L'Africain (1983) par Sébastien Raymond Résumé : Il croyait avoir trouvé au milieu du continent africain un havre de paix. Il avait refait sa vie, surveillant les braconnages aux manettes de son avion, mais c’était sans compter sur l’arrivée impromptue de sa femme, dont il était séparé depuis plusieurs années. La tempête s’annonce rude, car l’épouse a la ferme intention de voir ériger un centre hôtelier et de loisirs dans la région. Critique : Très curieusement, ce film de Philippe de Broca n’atteint pas pleinement ses objectifs. Entendons-nous bien : il n’est pas mauvais ce film, loin de là, mais disons qu’il ne parade pas non plus sur les sommets que le cinéaste a déjà plusieurs fois côtoyés auparavant. Pourtant, sur le papier, tous les ingrédients chers à De Broca sont bel et bien là. Mais la magie n’opère pas. Exotisme, casting royal, alchimie détonante des personnages, le film avait tout ce qu’il fallait et l’ensemble ne parvient pas à produire le résultat escompté. Pourquoi ? Je serais bien incapable de répondre avec sûreté. J’avancerais toutefois une hypothèse : le rythme pas aussi échevelé qu’à l’habitude. En effet, Philippe de Broca a toujours plus ou moins su intégrer à ses comédies cette dimension de vitesse d’exécution, soit dans les dialogues, soit dans le montage et la succession des situations. L’Africain déroge à la sacro-sainte règle de la comédie et l’on peut dire sans se tromper qu’il n’est pas un film qui dévale la pente. Il n’y a pas cette folie, cette course de mots et de gestes, cette percussion dans le récit. Les personnages ne virevoltent plus, ne se téléscopent plus qu’avec modération. Le rythme n’est pas ébouriffant. Les dialogues manquent de puissance et d’accroche. Les acteurs sont formidables, mais ne peuvent éviter de se heurter à ce manque de souffle originel. Le scénario a beau chercher à faire bouger les personnages, l'enchaînement des situations manque de dynamisme. Les enjeux ne sont pas suffisamment mis en valeur peut-être également. C’est dommage car Catherine Deneuve est de toute beauté, charmeuse, maligne et fait preuve d’une force, d’une indépendance qui ne laisse pas le spectateur de marbre. Face à elle, le grand Philippe Noiret parvient encore à jouer l’homme fort, tonitruant, prêt à déraciner les arbres à la force des bras et de sa colère. Leur collision n’est pas sans charme. Au loin, on devine leurs souvenirs communs, un film de Philippe de Broca déjà, La vie de château, où ils étaient tous si jeunes et pétulants. Seulement, le temps a passé et le côté piquant n’est plus de leur âge peut-être, oui, sans doute. On songe aussi au merveilleux film Le sauvage de toujours ce grand Philippe de Broca, avec Deneuve et Montand, chef d’œuvre dont L’Africain reprend un peu la trame : un homme parti loin des emmerdes modernes voit débouler une femme qui n’en finit plus de le bousculer. La comparaison heurte L’Africain de plein fouet. Le sauvage est au-dessus à 100 coudées. Malgré un très beau casting, où l’on retrouve un Jean-François Balmer un peu effacé et un Jean Benguigui magnifique de dégueulasserie et un bien curieux rôle d’anglais pour le grand Jacques François (tiens, en voilà une idée saugrenue !), malgré les superbes images africaines de Jean Penzer (la restauration récemment effectuée donne un résultat probant), malgré la très jolie musique de Georges Delerue qui enrobe le tout d’une parure fort plaisante, on finit le film un peu déçu. Certes, on est ravi d’avoir revu ces images, ces acteurs à l’œuvre, mais déçu que tous ces ingrédients n’aient pas produit ce que la recette laissait espérer. Souci d’enfant gâté ? Je n’en suis pas sûr. Je crois réellement que le film s’est assoupi en cours de route, sans qu’il s’en rende compte, tout doucement, gentiment, sans faire de bruit... Anecdotes :
Séquences cultes : T'es plus commandant de rien du tout ! Arrête de touiller ton champagne avec ta cuillière ! La routine, quoi ! |
Je vais craquer (1980) par Sébastien Raymond Résumé : Jérôme est un mari et père de famille rangé, petit bourgeois, dont la vie est réglée par la monotonie d’un quotidien très banal, jusqu’au jour où il retrouve un copain de lycée qui mène une vie de patachon. Le contraste est tel que Jérôme en est subjugué. Pire, cet édifiant fossé le perturbe de façon considérable. Il est sur le point de connaître une crise existentielle majeure. Critique : J'aime bien ce film et ce ne fut pas toujours le cas. Cette revoyure me l'a en quelque sorte un peu révélé à ma grande surprise. Pendant longtemps, j'avais pour Gérard Lauzier un regard lointain, un peu méprisant. Surtout, je ne le comprenais pas, du genre "on ne fait pas partie du même monde". À dire vrai, je me demande maintenant si ce n'est pas plutôt une question d'âge, de maturité pour être plus précis. Je vais craquer raconte l'histoire d'un trentenaire désabusé par son existence bourgeoise monotone, en tout cas pas assez palpitante. Il est rangé. Et certains s'ennuient quand ils sont rangés. Le rêve d'être libre et sans attache devient trop fort. Chez lui, le rêve d'être un grand écrivain à succès et riche s'accompagne de la domination d'une grande vamp, ni pute ni soumise. Il me faut confesser que j'ai souvent vu ce film pour cette actrice qui l'interprète : Maureen Kerwin a du chien. Très élégante, très forte (du moins en apparence), avec sa voix rauque, très chaude, elle a effectivement un charme fou. On comprend l'emballement du porte cravate que joue le jeune Christian Clavier. A cette époque, il jouait volontiers ce type de personnage, un peu coincé ayant des rêves trop ambitieux, pétant de temps en temps le petit câble qui le fait monter dans les aigus, en tout cas tombant de désillusion en échec sordide. Il l'incarnera à nouveau un an plus tard dans une histoire très proche (Les Babas cools) également signée par François Leterrier. Dans ce registre-là, le comédien est sans reproche, souvent très juste. Le film manque parfois de rythme, mais les acteurs sont bons. Nathalie Baye fait également une très belle sensation. J'aime beaucoup cette grande actrice qui n’a malheureusement pas assez participé à des comédies. Depuis les années 2000, elle se rattrape de ce point de vue. Elle y est excellente ici. Anémone, en tête à claque persévérante, accompagne fort bien ce trio de comédiens que j'avais envie de mettre en avant. Il est vrai que la réalisation, pour correcte qu'elle soit n'en demeure pas moins ordinaire. Oui, correct est le terme qui me vient à l'esprit dans l'immédiat. Pas grand-chose d'autre à dire, si ce n'est que dans le montage, peut-être qu'un peu plus de coupes auraient pu insuffler un peu plus de dynamisme ? On retiendra de bons acteurs principaux (certains comédiens annexes ne sont pas très bons par contre, sans présence et alourdissent les scènes), un scénario acerbe sur la société française post 30 glorieuses, avec cette espèce d'aveuglement à la fois cynique, matérialiste, consumériste et tellement vain qu'on ressent encore chez beaucoup de français d'ailleurs (je me colle volontiers dans ce magma crétin). La satire est ici particulièrement mordante et constitue un petit document amer qui raconte finalement bien son époque, avec ses aspirations, son aigreur. Alors qu'il m'inspirait assez peu quand j'étais jeune et plein de fougue tel un fier étalon galopant sur les collines qu'un avenir joyeux rendait encore plus verdoyantes, maintenant le cheval fourbu y entend une musique plus mélancolique, celle du vent triste et de ses trop grandes peurs existentielles. Tout ce fatras de mots pour dire que derrière la faribole humoristique, je perçois aujourd'hui le désarroi sans doute un peu bête d'une classe moyenne ou supérieure, bobo dirait-on de nos jours, devant les non-sens et les désillusions de la société moderne. Anecdotes :
Séquences cultes : Fous-moi la paix ! Je la saute vite fait et je me casse C'est moi qui vous remercie |
La vie est un long fleuve tranquille (1988) par Sébastien Raymond Résumé : Deux familles, l’une de la grande bourgeoisie et l’autre issue du sous-prolétariat, sont bouleversées par la nouvelle que l’un de leurs enfants a été échangé à la naissance : le petit Le Quesnoy, Maurice a été élevé par les Groseille, alors que la petite Bernadette Groseille a vécu chez les Le Quesnoy. Explosion sociale garantie ! Critique : Ce film a été et reste pour un certain nombre de spectateurs un film culte, un film qui a marqué son époque. Malheureusement pour moi, je suis resté sur le bas-côté de cette route. Aujourd’hui encore je revois ce film sans en être embarrassé mais sans grand plaisir non plus. Est-ce que je peux dire qu’il me laisse froid ? J’aime bien le numéro de Patrick Bouchitey, son enthousiasme presque effrayant. J’aime beaucoup la lente érosion mentale à laquelle Hélène Vincent donne une note comique redoutable pour son personnage. Je redécouvre aussi la composition du personnage totalement débordé que nous livre André Wilms. Et pourtant, tout cela réuni ne parvient pas à créer pour moi une histoire et des enjeux cruciaux : je m’ennuie un peu. À la fin du film, je m’interroge sur le pourquoi fondamental : pourquoi Étienne Chatiliez et Florence Quentin ont écrit ça ? Ça veut dire quoi au juste ? Est-ce que c’est drôle de se moquer de cette famille de bourgeois béni-oui-oui et engoncée dans un univers hypocrite ? J’ai du mal à ressentir de l’empathie de la part du scénario pour tous ses personnages. Cela aurait dû me plaire, une satire sociale, mais je trouve l’humour du film un peu trop léger, pas assez mordant, peut-être pas suffisamment méchant (ou trop, je ne sais pas ? Je suis paumé devant ce peu de gaieté). En tout cas, il y a de la redondance et les personnages abusés font plus pitié que rire. Les hypocrisies des humbles répondent à celle des nantis ; l’idée du film est en fin de compte déprimante, manque de joie. Certes, ce sont les enfants qui se chargent de mettre de la vie là-dedans, mais est-ce que cela permet au film de sortir de sentiers déjà battus avec beaucoup plus de verve (Affreux, sales et méchants )? Je ne crois pas. Anecdotes :
Séquences cultes : Jésus revient Marie-Thérèse, ne jurez pas ! Oh la salope ! |
L'Étudiante (1988) par Sébastien Raymond Résumé : Un homme et une femme, aux caractères et aux vies diamétralement opposées, essaient de construire une histoire d’amour forcément compliquée. Critique : Ces derniers temps, ayant eu à passer par certaines revoyures qui ne m’ont pas trop égayé, ce film est venu à point me rappeler combien mauvais peut-être un film. Revoir L’étudiante a été une expérience très pénible. L’équipe de La Boum et La Boum 2 a cru bon de relancer la machine avec une Sophie Marceau cette fois enfin adulte, du moins était-ce ce dont je croyais me rappeler. En fait, à part quelques bribes, j’avais complètement oublié ce film. Et pour cause… j’ai détesté à peu près tout. Ne comptez pas une seule seconde avoir à faire avec une comédie. Certains pseudo-gags sont censés nous y faire croire, mais ils sont si navrants que l’on a plus envie de pleurer que de sourire (pleurer sur notre propre sort de spectateur maltraité). Il s’agit d’un drame romantique très sérieux et très ennuyeux. Quand j’évoquais la maturité de l’héroïne interprétée par Sophie Marceau, j’osais l’ironie. Elle a l’air d’avoir 30 ans mais joue une jeune femme plus proche des 20 ans avec un caractère pour le moins insupportable. Radicale, elle monte dans les aigus à la moindre contrariété ou au contraire fait sa boudeuse, pauv’ choupinette! Elle s’énerve pour un oui, pour un non. Les arguments qu’impose ce scénario pour nous faire gober tout ça sont aussi là pour faire réagir ses propres personnages. Ils sont assénés avec tant de maladresse que le récit apparaît grotesque et les personnages tombent dès le départ dans le ridicule. On comprend très vite que le scénario s’évertue à créer des conflits entre les personnages de manière si acrobatique et artificielle, pour susciter un semblant d’émotion et produire des enjeux faciles : au final sans aucune espèce de commencement d’intérêt ; d’où l’abysse d’ennui sous nos rétines. Par conséquent, l’irritation que produisent l’hystérie de l’une et la mollesse de l’autre se répercute sur les deux héros à qui j’ai eu très vite envie de mettre des swings de baffes à gogo. J’exagère ? A peine ! Sans doute que ce que j’endurais devant leurs gesticulations ineptes m’a rendu légèrement revanchard. Je suppose que cette critique s’en ressent, mais tant pis. En plus, la direction d’acteurs est si médiocre que des comédiens, par ailleurs plutôt bons, jouent ici étrangement faux ! Sans parler de ceux que je ne connaissais pas et dont le jeu nullissime surprend tout de même. Comment se fait-il que Claude Pinoteau, un réalisateur correct d’habitude ai pu commettre ce truc ? Ça sonne faux de A jusqu’à Z! Il n’y a absolument rien à sauver. Ratage complet, et incompréhensible. Et qu’on ne me dise pas que c’est parce que c’est une comédie romantique et qu’il faut être fleur bleue et patati et patata…. Non ! J’adore les comédies romantiques. Celle-ci est ratée, point barre. Anecdotes :
Séquences cultes : Accepte-moi comme je suis et je t'accepterai comme tu es Elle est au guichet la banquière ! You call it love |
La Boum 2 (1982) par Sébastien Raymond Résumé : Un an et demi plus tard, Vic continue de grandir et d’appréhender sa vie amoureuse avec quelques tracas. Après avoir échangé par mégarde son passeport avec un inconnu dans le train, elle va connaître une nouvelle histoire d’amour agitée. Critique : Bizarrement, cette suite n’est pas moins bonne ni meilleure. J’avais l’obscur souvenir d’une déconvenue. Bien que je n’ai jamais été un grand fan du premier film, il me semblait que le 2e avait été plus pénible à voir. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Oh, il ne m’enthousiasme guère dans la mesure où il répète presque à l’identique la même trame. Toutefois, la crise du couple paternel (Brigitte Fossey et Claude Brasseur) me paraît plus solide. Le scénario s’y appesantit peut-être un peu plus ? Encore que l’adultère prenait déjà une place non négligeable dans le premier opus. Ici, l’originalité vient du fait que la résolution du problème conjugal n’est pas nette, laissant au spectateur le soin de décider par lui-même quelle lecture il fait de la direction que semble prendre le couple. Concernant le personnage central de Vic, elle recommence à tergiverser, à jouer le sempiternel jeu de l’amour et du hasard, un marivaudage encore un peu enfantin et qui me laisse de marbre. Il faut absolument adhérer à ce pré-requis pour aimer les deux films de la série. Après avoir revu les deux films, l’un à la suite de l’autre, il m'apparaît plus clair que c’est ce qui me manque pour apprécier ces petites comédies. J’ai eu toutefois plaisir à revoir Claude Brasseur, surtout dans cette suite, avec une inquiétude, un désarroi qu’il tient vraiment très bien. Même Brigitte Fossey est parfaite ici. Alors qu’elle m’avait peu marqué sur le précédent film. Plus percutante, juste dans son jeu, son travail est agréable à suivre. Je suppose que le succès fracassant du premier film, les a tout naturellement incités à prendre leur rôle plus au sérieux. Il y a parfois dans cette 2e “boum” de la gravité chez les comédiens. Même Denise Grey semble moins dilettante. L’effet de surprise n’étant plus une option pour ce film, La Boum 2 joue sur d’autres registres, plus nuancés selon moi, mais n’en a pas oublié pour autant ce qui a fait son succès et suit un peu trop les ingrédients de la recette précédente. N’étant pas un fan du premier, je suis toujours peu enthousiaste mais reconnais tout de même que le véritable et pesant ennui n’est pas non plus au rendez-vous. Ce qui représente pour moi un film “moyen” doit constituer un bonbon de film pour d’autres, un bonbon où la nostalgie et l’affection pour les personnages sont les maîtres mots. Anecdotes :
Séquences cultes : Danse J'ai ma carte orange Les emmerdements commencent |