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 saison 1 saison 3

DR HOUSE

SAISON 3 - PARTIE 1

 


PRÉSENTATION DE LA SAISON 3

La saison 3 termine avec maestria la première période de la série. Elle se caractérise par une plus grande noirceur des cas traités. Si elle n’a pas tout à fait l’intensité de la saison 2, elle prépare la direction plus sombre des ères suivantes de la série.
Les sujets traités sont toujours aussi divers. Après le Couple (Rendez-vous avec Judas), les liens familiaux passent à leur tour dans le viseur de la série (Jeux d’enfants, Une aiguille dans une botte de foin, Le petit con…), la facilité à s’auto-détruire (Mauvaises décisions, Démission…), l’hédonisme outrancier (Que sera sera), la solitude affective et sexuelle (Y’a-t-il un médecin dans l’avion ?), etc. Pour équilibrer cette joyeuse ambiance, les scénaristes nimbent cette saison de quelques bouffées d’optimisme aussi rares que bienvenues. L’amour maternel (L’enfant miroir) et fraternel (Deux frères) triomphent de la mort, ou bien un viol surmonté (De pièces en pièces) témoigne d’une vague renaissance, sans que la série en soit trahie.

Deux intrigues secondaires figurent dans cette saison. La première est l'affrontement entre House et l’inspecteur Tritter (David Morse) de l’épisode 5 à l’épisode 11. Tritter se venge de House qui l’a humilié en consultation en cherchant à prouver qu’il est un drogué incurable, et le mettre en prison ou en désintoxication. La deuxième est la démission du docteur Eric Foreman qui survient à la fin de l’épisode 21 (Démission). L'épisode 14 (Sans peur et sans douleur) apparaît rétrospectivement comme étant le pivôt de la série, ses conséquences s'étendront jusqu'au finale de la saison 7.

Bien que la saison mette toujours au premier plan ses enquêtes et son regard furieux sur notre monde, les ships commencent à fleurir. Le « Chaseron » (relation Chase-Cameron) débute à l’épisode 14. Son aspect purement charnel lui donne un charme piquant. Entre leur rupture qui s’ensuit, puis leur réconciliation, apparaissent hélas les premiers signes de l’affadissement de ce couple dans les saisons suivantes. Le « Huddy » naît véritablement au cours du même épisode, car House, touché par une héroïque audace de Cuddy, semble enfin s’intéresser à elle. La tension sexuelle, jusque-là subodorée, éclate au grand jour. Le « Huddy » d’une écriture acerbe et enlevée, est superbement présenté. Sa concrétisation est toutefois encore lointaine. Par opposition, le Hameron décline, Cameron tentant encore quelques efforts (Demi-prodige) avant de se libérer peu à peu de cette attirance.

Les trois années passées avec leur patron ont changé le comportement des trois médecins. Ils deviennent plus professionnels, moins émotifs, plus durs. Leur évolution (surtout Cameron) est de plus en plus évidente, jusqu’à provoquer la dissolution de l’équipe. A cet égard, l'épisode 23 (Le petit con) est la digne conclusion psychologique de la première ère de la série, le finale ne faisant que baisser le rideau.

La saison 3 réussit son pari de maintenir le niveau de qualité et d’apporter quelques innovations sans jamais édulcorer la spécificité de la série. Elle clôt un chapitre et ouvre élégamment la voie à une nouvelle ère, à une nouvelle équipe.

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1. RETOUR EN FORCE
(MEANING)





Scénario : Lawrence Kaplow et David Shore, d'après une histoire de Russel Friend, Garrett Lerner, Lawrence Kaplow, et David Shore
Réalisation : Deran Sarafian

- The fifth level of happiness involves creation, changing lives.
- The sixth level is heroin, the seventh level is you going away.

Richard McNeil, frappé par une tumeur cervicale, est en fauteuil roulant et à l’état de légume depuis 8 ans. Un jour, sous les yeux d’Arlene, sa femme, et de son fils, il tente de se suicider en plongeant dans sa piscine. Caren est une jeune yogi qui a eu une paralysie inexplicable. Deux mois se sont écoulés depuis les événements de l’épisode précédent, et House, la jambe guérie, reprend le travail en s’occupant de ces deux cas. S’il est toujours aussi cynique, son entourage est surpris de le voir plus gentil et attentionné…


Le titre du premier épisode de la saison 3 mérite bien son nom, se centrant sur le retour de notre diagnosticien chéri. D’où une question qui nous brûle les lèvres : a-t-il changé ? C’est le thème de cet épisode un peu trop sage, mais dont le traitement des histoires est satisfaisant.

La tonique introduction voit House sur ses deux jambes, pressé de travailler, ne laissant même pas le temps à son équipe de le saluer : entrée fracassante en sueur dans le bureau de Cuddy, un moment de solitude pour Chase, un foutage de gueule pour Cameron.
Un homme pour qui son corps est un tombeau. Conscient mais impuissant à agir. Une situation horrible mais réelle pour Richard McNeil (reprise dans Je suis vivant ! en saison 5). House a cependant un comportement très bizarre : il réconforte l’épouse, lui donne des faux espoirs pour la maintenir dans l’espérance, assiste à l’opération... soit une attitude très hypocrite pour celui qui, dans A la vie, à la mort tournait en dérision la volonté de changement de Foreman. La série signale ainsi la différence entre la connaissance d'un savoir et son expérience physique : l'homme est difficilement capable de saisir toutes les implications d'une expérience, d'une situation, tant qu'il ne l'a pas éprouvée. House se moquait de Foreman par ignorance, mais il doit aujourd'hui avouer que le changement après un traumatisme est possible.

La série distord l'apparente noblesse d'âme d'Arlene qui garde son mari encombrant chez elle : oui, Arlene l'aime, mais elle le garde sans plaisir. Son amour est dilué par la pitié et par le fait qu'elle se sente "obligée" de le garder. Ainsi, son courage est moins noble qu’à première vue, ce qui l’humanise pourtant davantage ; c'est adroit. Il est difficile de ne pas penser à Ruth Fisher faisant face à la folie de son second mari dans Six feet under. L'humanité du jeu de Kathleen Quinlan est évidente. Notez qu'Arlene accepte les opérations les plus dangereuses et que House est rassurant, comme tout docteur « normal ». Une inversion renforcée par Cameron inquiète sur sa complaisance. Le fan de Buffy regrettera seulement que Clare Kramer n'envoie pas de grosses mandales dans la gueule des médecins en tenue bimbo.

L'enquête reste classique, mais se suit sans déplaisir par son suspense entretenu. Le dernier acte enchaîne les surprises : le twist final est très surprenant (la scène d’intro était un trompe-l’œil) mais s'enchaîne à une seconde surprise : House a trouvé une solution limpide et élégante (rasoir d’Occam) mais qu’il est incapable de prouver. Aussi Cuddy refuse le traitement proposé par House, car ce serait lui donner trop de liberté : à terme son orgueil et sa certitude d'avoir raison sans preuves suffisantes pourraient avoir de graves conséquences pour un prochain patient. Absurde mais tristement crédible. En femme de tête impitoyable et rigide, Lisa Edelstein est fantastique. Le happy end, total et lumineux, extrêmement rare dans une série préférant les faux happy ends, est une autre surprise, tout comme Wilson convaincant Cuddy de tenir House dans l'ignorance. House avait tort moralement en jouant avec la vie de son patient : Qu’il ait eu raison ne l’empêche pas d’avoir eu tort ! Paradoxal ? Non, humain. En passant, un détail à noter : House se prescrit à lui-même de la Vicodin ; ça aura des répercussions par la suite.

Cameron (plus craquante que jamais) cuisine House au sujet de son changement. Cela aboutit à une scène qui fait débat parmi les fans du Hameron : House proposant un rendez-vous à Cameron !! Et cette fois, c’est Cameron qui décline sous le motif que House n’est pas « complètement guéri » !! Cette scène est d’autant plus estomaquante qu’on ne saura jamais le véritable état d’esprit de House : se payait-il la tête de son employée, ou bien était-il sincère et cherchait à renouer le lien qu’il avait si brutalement interrompu dans Des maux d’amour (saison 1) ? Nous savons depuis l’épisode précédent que House a des fantasmes sur Cameron. Est-ce parce qu’il s’en souvient qu’il veut se donner une seconde chance ? House en tout cas, se montre davantage humain.

Son édulcoration n'est heureusement que partielle, et on le voit dans le cas de Caren où il retrouve sa férocité, allant jusqu'à la malmener physiquement. Voir ensuite notre docteur tout penaud d'avoir tout faux est toujours un spectacle comique. Hugh Laurie, pour une des rares fois de la série, marche sur ses deux jambes et il le fait avec un plaisir non dissimulé. Il adoucit son personnage sans tomber dans le lénifiant.

Infos supplémentaires

- Wilson dit à la fin la devise de la série « Everybody lies ».

- Nous apprenons par Cuddy que House s’occupe de 24 cas par an en moyenne. (Soit deux fois par mois seulement). On remarque d’ailleurs que les saisons 2 et 3 comportent 24 épisodes, laissant penser que chaque saison se déroule sur un an et que nous voyons tous les cas qu’il examine.

- Fait rarissime : House s’occupe de deux cas en simultané (hors consultations).

- House habite à 13 km (8 miles) de l’hôpital. Le regard intéressé de deux jeunes filles quand il fait du skateboard nous confirme que le personnage ne laisse pas insensible la gent féminine !

- Jack Moriarty, le tireur fou de House à terre, n’a pas été retrouvé. Il n’en sera plus jamais fait mention dans la suite de la série.

- Edward Edwards reviendra dans le même rôle dans l’épisode suivant, fait très rare dans la série.

- House compare son patient à Stephen W. Hawking. Né en 1942, c'est un physicien anglais spécialisé dans la cosmologie et la physique quantique, qui a beaucoup étudié notamment les trous noirs et a écrit plusieurs ouvrages de vulgarisation qui furent des best-sellers internationaux (A Brief history of time). Atteint d’une sclérose latérale amyotrophique (SLA), il est aujourd’hui presque totalement paralysé, d’où le rapprochement ironique de House avec son patient immobilisé par une maladie aux effets similaires…

Erreurs :
- Sur le tableau des symptomes, le mot « diarrhea » est incorrectement orthographié « diarea ».
- Lorsque House fait sa prescription pour de la Vicodine ES, il écrit un dosage différent de celui dont est constitué la Vicodine ES : il met celui de la Vicodin « normale ».

- On entend à la fin de l’épisode You can’t always get what you want des Rolling Stones, qu’on entend à plusieurs reprises au cours de la série. En dehors des Rolling Stones, on entend aussi Feel good inc de Gorillaz et D. Jolicoeur, interprété par Gorillaz.

Acteurs

Edward Edwards reviendra dans l’épisode suivant La Vérité est ailleurs. Il a surtout joué à la télévision, comme dans les séries Code Quantum (épisode Le Sauvage), Buffy contre les vampires (épisode Le Soleil de Noël), L’incroyable Hulk, Shérif fais-moi peur, Desperate Housewives, JAG (2 épisodes chacun pour les trois dernières), ALF, Matlock, Le Prince de Bel-Air, La vie à tout prix, The Sentinel, Les Experts, Les Experts : Miami, 24 heures chrono, Monk, NIH alertes médicales, Frasier, Boston Justice, Esprits Criminels, Shameless US, FBI portés disparus (2 épisodes), etc.

Clare Kramer (1974) est surtout connue pour avoir été la sadique (et hilarante) Glory dans 13 épisodes de la série Buffy contre les vampires. Elle joue dans quelques films et séries mais est relativement discrète professionnellement. Elle a crée une série : Take five (13 épisodes).

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2. LA VÉRITÉ EST AILLEURS
(CANE & ABLE)



Scénario : Russel Friend et Garrett Lerner, d'après une histoire de Russel Friend, Garrett Lerner, Lawrence Kaplow, et David Shore
Réalisation : Daniel Sackheim

- House, Clancy's gone missing.
- You take Alpha Centauri, Foreman can look on Tatooine, and Cameron can set up an intergalactic checkpoint. Let's pray he hasn't gone into hyperdrive - we'll never catch him.

Clancy Green, 7 ans, est persuadé avoir été enlevé par des extraterrestres et que ses derniers vont revenir. Une nuit, il est « kidnappé » et on le retrouve le lendemain matin dans le jardin, avec une hémorragie rectale. House et son équipe ont du mal à résoudre ce cas bizarre car le corps de Clancy est peuplé de cellules étrangères. House constate avec colère que sa jambe recommence à lui faire mal…


Quand Dr.House rencontre X-Files

C’est bien à la glorieuse série de Chris Carter que David Shore rend hommage. Beaucoup de séries SF modernes ont rendu hommage à leur modèle, mais on voyait mal Dr.House lui faire un clin d’œil : confronter une série « rationnelle » et une série « SF » relève de la gageure, et en effet, l’épisode ne se penche pas trop du côté X-Files. Toutefois, on est amusé de voir le mystère des implants métalliques et des ADN étrangers expliqué de façon rationnelle. On aime aussi que House, rejettant toute hypothèse extra-terrestre, agit comme une Scully (ou un Doggett) l’aurait fait. On regrette que Chase, en mode « Mulder » (ou Monica) soit un peu mis sur la touche. La vérité est ailleurs - hommage évident au credo de la série - reste un épisode de Dr.House, un peu trop mécanique, mais dont les allures (faussement) fantastiques viennent à la rescousse.

Après vingt minutes toniques, l’épisode s’essouffle avec des diagnostics manquant d’humour ou d’allant et un final anticlimatique. Un statisme heureusement compensé par l'enchaînement trépidant des clins d'oeil à X-Files, fort délectables même pour ceux qui ne connaissent pas cette série, grâce à leur saveur Fantastique. Les mésaventures de Duane Barry, euh pardon, de Clancy Green (Skyler Gisondo, un peu tête à claques) commencent fort avec son « kidnapping » aux effets spéciaux inspirés directement des X-Files. Bon, on sait que ça ne peut être qu’une hallucination, mais l’effet est réussi. La télé qui déraille fait penser à celle d’Âmes damnées, Clancy, certain d’avoir un implant injecté par les aliens, s’ouvre la nuque avec un couteau, et y trouve... un implant, House se demandant si Clancy est un hybride renvoie à la Conspiration gouvernementale, Foreman mentionnant une disparition de temps est une référence aux enlèvements, le deuxième « enlèvement » de Clancy est copié/collé sur celui de Samantha Mulder dans Les petits hommes verts, l’opération finale invite les aliens de Roswell dans la partie, et le mémorable diagnostic final fait penser à l’épisode Les Calusari. Tout cela est confirmé par une citation explicite de la série par House (toujours accro au porno comme un certain agent du FBI…) qui vient de découvrir que son patient a deux ADN, soit un des symptômes les plus WTF de la série.

Wilson, Cuddy, et Cameron connaissent la Vérité sur le patient de l’épisode précédent, et ce Syndicat dirigé par Wilson (dans un rôle similaire à l’Homme à la Cigarette) ne dira pas la Vérité à House dans l’espoir de le voir redevenir humble. Wilson veut à tout prix nier en bloc cette "Conspiration" (le terme est de lui). House nous donne une clé de son comportement lors de sa dispute avec Wilson : il ne se prend pas pour Dieu, mais le fait d’avoir raison, envers et contre tout, est le moteur de sa vie, celui qui le rend si efficace. Une nouvelle application de son mélange de haine et d'admiration envers sa personne. Cette déclaration l’humanise étonnament.

Sheryl Lee joue la mère du patient, et on rappelle qu'elle fut le célèbre cadavre de Twin Peaks où un certain David Duchovny fit ses premières armes. L’histoire secondaire, House souffrant de nouveau de sa jambe, reste cependant périphérique. Mais on apprécie le final voyant House se résignant à reprendre sa canne, comme une porte de sortie physique et psychique qui claque sans plus jamais se rouvrir.

L'épisode trouve bien de la sève dans son humour : la vanne lourdement foireuse de Chase, House se déchaînant sur Cuddy en pensant qu'elle est enceinte, McNeil en convalescence songeant déjà à ses besoins sexuels, et surtout la tonitruante dispute entre Cameron et Cuddy (note : j‘ai un faible pour la première version de la scène, assez énorme…). Sans oublier le duel en acier trempé entre Chase et Foreman. Summertime... On remarquera que Stephanie Venditto, qui joue l’infirmière Brenda Previn, a pour une fois quelques lignes à prononcer.

En tout cas cet épisode n’est pas passé inaperçu puisque l’année suivante, le Dr.Joshua Lee demanderait à Christian Troy et Sean McNamara de lui enlever un implant métallique qui aurait été inséré à l’arrière de son crâne par des aliens (Nip/Tuck, épisode 5.07). Ce dernier épisode a pour titre VF… La Vérité est ailleurs. Décidément, on reste pantois devant les efforts démesurés des traducteurs français…

Infos supplémentaires

- La première version de la scène où Cameron se dispute avec Cuddy était beaucoup plus trash, les comédiennes lachant 32 mots orduriers en 58 secondes, avec interprétation outrepassant toutes les limites du cabotinage.

- House, quand il a du temps dans son bureau, mate des vidéos et films pornographiques. Au moins un point commun avec Mulder. Par contre, il ne regarde pas X-Files. Dommage…

- Cuddy dit que McNeil s’est levé après des années d’immobilisation tel « Rip van Winkle ». Il s’agit du personnage principal de la nouvelle éponyme de l’écrivain Washington Irving qui rencontre un équipage fantôme. Cet équipage lui fait boire une liqueur qui le fera dormir 20 années durant. Cette nouvelle inspira Rod Serling pour écrire le scénario de Rendez-vous dans un siècle (titre VO : The Rip wan Winkle Caper) de son anthologie télévisée La Quatrième Dimension. La VF remplace par Hibernatus.

- Lorsque Cameron demande de trouver un « cunning plan » pour aider House, elle cite un gimmick de la série des BlackAdder, où joua Hugh Laurie. Lorsque House dit « Il nous faudrait un plus gros bateau » : il cite la célèbre réplique des Dents de la mer (1975).

- La chanson de l’épisode est Gravity de et par John Mayer.

Acteurs

Skyler Gisondo (1997) a commencé très jeune à la télévision, jouant dans de nombreuses séries. Ses deux rôles les plus notoires sont le Shawn jeune dans Enquêteur malgré lui (11 épisodes), et Bryan Pearson dans The Bill Engvall show (31 épisodes), qui lui valut un Young artist's award. Il fut aussi dans Ce que j’aime chez toi, Monk, Cold Case, Esprits Criminels, Les Experts, Les Experts : Manhattan, Earl, Urgences (2 épisodes), Terminator les chroniques de Sarah Connor, House of lies, Once upon a time, etc. Il a joué quelques seconds rôles au cinéma comme The amazing Spider-man 1 et 2, La nuit au musée 3, etc.

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3. MARCHÉ CONCLU
(INFORMED CONSENT)


Scénario : David Foster
Réalisation : Laura Innes

- We have to do all of that in 24 hours ?
- Nah. Whatever you don't get done, you can finish at the autopsy.

Le prestigieux chercheur en cancérologie Ezra Powell, 71 ans, s’écroule dans son laboratoire alors qu’il menait une expérience sur des rats. La souffrance est telle qu'il demande à l’équipe de House de « l’aider à mourir ». House lui arrache un délai de 24 heures pour trouver ce qu’il a, mais échoue au bout du délai imparti à trouver le diagnostic. Powell réclame donc une dose létale de morphine, provoquant des dissensions dans l’équipe…

L’épisode s’intéresse à la grave question de l’euthanasie, cette « mort heureuse » donnée à des patients atteints d’horribles maladies. Cet épisode est généralement estimé des fans, ce qui n’est pas le cas de votre serviteur : alors que la série se montre très agile quand elle aborde des questions éthiques, elle échoue ici à mener un débat intéressant, préférant se concentrer sur le cas en lui-même (assez moyen) ainsi que sur les sentiments trop fluctuants de nos médecins, jusqu’à la lassitude (surtout Cameron).

Le cas démarre bien avec l’idée des 24 heures maintenant le début de épisode dans l’urgence. Hélas, l’épisode fait ensuite retomber la pression. S’ensuivent examens insipides, scènes longuettes, et rebondissements mous. Certes, la fin est sombre, bellement écrite, mais l’épisode n’arrive pas à émouvoir, encore moins à captiver. A-t-on le droit de tuer un être humain qui souffre horriblement et qui demande à en finir ? Les avis sont partagés : Chase défend l’euthanasie, disant que la décision est mûrement réfléchie et qu’il faut la respecter. Foreman est contre car veut encore croire en la guérison. Cameron a une opinion tout à fait stérile : tuer Powell avec de la morphine la met en horreur, tout comme celle de le voir souffrir. En fait, elle veut respecter sa volonté mais ne pas l’honorer. House, on s'en doute, n’a aucun jugement : il veut le préserver en vie juste pour résoudre son énigme. Les enjeux ne suivent pas car l’épisode n’apporte que des ressassements ou des réponses confuses. L'épisode dévie en rajoutant une face obscure à Powell dont on apprend les expériences douteuses sur des nourrissons, mais cela ne nourrit pas le débat. Cependant, dans un pays aussi religieux que les USA où le droit à la vie est primordial, voir des gens pour l’euthanasie sans les juger est une preuve du courage de la série. Dommage que la thèse de l’épisode soit si confuse. Mais Joel Grey a saisi toutes les nuances de son personnage.

Cameron, apprenant les expériences de Powell, dit que détester ce patient ne changera rien à sa décision de ne plus faire d‘examens… ce qu’elle fait pourtant. Agissant ainsi impulsivement, Cameron se décrédibilise. Ce personnage est certes bon pour l’expression des doutes en chacun de nous, mais utilisé à l’excès, cet aspect devient contre-productif. La réponse du professeur qui la félicite d’avoir enfin « défendu ses propres convictions » est improbable, déplacée, et contredite par le regard dur de Cameron. Le personnage fait ici un retour en arrière, ne sachant pas se décider dans les moments les plus importants, loin de l’ironie assumée dans Faux-semblants (saison 2) ou de l’intransigeance froide de … Au suivant. (saison 2). Jennifer Morrison transcrit chaque émotion avec réussite, ce qui paradoxalement plombe tout l'épisode à cause de ses changements incessants. Le revirement final est une énième contradiction, entâchant la beauté douloureuse de la coda. Bien que tout aussi moyen, Mise au jour (saison 7) ménera un débat sur le sujet plus convaincant.

Le cas secondaire est original car ce n’est pas le patient qui attire l’attention mais sa fille. En effet, cette jolie Lolita provocante semble avoir flashé sur House et lui fait des avances de plus en plus explicites. House semble flatté de l’attention qu’elle lui porte mais reste prudent, étant donné qu’elle est encore mineure, ce dont apparemment la fille a l'air de se moquer (on relèvera les regards effarés de Cameron).

Leighton Meester, ici dotée de sa blondeur naturelle, prouve que malgré qu’elle se soit commise par la suite dans une série aussi mièvre que Gossip Girl, elle est une brillante actrice en devenir. Là, elle se pose pas de questions, elle fonce, elle s’impose, et pis c’est tout ! L'anti Blair Waldorf quoi. On note que c’est en jetant un coup d’œil sur le string de la demoiselle que House trouve la solution du cas principal, une trouvaille bien décalée. Leur duo improbable et drôle donne les meilleurs moments de l’épisode. Cependant, une question nous taraude : House consentirait-il vraiment à coucher avec une fille de 18 ans ? Il est vraiment partagé entre l’amoralité de la chose et cette brûlante tentation. Affaire à suivre...

Pour info, cet épisode est à regarder en VO ainsi que le suivant, à cause de l’horrible voix VF de Meester qui dénature totalement son personnage.

Infos supplémentaires

- Septième échec de House, ici total ; son patient mourrant d'une maladie incurable.

- Joël Grey est le père de Jennifer Grey, qui sera à son tour une patiente dans House-sitter (saison 7).

- L’horloge dans la salle d’IRM est labellée « Stoia Tucker », un clin d’œil à l’épisode Être ou paraître (saison 2) où c’est le nom de la société qui sponsorise le combat de Sebastian Charles.

- La musique entendue dans le laboratoire de Powell dans l’introduction est le fameux Prélude de la Première (en sol majeur) des Six suites pour violoncelle seul de Jean-Sébastien Bach (1685-1750), une de ses pièces les plus connues. C’est ici le violoncelliste japonais Yo-Yo Ma qui le joue.

- Il y’a une contradiction entre cet épisode et Retour en force, car House déclare s’occuper d’un patient par semaine, alors que Cuddy déclarait que House ne s’occupait que de 24 cas par an.

- Pay no attention to the man behind the curtain dit House à Powell, prononçant une réplique du Magicien d’Oz (1939), dont l'adaptation à Broadway compta d'ailleurs Joel Grey dans la distribution. Il dit aussi une réplique bien connue de Pulp Fiction (1994) : The rats « got médieval on his ass ». Il fait allusion aussi Misty May, une joueuse de Beach Volley, ce qui laisse à penser que House connaît bien ce sport ou du moins son versant féminin.

- Erreurs :
Lorsque House palpe les chevilles de Powell, sa jambe gauche réagit. L’instant d’après, House déclare qu’il n’a aucune réaction à la jambe gauche.
Quand House va injecter la morphine à Powell, la seringue est tantôt à moitié pleine, tantôt au quart pleine.
La balle de tennis de House est au début rouge et violette. Plus tard, elle est rouge et grise.
Quand House examine Mark, le père d’Ali, il pointe son doigt sur son sourcil, mais au plan suivant immédiatement, il le pointe sur son nez.

- La chanson de l’épisode est Into Dust de et par Mazzy Star.

Acteurs :

Joel Grey (1932) est surtout connu pour avoir été le Maître de cérémonies dans le film Cabaret (1972), rôle qu'il a créé dans le musical original de Broadway. Il a obtenu un Tony award et un Oscar pour ce même rôle, ce qui n'est arrivé qu'à sept autres acteurs. Il a fait une petite carrière au cinéma (Sherlock Holmes attaque l'Orient-Express, Dancer in the Dark...) mais a surtout joué au théâtre et dans les séries. Un de ses rôles les plus remarquables fut Adam, dans le double épisode final Conundrum du feuilleton Dallas. Mais il a aussi joué dans L'Homme de fer, Night Gallery, Au-delà du réel l'aventure continue (2 épisodes), Star Trek : Voyager, New York section criminelle, Oz (6 épisodes), Alias (épisodes Haute voltige, Sloane & Sloane, L'orchidée sauvage), Buffy contre les vampires (épisodes Pour toujours, Sans espoir, L'Apocalypse), Grey's anatomy, Private practice, Nurse Jackie, Warehouse 13, Les Experts, etc. Il est le père de Jennifer Grey (Dirty Dancing...).

Leighton Meester (1986) reviendra dans l'épisode suivant Dans les yeux, et retrouvera Hugh Laurie dans le film The Oranges où ils ont les rôles principaux. Née d'une mère qui passa plusieurs années en prison pour drogue, elle fut d'abord mannequin. Elle devint ensuite une des comédiennes les plus douées (et une des plus jolies !) de sa génération, malgré qu'elle doit sa célébrité pour s'être noyée dans le rôle de Blair Waldorf dans l'inénarrable Gossip Girl (121 épisodes). Elle a joué également dans New York police judiciaire, Boston Public, Deuxième chance, 7 à la maison, North Shore, Numb3rs, Les Experts : Miami, Veronica Mars (2 épisodes), 24 heures chrono (4 épisodes), etc. Elle est régulièrement dans le haut des classements des plus belles femmes du monde. Elle est également chanteuse d'électro-pop.

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4. DANS LES YEUX
(LINES IN THE SAND)


Scénario : David Hoselton
Réalisation : Newton Thomas Sigel

House doesn't have Asperger's. The diagnosis is much simpler : he's a jerk.

- After that look, I'm feeling a little frisky, looks like you're up.
- I'm ovulating, let's go.
- Oops, the "frisky" just went away.

- I want my old carpet back.
- It was stained with blood.
- Yeah. My blood. Which makes the carpet part of me. I want it back. I want to be buried with it !

- The girl would have sex with an invertebrate.
- Come on. You're not that bad.

Fecal smear, talk to me !!

Adam, 10 ans, est atteint d’autisme sévère. Ses parents l’amènent à l’hôpital après une crise d’étouffement. Tout au long de son traitement, il ne cesse de dessiner des petites vaguelettes. L’équipe a du mal à traiter le cas : Cuddy a fait changer la moquette du bureau de House, souillée de son sang depuis qu’il s’est fait tirer dessus, et refuse de lui remettre l'ancienne. House se venge en faisant ses diagnostics différentiels dans les lieux les plus incongrus de l’hôpital tant qu‘il ne l’aura pas récupérée. Pour ne rien arranger, Ali, la fille du patient secondaire de l’épisode précédent, entame un véritable harcèlement sexuel à son égard…


Cet épisode est un des plus drôles de la série entière. L’arrivée du scénariste David Hoselton crée l'événement. Son premier épisode pour la série est un véritable stand-up Housien. On rit d’un bout à l’autre d'un humour délirant et frénétique. A l’opposé, le cas principal permet en contrepoint de très beaux moments d’émotion et de gravité. Dans les yeux est ainsi un des épisodes les plus réussis de la série. Hoselton par la suite, si on excepte deux ou trois accidents, écrira parmi les meilleurs épisodes, généralement avec un humour dévastateur.

On ne sait pas trop quoi citer parmi tout le déferlement de vis comica : scène bien allumée où Cuddy traite House comme un enfant, consultation avec des patients atteignant des degrés de crétinisme à faire pâlir Max la Menace, et... scènes hilarantes avec la torride Ali. La demoiselle renouvelle ses avances sexuelles et se met en topless pour exciter notre cher médecin (caméra hélas trop pudique) qui n’en demandait pas tant. La deuxième scène est aussi tordante : elle l’attend dans le parking, refait son numéro, et House est déjà moins péremptoire quant à ses propositions. Evidemment Cuddy arrive à ce moment-là et ça vire au duel verbal.

La troisième scène est encore plus géniale : elle démarre très fort avec une engueulade génialissime entre House et Cuddy qui tente de faire passer Ali pour une monomaniaque, leur conflit est tel qu’on se croirait dans les disputes légendaires de Maddie Hayes et David Addison de la série Clair de Lune : les dialogues claquent à chaque seconde ! Puis, House redevient grave et accepte, sous l’insistance de Cuddy, de convaincre Ali de sa folie… mais si on espérait un moment plus sérieux, c’est râpé, House et Ali partant très vite dans une parodie de soap opera où ils parlent de leur liaison condamnée par la société à demeurer platonique… l’épisode y va vraiment à fond les manettes, dézinguant tous les clichés des « Daytime series ». Et comme si ça ne suffisait pas, un énorme twist final couronne cette histoire impeccable et nous laisse pliés en quatre. La chanson Waiting on an Angel de Ben Harper plus inappropriée à la situation tu meurs complète cette histoire de fous. Leighton Meester accomplit la performance d’être encore plus punchy que l’épisode précédent : TNT de sensualité et de loufoque ultra-concentrée ; c'est sans doute une de ses plus grandes compositions.

House ne veut pas faire de séances sans sa moquette : attaché comme un enfant à cette trace tragique de sa vie (la tâche de sang), il va gâcher la vie de l’hôpital en travaillant n’importe où pourvu que ça emmerde sa patronne : salle d’attente où House crie les examens à faire devant tout le monde, bureau de Wilson qui donc ne peut plus travailler correctement (magnifiques échanges avec House), puis salle de réunion, sabotant ainsi les rendez-vous administratifs de Cuddy. L’apothéose est quand il se prend pour Dieu en personne et fait la séance dans la chapelle de l’hôpital. Hugh Laurie en fait quinze tonnes. Gag final : Wilson parvient à convaincre Cuddy de redonner la moquette à House, jusqu’à ce qu’on s’aperçoive que c’était une combinaison de House. Brillantissime… Enfin, Wilson qui fait aussi une petite avance à Cuddy (non mais c’est le printemps ou quoi ?!!) c’est également à ne pas rater.

Au milieu du torrent comique de l’épisode, nous sommes pris de sympathie pour ce pauvre Adam, prisonnier de son corps. La réalisation de Newton Thomas Siegel, avec ses angles et couleurs bizarres nous plonge idéalement dans la tête de l’enfant. La détresse de ses parents, surprotégeant leur enfant comme par compensation, est émouvante, sans pathos, car restant à l'arrière-plan. L’affection de Wilson pour les jouets que lui donnent les petits cancéreux est touchante aussi. Mais ce sont les réflexions de House qui sont sublimes : ainsi cette incroyable scène où il envie le sort de son patient, débarrassé par son autisme des conventions sociales, de l’hypocrisie des rapports humains. Les règles du savoir-vivre bien-pensant ne sont indispensables que pour les médiocres comme disait Franz Liszt à Richard Wagner. Maxime qui pourrait être celle de House, qui en a marre d’évoluer dans ce monde faux, apparent. Ses déclarations, très Numéro 6, sont celles d’un homme fatigué de vivre et qui pourtant trouve ses raisons de vivre en se révoltant, en refusant tout conformisme. Il dénonce l’intolérance de la société à l’égard de ceux qui sont différents, qui pensent et agissent différemment de la norme. On est pas loin de ce chef-d'oeuvre mythique qu'est Le Prisonnier.

Le cas est classique mais efficace, avec ses moments de bravoure (l’œil qui bascule, House avec le masque…). La scène finale, avec son twist médical très rusé et intelligent est superbe, presque sans paroles. Nous voyons que House a de la compassion, mais c’est de la compassion froide, sans chaleur. House est décidément un des personnages les plus fascinants des séries télé. Le jeune Braeden Lemasters, non autiste dans la vie réelle, accomplit une prestation saisissante.



Infos supplémentaires :

- Une foultitude de références dans cet épisode. House pastiche Le Magicien d’Oz (1939) en saluant Ali d’un Hello my pretties ! Puis lors de la scène d’adieux avec Ali, Casablanca (1942) en mentionnant « Victor » (le mari d’Ilsa). Fait référence à 007, puis son cri « Attica, attica attica !… » quand Cuddy refuse de lui rendre sa moquette est tiré de Un après-midi de chien (1975).

- Erreurs :
La majorité sexuelle dans le New Jersey est de 16 ans et non de 18. House pourrait donc coucher avec Ali sans se préoccuper de la loi.
La moquette réinstallée dans le bureau de House est trop grande pour la pièce. De plus, House s’est écroulé dans House à terre (saison 2) dans le fond de la pièce et non juste devant la porte, là où se trouve maintenant la tâche de sang.
Adam trace des lignes pour exprimer ce qu’il voit. Mais à part à la fin, quand on voit ce qu’il voit de son point de vue, on ne voit pas les lignes.
House trouve les lignes dans son œil gauche, mais c’est pourtant son œil droit qui a été atteint.
Quand Adam commence à stresser, la position de ses mains varie d’un plan à l’autre.

- La chanson de l’épisode est Waiting on an Angel de et par Ben Harper.

Acteurs :

Braeden Lemasters (1996) a commencé sa carrière dans les séries télévisées. Entre autres, Six pieds sous terre, Esprits criminels, Urgences, The Closer : L.A Enquêtes prioritaires (épisode Enquête sous pression), Grey's anatomy, New York unité spéciale, Ghost Whisperer, Cold Case, NCIS : enquêtes spéciales, Men of a certain age (17 épisodes), Betrayal (13 épisodes), etc.

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5. L’AMOUR DE SA VIE
(FOOLS FOR LOVE)

Scénario : Peter Blake
Réalisation : David Platt

Infectious or environmental... all we have to do is check out parasites, viruses, bacteria, fungi, prions, radiation, toxins, chemicals ; or it's internet porn related. I'll check the internet, you guys cover the rest of the stuff.

Jeremy (caucasien), et Tracy (une métisse) sont un très jeune couple marié (20 ans). Un soir, ils sont pris dans un braquage de restaurant. Le choc entraîne une crise respiratoire de Tracy. Lorsque Jeremy tombe malade à son tour, la situation se complique. Pendant ce temps, House a surpris Wilson devisant avec Wendy, une nouvelle infirmière, et malgré ses dénégations, est persuadé qu’il sort avec elle. Pour ne rien arranger, House se moque ouvertement d’un patient qui exige des excuses. House refuse, ignorant qu’il vient de commettre une grave erreur…


Cet épisode se regarde sans déplaisir mais son cas traîne en longueur ; il vaut surtout pour son cruel twist final. L’épisode reprend des couleurs dès lors que House enquête sur la relation Wilson-Wendy, et quand il ouvre un arc narratif de sept épisodes : l’arc « Tritter ». L’ouverture de cet arc est l’intérêt principal de L’amour de sa vie où House, tombant sur un patient moins docile que d’habitude, commet l’erreur de le sous-estimer.

L’épisode commence bien avec House contrarié que Wilson s’entendant bien avec la jolie nouvelle recrue de l’hôpital. Evidemment, ça part vite dans les échanges bien piquants. L’instant psy est régalant : House dit s’inquiéter que Wilson flirte à tout bout de champ, et Wilson réplique que lui, House, a peur de le voir être engagé dans une relation stable. Ses trois mariages successifs ont été des échecs, et si la fois suivante était la bonne, House pourrait avoir peur de le perdre. D’ailleurs, la sorte de jalousie qu’éprouve House quand Wilson flirte est assez troublante. Sans aller parler d'homosexualité refoulée des personnages principaux, on constate que House est très possessif, et semble mal digérer que Wilson puisse ne pas avoir besoin de lui. D’ailleurs, la relation que nouera Wilson dans la saison 4 démontrera ce fait. Durant l’épisode, il fera tout pour savoir si Wilson sort ou non avec elle ce qui vaut plusieurs effarements Wilsoniens délicieux. Il est intéressant de comparer le "Hilson" de cette saison avec celui des trois dernières saisons, où le côté "amour vache" sera remplacé petit à petit par des démonstrations d'affection moins bourrues, plus émouvantes et profondes. La révélation finale déchaîne le rire, avec un House qui s'est laissé piéger par les apparences (et nous avec).

Le cas trop prévisible enchaîne diagnostics sans humour et péripéties convenues, même si le cauchemar suivi du coma subit de Tracy est une bonne idée. Cependant, les déclarations d’amour répétées de Jeremy lassent à la longue ; et le cas s’embourbe dans des complications malhabiles : on ne sait plus trop qui a quoi ni qui veut quoi. La situation confuse se dénoue brutalement avec le terrible twist final, vraiment méchant. On avait affaire à un couple qui semblait parfait, harmonieux, qui s’aimait vraiment. Loin de la vision pessimiste du Couple-qui-s’aime-mal de la série. Mais ce couple-là n’échappe pas non plus à son destin : Jeremy et Tracy sortent de leur maladie totalement détruits. L’épisode se termine là, sans qu’on sache si le couple arrivera à passer l’obstacle. Foreman doit alors sacrifier sa soirée pour faire son devoir de médecin et tenir compagnie à un Jeremy brisé. Encore un happy end qui est tout sauf happy ! Cette superbe fin est hélas affaiblie par le jeu souvent caricatural de Ricky Ullman et Jurnee Smollett.

Michael Tritter, nouveau nemesis de House, nous frappe dès les premières secondes par sa corpulence et son ton narquois. Pendant que House le vanne, il l’analyse en quelques secondes : misanthrope, solitaire, profitant de sa figure d’handicapé ; House en reste comme deux ronds de flan mais ne se prive pas de lui faire une mauvaise farce. Deuxième scène : Tritter revient réclamer des excuses, House refuse et surenchérit. Chaude ambiance (- Je ne veux pas vous intenter un procès. - C’est cool ! - Je veux vous voir vous débattre dans votre merde. - Moins cool !). La troisième scène est un coup de théâtre, Tritter a intelligemment calculé son coup en remarquant la dépendance de House à la Vicodin. L’affrontement s’annonce tendu. David Morse paraît déjà très inquiétant. Son allure massive, autoritaire, et son calme glaçant impressionnent. C’est un adversaire à la hauteur de House, bien plus dangereux que Vogler. Irritation et cynisme noir sont le carburant détonnant du jeu de Hugh Laurie dans cet épisode.

Trois melons tout juste.


Infos supplémentaires :

- Premier épisode (sur six) avec le personnage de Michael Tritter. David Morse connaissait David Shore qui avait travaillé sur une série où il tenait un des premiers rôles : Le justicier de l’ombre. Shore voulait un adversaire pour House qui pouvait également rivaliser avec lui par la taille. Il fit donc appel à David Morse, une des rares personnes de son entourage de haute taille qu’il connaissait. Morse ne connaissait pas la série, et en regardant le script, s’étonna qu’un personnage aussi antipathique que House eut un tel succès. Ce fut finalement sous le conseil d’amis complètement fous de la série (dixit l'acteur) qu’il accepta ce rôle.

- Le titre fait référence au film Fool for love de Robert Altman.

- Wilson et Foreman sont des amateurs de jazz.

- House joue à un jeu vidéo appelé Chyro City. Il semble que ce soit un jeu inventé spécialement pour l'épisode car aucun jeu ayant ce titre n'est référencé.

- Lorsque Tritter arrête House, il remarque que ses pupilles sont dilatées puis déclare qu'il est sous l'influence de Vicodin. Cependant, la Vicodin ne cause pas de dilatement des pupilles, même à haute dose.

- La chanson de l'épisode est Walter Reed de et par Michael Penn.


Acteurs :

David Morse (1953) et ses 1m93 ne sont pas passés inaperçus dans le milieu. Sa stature imposante et son grand talent lui ont ouvert rapidement les portes du cinéma où il demeure le plus actif (une cinquantaine de films). Côté télévision, on retiendra surtout son personnage de Jack Morrison dans 124 épisodes de la série Hospital St-Elsewhere, Mike Olshansky dans Le Justicier de l’ombre (40 épisodes), et Terry Colson dans Treme (30 épisodes). Mais on peut aussi citer Les contes de la crypte, Médium (le triple épisode Le Bon… La Brute… et L’Innocent), etc.

Jurnee Smollett (1986) est principalement une actrice récurrente et semi-régulière de séries télé, séries qui n'ont pas cependant traversé l'Atlantique : La fête à la maison (12 épisodes), Seuls au monde (20 épisodes, où elle joue avec ses quatre frères et sa soeur !), The Defenders (18 épisodes), Parenthood (7 épisodes), True Blood (17 épisodes), et surtout la populaire Friday night lights (26 épisodes), mais cette ravissante métisse a aussi joué dans d'autres séries plus connues comme Urgences, Grey's anatomy, New York police blues...

Raviv Ullman (1986) est un comédien de théâtre et des musicals de L.A (il est également batteur, guitariste, et chanteur pour un groupe de musique caritatif : Teen AIDS Prevention). Son rôle le plus connu est celui de Kip dans Rita Rocks (32 épisodes). Il a joué dans New York Section criminelle et Unité spéciale, Haine et passion, Big Love, Cold Case, Criminal Minds suspect behavior....

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6. QUE SERA SERA
(QUE SERÁ SERÁ)


Scénario : Thomas L. Moran
Réalisation : Deran Sarafian

Apparently, Cuddy has widened her sperm donor search to include Neanderthals.

George est un homme obèse de 250 kg. Il a sombré dans le coma dans son appartement et est amené à l’hôpital par les pompiers. House, libéré sous caution, revient à l’hôpital. Mais Tritter ne le lâche pas, et le poursuit pour détention illégale de stupéfiants : il a perquisitionné chez House et a trouvé chez lui un énorme stock de Vicodin. Il le menace d’un procès. Pendant ce temps, George se réveille de son coma en pleine séance d’IRM…


Le scénario de Thomas L. Moran n’a pas de faiblesse particulière mais est trop rigide, sans audaces ni fantaisies qui font habituellement tout le sel de la série. Ceci dit, l’action est menée tempo presto, ce qui n’est pas fréquent dans la série qui préfère généralement prendre son temps. Le cas en particulier fourmille de développements intéressants et bénéficie d’un patient astucieusement dessiné. Quant à la menace Tritter, elle enfle davantage dans cet épisode à la fin incertaine et instaure une tension qui va encore s’accentuer.

L’obésité est un thème qui avait déjà été traité dans Symptômes XXL (saison 1), et George est une version masculine de la tonique Mme Hernandez : assumant son poids et ne voulant rien y changer. Pas étonnant puisque Moran a écrit ces deux épisodes. On sent l’effet de répétition. Si l’épisode n'est pas tout à fait à la hauteur de son modèle, il défend tout aussi bien son plaidoyer pour la différence. Refusant de se plier aux canons, George clame sa fierté d’être ce qu’il est. Hédoniste, adepte de tous les plaisirs (musique, prostituées, et surtout bouffe), il refuse de se modérer, quitte à se détruire. Contrairement au défoncé Kalvin de Partie de Chasse (saison 2), Moran ne le juge pas et même semble le soutenir en approuvant son Carpe diem car George sait où il va, sait ce qu’il veut, à la différence de Kalvin. Mais Moran nuance son propos en le faisant mourir à la toute fin, semblant nous dire qu’une vie de plaisirs consommés à la chaîne mène fatalement à sa perte. Pourtant, après l’annonce du diagnostic létal, George ne regrette rien, et accepte sa mort. Il a aimé profondément sa vie, en a joui au maximum, et tel un sage, se retire. Ce personnage troublant, gros et heureux, est un excellent support à l’épisode. La voix douce et chaleureuse du toujours excellent Pruitt Taylor Vince (bien reprise en VF) fait un curieux effet. Bien entendu, l’équipe n’oublie pas de nous rappeler les méfaits de l’obésité via quelques rappels salutaires qui font particulièrement mouche (a fortiori au pays de la malbouffe que sont les USA).

D’excellents moments de bravoure et/ou comiques : le poids de George qui rend difficile l’IRM, le spectaculaire saut par la fenêtre, House qui donne des surnoms à son patient, George refusant tout examen en rapport avec son poids (tout comme la mère de Jessica à propos de sa fille dans Symptomes XXL), House ordonnant à Chase de rester sur son cul - en clair de ne rien faire - ou encore la scène du patient secondaire qui pourrait servir de maître-étalon sur l‘art et la manière de « vous foutre de la gueule d’un ahuri ». Sans oublier House qui sait vraiment bien plaidoyer sa cause devant son avocat blasé par tant de mauvaise foi.  Le parallèle établi entre George et House est assez poilant : anticonformistes, peu coopératifs, rationnels, aimant la musique et les prostituées… résultat : des échanges avec Wilson assez gratinés !

La guerre est déclarée entre Tritter et House. Leurs échanges perfides sont savoureux : si on ne s’étonne guère des remarques ironiques de House qui n’a décidément pas peur d’insulter un flic, on admire comment ce dernier l'analyse ou se montre aussi adroit que lui dans les concours de vannes (l’entendre dire qu’il surestime son pouvoir de domination est un superbe rabattage de caquet). La découverte de l’énorme sac de médocs (Ne jamais sous-estimer la bêtise d‘un drogué !), dans une scène toute en tension, va de pair avec le personnage de House qui exagère ses actions en tous domaines. Cette révélation fait envisager une hypothèse folle : et si House était shooté en permanence ? Si les patients savaient ça… Wilson tente de sauver House quand Tritter découvre les ordonnances falsifiées, mais Tritter n’est pas dupe. Lorsqu’il le quitte, s’éloignant lugubrement de l’écran, on se dit que la bataille est très mal engagée pour les deux médecins avec un adversaire aussi incisif. David Morse, minéral, imprime la rétine.

Enfin l’épisode ravira tous les fans du Hameron. Ainsi, Cameron ne cesse d’agir en faveur de House (donc contre les règles, voire la loi) : elle convainc ses co-équipiers de faire l’IRM, ment effrontément à Cuddy, s’inquiète davantage du retard de son boss que du patient. La scène finale joue beaucoup sur son attitude à la fois avenante et fermée. Elle refuse de dire à House pourquoi elle l’a aidé. Le spectateur en conclura que c’est par amour mais aussi pour son attirance naturelle envers les « gens cassés » comme House et George, avec qui elle se montre très protectrice. Cameron continue son chemin vers la maturité, délaissant peu à peu ses oripeaux soap, devenant moins lisse, plus rude. Evidemment, le Hameron reste terriblement à sens unique, House ne trouvant rien de mieux que de la traiter de chieuse après qu’elle lui ait sauvé la mise. Jennifer Morrison, en première place, a un investissement comparable à celui de son personnage, et est pour beaucoup dans le succès de ses scènes.

Un crû pas exceptionnel mais de bonne qualité.

Infos supplémentaires :

- Huitième échec de House (ici total) : son patient meurt d'une maladie incurable.

- House arrive généralement à son travail « entre 8h et 10h » (Cameron). Il aime les meubles danois et ce sont les femmes russes qui lui plaisent le plus. L'arrivée de Dominika Petrova en saison 7 confirmera ce fait. Sa guitare est une Gibson Les Paul.

- Chase déteste les obèses.

- Wilson aime les betteraves depuis qu’il a 5 ans. L’acoustique est parait-il excellente entre le bureau de Wilson et la salle de diagnostic différentiel.

- Les médecins remarquent que George a comme symptôme un nystagmus (trouble visuel intempestif). Pruitt Taylor Vince, l’interprète de George, est réellement atteint de ce trouble.

- House surnomme Tritter « Inspector Clouseau », ce qui est une référence à la fameuse comédie La Panthère rose (1963). Au début de l’épisode, il surnomme George « Jabba », ce qui renvoie au fameux « animatromique » du Retour du Jedi (1983), sixième volet de l’héxalogie Star Wars.

Acteurs :

Pruitt Taylor Vince (1960) est une figure familière du cinéma et des séries. Il débuta complètement par hasard dans la comédie : alors qu’il était encore étudiant, une erreur d’ordinateur l’inscrivit dans la classe de théâtre de son université ! Spécialiste dans les rôles de détraqués ou d’hystériques, on peut citer dans sa filmographie Sailor et Lula, L’échelle de Jacob, JFK, Tueurs-nés, Un homme presque parfait, Dans la brume électrique… Sur le petit écran : Code Quantum (épisode Cauchemar), Chicago Hope, Highlander (épisode L’Homme perdu), X-Files (épisode Les Hurleurs), Alias (épisode Volte-face), Justified, Les Experts, Bones, Hawaï 5-0, Deadwood, Médium (épisode Les larmes d’Eros), Mentalist (13 épisodes), True Blood (5 épisodes), The Walking Dead (2 épisodes), etc. Il reçut en 1997 l’Emmy Award du meilleur acteur invité dans une série dramatique dans la populaire série Murder One.

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7. 24 HEURES POUR VIVRE ET MOURIR
(SON OF A COMA GUY)


Scénario : Doris Egan
Réalisation : Daniel Attias

- Genetic tests take forever, you can't just keep testing for every inherited condition you think it might be.
- Well, not me, I'll be leaving early ; but you guys can.

House remarque une akinétopsie (incapacité à voir des objets en mouvement) chez Kyle, 22 ans. Son état s’aggrave soudainement. Convaincu que c’est héréditaire, House se tourne vers la seule famille de Kyle : son père Gabriel, dans le coma depuis 10 ans depuis qu’il a essayé de sauver sa femme lors de l’incendie de sa maison. House parvient à réveiller Gabriel mais seulement pour 24 heures, ensuite il retombera dans le coma. Mais Gabriel semble tout à fait indifférent au sort de son fils et oblige Wilson et House à faire un petit « trip » avec lui s’il veut répondre à leurs questions…

Doris Egan est une des rares scénaristes de la série à être d’une parfaite régularité : auteur d’épisodes systématiquement excellents, elle est gage de qualité. Cela est dû à l’idée initiale de ses histoires, toujours sortant de l’ordinaire. C’est ainsi qu’elle n’hésite pas ici à déformer le canevas de la série avec ce petit road-movie initiatique. Volontairement minimaliste, l’intrigue est efficace car la scénariste mise en fait sur les personnalités de House, Wilson, et Gabriel, franchement opposées, mais forcées de rester ensemble ; tandis qu’elle dresse un portrait d’eux avancé et cohérent. Ce trio central compense la mise à l’écart du patient et de l’équipe. Pas d’urgence ou de suspense mais de délicieux dialogues de velours, une mise en scène épurée, une interprétation sobre mais poignante... et un stressant cliffhanger.

L’épisode semble d’abord prendre un chemin tout à fait balisé, mais quand House se mèle de réveiller le père (coutumière intervention de Cuddy excédée), on suit un tout autre sentier. Première surprise : le père se réveille de son coma. Deuxième surprise : la première chose qu’il demande est… un steak ! Troisième surprise : il se fout comme de l’an 40 de ce qui est arrivé à son fils. Quatrième surprise : pour son unique jour de vie, il demande de manger un panini dans un restaurant italien, etc. Ces continuels virages à 180° qui ne cesseront pas avant la fin de l’épisode surprennent agréablement : impossible de savoir où l’épisode va nous mener. Ces effets décalés sont une sorte d’ersatz à l’humour, quasiment absent de cet épisode (on citera quand même le « ip-odd » ou les mésaventures de Wilson avec les traiteurs italiens).

Gabriel et House sont deux hommes qui aiment le pouvoir, leur cohabitation est donc au départ difficile (Le seul pouvoir qui me reste aujourd‘hui, c’est celui de vous emmerder). L'épisode nous tient grâce au secret de Gabriel dont on est étonné de l'indifférence qu'il porte à son fils. La réponse est astucieusement reportée par House qui lui n’en a rien à faire et ne veut pas le savoir ! Le contrat passé entre eux - Gabriel répond aux questions de House uniquement si House répond aux questions de Gabriel - permet échanges gaiement vifs, et approfondissement des personnages.

La deuxième partie de l’épisode se déroule dans une chambre d’hôtel-casino où les langues vont se délier. Wilson assure le côté décalé avec ses multiples tentatives d’obtenir des paninis italiens (un winner, ce Wilson). On est très touchés quand Gabriel dévoile ses sentiments envers son fils. Piégés par les apparences, cette révélation a l’émotion d’un aveu arraché mais libérateur : c’est la seule fois où Gabriel ose enfin s’emporter, laisser cours à sa douleur tandis que le poids de sa culpabilité est réellement prégnant. Quant à House expliquant la raison qu’il l’a fait devenir médecin, elle est une parfaite réponse à la révélation précédente. A 14 ans, House était déjà House et aspirait déjà à une vie pleine de savoir et d’intelligence, où la joie individuelle n'a pas sa place. Tout à fait le genre de « révélation » qui au lieu de nous en apprendre plus sur le personnage, ne le rend que plus mystérieux. Toute cette partie est un miracle de dialogues au cordeau, oscillant entre ironie, émotion, honte, et douceur. La résolution de l’intrigue aurait facilement pu tomber dans le piège lacrymal. Elle apparaît au contraire d’une lumineuse dignité. La courageuse décision de Gabe, qui voit là sa dernière chance d'avoir sa rédemption est à la fois héroïque et désespérée, à l’image des personnages de la série. Le diagnostic final, très étonnant, couronne magnifiquement ce cas particulier. Quant à House, il semble - enfin ! - reconnaître une partie de ses erreurs et embêté d’avoir embarqué Wilson dans cette affaire de fausse signature et de détention illégale. Un épisode catharsis. Le trio John Larroquette-Hugh Laurie-Robert Sean Leonard est le centre de gravité émotionnel de ce chef-d'oeuvre.

Tritter en rajoute une couche : interrogatoire des médecins ! Cameron, devinant les intentions de l’inspecteur, se met à son tour à mentir pour couvrir son patron et encourage les autres à faire de même, malgré que Tritter devine instantanément leurs jeux. Sans dire que c’est House version policier, il est lui aussi très fort en psychologie humaine (remarquable scène avec Foreman). Et le voir dire à son tour la réplique fétiche de la série Everybody lies ! est un brillant clin d’œil. N’ayant rien obtenu par la voie normale, Tritter passe à la vitesse supérieure et est l’instigateur de l’angoissant cliffhanger final, qui compromet dangereusement l'amitié du Hilson. David Morse continue d'intimider.


Infos supplémentaires :

- Nous apprenons pourquoi House a décidé de devenir médecin : lors d'un séjour au japon, House, âgé de 14 ans, fut témoin d'une scène étonnante : les médecins n'arrivaient pas à diagnostiquer la maladie d'un patient, et demandèrent donc l'avis d'un buraku (membre d'une caste inférieure japonaise, équivalent des dalits [intouchables] indiens) dont le métier était de faire le concierge, mais qui avait d'immenses connaissances en médecine. Ce « moins-que-rien » trouva en peu de temps la maladie du patient, événement qui bouleversa le jeune House.
Sinon, on apprend que House déjeune habituellement « avec » un comateux. Ce doit être celui vu dans Peine de vie (saison 2).

- L'épisode évoque le cas de Terri Schiavo (1953-2005). Cette américaine fut victime en 1991 d'une hypokaliémie (chute du taux de potassium) qui causa un arrêt cardiaque. Dans un état végétatif présenté comme incurable, elle ne mourait pas, et son ex-mari demanda son euthanasie en 1998, mais ne put la débrancher qu'en 2005. Cette affaire déchaîna les passions aux USA, et son nom reste attaché à la lutte pour ou contre l'euthanasie.

Erreurs :
- La scène où House, Wilson, et Gabriel sont à Atlantic City a été clairement tournée à Las Vegas.
- Il est étonnant que Gabriel se lève sans difficulté après 10 ans de coma, alors que ses muscles devraient être dans un état d'atrophie avancée.

Citations :
- House appelle Gabriel le "sleeper" et demande à ce qu'il ne touche pas à "l'orgasmatron", deux termes du film Woody et les robots (1973).
- We've all seen Awakenings. It made me cry. I wanna cry
dit House plus loin, paraphrasant une citation de L'Eveil (1990) de Penny Marshall.
- Enfin, il glisse une allusion à Hannibal Lecter (Le silence des agneaux, 1991), décidément un film qu'il aime bien car ce n'est pas la première fois qu'il le cite dans la série.

- L'émission regardée par House dans sa mini-TV est l'émission de télé-réalité Blind Date, qui prit fin en 2006. Le but de cette émission est de se faire rencontrer intimement des personnes qui communiquent tout en ne se voyant pas. Elle fut adaptée en France sous le titre L'amour est aveugle.

Acteurs :

John Larroquette (1947) abandonna la musique (clarinette et saxophone) pour se tourner vers la comédie après avoir assisté à une répétition d'une pièce de Tennessee Williams. Sa carrière décolla quand il maîtrisa sa dépendance à l'alcoolisme (il a animé plusieurs émissions sur ce thème). S'il a surtout joué au théâtre, il a également joué dans une vingtaine de films mais est surtout connu pour avoir interprété l'assistant D.A. Dan Fielding dans les 193 épisodes de la série Tribunal de Nuit, ainsi que dans 32 épisodes de Boston Justice, et la série de téléfilms McBride (10 épisodes). Il a également animé 93 épisodes durant la sitcom comique qui lui est dédiée : The John Larroquette Show. Mais il a aussi joué dans les séries Kojak (épisode Joyeux Noël), Le riche et le pauvre, Dallas, Joey, Chuck (2 épisodes pour chacun des trois), Remington Steele, A la maison blanche, The practice (6 épisodes), New York unité spéciale, Les Experts : Manhattan (3 épisodes), etc. Ce grand comédien (1m94) est très réputé en Amérique.

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8. JEUX D’ENFANTS
(WHAC-A-MOLE)


Scénario : Pamela Davis
Réalisation : Daniel Sackheim

- You can't lift your arm.
- You can't pee standing up.

Jack, 18 ans, est le tuteur de son frère et de sa soeur depuis la mort de leurs parents. Pendant qu’il officiait comme serveur, il est pris de vomissements, de convulsions, et fait un arrêt cardiaque. House trouve la solution rapidement, mais refuse de la dire à son équipe, voulant qu’elle trouve le diagnostic elle-même. Tritter tente de pousser Wilson à dénoncer House en le privant de son droit de prescription. House, ne pouvant plus prendre de Vicodin, tente de convaincre ses employés de lui en prescrire. L’état de Jack se révèle plus sérieux que ne le pensait House…

Cet épisode rejoint l’essence de la série. L’enquête médicale est une des meilleures proposées par les scénaristes. Le premier tiers, assez décalé, fait démarrer l’épisode dans une ambiance légère grâce au culot d’acier de House. Les deux autres contrastent par leur gravité. Scénario en béton, rythme soutenu, acteurs excellents, triomphe du pessimisme, House grandiose, rupture du Hilson, dialogues en or massif… l’épisode a de nombreuses cordes à son arc et s’impose comme un pic de cette saison 3.

Le cas est magistral, d’un suspense total. D’abord sous les habits de la farce : House tourne le cas en devinette et se moque de chacun d’eux. La meilleure scène est celle avec Cameron où il l’encourage à stresser le patient : Cameron obtempère (quelle évolution depuis le pilote !), puis House se paye sa tête en disant qu’elle est un méchant docteur qui torture ses patients… l’hôpital qui se fout d’la charité. Le gag énorme du contenu de l'enveloppe est tout à fait dans le style de la série. A l’inverse, on vire dans le drame après le brillant rebondissement central avec des diagnostics haletants, des examens soigneusement menés, des scènes climatiques (le sauna, l’effrayante IRM, le cocktail de maladies…) intensément réalisées. Les personnages bénéficient d’une étonnante recherche. Jack bien sûr mais aussi Kama (sa sœur) et Will (son frère). Orphelins, donc forcés d’être plus matures à leur jeune âge. Cela se voit surtout sur Kama, qui envisage sans broncher la mort de Jack. La série aime décidément les enfants matures (on remarquera qu’il savent ce que c’est qu’un anulingus), qui sont toujours des atouts dans des séries.

Jack aime son frère et sa sœur, mais au prix de son existence. Il est condamné à vivre pour eux, et ne peut profiter de sa propre vie. Il culpabilise de cette « mauvaise » pensée pourtant bien naturelle. Lorsque tombe le diagnostic final, exigeant une greffe de mœlle osseuse de la part de son jeune frère, il la refuse, par respect pour lui : il veut attendre la majorité de son frère pour qu’il puisse décider de faire cette opération lourde en toute connaissance de cause. Mais Pamela Davis nous sort un superbe twist : House rend caduc son « courage » en montrant que Jack ne souhaite pas l’opération uniquement pour rester à l’hôpital. Privé si tôt d’un environnement affectif nécessaire, il veut retrouver un ersatz en étant choyé par des médecins. Ainsi, il délaisse sa tâche de deuxième père pour penser enfin à lui, une décision qui questionne grandement nos valeurs morales. La scène d’adieux a une beauté qui n’a d’égale que sa bienvenue brièveté. Quasiment un unhappy end. Patrick Fugit éclaire toutes les facettes de son rôle difficile à interpréter par sa profondeur, les jeunes Cassi Thompson et Tanner Blaze sont aussi irréprochables.

Tritter est absent mais son ombre s’étend sur l’épisode via Wilson, qui voit successivement tout s’effondrer autour de lui jusqu'à son droit de prescription. Bien que House semble n’en avoir rien à cirer, il en subit le dommage collatéral, il n’a plus accès à la Vicodin. Il demande donc à ses « larbins » de lui en prescrire, ce qui permet trois petits solos : Chase fait une entorse à sa servilité habituelle, Foreman se contente d’un non ferme et clair, et Cameron refuse sèchement. Depuis le début de cette saison, elle s’est montrée plus tranchante, plus rebelle envers son boss. House échoue d'ailleurs à la culpabiliser. Que House n’insiste pas avec Foreman signifie bien qu’il a moins d’ascendant sur lui que sur les autres.


House ne veut pas s’avouer vaincu, et tente de calmer la douleur par tous les moyens (poilante scène avec la masseuse). Mais son obstination finit par lui coûter Wilson : fatigué, excédé, par la suffisance de House devant les malheurs qui l’accablent, il finit par lui hurler dessus dans une scène stupéfiante. House ne peut se défendre quand Wilson lui fait remarquer qu’il culpabilise déjà de ce qu’il lui fait : son épaule douloureuse est un avertissement de sa conscience qui sait bien au fond que c’est à cause de lui et non de Tritter, qui n’est qu’un « déclencheur », qu’ils sont dans une telle situation. La rupture du Hilson est très frappante tout comme le fait que le subconscient de House soit plus sensible, plus humain qu’on pourrait le penser. Le quasi one-man-show de Hugh Laurie est festif, on ne dira jamais assez combien sa palette de comédien est immense. Robert Sean Leonard concentre toute la rage de son personnage pour mieux exploser à la fin, effet garanti.

Instant Hameron : remarquez le regard étrange de Cameron et sa sollicitude à débarrasser House de l’écharpe ornant son bras. Ses gestes sont d’une grande douceur et même House semble concentrer un instant son attention sur elle (énorme devil mind en prime).

Infos supplémentaires :

- D’après l’enveloppe utilisée par House, l’hôpital de Princeton-Plainsboro se situe au 10 Burlington Boulevard. Princeton. New Jersey 08540.

- The game is a itchy foot écrit House sur l’enveloppe scellée. Il s’agit d’une réplique que Sherlock Holmes prononce parfois dans ses aventures. House étant modelé sur le personnage de Conan Doyle, cette allusion au célèbre détective n’est pas fortuite.

- House ne semble pas être fana des séries La vie des cinq et Newport Beach, mais dans la VF, il dit apprécier la première.

- Patrick Fugit a joué dans le film Bickford Shmeckler's Cool Ideas (2006) où il partageait l’affiche avec Olivia Wilde. L'actrice intégrera la série en saison 4.

- Une référence à la comédie Mr.Mom (1983) par House qui mentionne le film.

Acteurs :

Patrick Fugit (1982) fait sa carrière surtout dans le cinéma indépendant. Peu prolifique mais très régulier dans la qualité de ses rôles et interprétations, il n’a quasiment jamais tourné pour la télévision : très peu de séries dont Urgences (3 épisodes), et encore moins de téléfilms.


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9. RENDEZ-VOUS AVEC JUDAS
(FINDING JUDAS)


Scénario : Sara Hess
Réalisation : Deran Sarafian

Either you screwed me and you want absolution, or you didn't and you want applause. Either way, I'm not interested.

Alice, 6 ans, est prise de panique et de douleurs intenses alors qu’elle était sur un manège. L’équipe a du mal à traiter son cas car Edie et Rob, ses parents divorcés, ne cessent de se disputer. Tritter augmente sa pression en gelant les comptes bancaires des médecins. House reste sourd aux tentatives d’ouverture de Cuddy et se met à tempêter contre tout le monde, sous l’effet de la douleur qui devient de plus en plus aiguë…

Les scénaristes étonnent par leur capacité à forger des cas toujours plus imaginatifs. Cependant, on regrettera que les personnages du jour soient compassés. L’arc Tritter est au beau fixe, l’inspecteur donnant un tour de vis à la poigne de fer qu’il exerce désormais sur tout l’hôpital. Cuddy, plus présente, dynamise beaucoup cet épisode aux ruptures de ton soudaines mais judicieuses. L’opposition à la fois courageuse et ridicule de House ainsi que l’abattement mêlé de colère du trio donnent une ambiance orageuse. Le cliffhanger final marque la fin de la menace suspendue de Tritter qui a désormais les mains libres pour s’occuper plus directement de House.

Les disputes tonitruantes des parents marchent très bien : quand l’un parle, l’autre s‘oppose. Et cette mécanique apporte toute l’intensité nécessaire, comique (les deux scènes chez l’avocate), ou dramatique (les parents se criant dessus devant leur fille). Chacun veut écraser l’autre sans se rendre compte que leurs désaccords hypothèquent les chances de survie d'Alice : quand la rancœur, la frustration, la vengeance vous guident, on accorde pas d’attention aux dommages collatéraux, et des innocents peuvent en pâtir rappelle la série. Ce faisant, elle continue à enfoncer ses fers de lance dans le Couple, qui après s’être séparé continue à se pourrir la vie. La guérison de la fillette ne ressoudera évidemment pas le couple. Cet épisode est sans doute un des plus noirs sur l’être humain, incapable de compromis sincères, d’aimer durablement, et toujours égoïste. Ce qui manque est cependant un approfondissement de ce couple en mode automatique. Paula Cale et Christopher Gartin luttent difficilement contre les clichés.



Quand Sara Hess se concentre sur l’implosion du groupe, payant les pots cassés de son patron égotique, ça marche du tonnerre. Les disputes, les sautes d’humeur, crépitent à chaque scène, et montent en crescendo au fur et à mesure que les réserves de Vicodin vont decrescendo. Finalement, cela aboutit à une scène terrible : House ordonne qu’on ampute la pauvre petite fille d’un bras et une jambe pour la sauver. L’épisode s’achemine ainsi vers une horrible conclusion (gros plans sur les instruments chirurgicaux absolument glaçants) lorsque survient le retournement final salvateur (vive les lasers !) où à la surprise générale, c’est Chase qui trouve la véritable maladie. House, incrédule que la solution lui ait échappé, est catastrophé par l’énorme bavure qu’il allait commettre. Une fin très inattendue où l’élève dépasse un maître emprisonné dans son orgueil et sa douleur démesurés. Jesse Spencer, entre lâcheté et idéalisme, est convaincant.

Tritter révèle le House en lui : il connaît tout de suite les personnalités de l’équipe. La meilleure scène de l’épisode est son croisement de fer avec Cuddy. Tritter a le dernier mot car Cuddy sait qu’elle a donné trop de chances à House et que ce dernier n’a jamais voulu s’en saisir pour changer. Tritter est là pour lui faire payer l’échéance. Connaissant la rigueur de Foreman, Tritter le culpabilise en lui proposant un odieux chantage : son témoignage contre la libération de son frère qui a bien droit à une « seconde chance » comme Foreman l’a eue. Les fans du Hameron hurleront de joie à entendre Tritter dire à Cameron qu’elle est amoureuse de son patron : il suffit de voir le lien avec son passé (son mari malade) et sa volonté de défendre House à tout crin. Pour Chase, il stimule son côté opportuniste et le compromet devant tout l’hôpital. On en vient à une situation assez délirante avec le trio furieux d’apprendre que leurs comptes ont été dégelés car cela implique que l’un d’entre eux a trahi House. Chase, au courant de la manœuvre de Tritter qui ne vise qu’à les faire douter, ne peut rien dire sans qu’on l’accuse de compromission. Quel tacticien ! House n’est pas dupe mais choisit la stratégie la plus idiote : il persiste dans sa voie de protestation. Les esprits sont très échauffés...


Cuddy fait un sacré numéro. On commence par une bonne enguelade avec House qui pointe un laser sur son affriolant balcon (Lisa Edelstein est sexy au plus haut point), annonçant les futures allusions sexuelles housiennes répétées jusqu’à l’obsession. Elle montre, à l’inverse, sa tolérance pour ses méthodes peu orthodoxes mais toujours justifiées. Mais peut-être aussi, pour les fans du Huddy, son attirance cachée. Elle se retranche toutefois derrière le fait (exact) que c’est pour défendre les intérêts de l’hôpital. Retarder le véritable début du jeu de cache-cache amoureux entre les deux docteurs montre que la série maîtrise son sujet et peut se permettre de faire durer le plaisir. Femme forte, mais souffrant de ne pas être mère, Cuddy tente de compenser en se montrant d’une débordante gentillesse avec Alice. Laissant de nouveau parler son cœur au lieu de rester stoïque, elle multiplie les erreurs de jugement, jusqu’à la terrible scène de la douche où House lui hurle la pire chose qu’il pouvait lui dire. Cuddy, meurtrie au plus profond de sa chair, s’effondre en larmes. Wilson lui-même s’en étonnera : c’est la première fois que House parvient à assommer Cuddy (il y réussira une seconde fois dans Parle avec elle [saison 5]). Nous voyons combien House, déchiré par la douleur, peut perdre tout self-control et combien on peut s’effondrer quand quelqu’un parvient à vous atteindre là où ça fait mal. La variété du jeu de Lisa Edelstein, et les déchaînements de fureur contrôlées de Hugh Laurie sont de purs joyaux.

La bavure médicale de House + une équipe ayant perdu son harmonie + le chagrin de Cuddy = trop c’est trop. Et Wilson va trahir House. Dans Dr.House, dénoncer quelqu'un est aussi un acte d’amitié, et c'est la raison du geste de Wilson. L’épisode se termine sur le sourire sinistre de Tritter. Le durcissement du jeu de David Morse est électrifiant. Encore un happy end qui tombe à l’eau.


Infos supplémentaires :

- Premier épisode où House échoue à trouver le diagnostic qui est trouvé par un autre membre de son équipe (Chase).

- Nous apprenons que Foreman a un frère : Marcus. Et que ce dernier est en prison pour trafic de drogues. Marcus apparaîtra dans l'épisode Passage à l'offensive (saison 6).

- House frappe Chase dans cet épisode, ce genre d'événement reste exceptionnel dans la série. Plus légèrement, House serait arrivé deuxième à un « concours des trucs les plus tordus sortis d’un orifice » en extirpant un laser.

- Clin d’œil à un running gag de la série : dans beaucoup d’épisodes, le lupus est un moment considéré comme hypothèse de la maladie d’un patient. Ici, House dissimule sa cachette à comprimés dans un livre sur le lupus car comme il dit à Foreman : Ce n’est jamais un lupus. Raté, car l’épisode Le dessous des cartes (saison 4) se conclura par un diagnostic de lupus !

- House fait une comparaison entre sa patiente et Le patient anglais (1996).

Acteurs :

Paula Cale (1970) suivit simultanément des études d’enseignement, d’arts plastiques (Fine Arts) et de comédie. Elle opta pour cette dernière carrière. Elle doit sa petite notoriété en étant une des héroïnes de la série Providence dont elle joua 81 épisodes. Actrice de télévision, elle joua aussi dans Cybill (2 épisodes), Ghost Whisperer, Joey (3 épisodes), $#*! my dad says, Pretty little liars, etc. Elle semble avoir arrêté de tourner.

Christopher Gartin (1968) s’est également spécialisé à la télévision : Alerte à Malibu, Madame est servie, Melrose Place (2 épisodes), La vie à cinq, New York police judiciaire, NYPD Blue, Private Practice, True Blood (3 épisodes), Drop dead diva, Numb3rs, Les Experts (2 épisodes), Les Experts : Manhattan, Desperate Housewives, MentalistSouthland, Shameless US etc.

Alyssa Shafer (1998) a mis entre parenthèses sa carrière, encore strictement télévisuelle : NIH alertes médicales, How I met your mother, Las Vegas, Private Practice, Desperate Housewives, Grey’s anatomy, Parks and recreation, et surtout The unit (22 épisodes), etc.

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10. ACCEPTERA… OU PAS ?
(MERRY LITTLE CHRISTMAS)


Scénario : Liz Friedman
Réalisation : Tony To

- What are you gonna do ?
- I thought I'd get your theories, mock them, then embrace my own. The usual.

Un des poumons d’Abigail, 15 ans, se dégonfle. Abigail est la fille de Maddy, atteinte de nanisme, et comme sa mère, aussi de très petite taille. Tritter, fort du témoignage de Wilson, propose un marché à House : ou il passe deux mois en désintox, ou bien ils vont jusqu’au procès, et la prison sera inévitable. House ne veut rien lâcher et ordonne ses pilules de codéine pour résoudre le cas. Cuddy refuse et lui retire le cas. Mais les médecins, privés de House, n’arrivent pas à résoudre le cas. Cuddy cependant refuse de céder et la douleur devient bientôt insupportable pour le diagnosticien…


Encore un chef-d’œuvre. Tritter inspire décidément les scénaristes. A bout de nerfs (saison 1) avait mis en scène un sevrage forcé de House. Cet épisode parvient toutefois à surpasser son modèle. Dans le premier, House se montrait simplement plus désagréable que de coutume, mais ici, il devient carrément infréquentable. Autodestructeur, victime, et bourreau, il est dans cet épisode aussi fascinant que repoussant. Le résultat est éclatant de virtuosité, même si Ecorchés vifs (saison 5) parviendra à aller encore plus loin. La guerre de tranchées que se livrent Cuddy et House, axe central de l’intrigue, est brillante. Le cas du jour, avec une mère qui a du répondant, la pesante semi-absence de House, et l’enchaînement impeccable des péripéties tient en haleine jusqu’à une chute finale proprement stupéfiante.

On démarre très fort avec House vannant sur les tailles d'Abigail et de Maddy, ce qui entraîne de jolis smashs verbaux. Si on peut regretter que l'épisode ne continue pas dans cette voie, le choix de se concentrer sur House, ici encore plus « extrême » que d’habitude, justifie le ton sérieux de l’ensemble. Les diagnostics différentiels sont tenus dans le deuxième tiers dans le bureau de Cuddy, une première (mais pas la dernière). La dispute Cameron-Wilson est excellente : Wilson se défend en disant avoir agi par altruisme, mais Cameron le méprise, convaincue qu’il ne la fait que pour améliorer sa situation personnelle. Ici, Cameron a le mauvais rôle. Les spectateurs connaissent le dévouement total de Wilson et il est certain que c’est pour aider son ami qu’il l’a trahi. Mais Cameron a été métamorphosée par House comme Tritter le lui disait dans l’épisode précédent : dans ses semblables elle voit maintenant davantage le mauvais côté que le bon. Cela la rend meilleure médecin mais moins humaniste, là où Martha Masters, ultérieurement, restera fidèle à son idéalisme. Wilson, ami fidèle et dévoué, prêt à tous les sacrifices, est ici mal récompensé de son courage.


Le cas est efficace et rythmé. L’absence de House donnant une plus grande incertitude aux décisions des médecins, le cas en devient plus urgent. La solution terminale est fantastique : House résolvant le cas à la suite d’une discussion loufoque avec une petite fille, la chute qui en résulte est une des plus renversantes de la série, et d’un irrésistible humour noir. Triomphe des apparences encore et toujours… bouquet final : une dernière discussion entre House et Maddy puis entre Maddy et Abigail sur le concept de la « normalité » : si on veut réagir contre l’ordre du monde, comme le fait un House ou un Numéro 6, doit-on le faire par tous les moyens ? Souffrir mais être fier d’être « différent », le jeu en vaut-il toujours la chandelle ? Les dialogues de cette double scène sont parmi les plus beaux de toute la série, avec happy end total exceptionnel. Merveilleux scénario, superbe leçon de vie. La scénariste Liz Friedman a été touchée par la grâce. Meredith Eaton, actrice réellement naine (1m30), est aussi superbe que talentueuse : mordante d’ironie (surtout dans les deux premières scènes), elle donne beaucoup de pêche à cet épisode.

Conscient qu’on lui tend la perche de la dernière chance, House la refuse pourtant. Et quand House ne veut rien entendre, toutes les Cuddy du monde n’y peuvent rien. Sa vantardise atteint ici des sommets proprement hallucinants : lorsque Cuddy lui retire le cas, il déclare qu’« elle reviendra le supplier ». Pire encore, même si sa patiente est en danger de mort, House préfère la laisser mourir pour que ça serve de leçon à Cuddy plutôt que de revenir sur sa décision. Le sommet est atteint est quand il utilise cet argument contre Cuddy pour la culpabiliser : ce serait sa faute si la gamine mourrait car elle lui a pas donné ses pilules. Et à ce jeu-là, House a le dessus. Il est vainqueur mais uniquement par un stoïcisme cruel. Angoissante question : le manque fait-il devenir House plus méchant, ou bien révèle-t-il sa vraie nature qu’on ne voit jamais car il est shooté en permanence ? Ce magistral anti-héros que l’on pense pourvu d’un cœur enterré sous le marbre de son cynisme, ne serait-il qu’une ordure totale ? On l'ignore alors, et on ne sera que plus rassurés quand il commencera à devenir moins inhumain à partir de la saison 6.


House commet une erreur que lui avait pourtant signalé Tritter dans Que sera sera : il surestime son pouvoir de domination. Il peut faire plier n’importe qui de « normal » : son équipe, Cuddy… mais Tritter n’est pas « normal ». Ce qui marche avec Cuddy échoue sur Tritter qui se bat finalement avec les mêmes armes que House. Or House semble ignorer un fait de taille : supérieurement intellectuellement à la majorité des hommes, ses erreurs de jugement sont en conséquence bien plus graves ; et il l’applique à la lettre : aussi génial soit-il, il commet une erreur d’une débilité faramineuse : il est prêt à risquer la prison et être interdit d’exercer rien que pour ne pas accepter le chantage de Tritter. Et surtout, il accepte une douleur horrible : la scène où Cameron vient le voir dans sa maison montre l’extrémité du personnage qui s'entaille pour contrer la douleur du manque. S’enfonçant dans une sorte de semi-démence, il en vient à commettre l’irréparable, non sans au passage de ravageurs échanges entre lui et Wilson. Wilson, révulsé de le voir plonger si profondément dans les eaux de la déchéance pour satisfaire son ego, abandonne son ami dans une scène impressionnante. Ce coup de fouet lui fait ravaler sa honte et accepter le marché de Tritter… mais c'est trop tard, et c’est sur un corrosif « Merry Christmas » que se termine cet épisode où House est allé au plus profond de son côté sombre. Hugh Laurie explose en homme cassé par la douleur et trop orgueilleux pour se remettre en question, une de ses prestations les plus explosives, Chapeau l’artiste !

Infos supplémentaires :

- House a une tante qui s’appelle Sarah.

- Erreurs :
Quand House demande de la Vicodin à un médecin d’un autre hôpital, ce dernier lui répond qu’il ne peut lui prescrire d’opiacés. Il était prêt cependant à lui donner de la Tylenol contenant de la codéine… qui est un opiacé.
Lorsque House va dans la chambre d’Abigail pour lui annoncer le diagnostic final, on peut voir que le nom de l’hôpital est mal orthographié en haut de la photo de l’IRM : « Plansboro » au lieu de « Plainsboro ».

- La chanson de l’épisode est une chanson populaire : Zat You, Santa Claus ?, interprétée par Louis Armstrong et le groupe des Commanders.

Acteurs :

Meredith Eaton (1974) est connue pour être la première femme naine à avoir interprété un rôle récurrent dans une série américaine en prime time (Associés pour la loi, 14 épisodes). Elle a aussi joué dans les séries NYPD Blue, Les Experts, FBI portés disparus, New York unité spéciale, Boston Justice (18 épisodes), NCIS (3 épisodes où elle joue le rôle d’une personne appelée Carol Wilson !!!), NCIS Nouvelle-Orléans, etc. etc. Elle poursuit en même temps une carrière de thérapeute (ayant fait des études de psychologie clinique tout en ayant quelques cours de théâtre). Elle est un rôle récurrent dans une autre série (co)créée par David Shore : Battle Creek (7 épisodes).

Kacie Borrowman a commencé très tôt une carrière d’actrice et de doublure de cinéma : en tant qu’actrice, elle a joué dans quelques séries comme JAG, Bones, Private Practice… et double régulièrement les enfants ayant des rôles de cinéma ou de séries.

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11. CŒURS BRISÉS
(WORDS AND DEEDS)


Scénario : Leonard Dick
Réalisation : Daniel Sackheim

- House, I just heard that you apologized to Wilson.
- Detoxing. I didn't know what I was saying.

Derek, un pompier, a tout à coup très froid, et se dirige vers un immeuble en flammes. Il n’est sauvé que par l’intervention d’Amy, sa collègue. L’équipe doit de nouveau travailler avec l’aide lointaine de House : Tritter ayant refusé d’abandonner les charges contre House, il a décidé de prouver sa « bonne foi » en suivant une cure de désintoxication. Cameron découvre que l’amour non partagé de Derek envers Amy le tue au sens propre. House ordonne alors que Derek subisse un électrochoc qui lui fera perdre la mémoire, sans savoir qu'il souffre également d’une autre maladie…

Cet épisode laisse des impressions mitigées. Un tempo assez lent gène le déroulement du cas qui mise beaucoup sur des morceaux de bravoure entrecoupés par pas mal de temps morts. Le twist, vertigineusement ironique, intervient trop tôt. La personnalité Housienne est intelligemment conduite, et l’efficace conclusion de l’arc Tritter sonne la fin de cette excellente première moitié de saison.

Le cas souffre de plusieurs défauts dont le moindre n’est pas les trois personnages académiques. Le dépit amoureux de Derek est exprimé avec peu d'émotion. Amy n’a aucun cachet, et son frère est transparent, et les trois comédiens sont assez médiocres, surtout l'inexpressive Meagan Good. Alors oui, il y’a des moments forts comme la spectaculaire strangulation de Cameron, l’électrochoc décisif, ou le twist central qui relance tout. Mais à part ces moments, il faut reconnaître que le cas fait davantage figure de remplissage entre les différentes séquences de l’affaire Tritter. La précipitée résolution finale est bien terne. Reconnaissons que l'incroyable maladie est tout à fait dans le cadre de la série qui prend toujours plaisir à casser la tête aux idées reçus : l’Amour est ici décrit comme un principe chimique qui peut vous tuer physiquement et rapidement !

House en desintox, vous ne l’avez jamais demandé, Leonard Dick l’a fait. Dans la majeure partie de l’épisode, il passe sa cure et semble en avoir ras-le-dos au bout seulement de deux jours. Il essaye de paraître gentil et raisonnable, et nous, pauvres crédules, sommes prêts à le croire. Le fait de se mesurer à un adversaire trop fort, d’être devant un obstacle insurmontable, nous fait souvent réfléchir. House agit-il de même ? Simule-t-il ou non la bonne volonté même « forcée » ? Eh bien, l’optimiste ira de désillusions en désillusions. Ainsi les excuses implorantes de House à Tritter tombent à l’eau : pour Tritter, les mots ne veulent rien dire s’ils ne sont pas suivis d’actes, et il perce à jour House en devinant qu’il n’est pas sincère. S’inscrivant en réaction en désintox pour marquer Tritter, il subit donc des affres, terribles pour lui, comiques pour nous (drogue qui le fait vomir, emmerdement pendant les séances genre « drogués anonymes »…).


Tritter, malgré les efforts de son nemesis, refuse de lâcher l’affaire à notre grande stupéfaction. Ce Javert des temps modernes ne croit pas en la rédemption, et House n’est pas Jean Valjean. Tritter semble devenir vraiment méchant car on est convaincu de la bonne foi de House. C’est sans compter sur le diabolique twist final des dernières secondes : Tritter s’est comporté comme un salaud mais il a eu raison : même les actes de House étaient bidon. Leonard Dick nous culpabilise ainsi de prendre parti pour House, c'est énorme.
Cet épisode est aussi pessimiste que les autres : la rédemption est-elle possible ? Certes, il s’agit ici de House, mais tout changement est douloureux pour chaque homme. Les excès de House forment un miroir explicite quant à tous nos travers humains : ravaler sa fierté, simuler la soumission… tout ça est humiliant, mais pouvons-nous toujours nous y soustraire quand on est sûr de son bon droit ? Le compromis n’est pas dans notre nature et il faut une force mentale forte pour l’accepter. A défaut, nous utilisons la manipulation. Dark, so dark...

Curieusement, House finit par tomber son attitude de révolté et de se replier vers la résignation. Il ne peut rien faire d’autre qu’attendre sa prévisible condamnation. Lorsqu’un homme n’a rien à perdre, il n’a plus de limite. Quelle autre sorte d’homme pourrait quitter une séance de tribunal pour regagner son lieu de travail, envoyant balader la procureure ?!! N’étant plus dans l’incertitude, il gagne une certaine sérénité en résolvant tranquillement le cas. L’étreinte de Cameron semble l’émouvoir brièvement mais il y met fin rapidement. C’est un des rares moments où House ne se moque pas de l’attirance que Cameron a pour lui. Moment Hameronien doucement filmé avec enfin une part de réciprocité…


Le spectaculaire parjure de Cuddy était programmé d’avance, mais reste plein d'effet. House est sauvé miraculeusement mais cherchez pas de happy end : Cuddy a subi la mauvaise influence de House en se parjurant, et pour la peine, lui promet la vie dure dès son retour à l’hôpital ! Lisa Edelstein est réjouissante dans la scène finale, toute en rage contenue et en joie féroce. Mais il y’a un revers : pourquoi l’intolérant Tritter finit-il par souhaiter bonne chance à House, et même lui faire un sourire encourageant à l’issue du non-lieu ? Ca fausse le personnage, et Tritter nous quitte ainsi sur une impression d’incohérence. David Morse, roc massif et talentueux, a quand même bien contribué au succès de son arc. On l’en remercie.

La fin est d’une amoralité sardonique, tout comme A bout de nerfs. Mais l’effet est plus fort car ici l’épreuve de House a duré le temps de six épisodes et non d’un seul… le résultat, identique, est donc encore plus fort : House n’a pas retenu la leçon et semble bien décidé à retourner à sa vie d’avant ! Wilson est consterné mais c’est alors qu’intervient une touche bien trouvée : House s’était auparavant excusé auprès de Wilson de l’avoir entraîné dans cette galère, excuses que nous pensons à la fin de l'épisode factices puisqu'il a tout simulé… mais alors pourquoi est-il allé jusque-là, jusqu’à s’excuser alors qu’il aurait pu ne rien dire du tout ? Et si une fois dans sa vie, il avait vraiment eu des regrets ? House reste ambigu. Mais ici, il nous est permis d'espérer que House s'est montré responsable. Une petite bulle d’espoir qui conclut cet épisode inégal.


Infos supplémentaires :

- Sixième et dernier épisode de la série avec David Morse (Michael Tritter).

- C’est cette fois Chase qui prononce la devise de la série Everybody lies.

- Nouvelle référence à Spinal Tap (1984), toujours via la citation par House consacrée au nombre 11. Et bien sûr, évocation claire et nette de la saga des Harry Potter avec le surnom « Voldemort » donné par House à son infirmier de désintox.

- La chanson de l’épisode est Season of the Witch de et par Donovan Leitch.

Acteurs :

Tory Kittles (1975) parfois surnommé « TK » est un acteur de cinéma qui a commencé sa carrière au début des années 2000. Après avoir eu la révélation avec L’Empire contre-attaque, il étudie la comédie et continue de jouer au basketball. Il a tourné dans plusieurs films, notamment ceux de Joel Schumacher. Il tourne un peu à la télévision : Les Experts : Manhattan, Intruders (8 épisodes), Sons of anarchy (11 épisodes), etc. Son rôle le plus connu est celui du détective Thomas Papania dans la série phénomène True Detective (8 épisodes).

Meagan Good (1981) commence sa carrière très tôt, à 4 ans, dans des publicités. Depuis, elle a étendu son registre au cinéma, à la télévision, et aux clips musicaux. Elle a son premier vrai rôle avec le film La rivière du bayou (1997) où elle partage l’affiche avec Jurnee Smollett (Tracy dans l’épisode L’amour de sa vie). Maintenant, elle passe son temps entre le cinéma et les séries comme Cousin Skeeter (52 épisodes), Cold Case, Californication (7 épisodes), La loi selon Harry, Deception (11 épisodes), New York unité spéciale, etc.

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12. DE PIÈCES EN PIÈCES
(ONE DAY, ONE ROOM)


Scénario : David Shore
Réalisation : Juan José Campanella (crédité comme "Juan J. Campanella")

- Start counting your heartbeats... Stop. How many ?
- 26.
- Okay, either you suck at math, or you're going to die in two seconds... (two seconds later). You suck at math.

Cuddy force House à travailler en consultation deux jours de suite pour payer en partie la dette qu’il a envers elle (voir épisode précédent). Il y rencontre Eve, une jeune femme victime d’un viol. Bien qu’elle n'ait attrapé qu’une MST bénigne, elle reste à l’hôpital dans le cas de sa thérapie. Mais Eve inexplicablement ne veut parler qu’à House, et rien qu’à House. A son corps défendant, le diagnosticien passe du temps avec elle, mais il n’est pas à l’aise : Eve veut parler de tout et de rien, et son comportement échappe à toute logique. Toutefois, un lien finit par se créer entre eux…

Cet épisode est unique dans la série. Il ne contient aucun cas médical et est centré totalement sur la relation entre House et sa patiente. Le personnage ayant l’habitude de n’avoir aucun lien avec ses patients, les codes de la série s’en voient bouleversés. A cause de son rythme très lent, de ses longs dialogues introspectifs, de sa mise en scène minimaliste, cet épisode est très controversé. Pour ma part, je l’ai d’abord détesté avant de le considérer aujourd’hui comme le plus bel épisode de la série, et peut-être son meilleur. C’est dire s’il ne laisse pas insensible ! Le magnifique scénario de David Shore, dont on peut regretter qu’il n’ait écrit que trop rarement, est certes déconcertant tant dans la forme que dans le fond, mais l'alchimie est au rendez-vous. L’épisode doit beaucoup au monumental génie d’actrice de Katheryn Winnick, la meilleure comédienne invitée de toute la série de très loin. D’une hyperexpressivité presque effrayante (larmes, révolte, abattement, rage...), elle est à l’opposé complet de Hugh Laurie qui minimalise au maximum son jeu ; paradoxalement, il n’en est que plus émouvant. Cet épisode hors-normes, d’une grande beauté, touche par sa fausse sécheresse Beckettienne, son art de l’implicite, et sa splendide fin.

Les dix premières minutes sont un festival House et ne servent que de prélude : dispute à pointes perfides entre House et Cuddy, House soudoyant les patients pour qu’ils débarrassent le plancher, House qui fait faire à son équipe des examens inutiles pour avoir la paix, pari d’une absurdité sans nom... survient une brutale bascule dramatique quand une pauvre fille hurle DON'T TOUCH ME !!! quand House veut prendre sa main. Ses yeux rougis de larmes, sa rage contenue, sa pâleur mortelle… l’effet est saisissant avec la comédie des précédentes secondes ! Eve est traumatisée par son viol, mais House, fermé aux états d’âme de ses semblables ne peut rien pour elle. Rien ? Le destin va curieusement en décider autrement…


Eve refuse de parler à un autre médecin que House (excellente scène avec Cuddy, à la compassion impuissante), la dernière personne qui semble utile dans cette situation. Eve ne sait pas pourquoi elle a confiance en House, qu’elle ne connaît pas, mais elle a l'intuition qu'il est le seul homme à pouvoir la comprendre. House se heurte à un comportement inexplicable rationnellement. Il essaye de s’en sortir par la logique pure, car l’inexplicable est sa plus grande peur (intelligente bien que fausse hypothèse du viol inversé). Le coup de folie d'Eve démontre que le lien qu'elle veut forger avec House est une question de vie ou de mort. Et d'ailleurs, House, inconsciemment, a commencé à créer un lien avec elle, se montrant curieux de son état pendant l'entretien psychologique. La parole, primordiale dans l’épisode, est renforcée par la réalisation très épurée de Juan J. Campanella.

Nous savons que House a besoin des autres pour exister (il ne peut travailler sans collaborateurs) mais ses liens sont ou purement professionnels ou dénués de chaleur (Wilson). Or, il doit faire une démarche d’empathie pour soigner sa patiente. Bien sûr, il pourrait s’en aller, car il a pas l'habitude de se soucier des états d'âme des patients, a fortiori souffrant de maladies bénignes. Mais le désespoir d’Eve semble curieusement l’atteindre, sans qu’il comprenne pourquoi. Lui aussi subit cette attraction ineffable. Eve ne veut pas parler de son viol, ni d’elle-même, ni de quoi que ce soit « d’important » ; elle attend de découvrir pourquoi son esprit la pousse vers cet homme. House s’emporte car pour lui toute discussion sur un sujet trivial est du temps perdu. Il ne peut comprendre que l’inertie volontaire est le seul remède contre quelque chose qu’on ne peut contrôler. Et on voit bien que ses tentatives d’action se brisent contre le mur érigé par Eve. Mais House finit par se laisser faire : via ses regards, ses dialogues, son lien avec Eve dépasse son "complexe du Rubik's cube" sans tomber dans le piège de la tension sexuelle qui aurait été hors sujet.


Comment communiquer ? House quémande des conseils à ses « larbins » mais ils se contredisent tous. Cela montre toute la difficulté qu’on a de se mettre à la place de quelqu’un qui a subi un traumatisme dont on ne connaît pas les effets en pratique, et in extenso, la difficulté de dialoguer entre humains tout court. De toute manière, House doit sacrifier une partie de ses idéaux pour la comprendre (lien affectif avec le patient). Crescendo d’intensité psychologique tout le long : la force de House, sa froideur, devient sa faiblesse car gênant son processus d'empathie. Pourtant des fenêtres commencent à s’ouvrir : Eve sent que les blessures intérieures de House correspondent aux siennes, et veut l’obliger lui à se confier ! La scène avec Wilson est révélatrice : House a peur de créer ce lien affectif qui contredirait sa croyance selon laquelle la science explique tout. Tout son monde moral s’effondre. Alors, il veut s’en sortir par le mensonge, mais Eve n’est pas dupe. House se heurte une nouvelle fois à sa froideur, il ne peut comprendre cette simple vérité : notre vie dépend de nos rencontres, qui ne rentrent pas dans un moule là où House veut classer chaque situation sous une rubrique. Aucune situation ne peut être estampillée sous une étiquette, il n’y a que des cas particuliers.

Eve est enceinte de son violeur. Cette révélation ne l’abat pas mais House y est très sensible (son regard quand il l’apprend veut tout dire) ; elle agit comme catalyseur : sa froideur commence à fondre devant la compassion qu'il ne peut s'empêcher d'éprouver pour elle, même s'il la contient (Hugh Laurie calcule son jeu avec une précision vertigineuse). Shore fait dériver son sujet vers l’avortement mais moins pour amener un débat sur le sujet qui serait inapproprié que pour comprendre davantage les personnages et leurs éthiques sur la justice, puis le libre-arbitre et les aléas. Leurs échanges sont de plus en plus philosophiques et bouleversants. Eve et House s'accordent sur le fait que la Vie a un sens, mais la première croit que la Vie a un but, et non House : la première voit la Vie comme un chemin vers un but, le second comme une "fuite des enfers terrestres" ; la première pense que c'est la conséquence ultime (renaissance de l'esprit après la mort) qui donne de la valeur aux actions de la vie terrestre, le second que l'absence de conséquence ultime donne au contraire les actions terrestres leur valeur, même si cela implique qu'il n'y a pas de but dans la vie. Eve ne peut être d'accord avec House car elle veut trouver une raison, une leçon à retenir pour ne pas être prisonnière de son mal. Elle a besoin de croire que sa vie n’est qu’une transition entre le néant et l’après-vie, que de son mal peut naître un bien (le bébé, ou un développement de son courage). Le concept de Vérité est questionné : il est pour l'homme généralement moins fort que les croyances, dont la véracité n'est pas d'important : seuls comptent les effets positifs qu'il tire de ses croyances. Eve croit en l'après-vie parce qu'elle en a besoin, House n'y croit pas parce qu'il en a aussi besoin. Leur lien s'intensifie jusqu'à l'aveu poignant du docteur : Ce qui m’intéresse, c’est-ce que vous ressentez. Il n’avait jamais dit cela à personne. Ils arrivent enfin à communiquer, et Eve comprend enfin pourquoi elle voulait House : elle a senti qu'il est aussi ravagé qu’elle, qu'il comprendrait son traumatisme. Un aveu qui la libère, et lui permet de parler de son horrible nuit. Elle commence sa reconstruction.

L’ultime scène est splendide, Cuddy et Wilson félicitent House d’avoir communiqué avec quelqu’un, mais il n’en est pas satisfait. S’il sait pourquoi Eve l’a choisi, House ne sait pas pourquoi il s’est attaché à elle. Pour nous, c’est évident : House a été chaleureux, humain, compatissant… avec une étrangère. Il est trop désespéré et orgueilleux pour le reconnaître mais n’est pas sorti indemne : Eve lui manque mais il doit retourner à son travail. One day, one room… Entendez, un autre jour, une autre pièce demain, la vie continue malgré tout. Une fin tout en retenue et bouleversante. L’intelligence et la logique du texte n’excluent pas l’émotion, bien présente tout au long de l’épisode. En cela, Shore et Campanella ne sont pas loin d'un Rohmer. Ils sont bien aidés par leurs acteurs qui vivent vraiment leurs personnages.

On n’oubliera pas en parallèle le cas du clochard condamné qui a tout fait pour donner satisfaction à un père indigne qui lui a prophétisé une vie ratée. Mais il ne veut pas rater sa mort, et adopte une solution désespérée : il supplie Cameron de le regarder mourir douloureusement, afin qu’elle soit marquée par lui. Au-delà de son désespoir, ce pauvre homme est le reflet de notre interrogation sur ce que deviendra le monde après nous : que laisserons-nous ? Comment quitterons-nous cette Terre ? Ce personnage apporte une émotion supplémentaire, accentuée par l’impuissance de Cameron, ne pouvant que le contempler pour exaucer sa dernière volonté. Elle en ressort secouée… comme le vieil homme le souhaitait. Geoffrey Lewis est excellent. Une note plus joyeuse : le Huddy émerge dans cet épisode avec House lui faisant des avances. House s'intéressee de plus en plus à son boss depuis qu'elle lui a sauvé la mise.

Que dire de la pulpeuse Katheryn Winnick, si ce n’est qu’elle accomplit un numéro d’acteur comme on en voit rarement à la télévision ? L’émotion faite femme tout simplement. Le fait que sa carrière ait pris un nouvel élan après cet épisode n’est pas anodin.

Ce n’est certes pas un épisode facile, qui se laisse cerner aisément. Un deuxième visionnage peut s’avérer nécessaire. Mais De pièces en pièces est véritablement un épisode inoubliable, qui touche au sublime.

Infos supplémentaires :

- Dans une interview à TVGuide.com, Katheryn Winnick devait déclarer à propos de son personnage : It's probably one of the biggest guest-star roles ever written — not just in terms of the size and amount of material, but in the way it goes very in-depth for a guest star, as Eve goes head-to-head with Dr.House. I don't know how much I can give away, but she's a rape victim who goes through a lot of different stuff within the episode. It was pretty intense while shooting it.

- Katheryn Winnick a joué dans le même épisode d'Esprits criminels que Peter Jacobson, futur interprète du Dr.Chris Taub dans la série. Il s'agit de l'épisode Crimes à la une (saison 1). (Merci à Shinishi du forum Dr.House pour cette info)

- On apprend que House, enfant, a subi des mauvais traitements de la part de son père. Cela explique sa haine envers lui…

- Plusieurs faux raccords dans la scène dans le bureau de Wilson, avec la position de la canne qui ne cesse de changer.

- Les deux chansons de l’épisode sont Listen Here de et par Eddie Harris, et Grey Room de et par Damien Rice.


Acteurs :

Katheryn Winnick (1977) est non seulement actrice mais aussi une émérite artiste martial (3e dan de tae kwon do, 2e dan de karaté) qui a une licence de garde du corps. Cette talentueuse comédienne perce au cinéma depuis plusieurs années, et tient le rôle principal de Lagertha dans la série Vikings (28 épisodes). Elle a illuminé de sa présence les séries Sydney Fox, Oz, Les Experts (les trois séries), Esprits Criminels, New York police judiciaire, New York section criminelle (2 épisodes), Bones (7 épisodes), The Glades, Person of Interest, Nikita, etc. Sa carrière d'actrice décolla après sa participation à cet épisode.

Geoffrey Lewis (1935-2015) étudia les arts dramatiques mais commence par faire quelques one-man-shows. Quelques apparitions plus tard dans des musicals de Broadway, il se consacra enfin aux écrans à partir des années 70. Il a derrière lui une immense filmographie. Il a joué dans près de 60 films dont certains très prestigieux (L’homme des hautes plaines, La porte du paradis, Minuit dans le jardin du bien et du mal, Doux, dur, et dingue…). Il a joué dans de très nombreuses séries telles Mannix (2 épisodes), Cannon (épisodes Le cobaye et Le pigeon), Bonanza, Mission : Impossible (épisodes La Vérité et La Lettre), Gunsmoke, Kung-fu, Starsky et Hutch, Les Rues de San Francisco (épisode L‘école de la peur), L’homme qui valait 3 milliards, Hawaïi police d’Etat (épisode Une bonne couverture), La petite maison dans la prairie, L’agence tous risques, Magnum, Dawson (2 épisodes pour les quatre), Tonnerre de feu, Falcon Crest (9 épisodes), L’homme qui tombe à pic, Histoires fantastiques, McGyver, Walker texas ranger, Arabesque (4 épisodes), X-Files (épisode Photo mortelle), Nip/Tuck, Cold case, New York section criminelle, Earl, Esprits criminels, etc.

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Crédits photo: FOX.

Images capturées par Clément Diaz.