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 saison 1 saison 3

L'homme à la valise

Épisodes 1 à 15


1. Lavage de cerveau (Brainwash)

2. Le pigeon (The Sitting Pigeon)

3. Le jour de l'exécution (Day of Execution)

4. Un million de dollars, première partie (Variation on a Million Bucks - Part 1)

5. Un million de dollars, seconde partie (Variation on a Million Bucks - Part 2)

6. Le fantôme (Man from the Dead)

7. Suzanne (Sweet Sue)

8. Des apprentis terreurs (Essay in Evil)

9. La Vénus disparue (The Girl Who Never Was)

          10. L'enlèvement (All That Glitters)

11. Les souliers du mort (Dead Man's Shoes)

12. Cherchez la femme (Find the Lady)

13. Le pont (The Bridge)

14. Trente ans après (The Man Who Stood Still)

15. La preuve (Burden of Proof)


 

 


1. LAVAGE DE CERVEAU
(BRAINWASH)



Cet épisode présenta la série au public britannique en septembre 1967, alors que les Américains préférèrent Man from the Dead quelques mois plus tard comme introduction. On comprend les Britanniques car Brainwash est formidable dans son développement sans temps mort, qui laisse le téléspectateur sous pression d’un bout à l’autre.

McGill descend d’un train à une petite gare de campagne pour y rencontrer un client. Il se fait enlever et se retrouve séquestré dans un lieu hermétique qui s’avère être un vrai labyrinthe. Un certain colonel Davies veut la confession signée de la participation de McGill, alors qu’il était un agent américain, à son éviction en 1958 de la direction d’Ikwala, un petit état africain. L’épisode, un huis-clos, rappelle par les séances de torture les interrogatoires subis par le numéro 6 (John : ‘Your cure requires a little information about Ikwala’). Les deux seuls passages en extérieur sont l’entame et la dernière scène ; pendant tout le reste, McGill est progressivement détruit psychologiquement et mentalement par un bruyant film d’actualité du pays africain passé en boucle et le manque de sommeil dévastateur. Une réalisation d’orfèvre de Charles Crichton fait participer le téléspectateur à ce cauchemar. Tout est parfait : l’enlèvement, le réveil, la tentative d’évasion, le déjeuner en tête-à-tête avec la jolie Judy, la lente descente aux enfers, le jugement, l’évasion, les motivations hallucinantes de Davies et le final. McGill sort des lieux - finalement un chantier à Londres vu le bus rouge - en titubant et la chemise sanguinolente pour s’écrouler au pied d’un policeman. Une image détonante à l’époque de Simon Templar et  Napoléon Solo à la coiffure et tenue impeccables quelque soit la situation. Cet épisode plante le décor : McGill est antipathique et froid, comme un espion sorti d’un bouquin de John Le Carré, violent (il tente d’étrangler par deux fois la jeune femme), fume cigarette sur cigarette et évolue dans un univers glauque qui n’a rien d’Avengeresque.

Le colonel Davies est Howard Marion-Crawford, décédé d'un excès de somnifères peu après, en 1969 ; un acteur qu’on a pu voir dans trois épisodes des Avengers, dont Les espions font le service. Colin Blakely (John)  a un rôle de salopard, équivalent à celui qu’il a dans Le village de la mort, bien loin du docteur Watson dans le somptueux film, La vie privée de Sherlock Holmes. Son entente avec Bradford ne transpire pas à l’écran, ce qui est gage de professionnalisme. La ravissante Suzan Farmer (Judy) a participé à des films de la Hammer mais également à des séries britanniques prestigieuses, comme Le Saint (quatre épisodes), Sherlock Holmes (avec Douglas Wilmer), Amicalement vôtre (L’un et l’autre) et au dernier épisode de Thriller (Death in Deep Water, inconnu en France), où elle interprète Gilly, une superbe manipulatrice machiavélique en bikini, avec des cheveux courts cette fois.  

C’est l’épisode préféré de Richard Bradford, et c’était son idée de faire réciter les mois de l’année à McGill pendant le lavage de cerveau afin de montrer le personnage lutter pour ne pas perdre la raison. A mon avis, c’est sûrement un des meilleurs épisodes que la télévision a produit, toute série et pays confondus. Il n’y a rien à jeter et mon passage préféré est la découverte du miroir dans le mur et la méfiance du déjeuner (‘They put it in the salt!’). Sans oublier, bien entendu, le long processus du lavage de cerveau dont le climax est la phrase traumatisante par sa répétition : I’m going to shoot you, McGill !

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2. LE PIGEON
(THE SITTING PIGEON)

Le second épisode est beaucoup moins intéressant que l’entame proposée par les Britanniques, car c’est une histoire de détective trop classique. McGill est engagé (contraint) par la police londonienne pour escorter un témoin vingt-quatre heures avant un procès visant à condamner deux criminels de la pire espère. La particularité est que ce témoin, Rufus Blake, est le frère des deux autres ; il était dans l’ombre jusqu’à présent mais il a maintenant des idées de grandeur et il est désireux de s’approprier le magot de ses frangins planqué en Suisse contre son témoignage. McGill doit protéger l’individu poltron contre lequel l’avocat des deux frères a lancé un tueur professionnel aux trousses. L’épisode met beaucoup de temps à se mettre en route, et il ne surprend guère, même dans la seconde partie, plus intéressante. Rufus Blake est interprété par George Sewell, acteur britannique réputé, qui se déclara impressionné par la gentillesse et le professionnalisme de Bradford sur le tournage. Les autres rôles sont tenus par des têtes déjà vues comme James Grout (le policier Franklin) qui est le Chief Superintendant Strange dans Inspecteur Morse. Et puis, une pose lascive de Miss Dinsdale, la secrétaire (ou plus ?) de l’avocat, m’a fait reconnaître immédiatement Carol Cleveland, la maitresse de Cartney dans Le club de l’enfer. Quant au réalisateur, Gerry O’Hara, il participa à l’âge d’or des Avengers en travaillant sur deux épisodes de la quatrième saison.

A partir de cette aventure, on note que Bradford, comme toute star de série, a une doublure pour des scènes anodines (de dos, ou dans des escaliers), mais elle est apparente, même si on n’est pas encore habitué, après deux épisodes, à la mouvance de l’acteur. L’histoire n’est pas inoubliable, parfois aux limites de la crédibilité (McGill ne doit pas utiliser d’arme, la petite amie ne sait pas que son Rufus est un truand alors que les frères Blake sont à la une des journaux), mais elle permet de visiter le Londres des années 60, lorsque McGill et son témoin prennent le fameux taxi noir. Les meilleures scènes sont le passage drôle au concert pour personnes âgées et le final au jardin botanique.

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3. LE JOUR DE L'EXÉCUTION
(DAY OF EXECUTION)

Cette troisième aventure est considérée par beaucoup de fans, avec raison, comme l’un des meilleurs épisodes de la série. Contrairement à d’habitude, McGill n’est pas engagé pour une poignée de dollars, et il se retrouve la cible d’une vengeance savamment planifiée. Comme Brainwash, la qualité du scénario est parfaitement exploitée par Charles Crichton (il réalisa six épisodes de Man in a Suitcase), et la distribution est prestigieuse. Donald Sutherland, peu après son passage dans The Avengers, est Willard, l’ami d’enfance de McGill, porté sur la boisson et pas courageux pour deux sous. Moira, la petite amie entreprenante de McGill, est interprétée par Rosemary Nicols, juste avant d’être Annabelle Hurst dans Département S. A noter aussi, Robert Urquhart (Jarvis, le journaliste qui aide McGill), mémorable dans Castle De’ath, et le vilain, T.P. McKenna. Quant à Bradford, il est parfait, comme toujours.

C’est en rentrant d’une soirée arrosée avec ses deux amis, Willard et Moira, que l’ancien membre des services secrets est apostrophé par le conducteur d’une voiture qui passe : ‘Hey you, Mariocki, we’re going to kill you’. Progressivement, McGill a conscience qu’il n’y a pas erreur sur la personne ; il est obligé de prendre la menace au sérieux et de se préparer à l’échéance dans son duplex londonien, un somptueux logement qu’on ne reverra plus. L’adresse est 56, Clive Mansions, SW3, et l’appartement est le numéro 7, comme on le voit sur le ticket du teinturier (en fait, Ennismore Gardens, à deux pas de Hyde Park).

Day of Execution n’a aucun temps mort et chaque action accroit le suspense et procure une atmosphère pesante. Harcelé au téléphone, McGill reçoit un costume au nom de Mariocki et une couronne mortuaire (puis il est interpellé de la sorte à un feu tricolore par une jolie jeune femme lors d’une poursuite de nuit effrénée peu banale dans les rues de Londres (un des temps forts de l’épisode). D’abord perplexe sur ces menaces de mort, McGill s’organise car son appartement est régulièrement visité. Il fait finalement mine de prendre un congé mais il revient la nuit tombée et attend, tapi dans l’obscurité. La voiture à glaces avec l’inscription ‘Soon Mariocki’ est une bizarrerie saugrenue. Enfin, McGill connaît la raison de ses ennuis (dans le final), lorsque Willard, piégé et rossé par le trio diabolique, lui remet un bout de papier avec ‘Beirut’ écrit dessus. Le passé d’espion ressurgit et l’attente des douze coups de minuit (l’heure de la vengeance) dans l’appartement au bruit de l’ascenseur fait monter la tension. Cyniquement, McGill exige 10 000$ de Willard pour le mettre en sécurité !

Le final est souvent considéré comme vite expédié (ici, McGill utilise une sorte de mannequin enflammé et un cocktail Molotov pour accueillir le trio), mais c’est le cachet de la série d’avoir une fin abrupte, sans épilogue : on a le générique alors qu’on ne s’y attend pas ! La dernière image de Moira en pleurs justifie les dires de McGill, qui ne peut s’attacher ni se fixer : ‘My life is one Mariocki after another’. 

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4. UN MILLION DE DOLLARS, PREMIÈRE PARTIE
(VARIATION ON A MILLION BUCKS - PART 1)

Max Stein, un diplomate russe, a dérobé un million de dollars qu’il a déposé dans une banque de Lisbonne avant de passer à l’Ouest. A Londres, il vit chichement avec son ami McGill, qui vient juste de retrouver Taiko, une Japonaise qu’il avait connue quatre ans plus tôt à Tokyo. Le trio ne se doute pas qu’il est surveillé pendant plusieurs semaines par des agents de tout bord, désireux de mettre la main sur le magot. Un soir, Max s’entretue avec un agent russe mais il a le temps de révéler à McGill avant d’expirer que la clé du coffre se trouve dans la dame noire du jeu d’échecs que les deux amis utilisent. Avec l’aide d’un contact, McGill organise son départ en bateau pour Lisbonne avec des faux papiers et il laisse Taiko, désemparée, dans les mêmes circonstances qu’à Tokyo. McGill a semé temporairement les Russes et ses anciens collègues de la CIA ; lors de la brève entrevue avec l’agent Michaels, celui-ci conçoit que McGill est innocent des charges de trahison qui ont causé sa démission.

Comme tout épisode en deux parties, l’histoire prend quelque temps à se mettre en place, mais l’intrigue est intéressante et les personnages bien interprétés. Stein, le Russe jovial, amateur de belles femmes et d’alcool, est truculent et il n’a rien à voir avec le guignol Brodny. Malgré la fin prématurée du personnage, Anton Rodgers fait une grande performance ; il est le numéro deux dans l’épisode du Prisonnier, Double personnalité, tourné la même année. La gracieuse Yoko Tani avait neuf ans de plus que Richard Bradford, mais les cheveux blancs de l’acteur n’ont pas rendu leur relation ridicule (l’actrice joua dans les deux derniers épisodes, couleur, de Destination danger). Citons aussi Aubrey Morris (Kenneth, le contact de McGill), sans lunettes, qui est Quince, très intéressé par les oiseaux, dans La poussière qui tue. Les meilleurs passages sont la première rencontre McGill/Taiko à l’entracte (‘I’m sorry for cheating us’), Mc Gill et Max (‘I’m an expert with women’) au café jouant aux échecs et l’arrivée de McGill lors de la mise à sac de son appartement.

Cet épisode en deux parties est sorti comme un film aux USA sous le titre To Chase a Million.

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5. UN MILLION DE DOLLARS, SECONDE PARTIE
(VARIATION ON A MILLION BUCKS - PART 2)

Tandis que Taiko rentre à Tokyo, McGill commence sa traversée vers Lisbonne, qui s’avère périlleuse. Les Russes ont un homme sur chaque bateau et la récompense offerte pour l’ancien agent, mort, est tentante. Ainsi, McGill est racketté puis agressé sauvagement dans sa cabine mais, bien que sérieusement blessé, il parvient à s’en sortir et le capitaine le fait débarquer sur le quai dans une caisse. Il n’est pas au bout de ses déboires, car il est rossé et dépouillé sur un chantier en route pour Lisbonne. En ville, il se rend chez Lucia, la femme payée pour le loger, mais McGill, épuisé, s’écroule à ses pieds. La jeune femme le soigne comme elle peut, ce qui lui permet d’avoir des forces pour se rendre à la banque et prendre l’argent ainsi que les documents. Les Russes et les Américains ont, à ce moment, déjà repéré la trace de McGill.

La seconde partie est aussi solide que la première avec, en plus, des rebondissements et du suspense. Néanmoins, Max, mais aussi Taiko disparaissent du récit et les personnages du second volet – le capitaine du bateau, les matelots – ont moins d’envergure. Heureusement qu’il y a Lucia, la Lusitanienne, interprétée par la ravissante écossaise Gay Hamilton, qui participera à un second épisode de la série. L’actrice se souvient d’avoir apprécié le tournage avec Bradford, qui était amusant et gentil. Il avait une méthode similaire à celle de Marlon Brando pour travailler. Lors d’une scène, elle devait apaiser la fièvre de McGill avec de l’eau. Bradford décréta que cela devait être de la glycérine car McGill avait des sueurs froides. D’après Gay Hamilton, Bradford s’en tenait au script mais il marmonnait beaucoup.

La seconde partie, mise en scène par un réalisateur différent, Robert Tronson (cinq épisodes de la série), débute par quelques images du premier volet, parfois inédites d’ailleurs. Les passages qui retiennent plus l’attention sont l’interrogatoire de Taiko par Michaels, l’agent de la CIA, au début de l’épisode avec des répliques clairvoyantes de la Japonaise en tenue sexy. La scène de l’agression dans la cabine est déterminante car, à partir de ce moment, McGill est blessé et Bradford retranscrit avec conviction l’état déclinant du personnage, dont l’apogée est le délire dans l’appartement de Lucia. C’est la séquence la plus captivante, car McGill, soigné par la jeune femme, est allongé sur le canapé et il a des visions de Taiko (‘I’ll never see you again’), Max et Michaels, puis Max, rigolard, se dirige vers McGill, la paume ensanglantée. Ensuite, le final est explosif : d’abord à la banque, où McGill, diminué, liquide l’agent russe, puis la course effrénée et stressante avec l’enveloppe bourrée de billets jusqu’à la boite aux lettres (‘You are crazy, Mac’). Peine perdue. Michaels laisse néanmoins 30 000$ à McGill ainsi qu’un passeport et sa valise. McGill lui dit d’en donner la moitié à Lucia puis, songeur, il détruit l’adresse de Taiko que vient de lui remettre  Michaels.

Une très bonne histoire en deux parties, finement interprétée et au suspense remarquable, que les Américains ont justement exploité en film.

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6. LE FANTÔME
(MAN FROM THE DEAD)

Man from the Dead – premier épisode diffusé aux USA - est le véritable pilote de L’homme à la valise car il répond aux nombreuses questions qu’on peut se poser en regardant la série et il fournit les antécédents essentiels du personnage principal, devenu une sorte de détective privé sans licence en Europe. En effet, McGill - titre initial de la série – a été contraint de démissionner des services secrets, mais l’intrigue de cette aventure ne laisse planer aucune ambigüité : l’agent fut accusé à tort six ans auparavant.

Rachel Thyssen reconnaît son père, décédé depuis six ans, dans une rue de Londres et la Une des journaux attire l’attention de McGill, car l’attitude de Harry Thyssen le discrédita, provoqua sa démission forcée et le fit accuser sans jugement. McGill se rend au bureau américain de Londres mais Coughlin, son supérieur de l’époque, ne croit pas à cette ‘résurrection’ et il menacera son ancien agent d’inculpation pour trahison s’il continue ses investigations. Pourtant, Harry Thyssen est le seul qui puisse témoigner que McGill obéit à ses ordres lorsqu’il autorisa la défection à l’Est du mathématicien LaFarbe. 

Malgré l’insistance de Coughlin et le volte-face de Rachel Thyssen, McGill engage un détective et prend une chambre en face du logement de la jeune femme. Rapidement, il s’aperçoit que les Russes la surveillent également ; très bonne scène de filature nocturne sur les quais de la Tamise à Southwalk Bridge. McGill essaie de convaincre Rachel, une conquête avant ‘l’affaire’, de le mener à son père, mais devant le refus de celle-ci, il ne peut compter que sur l’indice de son détective (un début de numéro de téléphone). Cela mène McGill au Regal City Stadium (White City Stadium, aujourd’hui démoli), où il retrouve enfin Harry Thyssen, très malade, qui lui propose un marché pour revoir sa fille.

Une très bonne histoire d’espionnage, dans la lignée des romans de Len Deighton, qui  atteste de l’innocence de McGill, un pion dans un jeu de stratégie. Révéler son impartialité compromettrait les desseins de l’agence et mettrait en danger la vie de LaFarbe, espion infiltré. McGill se sacrifie en facilitant la fuite d’Harry Thyssen, l’agent de liaison, pour qu’il ne soit pas démasqué. Cette histoire écrite par Stanley Greenberg, Executive story consultant et scénariste sur cinq épisodes dont celui en deux parties, établit la ligne que suivra la série, et le niveau de violence et de réalisme, inhabituel dans les années 60. L’intrigue est plutôt conventionnelle et on retiendra surtout la dernière partie dans le stade ; le stratagème téléphonique qui permet à McGill de faire sortir Thyssen de sa tanière, et la course de McGill dans le stade poursuivi par une vingtaine d’agents russes avant une sévère correction, ce qui constitue un des grands moments de la série (‘Where is the alleged dead man, Sir ?’).

Le titre initial devait être Man in a Suitcase, et la reprise du thème musical dans une version longue dans la première scène après le générique, lorsque McGill achète le journal, montre effectivement que l’épisode devait servir de pilote. La ravissante Angela Browne personnifie avec a propos l’employée de crèche, Rachel Thyssen, fille de l’agent mourant et aussi ancienne petite amie de McGill. Angela Browne, disparue trop tôt, fut, entre autres, Sara dans Comment réussir un assassinat et elle tourna dans les séries avec Patrick McGoohan, avec qui elle s’entendait bien : Destination danger et Le prisonnier, où elle est le numéro 86 dans J’ai changé d’avis,  une intrigue qu’elle avoua n’avoir pas saisie. Le sympathique et excentrique détective Pfeiffer est Timothy Bateson (Merryweather dans Meurtres distingués). A voir le déjeuner sandwich/bière avec McGill, et sa réplique dans le café : ‘Are they English, Sir ? I have a certain standing’ renvoie directement à la première scène de l’épisode Avengers. Stuart Damon est Williams, l’agent qui remplace McGill avant d’être Stirling dans Les champions, tandis qu’il faut être vigilant pour reconnaître la réceptionniste, Fabia Drake (le colonel Adams dans Les chevaliers de la mort) dans une petite scène avec Richard Bradford.

Pour finir, la dernière réplique de McGill à Rachel qui lui demande pourquoi sa voiture, une Hillman Imp, et sa valise sont si importantes :’They're all I own’. [C’est tout ce que je possède].

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7. SUZANNE
(SWEET SUE)

Sweet Sue est une histoire bien plus conventionnelle que les quatre précédentes, moins intéressante aussi. McGill est engagé par Mandel, un homme d’affaires puissant et riche, pour enquêter sur les relations de sa fille, la gâtée-pourrie mais jeune et jolie Sue. 300 dollars plus les frais est le tarif. Sue s’est acoquinée de deux individus qui semblent être des escrocs opportunistes. Colin et Charles ont en effet trouvé en Sue une poule aux œufs d’or et ils voient d’un mauvais œil l’arrivée de McGill, qui joue le play-boy en goguette. Sue est fascinée par l’ancien agent et celui-ci joue au chat et à la souris avec les deux jeunes truands têtes-à-claques en prétendant être un riche Américain. Lors d’une partie de poker visant à le plumer, McGill récupère l’enveloppe subtilisée dans le coffre de Mandel. Les blancs-becs traquent alors le détective qui doit convaincre Sue de la dangerosité des individus…mais elle n’en a cure ! L’intrigue n’est pas folichonne et la fin est même décevante ; alors que McGill semble avoir la partie gagnée, il tombe dans un piège et manque de peu d’être défenestré, puis il a beaucoup de mal à se débarrasser du freluquet Charles dans un mano a mano à l’issue inconnue. Dans la dernière séquence, on se rend compte que l’action de McGill n’a rien résolu du tout.

Les passages dignes d’intérêt ne sont pas nombreux, mais il y a celui de la boite. McGill fait la connaissance du trio et invite Sue à danser et elle l’aguiche en se trémoussant subjectivement, puis il provoque les deux sbires par un pari sur un jeu de pièce de monnaie (‘a very silly small time game’). Une séquence jubilatoire. En fait, Sue est une dévergondée qui attend que McGill la passe à la casserole jusqu’à ce qu’elle apprenne qu’il est un détective engagé par son père ! On peut noter aussi la rencontre McGill/Miss Brown dans un échange à double sens (‘That’s all I’ve got to sell, Mister McGill’), la partie de poker (avec autant de dollars que de francs) et quelques répliques comme lorsque Mandel concède : ‘Sue is running wild’ et McGill répond :’In what way ?’

L’intérêt réside donc dans ces quelques scènes mais aussi, et surtout, l’espièglerie de la ravissante Judy Geeson, la jeune garce rebelle envers son père, qui est la flamme de l’épisode. C’est ‘une bouffée d’air frais’ (ce sont les termes de Richard Bradford) et elle crève l’écran, ce que j’avais déjà remarqué dans un épisode de Thriller. Elle a également une moue craquante qui ne laisse pas indifférent.

Parmi les seconds rôles, je n’ai pas reconnu de suite Miss Brown, une ancienne victime de Charles et l’informatrice de McGill dans une scène unique et prenante ; c’est Jacqueline Pearce (Marianne dans L’économe et le sens de l’histoire). Quant à Peter Blythe (vu aussi dans L’économe et également La dynamo vivante), il joue Colin et il se souvient du tournage très plaisant. Richard Bradford était détendu et sympathique. Le studio avait loué une maison pour Blythe au nord de Londres à Highgate, et ils jouaient parfois au billard. Bradford raccompagnait Blythe qui n’avait pas de voiture et lorsqu’il lui dit qu’il avait joué avec la Royal Shakespeare Company, Bradford fut si impressionné qu’il le traita comme la star de l’épisode !

L’histoire est censée se passer dans le sud de la France, mais contrairement à Amicalement vôtre quelques années plus tard, le tournage eut lieu exclusivement en Angleterre et au Pays de Galles ; la séquence automobile du pré-générique fut filmée dans le Surrey par exemple.

Ah, pour finir : les tenues de piscine des années 60 n’ont vraiment rien de sexy, que cela soit celle de Sue et surtout l’accoutrement de McGill, un short étriqué et des chaussettes blanches ! Bigre, cela fait peine à voir!

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8. DES APPRENTIS TERREURS
(ESSAY IN EVIL)

McGill est engagé par George Masters qui craint pour sa vie, particulièrement lorsqu’il apprend l’identité des trois individus descendus sous de faux noms au Glendure Hotel, un charmant palace en Ecosse. McGill prend contact avec le trio pour lui faire comprendre que tout acte déplacé est éventé et d’aucune utilité dorénavant. Felix De Burgh, le chef, est au contraire d’avis de supprimer McGill, qui en sait trop, en même temps que Masters. Peters et Harris sont plus partagés, mais ils ne se doutent pas que le mobile de De Burgh est différent des leurs. En effet, De Burgh est le seul des trois qui ne subit pas de chantage de Masters : il veut tout simplement s’approprier Lucinda, la femme du maitre-chanteur qui hait son mari et, éventuellement, reprendre le chantage sur les deux autres !

L’intrigue est bien agencée par un début d’épisode qui laisse l’audience dans le flou. McGill se trouve déjà au même hôtel que les trois comparses qui passent pour de respectables hommes d’affaires. Il remplit sa mission en les avertissant que quelque soit leur but, ils sont démasqués. McGill fait ensuite son rapport à Masters pour toucher les 500$ promis et poursuivre sa route. Or, sa voiture est trafiquée et il est enlevé dans le but de le faire disparaître dans un supposé accident de bateau, en même temps que Masters.

Parmi les meilleurs passages, la bagarre McGill/Crick dans le bureau de Masters en fait partie (‘Mine worked’). Comment se débrouille Bradford pour garder sa clope au bec pendant l’affrontement ? Il y a aussi l’enlèvement de McGill, qui avait accepté l’offre d’assistance de Lucinda (interprétée par Wendy Hall, qui n’a pas fait grand-chose après cet épisode) et l’explication orageuse de Masters avec sa femme lorsqu’il découvre qu’elle l’a trahi et qu’elle fait partie du complot : il la dépouille de tous ses bijoux avant de la jeter dehors. Le final est explosif, dans tous les sens du terme, et il ne laisse que Lucinda et Harris de vivants après l’hécatombe avec, comme souvent, le générique de fin qui coupe abruptement (I’ve got to find my suitcase’).

L’arme utilisée, une mine de la seconde guerre mondiale, est un peu le point faible du scénario (The Mine devait d’ailleurs être le titre de l’épisode). ‘One WW2 naval mine in perfect condition for the perfect murder‘. C’est vraiment compliquer quand on peut faire simple. Ce point de coté, l’histoire est excellente et le suspense bien préservé jusqu’au final révélateur et mouvementé. Le maitre-chanteur et les apprentis terreurs sont à mettre dans le même sac, bien qu’on ne connaisse jamais la teneur du chantage exercé. De très bons interprètes connus de séries agrémentent l’épisode. Felix de Burgh est Peter Vaughan, acteur toujours excellent dans les différentes séries que je chronique (The Avengers, Amicalement vôtre, Madigan, Thriller, Sherlock Holmes). Vaughan se rappelle que Bradford était extrêmement athlétique et qu’il était très agréable de travailler avec lui. Les deux acolytes sont aussi des habitués ; John Cairney (Peters) joue les frères jumeaux Jenkins dans Amicalement vôtre (Une rancune tenace) et Maurice Good (Harris) a souvent participé aux Avengers et au Saint. Sinon, j’ai dû vérifier mais l’homme à tout faire de Masters, Crick, est interprété par Peter Brace, qui fait les cascades et de petites apparitions dans The Avengers.   

L’action est supposée se passer en Ecosse, mais, en fait, quelques affiches dans l’hôtel avec des fenêtres en trompe-l’œil s’ajoutent aux inserts pour donner le change et, contrairement à Castle De’ath, tourné dans les mêmes circonstances, un seul des acteurs de la distribution - John Cairney - est écossais pour entretenir l’illusion.

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9. LA VÉNUS DISPARUE
(THE GIRL WHO NEVER WAS)

Le capitaine Kershaw, un ancien soldat, confie à Miss Gilchrist, une antiquaire, qu’il connaît la localisation d’un Botticelli inestimable, disparu pendant la guerre. La femme engage McGill, une connaissance, pour réduire les sommes intermédiaires. Retrouver cette peinture ne s’avère pas si facile, car Foley, un compagnon d’armes déboussolé de Kershaw, l’avait en sa possession et elle a été vendue après qu’il ait peint par-dessus. La course pour la récupérer dans une boutique d’occasion est âpre, et l’appât du gain peut changer les mentalités.

Cette aventure est pour moi la plus faible visionnée jusqu’à présent. La longue séquence pré-générique semble produite pour un film sur la seconde guerre mondiale. Les combats font rage aux alentours d’un monastère italien. Le sergent Foley est tout à coup subjugué par un tableau, la tête de Vénus de Botticelli, et il en oublie le danger ambiant ; une séquence flashback très prenante avec une musique douce en contraste avec les images. La suite est laborieuse, excessivement bavarde et la plupart du temps ennuyeuse. McGill mène son enquête, en essayant d’augmenter sa part auprès de Gilchrist, tandis que Kershaw tente de le battre de vitesse. Tout ça pour ça et McGill rachète le tableau, une copie, pour que Foley puisse le contempler dans la chambre de l’institut, le seul plaisir qui lui reste dans la vie (dernière image). Rien de transcendant.

Mon passage préféré n’a rien à voir avec l’intrigue ; on y retrouve Vicki Woolf, une jolie brunette aperçue brièvement dans Amicalement vôtre (La danseuse). Ici, elle est la secrétaire de l’institut de Foley et McGill, admiratif, essaie de l’inviter à prendre le café dans une scène sympathique (You don’t like coffee, do you ?).

Bernard Lee, avec une moustache, interprète admirablement le cupide Kershaw et c’est un des rares bons points de cette aventure insipide. Il personnifie ce que les gens peuvent faire pour de l’argent. L’état désespéré de Kershaw, éternel perdant, dans sa longue supplique avec Mavis, la femme chez qui il habite, constitue la meilleure scène de l’épisode. Saoul, il finit par la poignarder involontairement avec un ciseau, sans gravité a priori. Comme quoi, Lee pouvait faire autre chose entre deux James Bond, même s’il est le meilleur M de la saga, un rôle qu’il interpréta onze fois. Il joua aussi avec Roger Moore avant que celui-ci ne devienne Bond, en étant Sam Milford, l’ami de Brett Sinclair dans Amicalement vôtre (épisode, Quelqu’un dans mon genre). Annette Carell, l’inoubliable docteur Voss des Marchants de peur, est Gilchrist, l’antiquaire, et ex improbable de McGill. L’actrice est également B dans le somptueux A, B et C du Prisonnier et elle décéda fin 1967, quelques mois après le tournage de ces trois épisodes. 

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10. L'ENLÈVEMENT
(ALL THAT GLITTERS)

McGill offre ses services pour retrouver un jeune garçon de dix ans, disparu d’un village idyllique de la campagne anglaise depuis quatre jours. Rapidement, le détective, qui passe pour un journaliste américain, se heurte aux villageois rustres et antipathiques. McGill découvre que le garçon est le fils illégitime de Michael Hornsby, un homme politique ambitieux qui brigue le poste de premier ministre. Cela lui avait été caché, tout comme la demande de rançon. Mais Hornsby est sans le sou, contrairement à sa femme. McGill accepte de servir d’intermédiaire, alors que les kidnappeurs ont décidé de supprimer tous les témoins gênants, y compris leur otage.

Une histoire classique d’enlèvement d’enfant qui tire son originalité dans la structure du scénario. McGill est engagé par un homme politique qui dit agir par sympathie pour une tierce personne, et le détective ne prend la direction des opérations, ayant toutes les cartes en main, que dans la seconde partie du récit. A part l’enlèvement, plusieurs autres thèmes sont abordés : l’influence politique, l’adultère et la méfiance de paysans bornés qui ont des secrets à cacher dans un petit village anglais, un peu comme Le village de la mort. Le titre initial était d’ailleurs : Mad Dogs and Englishmen.

Plusieurs scènes sont intéressantes comme McGill pratiquant le squash et son goût pour l’argent, déjà ressenti, est exacerbé dans cette aventure. Il a parié dix dollars au squash et demande à Hornsby, dans un cynisme malsain, 1000 £ s’il trouve l’enfant et 2000£ de plus si celui-ci est vivant !  Je ne sais pas si aujourd’hui, on accepterait ce genre de dialogues au CSA. McGill inquisiteur et malmené face aux villageois soupçonneux est une excellente scène, surtout que l’un d’entre eux, le répugnant Mason, est un kidnappeur. Le final est aussi solide et bien structuré ; dans un pub, McGill attend un coup de téléphone des ravisseurs avec qui il fait monter la pression dans un superbe passage où l’inquiétude du détective est perceptible à ses gestes. Il est contraint à faire des allers et retours (toute la nuit) avant que les kidnappeurs ne soient disposés à procéder à l’échange sur une déserte route de campagne. En fait, un piège, dans lequel McGill est blessé après une fusillade qui laisse les deux truands et sa valise pleine de vêtements inertes au milieu de la chaussée. Eric Thompson est excellent en chef de complot impitoyable.

Le joli village dans les Cotswolds n’est pas Little Storping in-the-Swuff, cher aux Avengers, mais Lower Slaughter dans le Gloucestershire. Le titre français est banal alors que l’original fait référence à un échange du couple Hornsby, considéré comme un couple en or mais tout ce qui brille…. A noter que lorsque Mrs Hart, la grand-mère demande : ‘Mister McGill ?’, le détective répond par deux fois : ‘Just McGill’. Comme Purdey fera dix ans plus tard.

Il y a des têtes Avengers dans cette intrigue ; d’abord le couple Hornsby. Michael est…Michael Goodliffe que je ne connaissais jusqu’alors que mort dans une cage de verre dans L’héritage diabolique, tandis que son épouse, Dolores, est Barbara Shelley, adepte des films d’horreur de la Hammer, mais aussi à la tête des Vénusiens Britanniques Associés dans Bons baisers de Vénus. Elle n’a malheureusement qu’une seule scène avec Richard Bradford (dans laquelle elle demande à McGill si elle peut  payer la rançon). On peut citer aussi Derek Newark, Rudy le ‘brave’ garde d’enfant illettré, qui participa à trois Avengers (dont également Bons baisers de Vénus) et le serveur Rankin interprété par Edward Underdown (le prétendant liquidé devant l’aquarium dans Cœur à cœur et le ‘fantôme’ du Mort-vivant).

Une solide intrigue et un épisode convaincant.

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11. LES SOULIERS DU MORT
(DEAD MAN'S SHOES)

McGill recherche un homme dans un village perturbé par des évènements étranges et terrifiants, qui sont liés aux investigations du détective. Un cartel de la drogue a raté sa cible, John Gilsen, à Milan - séquence pré-générique- et a décidé de semer la terreur dans le village natal du fugitif pour le forcer à revenir. La police britannique et les services secrets américains sont également intéressés par le retour de Gilsen, agent double détenteur d’informations vitales, et laissent s’installer la panique au village. McGill se retrouve ainsi impliqué malgré lui dans une affaire qui le dépasse.

Avec cette aventure, on sait dorénavant que McGill prend n’importe quelle mission, sans scrupule (ce que souligne le policier) et sans vérifier le sérieux de ses clients : c’est la seconde fois après Masters (Essay in Evil). En tout cas, la somptueuse première partie ne réconcilie pas McGill avec les villageois anglais, alors qu’il trouve aucune réponse, mais seulement de l’animosité à toutes ses questions concernant Gilsen. Seul dans le village, le détective fait penser au No6 voire aux Avengers. Il est affranchi petit à petit et, comme les truands et les services secrets, il décide d’attendre le retour de l’’enfant prodigue’ au village, qui, blessé, est fortement diminué.

Les meilleurs passages sont la séquence pré-générique, le début de l’épisode et la quête d’informations de McGill, isolé dans un village hostile, puis la visite du révérend et de McGill au pigeonnier, qui, on le sait déjà, sera un endroit stratégique pour le final (‘Have you ever tasted pies made of young pigeons, Mister McGill ?’). L’attaque du révérend par les motocyclistes est surprenante, le meurtre de Kane, l’agent américain, élimine un personnage inconsistant de l’histoire. Quant à la fin, McGill se sacrifie et prend une belle correction, exactement comme celle de The Man from the Dead.

Une très bonne histoire où McGill est manipulé puis pris entre deux feux. D’un coté, la police et les services secrets, de l’autre le syndicat et le cartel de la drogue, qui a engagé sous de faux prétextes le détective ! Finalement, l’ex-agent sera le dernier recours de Gilsen qui a rendez-vous chez sa petite amie et, comme d’habitude, McGill subira une bonne raclée, encore une !, dans le pigeonnier avant que les villageois, attirés par les cloches de l’église, ne fassent passer un sale quart d’heure aux méchants. 

La distribution est solide et on a l’impression d’avoir vu tous les protagonistes autre part. John Gilsen est John Carson (le tueur Fitch dans Meurtre par téléphone et Freddy du Baiser de Midas, entre autres) et le policier James Hedley est interprété par Gerald Sim, qu’on a vu dans de nombreuses séries britanniques comme The Avengers (quatre épisodes), Amicalement vôtre, Thriller, The New Avengers. Parmi le trio de truands, Peters, le ponte de la drogue aux goûts de luxe, est James Villiers (Petit gibier pour gros chasseurs) et Derren Nesbitt (Lucas) est l’inoubliable Groski dans Amicalement vôtre (Un drôle d’oiseau).  Il interprète ici aussi un tueur maniéré, qu’il perfectionnera aux cotés de Brett Sinclair et Danny Wilde. Le troisième méchant, le communiste, est caricatural et offre moins d’intérêt. A noter aussi que Jayne Sofiano (Juliette) est l’infirmière que met Steed dans le placard (Double personnalité).  Elle fait dire à Peters la réplique de l’épisode: ‘That girl is a cheese for our half dead mouse’

L’épisode a été tourné en extérieurs à Fulmer dans le Buckinghamshire, à deux miles des studios Pinewood ; c’est là aussi que la maison de Steed se trouve lors de la seconde saison des New Avengers.

Un excellent début, une bonne histoire soutenue par des interprètes de qualité, mais le final déçoit un peu.

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12. CHERCHEZ LA FEMME
(FIND THE LADY)

McGill est à Rome lorsque Mori, un de ses informateurs au temps où il était agent, lui apprend qu’il connaît Guilio, assassin et voleur d’un bijou inestimable. Espérant récupérer dix pour cent de la valeur auprès des assurances, McGill et Mori tendent un piège à l’individu, sans la présence de la police. Le détective laisse échapper le truand ainsi que Mori et le collier. Peu après, Guilio retrouve l’indic et le tue, mais avant d’expirer, il a le temps de dire au téléphone à McGill, qui lui demande où sont les bijoux :’The signora, find the signora’. A quelle femme Mori a-t-il remis le collier ? McGill, privé de passeport par le policier chargé de l’enquête, est cloitré dans son hôtel, attendant le tueur. Comme distraction, il fait la connaissance de Francesca, qui se jette dans ses bras telle une femme fatale, mais qui l’a envoyée ?

Acceptable sur le papier, l’intrigue est en définitive bien moyenne avec beaucoup de bavardages et de lenteurs. Il ne se passe pas grand-chose et le temps est meublé par des dialogues laborieux McGill/Francesca à l’hôtel (‘Do you like what you see ?). Richard Bradford a lui-même confié que plusieurs épisodes de Man in a Suitcase étaient à l’origine destinés à d’autres séries. Celui-ci possède les caractéristiques du Baron ou du Saint pour différentes critiques et je plussoie. Le final au cimetière est bon : il révèle la cachette de Mori, l’identité de Francesca et il y a également une bagarre bien chorégraphiée. Je ne dévoile pas l’astuce et il est heureux que le titre initial original ait été changé, car il sapait le peu de suspense.

Le clochard édenté à l’hygiène douteuse, Mori, est un personnage attachant - la première scène à l’hôtel est intéressante - et on comprend la peine de McGill à son assassinat, mais deux autres figures de l’épisode ont un rôle plus déterminant. The Commandante, interprété par l’inégalable Patrick Cargill (Lovejoy dans Cœur à cœur et Pemberton dans Les marchands de peur), exerce une sorte de chantage jubilatoire sur McGill dans l’espoir de s’octroyer une part de la récompense. Il l’utilise comme appât même s’il lui propose de lui rendre son passeport à l’hôtel pour s’en débarrasser dans la meilleure scène de l’épisode (‘No, I have a date here’). Il joue un policier beaucoup plus machiavélique que le tueur, bien fade interprétation en comparaison. A lui seul, Cargill fait grimper l’épisode d’un melon ! Sa dernière réplique à McGill est significative : ‘The trouble with you is you didn’t trust anybody !’. Quant à Francesca, c’est Jeanne Roland, qui a ici une prestation bien plus longue que celle dans Avec vue imprenable. La même année, elle fit une apparition dans On ne vit que deux fois.

L’action est censée se passer à Rome mais il y a peu d’efforts, contrairement à Essay in Evil en Ecosse, pour cacher la réalité : aucune prise ne fut effectuée en Italie et quelques inserts complètent un tournage 100% studio. Certes, certains plans, comme le cimetière et les catacombes, donnent le change, mais l’ensemble ‘pue’ le studio. Pour cette raison, l’épisode est vraisemblablement une resucée d’une autre série habituée à ce genre de procédés comme Le Saint.

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13. LE PONT
(THE BRIDGE)

Big Ben sonne cinq coups et McGill est réveillé par un lord qui le paye £1000 pour qu’il sauve son fils, parti se suicider en sautant d’Albert Bridge. Tim Gormond se sent responsable de la mort d’un ami qui a glissé en gravissant ce pont, et il tente de mettre fin à ses jours de la même façon. McGill arrive à temps pour le sortir de la Tamise, mais Tim n’en est pas à sa première tentative. Rapidement, l’ex agent s’aperçoit que la vérité sur ce décès survenu un an auparavant n’est pas celle établie. Tim n’était pas le seul témoin du drame, car deux autres jeunes ont assisté à la scène. Annabelle Fenchurch, également présente, n’a pas été entendue et elle ne figure même pas au compte-rendu : la fille de Sir Walter est pourtant au centre de l’intrigue.

Estampillé par Richard Bradford lui-même comme étant l’épisode le plus mauvais de la série, The Bridge, aussi prestigieux soit-il, est en tout cas l’une des aventures les plus pénibles que j’ai vue jusqu’à présent. Le premier quart d’heure est consacré au sauvetage et ses conséquences à la demeure des Gormond ; puis l’enquête de McGill pour retrouver les témoins est rapide et la fin en flashback est ridicule comme rarement. Annabelle remercie finalement le détective: ‘Thank you for freeing me’…

Jane Merrow est la ‘guest star’ qu’on remarque car elle a joué dans le dernier épisode Peel (Mission très improbable) et elle a été pressentie pour être une Avengers girl. Les amateurs des Champions reconnaitront Anthony Nicholls (Tremayne) dans le rôle de Sir Walter Fenchurch et Robert Urquhart est le journaliste Jarvis pour la seconde, et dernière, fois dans une courte scène (l’acteur n’est même pas crédité au générique).

Une histoire de mensonges et de jalousie qui tire en longueurs et, jusqu’à cinq minutes de la fin, la même question revient sans arrêt : ‘Que s’est-il passé sur ce pont ?’ De nouveau des gosses de riches, comme dans Sweet Sue, avec encore moins de réussite ici. Rien de sensationnel et l’attente n’est pas récompensée. La meilleure scène est la rouste que prend McGill par les sbires de Sir Walter dans la cour du garage (seule séquence d’action). Concernant la scène du pont au début, Richard Bradford a déclaré que Rodney Bewes, qui interprète brillamment Tim, a commencé à grimper sur le pont et qu’il s’est senti obligé de le suivre (par contre, le saut est effectué par un cascadeur). Il apprit plus tard que l’assurance ne le couvrait pas en cas de blessure. La phrase de l’aventure pour McGill: ‘As my mother always said, there is only one truth!’

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14. TRENTE ANS APRÈS
(THE MAN WHO STOOD STILL)

Ne cherchons plus : cet épisode est le plus mauvais de Man in a Suitcase. On ne pourra pas tomber plus bas, et c’est pour moi, un des pires ratages de toutes les séries que j’ai eu le loisir jusqu’à présent de chroniquer. D’ailleurs, coïncidence ou pas, c’est un des épisodes qui n’est même pas abordé sur les différentes pages anglo-saxonnes consacrées à la série, à part un : ‘It’s a boring mess.’  

L’histoire se déroule en Espagne, à 50 km de Madrid, où vit un anarchiste espagnol après trente ans passés en prison. Il engage McGill pour savoir si son vieil ami l’a trahi au profit de Franco. Il veut surtout avoir l’aide de son vieux camarade, qui travaille avec la police, pour passer des lingots d’or volés au gouvernement et soutenir la cause. Il ne se passe rien, même dans le final sans consistance. C’est lourd, ennuyeux, et je n’ai pas regardé une seconde fois l’épisode avant d’écrire mon avis, ce que je fais normalement toujours, même pour les plus mauvais.

Il n’y a donc rien à écrire sur cette affligeante aventure mais seulement sur les à-côtés. Les quelques scènes tournées hors des studios Pinewood furent filmées à Black Park, un endroit souvent utilisé pour représenter la frontière avec l’Est dans les New Avengers. Deux témoignages de tournage sont par contre intéressants : Philip Bond, le serveur espagnol aux cheveux teints, a déclaré que cela prenait des heures à se maquiller. Il se rappelle que Bradford était distant et qu’il ne se mélangeait pas. Quant à Cyril Shaps, qui interprète Palma le policier, c’était la première fois qu’il travaillait avec un acteur issu de l’Actors Studio et c’était difficile de jouer avec Bradford car il improvisait toujours et il fallait se mettre au diapason. Un petit détail pour terminer : le chauffeur de taxi, Ricardo Montez, est Josino dans Remontons le temps.

Quant à l’épisode, beaucoup de baratin moitié anglais, moitié espagnol, sans sous-titre (McGill ne parle pas mieux espagnol que moi),  accompagné d’une musique typique vite barbante pour une histoire qu’on peut zapper sans scrupule.

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15. LA PREUVE
(BURDEN OF PROOF)


Après deux ratages, la série renoue avec le succès grâce à cette histoire sombre et prenante magistralement interprétée.

Henry Faversham (nom d’une charmante localité dans le Kent), un conseiller anglais respecté d’une république d’Amérique centrale depuis vingt ans, décide de s’enfuir après avoir détourné un quart de million de livres. De retour à Londres,  il engage McGill comme protection, seulement pour enregistrer et filmer ce qui se passe dans son appartement (‘Your job is to watch, record, report’). Progressivement, le voleur devient sympathique et le trio de brutes aux mines patibulaires lancé à ses trousses révèle des intentions inacceptables. Faversham ne se cache pas et continue à vaquer à ses occupations, mais il est enlevé et amené à l’ambassade, réquisitionnée pour l’occasion. McGill retrouve les enregistrements qui serviront de preuve mais il arrive trop tard pour sauver Faversham.

Cette aventure est une des plus noires de la série, sans happy-end et avec une fin abrupte, ce qui sont les caractéristiques qui démarquent Man in a Suitcase des séries de l’époque comme Le Saint ou Des agents très spéciaux. Une histoire d’espionnage bien ficelée, au bon suspense et au dénouement imprévisible. L’enlèvement de Faversham et son arrivée à l’ambassade sont le tournant de l’intrigue, car ils ne sont pas prévus dans les plans du diplomate. Celui-ci a savamment organisé le piège pour démasquer Garcia, le véritable traitre, et McGill est, cette fois, un pion, relégué au rang d’observateur, qui comprend trop tard avec les documents laissés par Faversham. Malgré son intrusion dans l’ambassade, il ne peut venir en aide au diplomate, torturé à mort. Carla Faversham, son épouse qui a enfin compris, et la police ne peuvent pas intervenir dans le sanctuaire que constitue l’ambassade, tout en sachant très bien ce qui se passe à l’intérieur. Cela accentue le sentiment de violence crue et sans concession pas habituel dans les années 60. Comme souvent, McGill est frappé, mais ce n’est rien à coté du traitement infligé à Henry Faversham dans une des plus violentes séquences de la série. Le trio de sinistres comploteurs tortionnaires forme des méchants détestables à souhait.

Les meilleures séquences sont le long passage pré-générique, près de six minutes, et tout le final, à partir de l’arrivée de McGill à l’ambassade, mais il ne faut pas omettre la construction de l’intrigue qui laisse subtilement le détective et l’audience dans l’expectative. A noter de belles vues de Londres, dont celle de St James’s Park derrière Whitehall, première image après le générique, et la réplique du portier du club en voyant le passeport: ‘American, are you ? I thought you didn’t sound Scot !’.

Tous les rôles de la distribution sont bien personnifiés ; John Gregson interprète superbement Faversham, qui a tout prévu, même sa fin tragique. L’acteur, disparu prématurément d’un arrêt cardiaque à cinquante-cinq ans, vole la vedette à Bradford. L’énigmatique, mais ravissante, Nicola Pagett est Carla Faversham, dans un rôle assez sympathique, un peu comme une autre Carla - Wilks dans Amicalement vôtre (Formule à vendre) – et bien loin de la garce Adriana d’Un dangereux marché. A la fin de l’épisode, Carla sollicite la police et James Hedley (Gerald Sim), présent pour la seconde et dernière fois de la série. Sim précise que Richard Bradford était un type sympa même s’il ne le connaissait pas beaucoup. Pour lui, c’était amusant de travailler sur Man in a Suitcase. Enfin, mention spéciale à Wolfe Morris (Pudeshkin dans Un Steed de trop), au strabisme prononcé, qui est l’infâme colonel Garcia, un des pires vilains de la série.

Une solide intrigue à la fin violente et cruelle.

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Images capturées par Denis Chauvet.

 

 saison 1 saison 3

L'homme à la valise

Épisodes 16 à 30


16. Le secret (The Whisper)

17. Pourquoi tuer Nolan ? (Why They Killed Nolan)

18. Les quatre de Boston (The Boston Square)

19. Qui perd gagne (Somebody Loses, Somebody... Wins?)

20. L'aveugle (Blind Spot)

21. Un inconnu (No Friend of Mine)

22. Le faux-fuyant (Jigsaw Man)

23. Quatre contre un (Web with Four Spiders)

24. Quelle direction, McGill ? (Which Way Did He Go, McGill?)

25. Vente aux enchères (Property of a Gentleman)

26. Les révolutionnaires (The Revolutionaries)

27. Qui devient fou ? (Who's Mad Now?)

28. Trois clins d'œil (Three Blinks of the Eyes)

29. Le château dans les nuages (Castle in the Clouds)

30. L'avion pour Andorre (Night Flight to Andorra)


 

 


16. LE SECRET
(THE WHISPER)

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Marcus Spencer, propriétaire intraitable d’une plantation de tabac en Afrique, rudoie et abuse de sa main-d’œuvre locale constituée d’ouvriers noirs, refusant de payer leurs heures supplémentaires. Leur allié est le Père Ignatius Loyola, un prêtre jésuite. Spencer engage McGill pour enquêter sur le passé de Loyola, dont le comportement insurrectionnel l’inquiète.

McGill découvre – grâce à une empreinte sur une Bible - que Loyola est un ancien mercenaire sanguinaire (‘a death collector’) répondant au nom d’Alfred Porter. Ce dernier fut soi-disant retrouvé décapité, mais le détective est persuadé qu’il est toujours bien vivant. L’enquête de McGill en Angleterre le mène de la mission jésuite de Londres à un night-club : une superbe scène où il danse avec la charmante représentante délurée du Vatican en mini-jupe (il va jusqu’à la calmer en lui mettant vigoureusement la main sur le fessier) : ‘You like my legs, darling ?’. Puis il rend visite au père de Porter, un spiritualiste excentrique obsédé par l’Afrique, qui aurait eu un laissez-passer pour un Avengers

McGill retrouve finalement Porter en Afrique et, progressivement, il est convaincu que l’ancien massacreur s’est réellement repenti et qu’il prend sa nouvelle tâche comme une rédemption de son âme en aidant les Africains opprimés du village. Spencer et surtout sa femme apparaissent alors  comme les ‘méchants’ de l’intrigue.

Comment peut-on considérer Loyola ? Un assassin répugnant ou un bienfaiteur humanitaire ? La construction de l’épisode, dont le titre initial était "The Mercenary", fait inverser l’opinion de l’audience sur les personnages : le couple Spencer devenant détestable et Loyola/Porter plus humain. Ainsi, malgré ses crimes, le Père s’attire la sympathie de McGill, qui essaie de le sauver d’une éventuelle exécution, tandis que les Spencer ont un comportement odieux. Penelope Spencer pense d’ailleurs qu’il ne faut pas payer les travailleurs en plus car ils boivent avec l’argent (première scène) ! Condamné à l’exil par le conseil du village, Porter rentre à Londres avec McGill pour faire face à ses accusations.

Un bon épisode avec l’Afrique comme thème n’est pas monnaie courante dans les séries, mais cette histoire est une exception.  Il y a des acteurs de couleur (assez rares dans les séries ITC des années 60) et certains aspects du Secret font inévitablement penser à Petit gibier pour gros chasseurs, en particulier l’héritage de la colonisation sur l’empire britannique. Évidemment, les séquences supposées se passer en Afrique alternent entre du tournage en studio et du film recyclé, mais l’illusion est excellente.

L’histoire est portée par un impeccable duo d’acteurs invités, aux visages familiers. Patrick Allen est Marcus Spencer, personnage ambigu, et l’acteur a souvent joué des rôles de méchant (Le jeu s’arrête au 13 et Moran dans Le retour de Sherlock Holmes) mais également d’aimable businessman comme lors de sa participation à Thriller. Néanmoins, Colin Blakely est plus en évidence dans le rôle du Père en pleine rédemption. Son interprétation est prodigieuse, comme l’avait été celle du tortionnaire John dans le premier épisode de la série, Brainwash (également mis en scène par Charles Crichton). Comme Bradford, Blakely était issu de l’Actors Studio, et les deux hommes s’entendaient très bien, ce qui explique cette seconde participation.

 

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17. POURQUOI TUER NOLAN?
(WHY THEY KILLED NOLAN )

Critiqué sur quelques sites anglo-saxons pour ses incohérences, j’aime beaucoup cet épisode, qui a de grands moments. Certes, certains détails peuvent interloquer, mais n’est-ce pas le cas de n’importe quel épisode de série ? Nolan demande l’aide de McGill qui, on s’en doute à la lecture du titre, ne sera pas d’un grand secours. Il a pris des photos d’une femme dans une vaste propriété avant d’être poursuivi (séquence pré-générique) puis il a brûlé les clichés. Il implore McGill de l’aider à quitter le pays mais il refuse de révéler les raisons de sa peur sous prétexte de ne pas mettre en péril la vie du détective (‘Better blind than dead’). La comparaison de McGill, qui ne veut pas mourir sans savoir pourquoi comme un insecte écrasé, est cocasse. A contrecœur, il accepte et les deux hommes descendent à un hôtel. Peu après, McGill est assommé et son arme est utilisée pour abattre Nolan, qui murmure quelques mots au détective avant d’expirer. L’ex agent, recherché par la police, doit retrouver les meurtriers pour se disculper.

Le secret de Nolan, une des critiques à l’encontre de l’épisode, n’est effectivement pas aussi vital qu’il n’y parait. Il a photographié Mrs Arnoldson qui a participé avec son mari à un gigantesque fricfrac quelques années auparavant. Cette femme, consciente de l’infidélité de son époux, avait engagé Nolan pour le prouver. Reconnue, elle est un danger aux yeux de Mr Arnoldson, qui n’hésite pas à la supprimer dans une séquence dure, où elle est cernée par son mari, prêt à l’étrangler, et le chauffeur. Arnoldson, un ‘vieux beau’, peut ainsi prendre la poudre d’escampette avec la jeune et fraiche Angela. En s’appuyant sur les quelques bribes de phrases du mourant, McGill cherche désespérément en taxi un lieu, ‘Tylers Place’, qu’il finit par trouver. Il n’a plus qu’à planquer puis à suivre Arnoldson jusqu’à chez lui.

Quelques scènes intéressantes permettent de faire oublier les bizarreries du scénario : ainsi, pourquoi le mari a eu recours à la chirurgie esthétique pour changer de visage et pas sa femme ? Le meurtre brutal, mais suggéré, de Mrs Arnoldson est un temps fort, comme l’arrivée de McGill à Tylers Place où il fait la connaissance d’Angela en se faisant passer pour un représentant d’American Express. Surtout, le final dans la demeure cossue, entourée de paons qu’on entend souvent pendant l’épisode, est un grand moment de la série. Longue - près de dix minutes -, la partie de cache-cache dans l’obscurité, arme au poing, entreprise par Arnoldson et McGill, est prenante et très bien filmée ; chacun des protagonistes semblant tour à tour avoir l’ascendant. Arnoldson n’hésite pas à utiliser le corps de sa femme pour tenter de piéger McGill.

Il n’y a pas d’acteur transcendant, aucune figure connue ayant participé aux Avengers en tout cas. On reconnaît le chauffeur de taxi, Harold Goodwin, qui fut le sergent Foley, le soldat en extase devant La Vénus disparue. Le chauffeur est Duncan Lamont qui est un villageois dans L’enlèvement. Il joua aussi dans The Avengers (Le visage) et Amicalement vôtre et il décéda sur le tournage d’un épisode de Blake's Seven. Quant à Nike Arrighi (Angela), elle reviendra pour une seconde aventure. Actrice née à Nice, elle eut le privilège de tourner dans un film avec Belmondo (Stavisky) pour son dernier rôle. A noter que le nouvel appartement des Nolan se trouve à proximité de Pennant Mews et la réponse du client de l’hôtel lorsque la jeune directrice lui demande de se conduire en homme : ‘I’ve never wanted to be !’.

Why They Killed Nolan est un très bon divertissement agrémenté d’un excellent final, ce qui fait oublier les quelques imperfections.

 

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18. LES QUATRE DE BOSTON
(THE BOSTON SQUARE)


Cette aventure est autant encensée par les critiques anglo-saxonnes que la précédente était critiquée. Je vais prendre le contre-pied, car je juge The Boston Square, truffé d’erreurs de continuité, bien inférieur à Why They Killed Nolan. Et dire qu’un lecteur d’imdb considère l’épisode comme le meilleur de la série. Wouaf, nous n’avons pas les mêmes valeurs….

McGill est engagé par une importante compagnie londonienne pour retrouver Dalby, un océanographe, qui a disparu avec en sa possession des documents confidentiels sur la culture sous-marine en Adriatique (rien de folichon !). Le détective le retrouve à Corfou, tiraillé a priori entre des agents des deux bords, en particulier des Albanais, intéressés par le rapport. La fuite de Dalby cache en fait une mission secrète qu’il doit accomplir avec l’agent Packard de la CIA : l’obtention des plans d’une base de sous-marins chinois dans l’Adriatique. L’intrigue est de l’espionnage pur mais, contrairement à James Bond, la fin n’est pas rose pour les ‘innocents’ :Dalby et Packard sont prisonniers en Albanie et ils n’intéressent plus les autorités (‘Plainly, McGill, we never heard of them!"). Une histoire où tous les protagonistes se soupçonnent et McGill, un peu déboussolé, a surtout le mérite de sauver sa peau. Aucune séquence ne ressort de l’épisode ; la seule scène d’action étant l’attaque sur McGill lors de sa visite nocturne sur le bateau (Bradford est doublé), où l’ex agent manque de se noyer. 

La Grèce est parfaitement restituée et les vues des côtes et des villages grecs pittoresques sont, encore une fois, très bien utilisées pour compenser les scènes en studio. Il n’en est pas de même lors de la première séquence post-générique sur le golf, qui alterne studio et extérieurs, exactement comme Le jeu s’arrête au 13. D’ailleurs, le terrain semble être le même.

Deux reproches à McGill/Bradford : la tenue récurrente, chemise en velours bleue ou verte, pas très classe comparée aux accoutrements antérieurs du détective. Et puis, évidemment, la cigarette qui semble scotchée à ses lèvres ; rien que pour cela, la série ne risque pas d’être rediffusée, à moins d’y mettre un avertissement comme il y a sur tous les paquets de cigarettes.

Dans la distribution, on remarque de suite Peter Arne dans le rôle du sinistre Rudnik, l’agent albanais ; il est Pasold dans Avec vue imprenable. Il interpréta de nombreux rôles de méchants et son assassinat dans son appartement londonien en août 1983 n’a jamais été résolu. Pas de femme dans ce sombre opus à part Miss Lamb, la ravissante secrétaire de Dalby aux formes généreuses, présente lors de la première scène: c’est Alexandra Stevenson, une illustre inconnue. Don Chaffey, qui doit surtout la gloire à sa participation à Destination danger et Le prisonnier, réalise un travail honnête pour sa seule contribution à la série. Quant à Peter Brace (Marco, l’homme de main de Rudnik), il n’est pas crédité. Il avait déjà eu une grande confrontation avec Bradford/McGill dans Des apprentis terreurs.

Cet épisode pur espionnage est moyen et son histoire confuse se rapproche beaucoup plus de l’univers froid et réaliste de John Le Carré que des paillettes de James Bond. D’ailleurs, la dernière scène est sûrement la plus intéressante, car elle transmet la lugubre réalité du monde impitoyable de l’espionnage. Une atmosphère qui sera développée dans l’intrigue suivante, cette fois-ci un véritable chef-d’œuvre…

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19. QUI PERD GAGNE
(SOMEBODY LOSES, SOMEBODY... WINS?)

C’est indéniablement mon épisode préféré. L’intrigue a toutes les qualités pour satisfaire les fans d’histoires d’espionnage, dont je fais partie, en reprenant la trame d’un roman référence du genre, L’espion qui venait du froid de John Le Carré. Toute personne qui a lu ce palpitant récit, publié en 1963 - quatre ans avant le tournage de l’épisode -, a fait inévitablement le rapprochement.

À Londres, McGill est approché par Ernst Liebkind, un importateur d’appareil-photos, afin qu’il se rende à Dresde pour y rencontrer un fabricant. C’est sa couverture, car il doit en fait retrouver son frère, Johann, disparu pendant cinq ans et violoniste à l’orchestre symphonique. McGill accepte à contrecœur connaissant les risques (son prix exorbitant est accepté à son désarroi) : ‘East Germany is not the safest place on earth’. Il rencontre Ruth Klinger, une ancienne conquête (encore une !), mais elle est aussi un agent britannique qui est passée à l’Est. Elle est mise à l’essai par le Kommandant qui la charge de surveiller McGill. Ce dernier, soupçonneux, échappe à la vigilance de la belle et trouve l’appartement de Johann Liebkind, qui prend la fuite en le voyant. Il réalise progressivement que l’histoire du frère disparu cache un plan bien plus machiavélique. Quand Ruth l’amène à un Bierstube où ce frère tant recherché joue du piano, McGill comprend la situation et l’ingéniosité avec laquelle il a été manipulé. Il plante Ruth et rentre à l’hôtel, décidé à faire sa valise pour Londres. Lorsque sur place l’agent américain le renseigne sur l’opération, McGill est obligé de revenir sur sa décision pour ne pas condamner Ruth. En effet, celle-ci n’a pas trahi sa patrie et sa mission est de se faire accepter comme transfuge par les autorités de la RDA pour pouvoir, par la suite, renseigner les services de sa Majesté. Pour ce faire, elle doit réussir le test et le plan des Britanniques est de sacrifier Johann Liebkind, supposé nazi, et McGill afin d’établir un lien entre les services secrets américains et les nazis. Contre 25 000$, McGill, accompagné de Ruth Klinger, se rend chez Liebkind, alors que deux agents est-allemands sont également sur les lieux.

McGill est le petit pion dans une opération d’envergure visant à installer une taupe crédible à l’Est. Il modifiera les plans, ce qui lui permettra d’échapper à l’ennemi et de repasser à l’Ouest dans une séquence éblouissante. Les chances de Ruth Klinger ne sont pas compromises pour autant mais elle devra passer un autre test et prouver sa loyauté. Cet épisode est excellent car il est construit dans les grandes lignes comme le roman de référence du genre, L’espion qui venait du froid. McGill n’a pas été attiré à Dresde pour être piégé, comme il le suspecte, mais surtout pour cimenter la loyauté de Ruth Klinger auprès des autorités est-allemandes. Lorsque Johann Liebkind est abattu, McGill doit quitter le pays au plus vite. Contrairement au roman, la taupe est une femme et le pion McGill réussira à revenir à l’Ouest, alors que Leamas est tué en franchissant le Mur dans le bouquin de Le Carré.

J’estime d’autant plus l’épisode que ma connaissance de l’Allemagne de l’Est à l’époque du Mur me permet d’apprécier les détails crédibles contés dans l’histoire. Ainsi, lorsque Ruth Klinger est arrêtée alors qu’elle prend des photos d’installations militaires, de soldats et de la frontière à Berlin. Il était en effet interdit de prendre des clichés dans certains secteurs proches du Mur et la scène du début où Ruth est questionnée dans une pièce à part est également crédible ; je l’ai moi-même vécu avec un officier me demandant de vider mes poches sur la table. La file d’attente derrière une vitre en plastique, le passeport, la question du planton pour savoir si on parle allemand, l’interdiction de quitter Berlin-Est sans en avertir la police (parfois la raison de notre visite), le coup de tampon…puis la discussion au parc plutôt que dans un café. Tout est juste et rien n’est inventé ; mes connaissances à Berlin-Est préféraient aussi les espaces aux endroits confinés car la Stasi - le ministère de la sécurité d’état - employait de nombreux civils, occasionnellement ou en permanence, et il régnait une certaine paranoïa.

L’épisode ne fut pas tourné en RDA, mais pourtant, comme c’est pratiquement le cas pour chaque destination, les subterfuges employés donnent l’impression que la production a tourné derrière le Rideau de fer. Les scènes en studio sont vraisemblables et les décors réalistes : la cabine de contrôle à Berlin-Est (avec un dialogue en allemand non traduit à l’arrière salle), le Dresdner Hotel (et la porte du téléphone (Öff. Fernsprecher’), le bureau avec les tableaux de Karl Marx et Che Guevara, le taxi noir de marque soviétique Volga, que McGill emprunte pour aller à ‘Damenstrasse’ (véritable taxi en RDA dans les années soixante), la typique Bierstube avec la chanteuse et les ruines autour du logement de Johann Liebkind, qui font penser au décor utilisé lors du final de Mes funérailles à Berlin (1966). Egalement crédible vu que la ville fut rasée pendant la guerre. Le gouvernement est-allemand n’avait pas prévu par exemple de reconstruire la Frauenkirche de Dresde mais de laisser les ruines dans leur état et d'en faire un monument commémoratif.

Les extérieurs sont des images d’archive insérées : la porte de Brandebourg, Ebertstraße, les barbelés et les gardes frontières (toujours en duo) à Berlin et le palais Zwinger à Dresde. De longues séquences sont tournées autour des studios Pinewood avec toujours le sens de la crédibilité : les jardins Heatherden Hall représentent le parc de Dresde, où les discussions McGill/Ruth sont enregistrées (alors que l’ex agent pense que c’est le seul endroit de la ville sans micro), et la forêt à la frontière est encore une fois Black Park, utilisé aussi dans les mêmes circonstances lors du tournage des New Avengers. Plus conventionnel, la première vue post-générique montre l’angle Oxford Street/Marble Arch puis Regent Street. 

L’épisode est constitué de plusieurs scénettes, et aucune n’est fastidieuse car elles s’insèrent toutes admirablement dans le récit. Deux séquences primordiales de l’aventure prédominent : la révélation au Bierstube et la fuite de McGill pour rejoindre l’Ouest. Les trois thèmes de l’épisode sont la manipulation, la trahison et le sentimentalisme (sur la même mélodie musicale qu’avec Taiko). Ruth appelle d’ailleurs Mc Gill : ‘Mac’ à leur retrouvaille, ce qui est rare dans la série. Il y a quelques clins d’œil à James Bond - le champagne, le disque vinyle truqué et surtout l’écran de fumée de la voiture, le seul gadget de la série-, mais l’atmosphère et le rythme appartiennent sans partage à John Le Carré et Len Deighton. A noter qu’on apprend que McGill ne s’intéresse pas à la politique et qu’il parle mieux l’allemand que l’espagnol !

Jacqueline Pearce est remarquable dans le rôle de Ruth Klinger, l’agent double et ancienne maitresse de McGill. L’actrice, qui se perfectionna à RADA et à l’Actors Studio, a également joué dans The Avengers (Marianne Gray dans L’économe et le sens de l’histoire), Destination danger, mais son rôle dans la série de science-fiction Blake's Seven (1978-81) fut le plus marquant. Elle participa également à l’épisode Sweet Sue (Miss Brown) où elle n’a qu’une seule scène, avec Richard Bradford.

Philip Madoc, le Kommandant, a joué dans cinq épisodes des Avengers et de nombreuses séries britanniques et il reviendra dans une seconde aventure. Il soutient activement le parti nationaliste gallois, le Plaid Cymru. Madoc explique avoir surtout joué des rôles de méchants du fait de son physique ténébreux, ce qu’il ne regrette pas car, selon lui, ce sont les meilleurs ! Wendy Hall, la réceptionniste de l’hôtel, avait un rôle plus conséquent dans Des apprentis terreurs. Bettina Jonic, la chanteuse du Bierstube, n’a pas fait d’autre apparition, mais elle est connue dans le monde musical pour son interprétation de Bertolt Brecht. A noter, toujours dans un souci de crédibilité, que deux acteurs de la distribution sont nés à Berlin !

Cet épisode est l’incontournable de la série et marque les débuts du réalisateur John Glen, qui travaillera ensuite sur cinq James Bond. Il ne retournera plus malheureusement sur la série car il avait dépassé largement le budget et le temps imparti sur cet épisode. Le final montre McGill marcher seul, la valise à la main, dans la forêt, écœuré par ce sale boulot qu‘il croyait avoir quitté, mais une connaissance, qu’il ne reverra plus,  l’a fait se replonger dedans.

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20. L'AVEUGLE
(BLIND SPOT)

McGill fait escale à Paris pour une aventure rocambolesque et intrigante.  Evidemment, le tout est tourné aux studios Pinewood et aux alentours, mais l’ensemble est convaincant. La proximité des jardins Heatherden Hall, le parc de Dresde dans l’épisode précédent, permet de symboliser ici les jardins des Tuileries. Le premier insert montre la Tour Eiffel, puis suivent les Champs-Elysées, le Sacré-Cœur, Notre-Dame et la rue de Rivoli (où McGill est censé consulter un bijoutier). Louis XI et Notre-Dame de Cléry sont également évoqués dans la scène d’introduction.

Une jeune femme, partiellement aveugle depuis sa naissance, est témoin de l’assassinat de sa mère adoptive, qui a le même handicap qu’elle. Des bijoux inestimables, dont une tiare, ont disparu et McGill répond à une petite annonce d’un journal, qui offre une récompense. Marcelle Robart vit recluse dans une villa, avenue Foch, et l’ex agent essaie de lui redonner goût à la vie. Elle tombe sous son charme dans une longue scène improbable et pénible de dispute et d’amertume qui se termine par un baiser. Sacré tombeur ce McGill ! On ne sait pas si cela reste platonique, mais, en tout cas, le détective appelle ensuite la jeune femme par son prénom.

McGill est d’abord surpris par la véhémence de la police française et de l’oncle de Marcelle à vouloir le dissuader de poursuivre l’enquête. Le détective découvre alors que les fameux bijoux volés ne sont que du toc et que les soirées pour aveugles apparemment innocentes – le seul contact de Marcelle avec le monde extérieur - sont en fait le théâtre d’un vaste trafic de drogues. Si le début est commun et un peu fade, l’intrigue s’anime pour nous offrir un final palpitant et réaliste. Le vieil oncle, Henri Thibaud, est capable de tirer deux coups avec sa canne (pas de mauvais jeu de mots !) dans une superbe scène d’action, tandis que Marcelle reconnaît le meurtrier complice grâce à son pas dans les escaliers. Le dernier passage s’attarde sur la condition de la jeune aveugle qui, horrifiée par les affres de l’existence, se voue à la solitude avant que McGill ne la pousse à profiter de la vie. Une fin optimiste, qui contraste avec de nombreuses plus sombres. A noter des passages en français, non sous-titrés, mais au fort accent anglais…

Il n’y a pas de têtes Avengers très connues dans cet épisode, mais Felicity Kendal, alors âgée d’une vingtaine d’années, personnifie la jeune femme aveugle avec exactitude et fraicheur. L’actrice, très appréciée en Grande-Bretagne, est surtout célèbre outre Manche pour le théâtre et elle fut élevée au rang de Commander of the Order of the British Empire (CBE) en 1995. Elle publia ses mémoires, White Cargo, en 1999. Si vous avez une bonne vue (et mémoire), vous reconnaitrez Leon, le portier; c’est Keith Marsh, un des deux clochards du Monstre des égouts, tandis qu’un des deux agresseurs du détective est Frank Maher, la doublure de Patrick MacGoohan dans Le prisonnier. En fait, la figure la plus connue est celle de Derek Newark, Rudy le ‘brave’ garde d’enfant illettré dans All That Glitters/L’enlèvement. Il est ici le policier ‘Maurice’ et il participa à trois Avengers (dont Bons baisers de Vénus).

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21. UN INCONNU
(NO FRIEND OF MINE)

Après deux épisodes plaisants en Allemagne de l’Est et à Paris, on retourne en Afrique pour une aventure ennuyeuse et bavarde, bien loin de l’intensité des deux opus précédents. Contrairement à The Whisper, dont l’action se situe également sur le continent africain, No Friend of Mine suscite peu d’intérêt, avec une intrigue inconsistante et une distribution quelconque.

McGill travaille pour Garfield Cameron, le propriétaire d’une compagnie minière, dont l’exploitation subit des actes de sabotage. Cameron soutient Masuto, le politicien local, pour l’indépendance du pays imaginaire, Kalunga. De son coté, James Baldwin, le gendre, commet avec l’aide de Turner ces attaques dans le but de discréditer Masuto et de retarder l’indépendance. McGill sert de ‘tampon’ entre Cameron et Masuto et il doit éviter les sbires de Baldwin. Initialement désavoué, Mc Gill reçoit la visite de Cameron qui lui demande d’empêcher un bain de sang : la fermeture des mines entraine un début de révolte et l’état d’urgence est décrété.

Voir McGill agir en ‘terroriste’, dans la scène pré-générique, est assez incongru, mais on apprend rapidement que l’ex agent est infiltré dans les forces de sécurité du site pour démasquer les coupables. Une histoire politique bien ancrée dans les années 60 et la fin de l’empire britannique avec des ‘méchants’ qui n’acceptent pas le départ et l’abandon de leurs privilèges (Petit gibier pour gros chasseur a le même thème). Le passage le plus intéressant, et dramatique, est le final. Telle une pâle reprise de celui du film Zoulou, les travailleurs noirs se rebellent et la garde blanche fait face. Pendant les échauffourées, Cameron est tué accidentellement et la dernière image montre sa fille crier son malaise à son mari : ‘Murderer, murderer, murderer !’

Parmi les interprètes, notons Allan Cuthbertson (Turner), qui joua dans quatre épisodes Avengers dont les célèbres Mort en magasin et La porte de la mort. Sinon, Harvey Hall (Bates) a fait trois petites apparitions Avengers et Peter Halliday (Baldwin) est le Français Perrier dans Je vous tuerai à midi. Quant à Philippa Gail (Patricia), une des plus belles femmes de sa génération, elle aurait mérité une carrière plus riche, interrompue trop tôt par un cancer.

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22. LE FAUX FUYANT
(JIGSAW MAN)

Tout bon ou tout mauvais pourrait être le critère de la série. Jigsaw Man est une comédie burlesque, le plus souvent stupide, comme l’est Le legs pour les Avengers. Cet épisode loufoque accumule les excentricités et il n’est pas représentatif du ‘sérieux’ de Man in a Suitcase. 

McGill est employé par Ugo, un comte italien fortuné, pour retrouver Silvio, son jeune frère, afin de le faire hériter d’une conséquente somme d’argent, à condition qu’il signe un document. L’action ramène le détective à Londres, où Silvio, qui vit avec une communauté d’artistes, décline l‘offre. De son coté, Ugo a envoyé deux truands pour s’assurer que la signature est apposée sur les papiers.

Seulement le début, heureusement, se passe en Italie (à Naples) et une voix-off, un peu comme Qui suis-je???, situe l’action (‘Swinging London’) par trois fois inutilement. Il n’y a pas d’intrigue, rien ne se passe et le ton de l’épisode ne sied pas à la série. Dès la scène d’introduction guignolesque et l’emploi d’une musique inhabituelle au piano, comme pour les films muets, l’audience sait à quoi s’attendre. Certaines critiques britanniques le comparent à Homicide et vieilles dentelles, c’est dire…Je me suis demandé si je devais le classer comme le plus mauvais de la série à ce stade. Pour les quelques touches humoristiques convenables et les jolies filles présentes, je laisse The Man Who Stood Still en lanterne rouge.

En ce qui concerne la pauvre distribution, Ugo est Maurice Kaufmann, qui fut l’époux d’Honor Blackman. Il a joué dans Ivanhoé, Destination danger, Le Saint (deux épisodes), Thriller et La danse macabre des Avengers. John Bluthal est Ivenko d’Un Steed de trop. Parmi la brochette de ‘girls’ – quatre actrices pour compenser la platitude du script -, on remarque surtout la Néo-zélandaise Bridget Armstrong (Louise Baines) et Nike Arrighi, déjà vue dans Why They Killed Nolan, lors de la séquence pré-générique.

A voir la première rencontre McGill/Louise Baines et la dernière scène, lorsque McGill s’enfuit quand sa girlfriend du moment lui offre un emploi à l’entreprise de son père. Un scénario écrit pour la mauvaise série. Episode dispensable.

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23. QUATRE CONTRE UN
(WEB WITH FOUR SPIDERS)

Dr James Norbert, un avocat américain renommé en conseil, est victime d’une machination et une série de photographies compromettantes – le représentant éméché dans un bar, au milieu de poubelles et avec une prostituée -  le contraint à faire appel au service de McGill, pour qui il a peu de considération vu son passé. Un thème de l’épisode, car l’ex agent est, en fait, bien plus attaché à l’honneur et la dignité que le sera Norbert lors du final, dans un monde où le gouvernement, les groupes de pression, les criminels et les agents secrets semblent avoir la même morale.  

Au cours de son enquête, le détective est aux prises avec des gangsters et des espions anglais, allemands et américains, ce qui l’intrigue fortement. Il est persuadé que Norbert ne lui a pas tout dit. Soutenu par Martha, sa fille, l’avoué ne fait pas entièrement confiance à McGill, mais celui-ci apprend néanmoins qu’aucune demande d’argent n’a été faite pour les photos. Il est simplement demandé à Norbert de supprimer une partie de son rapport sur l’exploration de l’espace. Un groupe de pression veut retarder les conclusions du compte-rendu et utilise le chantage pour arriver à ses fins. Le juge doit choisir entre ses idéaux et sa réputation. McGill se retrouve une nouvelle fois entre deux feux et tente l’impossible. Le message de McGill (et de la série) est qu’on ne gagne pas forcément mais qu’on doit néanmoins se battre pour ses idées quelque soit les chances de succès.

Au moment du tournage de l’épisode, la conquête de l’espace battait son plein et l’intrigue est quelque peu obsolète de nos jours. Après deux aventures à zapper, celle-ci, sans être inoubliable, renoue néanmoins avec les critères de la série ; l’histoire est alambiquée et la fin n’est pas une ‘happy end’ traditionnelle de séries des années 60.

Les meilleurs passages sont le court voyage en train, la visite de McGill au Gullivers à Manchester – bagarre, jeu de mots osé sur Digby - et le final où le détective encaisse un sérieux échec dans un plan foireux. Le début est bavard et laborieux (l’entretien McGill/Norbert dure cinq bonnes minutes), mais l’épisode se laisse suivre, sans pour autant rivaliser avec une autre histoire de chantage, Essay in Evil. L’action se passe en Grande-Bretagne - Manchester et Londres - et il est regrettable que certaines scènes – la rencontre Croft/McGill à Trafalgar Square – aient été tournées en studio avec un film en arrière-plan. Sinon, pour ceux qui ne connaissent pas, il n’y a pas d’erreur de continuité car la gare de Manchester s’appelle bien …Piccadilly depuis 1960.

John Savident, qui joue le propriétaire de la boite, Joe Gulliver, fut policier à Manchester avant d’être acteur. Il se rappelle de la seule scène qu’il eut avec Richard Bradford, une prise effectuée aux studios Pinewood, avec des termes pas très élogieux pour l’acteur vedette. Il juge que le jeu de Bradford n’était qu’une pâle imitation de celui de Brando. La scène qu’il devait jouer fut difficile car Bradford parlait très doucement, comme s’il murmurait, en bougeant à peine les lèvres. En plus, l’acteur avait un rhume ce jour-là et Savident ne savait pas lorsqu’il avait terminé de parler !

Il y a deux visages connus des fans des Avengers. L’acteur irlandais Ray McAnally (La dynamo vivante, Mais qui est Steed ?) est l’avoué au penchant prononcé pour l’alcool. Il est le plus en vue de l’épisode et sa composition est excellente. Le juge digne perd de sa prestance et se plie aux exigences des maitres-chanteurs et la dernière image le montre fixant une bouteille de whisky. Simon Oates (Meurtres à épisodes, Le document disparu, Otage) interprète ici Simon Croft, personnage nébuleux d’un puissant lobby. En 1971, il fut John Steed au théâtre. Quant à Warren Stanhope, il reprend le rôle de l’agent américain Johnson de l’épisode en deux parties.


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24. QUELLE DIRECTION, McGILL?
(WHICH WAY DID HE GO, McGILL?)

Enfin un excellent épisode après trois mauvais ou moyens. A l’instar de Colin Blakely, le retour de Donald Sutherland est gagnant dans cette aventure qui a laissé l’espionnage de côté. Une histoire de gangsters prenante, finement interprétée, qui est un classique de la série.

Cinq ans auparavant, un gang a dérobé des lingots d’or et, seul, Keith Earle s’est fait prendre. A sa sortie de prison, il recherche ses partenaires pour avoir sa part et les abat un à un, se faisant justice à défaut de récupérer le fric. McGill se trouve mêlé à l’affaire par l’intermédiaire d’Eddy, un garagiste qui possède un cliché de la bande pris quelques jours avant le casse. Contre 10% du butin de la compagnie d’assurances, McGill se lance sur la piste d’Earle et de l’or, mais Scotland Yard est aussi sur le coup. Trois truands, et également une femme, Joy, une employée du garage, sont sur la photo, et McGill fait agrandir le document. A deux reprises, Earle devance le détective et trucide ses complices. Il reste le dernier acolyte, un certain George, qui s’est emmouraché de Joy (Jennifer Jayne). Cherchez la femme pourrait être le titre de l’épisode, car McGill et Earle se retrouvent dans le haras de la dame pour une sévère explication. Joy a fait disparaître le dernier membre de la bande, qui était en possession du butin, a mené la belle vie et essaie de monnayer, en vain, le pognon qui reste avec le détective.

Le personnage de Sutherland est diamétralement opposé à celui de la première participation de l’acteur à la série. Dans Day of Execution, il est Willard, un ami d’enfance de McGill, soulard et poltron. Ici, Keith Earle est un tueur cynique et impitoyable qui se déplace en moto. Earle est un des meilleurs méchants de la série avec ce comportement démentiel et un rire sinistre et sauvage adéquat. Chacune de ses répliques fait mouche: ‘I’ve already killed two people and I’m not superstitious about three!’ Deux superbes prestations de Sutherland dans deux excellents épisodes ; l’acteur allait devenir une vedette internationale contrairement à Richard Bradford. Le point commun d’une partie de la distribution est le film Son of Dracula (1974). Le réalisateur est aussi Freddie Francis (quatre épisodes de Man in a Suitcase), la scénariste est Jennifer Jayne. Connue surtout dans les années 50, cette actrice britannique a fait de nombreuses apparitions dans les films d’horreur de la Hammer. Elle écrivit aussi des scénarii (comme Son of Dracula) sous le pseudo Jay Fairbank. Jennifer Jayne se souvient du tournage de l’épisode et de la ‘magnifique’ bagarre qu’elle a avec McGill/Bradford et des quelques bons coups qu’elle a donnés ! Joy drague McGill (dans la longue séquence de la première rencontre) et elle se balade plus tard en petite tenue assez longuement pour être remarquée, bien qu’elle ne soit pas dans mon top three des McGill’s Girls ! A noter aussi la participation dans Son of Dracula de Rachelle Miller (une carrière à seulement trois petits rôles), qui est la modèle du photographe.

Il est difficile d’extraire quelques scènes de cet excellent épisode, mais il ne faut pas rater Earle, à la gare et dans le train, qui sème le policier (la séquence pré-générique), les visites de McGill chez Douglas, un photographe très Avengeresque ; il a une modèle en bikini mais il ne dédaigne pas interrompre sa tâche pour aider McGill dans son enquête. Passer de photos de garages à une modèle n’est qu’un changement de châssis pour le photographe! Evidemment, le dernier quart d’heure dans la ferme est superbe par le décor et le suspense, agrémenté de deux scènes d’action. McGill désarme Joy puis l’échange de coups de poings dans la cour avec Earle est une des grandes bagarres de la série. A l’occasion, on remarque que Sutherland (ainsi que la doublure) est bien plus grand que Bradford. Il ne reste qu’à retrouver ce qui subsiste du butin…

Le tournage en extérieur est un autre atout de cet opus ; Leys Farm dans le Buckinghamshire est la propriété de Joy, tandis que le club de golf est celui de Denham. Episode fortement conseillé !

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25. VENTE AUX ENCHÈRES
(PROPERTY OF A GENTLEMAN)

Les histoires de doubles sont toujours des épisodes particuliers, avec de bonnes et de mauvaises surprises. Celui-ci est dans la moyenne, mais il fait penser par certains côtés au léthargique Mademoiselle Pandora.

Chester Farson est un millionnaire reclus en fin de vie, mais ses fils ont paré à toute éventualité en lui trouvant un sosie, un acteur shakespearien porté sur la boisson (séquence pré-générique). Ils n’ont pas mis dans la confidence leur sœur, Jane, qui s’émeut en voyant le tableau préféré de son père aux enchères. La peinture est d’ailleurs vraiment un Cézanne (photo) ; son nom n’est pas Property of a Gentleman mais Still Life with Peppermint Bottle et elle se trouve à la National Gallery of Art à Washington. La vente aux enchères se déroule à Burlington Arcade sur Piccadilly, une galerie marchande londonienne couverte et aménagée en 1819, qui regroupe une quarantaine de magasins haut de gamme. Pour clore le chapitre ‘locations’, les jardins de la propriété sont encore ceux de Heatherden Hall, bien rentabilisés.

Jane Farson a donc engagé McGill pour résoudre ce mystère vu que son père, à son grand désarroi, refuse de la voir. Le détective réussit à rencontrer Chester Farson - le faux car l’authentique est déjà décédé d’une crise cardiaque – mais la description qu’il en fait à Jane (buveur de brandy, séjour aux Etats-Unis) met un peu plus la jeune femme dans le doute. C’est en allant sur place que la supercherie est découverte ; une subtile machination conçue du vivant de Farson père…pour échapper aux droits de succession pendant cinq ans. Jane, trop émotive, n’a pas été mise dans le secret. Quant à McGill, on lui propose un tableau pour garder le silence et il choisit un Modigliani (ndlr : la femme à la cravate) : ‘Take your pic, McGill’.

C’est une histoire gentillette, sans prétention ni véritable méchant, à la fin, comme toujours, particulière, car la famille se retrouve avec deux cadavres sur les bras, et McGill refuse de les aider (‘I don’t have an ice-box big enough to help you’). Le double personnage Chester Farson/Gray monopolise trop l’écran par des monologues redondants. En tout cas, une intrigue plausible surtout sous un gouvernement socialiste faisant feu de tout bois…  En 1967, les droits de succession pour les riches étaient donc un sujet d’actualité en Grande-Bretagne !

Il est à noter que le scénariste Wilfred Greatorex fit retirer son nom du générique, peut-être pas satisfait du résultat. Parmi les acteurs, on remarque surtout Terence Alexander (Gerald Farson), l’irremplaçable des séries britanniques, vu, entre autres, dans The Avengers (trois épisodes dont Voyage sans retour et Meurtres distingués), Amicalement vôtre, Mission casse-cou, The New Avengers . Il confia qu’il n’avait pas beaucoup de souvenirs du tournage, mais il se souvint que Richard Bradford était de l’Actors Studio et il a éprouvé des difficultés à tourner avec lui. Alexander n’entendait pas ce que Bradford disait lorsqu’il murmurait (ce n’est pas le premier acteur à donner cet avis), mais, diplomate, il ajouta que c’était son style et qu’il le faisait très bien. Jane Farson est interprétée par Justine Lord, une habituée du Saint (sept épisodes) mais qu’on vit aussi dans Le prisonnier et elle a disparu de la circulation au début des années 80.

Un divertissement honnête mais cet épisode ne fait pas partie des meilleurs de la série.

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26. LES RÉVOLUTIONNAIRES
(THE REVOLUTIONARIES)

Dr Maza, un dissident politique, est en exile en Europe avec sa fille Chantal afin d’échapper au colonel Haider, qu’il tient pour responsable du meurtre du président de son pays et qu’il soupçonne de fomenter un coup d’état pour prendre le pouvoir. Il a écrit ses mémoires, révélant la vérité, alors que le colonel a retrouvé sa trace en Suède. Maza demande à McGill de ramener sa fille et le manuscrit à Londres, mais le détective tombe dans un piège et Haider se retrouve en position de force, avec otages et mémoires. McGill ne peut compter que sur le soutien de l’éditeur de Maza, la ravissante Toni Olsen. Seul, l’ex-agent retourne au secours de Maza et de sa fille avant que Haider ne les exfiltre vers l’Afrique du Nord. 

L’aventure suédoise met McGill au cœur d’un conflit d’intérêt d’un état africain fictif, comme dans The Whisper et No Friend of Mine. L’action se déroule exclusivement en Suède, à Stockholm et aux abords d’un lotissement coquet près d’un lac à une centaine de kilomètres de la capitale. L’habitation est en bois, style Ikea, et le titre du livre lu par la jeune femme est en suédois. De toute façon, l’illusion est parfaite, car le tournage eut lieu à Hambleden Mill dans le Buckinghamshire. Il n’y a pas non plus d’acteur arabe mais là encore, le subterfuge fonctionne (l’accent est là en VO), bien mieux que la personnification de personnages asiatiques dans les Avengers. Il faut aussi savoir que le changement du sens de la circulation eut lieu en septembre 1967 en Suède ! Néanmoins, la quasi-totalité des véhicules utilisés dans le pays était déjà configurée pour la circulation à droite, c'est-à-dire avec le siège conducteur à gauche. Par conséquent, les véhicules ont le siège conducteur à droite dans l’épisode, comme en Angleterre, et c’est une erreur de continuité !

C’est une solide histoire de conspiration politique et McGill est de nouveau pris entre factions opposées. L’intrigue n’est pas avare de séquences mouvementées, et le détective effectue même une poursuite au volant de la légendaire Volvo blanche P1800 de Simon Templar, peut-être empruntée au studio d’à-côté ! Lorsque McGill et Olsen rentrent dans l’appartement, Yuseef les attend et la bagarre – en deux temps – est excellente. Evidemment, le clou de l’épisode est la fusillade où McGill utilise avec dextérité une mitraillette pour liquider deux ‘vilains’. La fin est positive et le tour de passe-passe d’échange des deux ennemis est jubilatoire. Dans le côté négatif, les scènes avec l’ambassadeur et les deux fils du président assassiné sont laborieuses.

L’autre facette intéressante de l’aventure est le ‘politiquement incorrect’ de quelques dialogues, qui bannirait l’épisode d’une éventuelle rediffusion. Ainsi, Maza souligne que Chantal possède un passeport français, mais celle-ci s’empresse de préciser : ‘French nationality but I’m an Arab like you’. Tellement d’actualité ! Plus tard, le traitre Yuseef à Maza : ‘Why do you use Christian mythology, doctor ? We’re Arabs !’. Encore plus fort lorsque McGill reproche à Haider, et aux Arabes, de menacer les femmes pour s’en sortir, le terroriste répond : ‘I think your western ideals of emancipation give a false value to a woman’s life’. Celle-ci mérite une traduction : ‘Je pense que vos idéaux occidentaux de l’émancipation octroient une valeur erronée à la vie d’une femme’. Une telle réplique, pourtant révélatrice, provoquerait l’ire de bien-pensants. A noter également les termes employés par McGill pour s’assurer que le garde arabe ne comprend pas l’anglais :’You stupid pig’. Je vous dis, du politiquement incorrect, à choyer, car introuvable de nos jours dans les productions aseptisées. A noter aussi que la CIA est mentionnée, souvent sous-entendue jusqu’alors, et McGill se permet dans sa réponse à Maza de critiquer l’action de l’agence : “Well, that sort of backfired on us, too.”

Côté distribution, le méchant, le colonel Haider, est interprété par Ferdy Mayne, qui a souvent joué des rôles similaires dans des films britanniques des années 50 à 70. Un de ses personnages les plus connus est dans Le bal des vampires. Il est le baron von Orlak dans le piètre Legs. Les deux jolis minois de l’épisode n’ont pas fait de longues carrières ; la brune Sonia Fox (Chantal) a joué dans les séries Destination danger et Le Saint, tandis que la blonde Marga Roche (Toni Olsen) n’a qu’un seul autre rôle à son actif, celui d’une masseuse suédoise dans une comédie d’espionnage, Some Girls Do, qui rassemble un parterre de beautés comme Yutte Stensgaard et Joanna Lumley.  Elle est simplement attirante et on comprend l’impatience de McGill pour la retrouver au petit déjeuner…

A découvrir en vidéo car vous ne risquez pas de voir cet épisode sur nos chaines formatées…

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27. QUI DEVIENT FOU?
(WHO'S MAD NOW?)

McGill est contacté par Joan Heinemann, une de ses ex (encore une!), sept ans après son mariage. Elle se dit persécutée par une mystérieuse femme blonde, pendant que Jason, son mari, pense qu’elle perd la raison. La disparition de son caniche adoré –en fait, balancé dans le fleuve dès le début - renforce les convictions de Joan. Sommé de laisser tomber l’enquête par l’époux, apparemment jaloux, McGill fait suivre Jason, qui a une superbe maitresse. Alors que l’affaire semble résolue, le détective découvre que Joan a un passé troublant et qu’elle consulte régulièrement un psychiatre.

Cet épisode n’est qu’une petite histoire de détective privé et on devine rapidement les aboutissements. Le mari a une maitresse très jolie, Diane, et il a essayé de faire souscrire à sa femme une assurance pour toucher ses biens. Tout est clair et ce n’est pas l’anecdote de la mère, qui vient s’imbriquer là-dessus dans la seconde partie, qui fait changer d’avis l’audience aguerrie à ce genre de récit.

Les subterfuges employés – appels téléphoniques anonymes, panique simulée, apparitions, disque rayé – sont usés jusqu’à la corde mais cela ne fonctionne pas plus mal qu’avec d’autres épisodes de séries similaires. La séquence du cimetière dans la brume est particulièrement réussie et constitue un des sommets de l’aventure. Joan se rend sur la tombe de son père et y rencontre la mystérieuse femme au rire énigmatique. Le fog de cette scène, ainsi qu’autour de l’habitation des Heinemann, située au bord de la Tamise, renforce l’impression d’atmosphère angoissante. Le seul problème est qu’il n’y a pas vraiment de mystère. Le salopard est bien celui qu’on pense et il s’est servi du retour de la mère de sa femme après dix ans d’absence ; Diane, la poule de luxe, adepte de perruques, fait alors des apparitions en blonde dans le même accoutrement que la mère pour rendre folle Joan (l’utilisation du miroir est grotesque). L’autre grand moment est le final : la préparation du ‘suicide’ et le combat aux poings McGill/Jason. La dernière image est celle du miroir brisé avec la trainée de sang du visage de Jason.

En ce qui concerne la distribution, il n’y a pas de vedette. L’Australienne Audine Leith (Joan) et l’Américain Robert Hutton (Jason) font des compositions honnêtes mais pas extraordinaires. Hutton sera Rocco, sans Siffredi, dans Minuit moins huit kilomètres d’Amicalement vôtre. Philip Madoc, qui interprète l’inquiétant psychiatre lors de deux scènes trop courtes, a joué dans cinq épisodes des Avengers dont Meurtres distingués et Mon rêve le plus fou. Il explique avoir surtout joué des rôles de méchants du fait de son physique ténébreux, ce qu’il ne regrette pas car, selon lui, ce sont les meilleurs ! Il décrit Richard Bradford comme étant quelqu’un de toujours impeccablement habillé et à l’apparence époustouflante.

Quant à la belle Luanshya Greer (Diane) – superbe mais courte scène avec McGill –elle revient dans l’ultime épisode de la série. Patience donc, lecteurs mâles ! Il est à noter qu’elle écrivit, avec Brian Clemens, l’excellent opus de Thriller, In the Steps of a Dead Man, et qu’elle est l’épouse de John Carson, une figure des Avengers.  Quelques passages en extérieur sont à relever dont la promenade sur Victoria Embankment avec Big Ben en toile de fond, que je connais particulièrement bien et qui n’a pas beaucoup changé depuis la fin des années 60. Cet épisode présenta la série en France le 6 mars 1970 sur la première chaine de l’ORTF, et cela s’apparente à une faute de goût préjudiciable et un choix malheureux des programmateurs, car l’aventure, assez moyenne, n’est pas caractéristique de Man in a Suitcase

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28. TROIS CLINS D'OEIL
(THREE BLINKS OF THE EYES)

Après Blind Spot, un second épisode a pour cadre Paris, et même si cette aventure ne fait pas partie des excellents opus de la série, elle gagne quelques accessits grâce à des scènes et répliques qui ne peuvent que nous concerner. 

Eleanor Duzac, une femme richissime, engage McGill pour espionner Bernard, son mari, beaucoup plus jeune qu’elle, parce qu’elle est persuadée qu’il a une maitresse. Le détective prend ainsi l’avion pour Paris et il se rend au club de La Guillotine, où Bernard a effectivement une conquête, Janine, la directrice des lieux. Ne manquant pas d’audace, l’ex-agent invite la jeune femme à passer la soirée (et une partie de la nuit) avec lui. Le lendemain, Madame Duzac demande à McGill par téléphone de proposer une forte somme d’argent à la maitresse de son époux volage pour qu’elle le quitte, mais lorsque le détective va accomplir sa mission, la police est dans l’appartement car Janine a été assassinée. L’étau se resserre sur McGill, accusé d’être le meurtrier, surtout que la police française s’appuie sur son passé compromettant. Avec des menottes autour d’un poignet, il s’échappe pour retrouver Bernard, mais l’issue de l’affaire n’est pas celle qu’il avait escomptée.

Comme pour l’épisode précédent, le dénouement n’est pas une totale surprise, puisque le détective a communiqué l’adresse de la victime – rue de Rivoli – à la milliardaire. L’intérêt réside surtout dans les répliques et certaines situations, car l’intrigue est une banale histoire d’adultère et de meurtre. D’ailleurs, McGill n’accepte l’affaire qu’à cause du chèque mirobolant qui lui est offert ; il aurait dû flairer l’anguille sous roche.  Charles Crichton fait toujours du bon travail, mais le spectacle au club de La Guillotine occupe une place trop importante. La production avait dû engager une troupe de danseurs – la plupart n’a que cet épisode sur leur fiche imdb – et il fallait la rentabiliser.

Les passages les plus intéressants sont la réaction du détective, qui a écouté l’altercation des époux dans la pièce d’à-côté (scène pré-générique), McGill et le gardien de prison, et le duel au pistolet au château, qui constitue le véritable final.

Les rôles principaux ne sont pas tenus par des acteurs au palmarès conséquent, contrairement aux secondaires. D’ailleurs, Faith Brook (Eleanor) n’avait aucun souvenir de l’épisode, même si elle se souvenait d’avoir participé à la série ! Le magistrat est Charles Lloyd Pack et il a un temps de présence bien supérieur à ses deux prestations Avengers (c’est l’inoubliable Sir Manfred Fellows de La poussière qui tue : ‘Smelt like old socks !’). Ne ratez pas Colin Jeavons (Le club de l’enfer, Le vengeur volant) qui interprète le gardien, dans une seule mais superbe scène. Il explique à McGill, qui dévore un poulet dans sa cellule, qu’un condamné à mort a le temps de cligner des yeux trois fois avant de mourir lorsque sa tête est tranchée (‘it’s a very nice thought for dinner’). Un fait que je ne connaissais pas personnellement mais qui donne à l’épisode un excellent titre ! Jeavons sera un policier/poulet dans Sherlock Holmes avec Jeremy Brett dans le rôle de l’inspecteur Lestrade. Le barman, Hans de Vries, est inconnu mais il fut un prétendant pour être James Bond dans Au service secret de sa Majesté.

Peu d’extérieurs – on aperçoit Trafalgar Square et Piccadilly Circus immédiatement après le générique -  mais l’imposante façade de la demeure, où se réfugie Bernard, est The Mausoleum à West Wycombe dans le Buckinghamshire. L’intérieur fait fortement penser à la vaste salle du Dernier des sept. Aucun tournage à Paris – seulement quelques inserts montrant les Champs-Elysées, le Moulin Rouge, Pigalle, Notre-Dame (le même que dans Blind Spot) - mais la langue de Molière est présente en VO à de nombreuses reprises, dont l’échange entre Bernard et Janine. Les termes ‘gigolo’ ‘garce’ ‘little putain’ sont même employés. Sinon, le ‘tricolore’ - boisson bleu/blanc/rouge - est offert par l’établissement pour fêter son ouverture, le général De Gaulle est au mur des bureaux de la police, le tableau de Napoléon sert de cible d’entrainement et McGill conduit une DS pour se rendre au château : les clichés ont la vie dure ! Quant à McGill, il revendique qu’il est texan et avoue que son français est suffisant pour commander une bière !


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29. LE CHATEAU DANS LES NUAGES
(CASTLE IN THE CLOUDS)

Sur fond de scandale politique typiquement britannique, un haut fonctionnaire profite des vacances de sa femme aux Bermudes pour s’encanailler. Il appelle McGill au secours lorsque la belle demoiselle rompt et garde une broche inestimable appartenant à sa moitié. Sir Dennis Galt, dans l’embarras, implore le détective de faire entendre raison à la délicieuse Magda afin d’éviter un scandale. L’intrusion d’un jouailler intéressé par le bijou intrigue le fonctionnaire et l’ex-agent, surtout que Magda, soi-disant issue d’une famille aristocrate autrichienne, est sur le point d’épouser Johnny Ezard, un sans-le-sou truffé de dettes qui compte sur la broche pour les rembourser. Et qui sont les deux malfrats auxquels se heurte McGill continuellement ? Le retour de la femme répond à bien des questions.

Il est rare que j’apprécie un épisode en décalage avec la trame d’une série, mais celui-ci reste une exception. Pendant les trois quarts de l’opus, McGill essaie de récupérer la broche par divers moyens, tandis que la fantaisiste et espiègle Magda mène le détective en bateau, lui racontant fable sur fable. En fait, elle n’a plus la broche, car c’est son ami, 'Gentleman Jim Ezard', qui l’a mise en lieu sûr pour rembourser ses dettes. Cela n’empêche pas la jeune femme, menteuse invétérée, de demander à McGill de lui payer un manteau de vison contre le bijou (scène très drôle) : ‘The coat for the brooch’.

L’arrivée de Jan Read, en tant que script-éditeur dans cette fin de série, a modifié le style avec moins d’épisodes au final violent. Castle in the Clouds a un côté humoristique, sans être ridicule et grotesque comme Jigsaw Man, et le ton est plus léger que le début de la série. Personne n’est tué dans l’aventure et les méchants sont en carton-pâte ! D’après certaines critiques américaines, une éventuelle seconde saison aurait fourni une majorité d’épisodes de cet acabit. Dans ce cas, l’arrêt après une seule saison est une bonne chose, car le succès de cette aventure tient à ce qu’elle possède un caractère unique. Plusieurs intrigues de ce genre auraient dénaturé la série !

Le titre initial prévu était The Adventuress, qui mettait encore plus en avant le personnage de Magda dans cette aventure légère. Il y a d’excellents passages comme  la visite de McGill dans l’appartement de la jeune femme (sur une superbe musique à la découverte de la lettre en allemand) et surtout leur première rencontre à la boite de nuit disco de Swinging London. Magda demande à McGill : ‘You’re American ?’ et la réponse est catégorique :’No, m’dam, I’m a Texan’. A noter une succession d’images de l’épisode après le générique ; très inhabituel, surtout qu’on aperçoit Magda en mariée, ce qui correspond à la fin insolite et amusante au bureau des mariages. 

L’histoire est agrémentée par des acteurs sympathiques et convaincants. L’actrice écossaise Gay Hamilton crève l’écran en escroc naïve. Elle est aussi la lusitanienne Lucia à la fin de l’épisode en deux parties, Variation on a Million Bucks : un rôle plus grave que celui-ci pour lequel elle porte une perruque brune. Qu’elle soit portugaise ou autrichienne, le fort accent écossais de Gay Hamilton est le même ! Avant ses deux apparitions à Man in a Suitcase, elle participa à des productions historiques, inconnues chez nous, dont certaines ont pour cadre son Ecosse natale (The Heart of Midlothian et la série St Ives). A la télévision, elle tourna dans Paul Temple, Cosmos 1999, Bergerac et on peut la voir au cinéma dans deux films historiques renommés, Barry Lyndon et Les duellistes. Edward Fox, Ezard, avait la même année un autre rôle léger ; celui de Chilcott, l’amoureux transi et ridicule de Tara King, dans Mon rêve le plus fou. Au cinéma, il a un registre plus grave dans Chacal et Les duellistes. Il est aussi M dans le James Bond ‘renégat’ Jamais plus jamais et il parla de la nomination de Craig en des termes peu flatteurs : ‘So ugly! He is utterly wrong for Bond. The opposite of what Fleming intended, and I knew Fleming’. Il ne se rappelle pas grand-chose du tournage de l’épisode  après tant d’années mais il est ravi que cela divertisse toujours après tout ce temps. La femme de ménage, Jan Williams, est la belle masseuse de Grant dans Bons baisers de Russie.

Un épisode drôle et rafraichissant avec la magnifique inconnue Gay Hamilton.


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30. L'AVION POUR ANDORRE
(NIGHT FLIGHT TO ANDORRA)

McGill a rassemblé quelques voleurs pour pénétrer une forteresse inaccessible dans les Pyrénées. Alors que l’ex-agent fait miroiter à ses comparses une importante collection d’œuvres d’art à dérober, l’audience sait rapidement qu’il s’agit de bien autre chose. Pendant que la bande prépare l’opération dans une ferme abandonnée, l’arrivée d’une jeune et jolie touriste va dérégler l’organisation.

Une fin de série mitigée, mais finalement correcte grâce à un bon final. Les préparatifs sont néanmoins fastidieux – la répétition avec le planeur et l’intervention des ‘électriciens’ sont de longues séquences – et Anne Weeks est le personnage indispensable pour faire patienter. Les intrigues autour de la jeune femme sont du remplissage (récupération des affaires à l’hôtel, la police à la recherche de la voiture), même si la volonté des truands lourdauds de tuer ce témoin gênant permet à McGill de se mettre en évidence. Les meilleurs passages sont l’arrivée d’Anne et le final, où presque toute la bande de voyous est décimée. Le suspense tient pour savoir qui est le traitre parmi les criminels et le rôle exact d’Anne Weeks ; en fait un agent britannique chargée de s’assurer que McGill accomplisse sa mission.

L’interprétation est bonne même si aucun membre de la bande ne sort du lot et que le vilain au monocle n’est pas sensationnel, mais on a le plaisir de retrouver quelques têtes Avengers. Anne Weeks est la ravissante Luanshya Greer, qui est Diane, un petit rôle de Who’s Mad Now ? Il est à noter qu’elle écrivit, avec Brian Clemens, l’excellent opus de Thriller, In the Steps of a Dead Man. Elle ne tourne plus depuis 1969. Maxted, l’envoyé du gouvernement britannique, est Edward Underdown (il est aussi le serveur Rankin dans un autre épisode de la série, All That Glitters) et il participa à deux aventures des Avengers : il est le prétendant liquidé devant l’aquarium de Cœur à cœur et le ‘fantôme’ du Mort-vivant. D’ailleurs, il a une scène très Avengeresque, lorsqu’au milieu d’un champ, il répond au téléphone dans sa Rolls avec une bouteille de champagne au frais. Peter Swanwick, le ‘supervisor’ du Prisonnier, est ici le Butler. Ricardo Montez, l’officier de police, est un chauffeur de taxi dans une autre aventure de la série, censée aussi se passer en Espagne, The Man Who Stood Still, et il est Josino dans Remontons le temps. Zia Mohyeddin (Rafael) est le prince Ali dans Du miel pour le prince et Ewan Hooper (Eddy) est le sergent Moran des Espions font le service. Reed de Rouen, un des deux scénaristes, s’est réservé un petit rôle, celui du truand Buick en planeur. A défaut de Pyrénées, le tournage eut lieu à Black Park dans le Buckinghamshire.

Le vol d’un microfilm, au nom du gouvernement britannique, sert de prétexte à une aventure moyenne, illuminée par le retour de Luanshya Greer, avec un temps de présence heureusement bien plus long cette fois. Man in a Suitcase se clôt donc sur un épisode qui n’est pas considéré comme un des meilleurs opus, mais certaines séries ont vu pire…

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Images capturées par Denis Chauvet.

 

 

 saison 1 saison 3

L'homme à la valise

Présentation


 

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Posted by Le Monde des Avengers on Thursday, December 3, 2015

L’homme à la valise est une série britannique de 30 épisodes de 49 minutes, créée par Richard Harris et Dennis Spooner. Elle fut diffusée entre le 27 septembre 1967 et le 17 avril 1968 sur ITV. En France, la série fit son apparition le 6 mars 1970 sur la première chaine de l’ORTF. Man in a Suitcase est toujours considéré comme étant une des plus intéressantes productions du groupe ITC (Incorporated Television Company) créé par Lew Grade en 1954. La série était surtout destinée au marché international, plus qu’aux USA où elle ne connut pas un grand succès. A l’époque, l’idée d’un agent américain suspecté de trahison était difficile à accepter comme un héros en Amérique. D’ailleurs, le terme ‘American Intelligence’ est préféré à ‘CIA’, bien que la série trempe dans les années de Guerre froide par certaines intrigues et répliques ("dirty Communists").

McGill est un héros atypique, un ex-agent de la CIA accusé injustement de trahison, qui est obligé de se muer en détective privé, voire chasseur de primes, en Europe et les colonies britanniques en Afrique. Les raisons de suspicion qui entourent McGill sont expliquées dans l’épisode Man from the Dead (premier diffusé aux USA mais sixième en Grande-Bretagne), qui permet de lever toute ambigüité sur l’impartialité du héros. Ne pouvant plus revenir aux USA, McGill, pratiquement apatride, habite Londres et ses seules possessions sont sa voiture, sa valise et son arme : l’ex-agent conduit une Hillman Imp de couleur vert cuisine et utilise une arme que lorsque la situation l’exige, mais il ne se sépare jamais de sa valise en cuir marron déjà bien esquintée. Voulant à tout prix être réhabilité, il devient détective privé et accepte de résoudre toutes les affaires qu'on lui propose pour la somme de 500 dollars par jour plus les frais. Se déplaçant un peu partout en Europe, il n'a qu'un seul bagage : une valise contenant quelques vêtements et son arme fétiche. McGill accepte n’importe quel boulot du moment qu’il est payé. L’argent est sa motivation et il est un paria n’importe où qu’il aille. Personne ne veut de lui, même pas ses clients qui l’engagent et veulent le voir disparaitre au plus vite.

Parmi les acteurs invités, les deux participations de Donald Sutherland et Colin Blakely - quatre superbes épisodes – sont à voir. Notons aussi les prestations remarquées d’acteurs, parfois aux visages familiers pour leur passage dans les Avengers : Anton Rodgers, Peter Vaughan, Patrick Cargill, Patrick Allen, Philip Madoc, Simon Oates, Ray McAnally, Terence Alexander, Bernard Lee, Derren Nesbitt, Peter Arne... Il y a également de nombreuses charmantes actrices qui ont joué, pour certaines, dans d’autres séries ITC ; citons, subjectivement, Suzan Farmer, Rosemary Nicols, Yoko Tani, Gay Hamilton (une fois brune, une fois blonde), Angela Browne, Jacqueline Pearce (deux épisodes), Judy Geeson, Barbara Shelley, Jane Merrow, Nicola Pagett, Felicity Kendal, Philippa Gail, Justine Lord et Luanshya Greer.

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Lors de la première scène de Brainwash – premier épisode diffusé en Grande-Bretagne et préféré de Bradford –, un train s’arrête à une gare et un homme en trench-coat descend et pose sa valise sur le quai et la caméra s’attarde dessus.  La série est basée sur des thèmes comme la trahison, la méfiance et la tromperie. A cause de son statut non officiel, McGill est souvent engagé par des clients peu scrupuleux et il se retrouve au milieu d’imbroglios criminels. Son passé le rattrape parfois car l’ex-agent est obligé, quelquefois sous la menace, de retravailler pour ses anciens employeurs. De nombreux scénaristes faisaient leur début et ils ont détourné la série des habituelles aventures d’espionnage légères pour aboutir à des histoires plus imprégnées du monde réel cynique, qui les font ressembler aux romans de John le Carré et Len Deighton. En comparaison, Le Saint semble daté et conventionnel aujourd’hui alors que Man in a Suitcase est plus déroutant et parvient encore à nous surprendre plus de quatre décennies après sa production. Le rôle d’Executive Story Consultant’ fut confié à Stanley R. Greenberg car, étant Américain comme Richard Bradford, on pensait que l’entente serait bonne. Il n’en fut rien et Greenberg n’écrivit que cinq histoires sur trente. Les autres contributeurs furent Edmund Ward et Jan Read (quatre scénarios) et Philip Broadley (3).

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La série fut tournée aux studios Pinewood et aux alentours, ainsi qu’à Londres, comme toutes les productions ITC de l’époque, même si l’action se déroule souvent loin de la Grande-Bretagne. La plupart des intrigues sont ingénieuses et les scénarii bien écrits, et il y a un subtile dosage de scènes tournées en extérieur, en studio et d’utilisation d’images d’archives. Cela permet d’avoir deux épisodes ‘parisiens’ ainsi que des aventures aux quatre coins de l’Europe (Italie, Suède, RDA, Portugal, Grèce, Ecosse, Espagne), mais aussi, pour trois d’entre elles, en Afrique. Néanmoins, le tournage de quelques scènes à Londres offre des vues très intéressantes de la capitale britannique dans les années 60. Pour l’époque, les réalisateurs de Man in a Suitcase innovaient en tournant la nuit, alors que très souvent, ces séquences nocturnes étaient filmées la journée ! Charles Crichton et Peter Duffell réalisèrent six épisodes chacun. Robert Tronson (5) et Freddie Francis (4) contribuèrent également activement à la série, mais d’autres réalisateurs prestigieux ont laissé aussi leur nom au générique comme Gerry O’Hara, Don Chaffey et John Glen. La musique jazzy du générique de Ron Grainer, ainsi que celle utilisée comme accompagnement composée par Albert Elms, est superbe et contribue au succès et à l’intérêt de la série. Certaines critiques émettent l’hypothèse que le thème du générique fut parmi ceux rejetés par Patrick McGoohan pour Le prisonnier.

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Bradford considère, avec raison, que McGill est plus ancré dans la réalité que ses contemporains comme Simon Templar et John Drake. En fait, c’est l’arrêt de Destination danger (Patrick McGoohan voulait se consacrer au Prisonnier) qui ouvrit les portes pour une série de remplacement. Quelques membres de la production de Danger Man – Sidney Cole, John Glen -   travaillèrent alors sur cette nouvelle série baptisée initialement McGill. Jack Lord fut le premier choix mais le rôle hérita finalement à Richard Bradford, un acteur de l’Actors Studio, 29 ans à l’époque, repéré pour sa prestation dans The Chase (1966) avec Marlon Brando. Les concepteurs, Richard Harris et Dennis Spooner, n’eurent aucune implication dans la série ; Spooner étant déjà occupé à produire sa nouvelle série, Les champions. Comme Le prisonnier, Man in a Suitcase conte les aventures d’un ex-agent indépendant, dont l’éthique et le sens  de l’honneur sont rattrapés par leur passé. La série n’est pas aussi sombre que Callan –une autre série britannique d’espionnage avec Edward Woodward – mais le ton est diamétralement opposé aux autres productions ITC comme Le Saint, Le baron ou Les champions. Le personnage de McGill n’appartient pas à la même catégorie que les héros gentlemen comme Simon Templar ou John Steed. McGill n’a aucune des manières raffinées que possèdent les héros britanniques : il est brusque, mal élevé et colérique. Alors que ses équivalents British ont des apparences impeccables et des goûts distingués en matière de vêtements, de vins ou de voitures, McGill boit de la bière et du bourbon au goulot et roule dans une vieille Hillman Imp. Il vit dans des hôtels généralement bon marché ou des appartements loués pour quelque temps.  C’est un solitaire qui a peu d’amis et pas de relation suivie avec une femme (il rencontre par contre de nombreuses ex-petites amies) et il y a souvent peu de différences entre les ‘bons’ et les ‘vilains’ qu’il côtoie dans ses aventures. Fréquemment, l’épisode se clôt sur une note pessimiste, réaliste d’un monde où le gris l’emporte sur le noir ou le blanc.

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C’est une série réaliste d’aventures et d’investigations qui bénéficie du charisme et de la compétence de l’acteur vedette texan Richard Bradford. Toujours plébiscité dans les pays anglo-saxons, L’homme à la valise n’a pas une notoriété, pourtant méritée, dans l’hexagone. Produite en Angleterre avec une vedette américaine, la série est un peu le contraire d’Equalizer – un acteur anglais à New York -, mais dans les deux cas, le héros est un ancien agent secret. Richard Bradford a déclaré avoir mis corps et âme pour créer un personnage réaliste auquel l’audience pouvait s’identifier. Avec ses cheveux prématurément gris et la cigarette au bec, McGill détone de ses aventuriers contemporains, Templar et Steed, mais cette particularité fait que Man in a Suitcase n’est pas tombé dans l’oubli. Lors d’une longue interview, Bradford révéla qu’il ne fumait pas, mais il établit ce comportement comme un trait de caractère de McGill et la cigarette est aussi indissociable du personnage que sa valise. D’ailleurs, on peut penser que cette particularité serait un frein en cas d’éventuelles rediffusions sur les petits écrans. Dans de nombreuses scènes, McGill fait tenir debout sa cigarette comme une bougie.  

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Développée par Bradford, la caractérisation de McGill est complexe. Comme un homme trahi par la vie et son pays, le détective apparaît extérieurement bourru et morose, mais cela masque une sensibilité intérieure. L’ex-agent a ainsi de la compassion pour les victimes des différentes affaires qu’il traite. Le niveau de violence, jamais atteint à l’époque dans une série produite par ITC, était dû au souci de réalisme que Bradford voulait faire transparaitre dans les histoires et les personnages. C’était aussi une réponse britannique à la campagne antiviolence à la télévision des Américains. Contrairement aux séries de l’époque, le héros ne sortait pas de rugueux combats sans effets secondaires. Bradford prenait soin de montrer son personnage commotionné et marqué par les coups. Rien à voir avec The Avengers, où peu de sang apparaissait à l’écran. Blessé par balles ou armes blanches, McGill finit parfois l’épisode à l’hôpital. Une astuce de la série est que le prénom de McGill n’est jamais révélé, même si certaines personnes plus intimes –souvent des dames – l’appelle : ‘Mac’.

La série est considérée comme sérieuse et dramatique mais cela ne l’empêche pas d’avoir de grands moments d’humour et de cynisme. Ainsi, lorsqu’une femme demande à McGill s’il est américain, celui-ci répond : "No, ma'am, I'm Texan," Bradford a une doublure pour de nombreuses scènes en extérieur – descente d’un escalier de dos, montée dans une voiture- mais, à part la perruque, il n’y a aucune ressemblance avec l’acteur. On repère donc facilement ces passages, courts le plus souvent, et il est heureux que Bradford ait tourné la plupart des séquences en extérieur !

Les éditions australiennes Umbrella Entertainment ont sorti les trente épisodes remasterisés avec des bonus comprenant des commentaires audio de Richard Bradford, du scénariste Philip Broadley et du metteur en scène Peter Duffell. Certains épisodes ont une introduction d’acteurs invités comme Jane Merrow et George Sewell. 

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Pour les commentaires sur les épisodes, j’ai souvent fait référence aux Avengers, la série incontournable des années 60. Ainsi, les titres d’épisodes sans mention de la série proviennent évidemment de Chapeau melon et bottes de cuir. Pour les anglophiles, je conseille vivement la lecture des pages du blog Double 0 Section concernant la série. L’auteur fait également référence aux Avengers (et à d’autres séries ITC) dans une étude riche en documents iconographiques et en commentaires judicieux.

http://doubleosection.blogspot.fr/2011/09/dvd-review-man-in-suitcase-volume-1-man.html

http://doubleosection.blogspot.fr/2012/03/dvd-review-man-in-suitcase-set-2.html

On trouve également un site recommandé par Richard Bradford himself !

http://www.freewebs.com/maninasuitcase/

John: How's London? Still swinging?
McGill : Oh yeah, like a pendulum do!
 

 

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Bradford considère, avec raison, que McGill est plus ancré dans la réalité que ses contemporains comme Simon Templar et John Drake. En fait, c’est l’arrêt de Destination danger (Patrick McGoohan voulait se consacrer au Prisonnier) qui ouvrit les portes pour une série de remplacement. Quelques membres de la production de Danger Man – Sidney Cole, John Glen -   travaillèrent alors sur cette nouvelle série baptisée initialement McGill. Jack Lord fut le premier choix mais le rôle hérita finalement à Richard Bradford, un acteur de l’Actors Studio, 29 ans à l’époque, repéré pour sa prestation dans The Chase (1966) avec Marlon Brando. Les concepteurs, Richard Harris et Dennis Spooner, n’eurent aucune implication dans la série ; Spooner étant déjà occupé à produire sa nouvelle série, Les champions. Comme Le prisonnier, Man in a Suitcase conte les aventures d’un ex-agent indépendant, dont l’éthique et le sens  de l’honneur sont rattrapés par leur passé. La série n’est pas aussi sombre que Callan –une autre série britannique d’espionnage avec Edward Woodward – mais le ton est diamétralement opposé aux autres productions ITC comme Le Saint, Le baron ou Les champions. Le personnage de McGill n’appartient pas à la même catégorie que les héros gentlemen comme Simon Templar ou John Steed. McGill n’a aucune des manières raffinées que possèdent les héros britanniques : il est brusque, mal élevé et colérique. Alors que ses équivalents British ont des apparences impeccables et des goûts distingués en matière de vêtements, de vins ou de voitures, McGill boit de la bière et du bourbon au goulot et roule dans une vieille Hillman Imp. Il vit dans des hôtels généralement bons marchés ou des appartements loués pour quelque temps.  C’est un solitaire qui a peu d’amis et pas de relation suivie avec une femme (il rencontre par contre de nombreuses ex-petites amies) et il y a souvent peu de différences entre les ‘bons’ et les ‘vilains’ qu’il côtoie dans ses aventures. Fréquemment, l’épisode se clôt sur une note pessimiste, réaliste d’un monde où le gris l’emporte sur le noir ou le blanc.

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 saison 1 saison 3

L'homme à la valise

Bonus: Interview de Richard Bradford

1. Making it real - Interview de Richard Bradford - 2004

 


1. MAKING IT REAL - INTERVIEW DE RICHARD BRADFORD (2004)

Grant Taylor est l’interviewer et le producteur exécutif, et Jaz Wiseman, le caméraman et metteur en scène. L’entretien fut filmé au Studio à Los Angeles en octobre 2004.

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L’entretien qu’accorda Richard Bradford fut réalisé en 2004 et la physionomie de l’acteur a beaucoup changé depuis le tournage de la série en 1967. C’est un long bonus de 69 minutes sorti sur certaines éditions DVD (ndlr : la série n’est toujours pas sortie en France). Bradford parle de la série mais aussi de sa méthode de préparation, de ses débuts, de son admiration pour Marlon Brando. Bradford marmonne beaucoup – comme dans la série – et il est parfois très difficile à comprendre, même pour les anglophones d’après ce que j’ai lu. Un critique oscille même entre les qualificatifs ‘soûl’ et ‘défoncé’ pour certains passages, mais il ne devait pas connaître bien l’acteur, car son débit est reconnaissable et les anecdotes méritent qu’on prête attention.

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Richard Bradford ne voulait pas que son personnage ressemble à James Bond, John Wayne ou au héros de Mickey Spillane, le détective Mike Hammer. Il voulait que McGill soit plus réel, plus humain et il ne devait pas se servir d’une arme à tout moment, à moins qu’il soit obligé d’y avoir recours. Dans de nombreuses séries, un type était assommé mais il pouvait courir cinq minutes plus tard comme si rien ne s’était passé. Dans la même situation, McGill se levait, essayait de courir mais le téléspectateur devait percevoir que le personnage n’avait pas retrouvé toutes ses facultés.

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Il pense que la série était bonne, particulièrement pour l’époque. Il s’est investi totalement pour que L’homme à la valise soit le mieux possible. Il évoque les problèmes lors du tournage avec l’équipe technique totalement britannique. Au début, par exemple, il trouvait que le caméraman, Lionel Banes (ndlr : il travailla sur 57 épisodes du Saint et six de la quatrième saison des Avengers), bien que talentueux, était trop lent et que cela compromettait les impératifs des dates. Il devait parfois revenir tourner une scène pour un épisode complété plusieurs semaines auparavant. Il essayait aussi que l’évolution de ses blessures soit crédible et Jimmy Evans, le maquilleur, faisait ce qu’il pouvait mais Bradford remarqua qu’il ne voyait plus bien et l’acteur décida de faire ses propres maquillages.

Il appréciait tous les metteurs en scène, même si ce n’était pas réciproque pour certains d’entre eux, comme Pat Jackson. D’ailleurs, Bradford ironise sur le fait qu’il ne fut pas un des trois réalisateurs retenus pour les treize derniers épisodes. Les relations avec Charles Crichton étaient parfois épineuses, car il était assez dur – on disait même qu’il buvait beaucoup – et il fallait faire ce qu’il voulait. Bradford ne suivait pas toujours les consignes et cela explosait entre les deux hommes en ‘artistic argument’ comme le souligne l’acteur. Il aimait la façon de travailler de Freddie Francis car il faisait bouger la caméra. D’autres, au contraire, étaient trop figés. Bradford cite ainsi l’exemple où il doit tomber, inconscient, la tête dans du verre, et alors qu’il joue la scène, le réalisateur ne le suit pas avec la caméra jusqu’à terre et reste au niveau du visage à la position initiale. Cela avait le don d’énerver l’acteur ! Se donner la peine de rendre crédible une scène sans que le réalisateur en tire profit ! ‘To make it real’ comme aime à le répéter Richard Bradford. Il voulait faire quelque chose qui n’avait pas été fait auparavant à la télévision.

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Il y avait des scripts ‘terribles’, pas très bons, souvent recyclés, de Destination danger entre autres et Bradford, toujours en recherche de la perfection, se plaint également que certaines actrices ont tourné sans talent. Il ne sait pas si elle le faisait exprès, si elle ne l’aimait pas ou si elle était bon marché mais le résultat était pitoyable ; ce n’était pas le niveau qu’il voulait. Il reconnait qu’il n’était pas assez mature pour aller dans le bureau des producteurs et leur dire ce qu’il pensait. Il lâche qu’il y avait ‘a lot of bullshit actors’….Brainwash est l’épisode préféré de Richard Bradford, et c’était son idée de faire réciter les mois de l’année à McGill pendant le lavage de cerveau afin de montrer le personnage lutter pour ne pas perdre la raison (‘A great moment in acting ; a great moment to film’) mais l’impact a été bousillé au montage à son grand désespoir. Il se rappelle du premier épisode, Brainwash, et de quelques autres mais pas des titres.

Bradford n’a jamais été impliqué dans la partie technique. Il se remémore certains acteurs qui ont joué dans la série. Colin Blakely, qu’il appréciait beaucoup (‘a great guy’) mais il ne voulait pas de relations spéciales même entre amis ; Patrick Cargill : il ne se rappelle pas de l’épisode mais il se souvient de lui, Rodney Bewes avec qui il tourna un ‘épisode mauvais’ intitulé The Bridge. Il s’attarde sur cet épisode qu’il déteste. Dans le script, McGill devait assister à une tentative de suicide d’un désespéré, qui voulait sauter d’un pont, en le testant par des applaudissements, ce qui ne correspondait pas du tout au personnage pour l’acteur. En aucun cas, d’après son contrat, Bradford ne devait aller sur ce pont. Pourtant, le jour du tournage, par un temps brumeux, personne du contrat n’était présent et il dût suivre l’acteur Rodney Bewes qui jouait le jeune qui voulait se balancer. Il alla moins loin que Bewes, mais Bradford réalisa par la suite qu’en cas de chute, l’assurance ne le couvrait pas. Tout le monde se serait tourné vers le contrat. Il s’ensuivit une entrevue orageuse avec Sidney Cole et Barry Delmaine, les producteurs, qui laissa longtemps des traces. On ressent dans les propos qu’il garde toujours une certaine animosité envers Cole (l’histoire du punching-ball à son effigie n’est peut-être pas que des racontars). En tout cas, cet incident et ce manque de considération marquèrent beaucoup l’acteur. Il reproche aussi qu’on lui demandait rien avant de l’annoncer à l’équipe, comme lorsqu’ils devaient travailler tard : ‘Just ask me first’ disait-il. A une occasion, il est d’ailleurs parti des studios avec son chauffeur. A chaque fois, Il aurait fallu qu’il gueule : ‘NO !’

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Bradford ne fumait pas mais il décida que McGill fumait. Et il fumait beaucoup ce que les producteurs voulaient freiner. Mais il continua car il était très borné.

Il a particulièrement apprécié le tournage en extérieurs en Angleterre où la campagne est merveilleuse. Il se souvient du Ritz aussi, mais il reconnaît qu’il n’a pas profité à sa juste valeur de l’environnement, son attention étant prise par le tournage. Il se rappelle de la première scène de tournage de la série où il devait courir, sprinter dans tous les sens dans le stade (ce qu’il appelle ‘Get The Yank Day’) et il fallait avoir une forme olympique, ce qui lui attira du respect de l’équipe de tournage. Il détaille cette dépense d’énergie qui est le passage final de l’épisode Man from the Dead ; une séquence classique de la série. Il se dit avec le recul que peu de personnes auraient pu faire ce qu’il a fait, et en plus deux fois de suite, aussi rapidement, et qu’ils devaient le tester ce jour là ! Après cette course, il se fait rosser et il devait dire un texte qu’il se rappelle avoir prononcé très lentement, tellement qu’il était exténué. Angela Browne, (Bradford ne se souvient que du ‘last name’) qui tournait l’échange final, ne fut pas satisfaite de la réplique. La veille, il avait rencontré Roy Vincente, le coordinateur des cascades, à Hyde Park et ils avaient effectué le tour du lac en courant (ndlr : la Serpentine). Il était un athlète et il s’impliqua beaucoup dans les scènes d’action.

Bradford spécule finalement sur la place de McGill dans la société contemporaine ; “Where’s McGill Today?” et le statut de la série, culte 37 ans après le tournage. Il est étonné de la popularité de la série, mais il estime que son personnage, la série et sa carrière d’acteur auraient pu être plus prospères que ce qu’ils ont été. Même s’il ajoute, dans une excellente partie de l’interview, que jouer l’intégrité à Hollywood est dangereux, car c’est un monde où tout est superficiel et artificiel. Il discute des raisons de sa décision de quitter la série et de ne pas avoir continué sur une seconde saison. Il regrette de n’avoir pas tourné plus d’épisodes mais il était fatigué des éternelles batailles pour que son avis soit pris en compte. En fait, il critique les économies de bouts de chandelle : une journée de tournage était supprimée pour économiser quelques pennies alors que cela aurait fait gagner des dollars. Pour une éventuelle seconde saison, il aurait aimé avoir de meilleurs scripts et que McGill soit plus impliqué avec des femmes car il préfère tourner avec des dames plutôt que des hommes ! D’un autre côté, il pense aussi que les producteurs en avaient marre de lui (‘They had enough of me’). Il avoue qu’il n’était pas très amical (surtout avec ses partenaires masculins, sauf pour son pote Anton Rodgers) pour le bénéfice de la série. Il n’était pas désagréable mais il n’allait jamais à la rencontre des acteurs invités sur un épisode. Bradford ne cache pas que ce n’était pas facile de travailler avec lui. L’aspect de crédibilité passait avant tout pour lui. Ainsi, lorsque Donald Sutherland revint pour tourner un second épisode, Bradford n’a pas essayé de se lier d’amitié avec lui prétextant qu’il jouait le rôle d’un salopard dans l’intrigue et qu’un rapprochement aurait pu nuire à la crédibilité du tournage. Sutherland en fut affecté. Et Bradford le regrette aujourd’hui. 

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La crédibilité passait avant tout pour Bradford, surtout dans les scènes de bagarre. Il disait à ses opposants de ne pas hésiter à le frapper (‘Don’t worry about anything’), car il ne tombait pas théâtralement s’il n’avait pas été déséquilibré.  Il reconnaît aussi qu’il agissait méchamment dans ces séquences, et qu’il aurait pu faire autrement. Certains acteurs ne voulaient d’ailleurs pas tourner avec lui. Bradford aimait vraiment cette vieille valise qui tenait à peine lors du tournage mais il ne sait pas ce qu’elle est devenue. A la fin de la série, Bradford eut un abcès dentaire et il n’avait pas confiance en la médecine britannique. Il rentra aux USA et il ne revint jamais !

Cet interview est un document car Richard Bradford se livre honnêtement, avec parfois une pointe d’humour, même s’il faut tendre l’oreille pour capter ses souvenirs quelquefois décousus. Il apparaît sincère et perfectionniste avec pour objectif primordial de rendre Man in a Suitcase le plus crédible possible au détriment de bonnes relations sur le plateau de tournage. Sur sa carrière, il concède qu’elle aurait pu être plus riche mais la superficialité d’Hollywood ne le fait rien regretter : "I'm truly just one blessed human being on this planet."

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Images capturées par Denis Chauvet.