de quatre jeunes hommes du New Jersey qui formèrent l'emblématique groupe de rock des années 1960 The Four Seasons. Critique : Jersey Boys est une biographie musicale du groupe The Four Seasons - l'ascension, les temps difficiles, les affrontements personnels, le triomphe et la séparation d'un quatuor d'amis, dont la musique est devenue symbolique d'une génération américaine. Le film conte l’histoire de ces quatre amis du New Jersey - Tommy DeVito, Bob Gaudio, Nick Massi et Frankie Valli – qui montent un groupe de musique. Plus qu’un simple concert hommage, Jersey Boys, dont l’action débute en 1951, se place au cœur des relations du groupe, avec un accent particulier sur le chanteur Frankie Valli. Alors qu’ils vivent de petits larcins tout en se produisant dans un club, la voix exceptionnelle de Frankie les mène vers le succès et la notoriété. Ils deviennent The Four Seasons et acquièrent une renommée grâce à quelques tubes, mais les dettes de Tommy à Il est assez difficile de juger ce biopic fait surtout pour les Américains. Personnellement, le groupe m’était inconnu et, seules, quelques chansons avaient vaguement un air familier à mes oreilles. Plutôt méconnus en France, mais légendaires aux USA, les Four Seasons ont des looks de mafiosi qui ont peu de points communs avec les Beatles…Après la country (Honkytonk Man) et le jazz (Bird), Eastwood met en scène et coproduit ce film sur le pop rock et ça passe beaucoup moins bien que les deux productions des années 80. Jersey Boys est trop long, 2h15, et de nombreux passages auraient pu être raccourcis car l’ennui pointe souvent, malgré des comédiens plaisants à suivre. Pour ma part, je n’ai pas non plus accroché au système narratif répétitif et laborieux qui fait s’adresser les protagonistes face à la caméra. A part les bons et entraînants – mais trop nombreux – passages musicaux en live sur le tournage, la réalisation s’attache à une reconstitution historique assez soignée dans les décors et les vêtements ; heureusement, car il est parfois difficile pour le spectateur de se repérer temporellement et d’évaluer le temps qu’il s’est écoulé entre chaque situation. Seuls la mode vestimentaire et l’environnement évoluent et nous donnent quelques indices. Le mélange film d’époque, mafia et comédie musicale ne prend pas et on ne s’attache à aucun personnage, même dans le climax dramatique du film, qui n’engendre aucune compassion, contrairement à Million Dollar Baby et L’échange. Il n’y a en effet rien de passionnant, de surprenant ou d’attachant. Les personnages superficiels, le scénario faiblard et la réalisation ne sont pas inoubliables. Aussitôt vu, aussitôt oublié. Ce qui intéresse Eastwood, ce sont les liens qui unissent ces amis, un peu comme dans Mystic River, mais la comparaison entre les deux films s’arrête là. Le flashback est inutile, les nombreuses ellipses rendent le récit souvent incompréhensible (la fille de Frankie passe d’enfant charmant à une junkie), mais on trouve les thèmes chers à Eastwood : relation père/ fille, sacrifice, trahison… Les quelques bons moments, non musicaux, sont rares mais notables, surtout qu’ils véhiculent un certain humour, qui réveille de la monotonie de l’ensemble. Les passages de comédie s’avèrent d’ailleurs mieux réussis que les dramatiques. Ainsi, le vol du coffre-fort trop lourd pour la voiture et l’incursion dans l’église afin d’improviser un concert nocturne à l’orgue, au grand dam d’une nonne roteuse, sont des scènes truculentes. La rencontre de Frankie avec Mary, sa future épouse, déjà accompagnée (« Call your mother, you're going to be home late. »), et le dépucelage de Bob, interrompu dans son visionnage d’un des premiers rôles d’Eastwood - un épisode de Rawhide – par un cadeau de Noël un peu spécial («You were right. It is better with another person. »), se révèlent également des scènes exquises, mais elles sont trop peu nombreuses et courtes. N’oublions pas la réplique des deux jumelles coquines inséparables à qui on demande leur âge : «Together, or separately? ». Quant au final, souvent plébiscité, il rend hommage à tout le casting et à la pièce musicale. Au lieu de chercher des acteurs, Clint Eastwood décida de prendre les comédiens de théâtre qui jouaient le rôle chaque soir sur scène et il constitua une adaptation de la comédie musicale. Ainsi, John Lloyd Young, Donnie Kehr, Erica Piccininni et Renee Marino reprennent leurs personnages respectifs qu’ils tenaient sur les planches de Broadway. Des interprètes par conséquent inconnus du grand public et, seul dans la distribution, Christopher Walken, le premier acteur du casting à être engagé, est un visage familier. A noter qu’une des deux serveuses – lorsque Bob est accepté dans le groupe – est Francesca, qui a bien grandi depuis Jugé coupable, et Kathryn, née en 1988, une autre fille Eastwood, fait ses débuts dans le rôle de la petite amie de Tommy. Si la critique française est enthousiaste, la presse américaine est beaucoup plus mitigée, ce qui collabore ce que j’ai déjà écrit lors de ces analyses. A partir d’à peu près le milieu des années 80, à la sortie de Pale Rider présenté à Cannes, Eastwood bénéficie d’une aura des critiques françaises qui encensent presque tout ce que l’artiste présente. Cependant, les Américains sont quant même plus aptes à juger ce biopic musical qui touche la culture et les souvenirs de millions de gens. Les inconditionnels d’Eastwood ne se laissent pas prendre : la promotion est intimiste et le film réalise un des plus mauvais scores de la carrière du réalisateur. C’est, dans l’ensemble, agréable à suivre mais c’est convenu et ce film restera vraisemblablement anecdotique dans la filmographie du maitre. Pas d’inquiétude, car la prochaine production eastwoodienne sera magistrale…et les critiques recommenceront à chouiner comme au bon vieux temps ! Anecdotes :
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