Piège de cristal (1988) Scénario : Steven E. De Souza et Jeb Stuart Réalisation : John McTiernan Sortie US : 15 juillet 1988 Sortie France : 21 septembre 1988 Résumé : John McClane, policier de new York, vient à Los Angeles pour passer le réveillon de Noël avec son épouse Holly qui travaille dans la tour Nakatomi. Mais, l’immeuble est attaqué par l’équipe d’Hans Gruber. Tout avait été minutieusement préparé par ce dernier, sauf la présence de McClane ! Critique : Le premier film de la saga est une merveille et reste probablement le meilleur de tous. Beaucoup d’action mais à laquelle ni l’humour ni la psychologie ou l’émotion ne sont sacrifiés. On commence d’ailleurs par une ambiance légère (le passager de l’avion, le chauffeur qui est une vraie pipelette et même le coup du changement d’état-civil de Holly qui a repris son nom de jeune fille !). Et c’est Noël, une petite fête d’entreprise a lieu chez Nakatomi pour ses employés. Tout cela installe une bonne ambiance et un faux rythme qui vole en éclat brusquement avec l’entrée en scène brutale d’une douzaine d’hommes armés. Leur leader, un livre en main, dans une attitude de précheur évangélique, tient un discours dont le texte décalé est rendu sinistre par le ton posé avec lequel il est débité. Pour obtenir du patron qu’il se montre, il récite sa biographie d’un ton froid. Son plan, il l’expose crûment et simplement à ce dernier : il veut le code d’accès au coffre qui recèle 600 millions ! Ledit patron ne pouvant le renseigner est abattu de sang-froid ! Alan Rickman a réussi son entrée. Portant beau le costume, barbe bien taillé, il représente un homme élégant, cultivé, mais absolument impitoyable. La froideur qu’il maintiendra tout au long du film n’est pas pour bien dans le charisme qu’il déploie. Jusqu’à présent, McClane est resté plutôt passif sans que Bruce Willis ne nous ennuie d’ailleurs le moins du monde. Dès le départ, on sent bien que le personnage est en complet décalage avec ce qui l’entoure et l’acteur rend tout cela très bien avec des mimiques et un certain humour. Ayant échappé à la rafle, le policier – on évite ainsi le cliché du quidam qui se révèle un super-héros – tente une première fois d’alerter les secours. Il essaiera une seconde fois et, dans les deux cas, se fera repérer d’où des fusillades . La seconde est une des meilleures scènes : filmée de haut avec un mouvement circulaire de la caméra de la droite vers la gauche. Histoire de montrer une traque en action. Les passages de fusillade seront traités intelligemment : sans abus, sans durer des plombes mais soulignant toujours le moment idoine. Elles scandent le film sans le noyer : l’action est ainsi mise au service de l’histoire et non l’inverse. La seconde alerte a fait venir sur place un des seconds rôles principaux, le sergent Al Powell à qui Reginald VelJohnson donne une profonde humanité, de l’intelligence (on n’en dira pas autant de sa hiérarchie !) et un certain sens de l’humour. Ses discussions avec McClane serviront de scènes de transition entre des moments plus violents dans l’immeuble mais ils ne meubleront pas pour de rien dire, servant notamment d’échanges d’information. Les « dernières volontés » de McClane, outre qu’elles montrent un Bruce Willis crédible dans l’émotion profonde, seront extrêmement touchantes. Le premier contact entre McClane et le chef des preneurs d’otage, Hans, se fait via un talkie-walkie. Si le ton est posé, il est d’une ironie mauvaise du côté de Hans et très direct côté McClane ! Très référence en culture américaine (ce que l’on retrouvera dans le final), il est aussi un moment complètement décalé : le policier prévient qu’il va passer, se définit comme cun « emmerdeur » et, surtout, il lance la réplique culte : « Yippee-kee-kay, pauvre con ! » On se doute de l’effet produit ! Si Powell fait l’effet d’un type compétent on mesure toute l’inanité de la police de la cité des Anges lorsqu’elle se fait canarder lors de sa tentative pitoyable d’entrer en force. La mise en position des bandits est en outre soulignée par la musique – un élement important tout au long du film – et le spectateur est ainsi conditionné, prévoyant le massacre avant qu’il ait lieu. McClane doit intervenir pour l’arrêter. Cette mise à l’écart temporaire était nécessaire pour déployer le versant « extérieur » de la prise d’otage et, en montrant McClane se remettant de ses émotions, le maintient dans un certain réalisme. Bruce Willis est impeccable et la colère désespérée de son personnage lorsqu’il voit ce qui va se passer est poignante. La réaction, explosive, montre toutefois que nous sommes dans un film d’action et pas dans une comédie de Noël ! Entendre McClane dire qu’il se sent « mal aimé » (traqué par les bandits et incendié par la police) est, par contre, une embellie comique bien trouvée. C’est alors que prend place le passage obligé de l’otage qui se prend pour plus intelligent qu’il ne l’est et croit malin de négocier avec des hommes armés. Outre que son sourire autosatisfait le désigne comme le boulet dans son milieu naturel, son imbécilité profonde et suicidaire lui fait manquer l’ironie froide avec laquelle Hans Gruber - et Alan Rickman fait peur avec sa mine fermée et son regard hostile - accueille ses déclarations ronflantes à l’effet comique certain cependant ! Le retour au dur sera souligné par un coup de feu que nous ne ferons qu’entendre. Toute la malice de Gruber éclate dans ses rapports avec la police puis le FBI (brillante prestation de Robert Davi en agent fédéral brutal et sûr de lui). Il a parfaitement intégré la manière de procéder tant des révolutionnaires dont il reproduit le discours à la perfection que des policiers. Superbe effet pour le spectateur qui voit bien que Guber raconte un mensonge puis voit les policiers gober l’appât avec l’hameçon parce qu’il entre très bien dans leur schéma de pensée. Évidemment, cela finira mal pour les fédéraux mais, visuellement, c’est splendide avec un effet de ralenti posé mais pas exagérément comme Matrix le popularisera quelques années plus tard. Le final est rendu très nerveux lorsque Gruber découvre qu’Holly est la femme de McClane. Bonnie Bedelia a très bien tenu son rôle, affirmant l’identité propre d’Holly (une femme indépendante qui n’a pas hésité à partir lorsqu’une opportunité professionnelle s’est présentée) et doté d’un certain sang-froid notamment lors d’une première entrevue tendue mais polie avec Gruber. Dans une atmopshère rougeoyante, saturée d’eau et de fumée, la confrontation finale sera aussi un grand moment. Le « fou rire » des deux protagonistes, alors que McClane est désarmé et que Gruber lui a « rendu » sa réplique est totalement décalée, surréaliste et brutalement interompu ! La mort de Hans Gruber est un des moments les plus spectaculaires avec ce gros plan sur le visage d’Alan Rickman puis ce ralenti sur la chute mortelle qui commence sous nos yeux. C’est vraiment impressionnant. Un peu de légèreté pour conclure avec une phrase « prophétique » du toujours aussi bavard chauffeur ! Du grand spectacle mais du grand spectacle intelligent, qui se déguste et s’apprécie à chaque passage. Anecdotes :
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