Saison 3
1. LES SEPT PÉCHÉS CAPITAUX Épisode Mythologique Scénario : Eric Kripke - So, we're eating bacon cheeseburgers for breakfast, are we? Résumé : Une semaine après l’ouverture de la porte de l’Enfer (cf. finale de la saison 2), les centaines de démons libérés parcourent le monde et sèment le chaos chacun de leur côté. Bobby, Sam, et Dean se retrouvent dans une maison où ils découvrent un macabre spectacle. Ils comprennent rapidement que les démons assassins comptent parmi les plus puissants qu’ils n’ont jamais affrontés, et ne peuvent être tués. Un couple de chasseurs est également sur leur piste. Pendant ce temps, une jeune femme blonde suit Sam à distance… Sept monstres pour le prix d’un : le spectateur adore, les Winchester curieusement moins… La critique de Clément Diaz : La saison 3 démarre tous moteurs allumés : alimenté par des dialogues tourbillonnants, une réalisation tout feu tout flamme du toujours impeccable Kim Manners, et une BO entraînante, le scénario développe une confrontation tonitruante entre les héros et une flamboyante bande de démons high class au sadisme raffiné. Bobby est évidemment une attraction supplémentaire. L’inépuisable relation Sam/Dean est au rendez-vous, avec Sam luttant pour trouver un moyen de briser le marché fatal de Dean, ce dernier étant bien décidé à être plus… Dean que jamais pendant l’année qui lui reste, numéros d’acteurs bien goûtus à la clé ! La Mythologie se développe avec l’entrée en scène d’un mystérieux personnage, un procédé scénaristique archi rebattu mais dont on ne peut nier l’efficacité. Au final, The Magnificent Seven (quel titre !) lance brillamment cette nouvelle saison. Mesdames et messieurs : aujourd’hui, rien moins que les sept péchés capitaux en personne ! Leur mégalomanie délirante force notre trio à recourir à toutes leurs ressources. L’adjonction du duo de chasseurs dramatise les enjeux à point, notamment lors de l’effroyable séquence du bar, un des meurtres les plus horribles jamais imaginés par Supernatural. L’attaque des bros (avec l’Impala payant de sa personne) montre bien qu’ils ne se battent qu’avec l’énergie du désespoir. Bobby est au top : le voir épouvanté par ces démons ou mater une Tamara en pleine hystérie est excellent : quand Bobby parle, on la ferme, et pis c’est tout ! Jim Beaver est fantastique. Mais le septuor n’est pas qu’une bande d’assassins sadiques, ce sont avant tout des fins psychologues qui aiment s’infiltrer dans l’âme humaine, et faire ressortir ce qu’il y a de plus noir entre eux. Trois scènes se détachent particulièrement : la scène des chaussures est d’un humour saignant très percutant. Celle très Hannibal Lecter (ou Angelus pour les amateurs de Buffy et d’Angel) où l’Envie pilonne nos héros rien qu’avec des mots aussi dévastateurs que… justes ; dans Supernatural, la vision de l’humanité n’est guère riante, et cet aperçu de la lie en chacun de nous est très dérangeante, renvoyant à nous-mêmes. Grand numéro de Josh Daugherty. Sur le même mode, le numéro du faux Isaac qui martyrise verbalement Tamara vaut aussi le détour, tout comme le monologue inénarrable de l’Orgueil, absolument jouissif. L’attaque finale se déroule à plein suspense sur 4 fronts - Dean doit se battre avec… la luxure (pourquoi n’est-on pas étonnés ?). Le deus ex machina final augure bien des surprises pour la suite de la saison. On note que l’on ne s’appesantit pas sur le triste destin des possédés, pas le temps d’ouvrir son cœur lorsqu’on est en guerre… L’épisode vaut aussi pour nos frérots. Si Sam est toujours doloriste, Dean nous régale en étant décidé à vivre sa dernière année pleinement : junk food à tous les étages, partie à trois avec des jumelles (hilarante scène !), et dérouillage de baddies à fond la caisse. Leurs dialogues frénétiques à la Gilmore girls (ancienne série de Jared) dynamisent beaucoup leurs scènes communes. Dean effraie dans la mesure où il semble résigné à vivre seulement un an avant d’être précipité en Enfer. Mais il le fait en ayant la pêche, en étant en mode kamikaze en permanence. Dean demeure bien un grand personnage tragique, noyant son soi si sombre sous des dehors explosifs ; mais combien de temps tiendra-t-il à ce régime ? L’on est pas dupe du faux enthousiasme de la coda, le dialogue final, très amer, reste tenace. Un début en fanfare ! La critique d'Estuaire44 :
The Magnificent Seven, un titre génial, avec la version originale du film Les Sept Mercenaires. A rebours le titre français est très littéralement Les Sept Péchés Capitaux, une différence de tonalité souvent observée au cours de la série. L’épisode signifie une une jouissive entrée en matière pour cette saison ayant bien des défis à relever à l’orée d’une nouvelle ère, le post Azazel débute. Autant l’avouer on est saisit d’emblée par la séquence récapitulative au son d’un métal en fusion comme on aime (le divin Hell Bells d’AC/DC) avec la perspective de sillonner l’immensité de l’Amérique dans une voiture de folie, tout en écoutant les bons classiques. Dès sa spectaculaire introduction, l’épisode plante le décor de la saison : considérablement plus enténébrée, multiples et périlleuses entités libérées, défiance des Chasseurs envers les Winchester, le compte à rebours fatal de Dean. Dean est tel qu’en lui-même face à l’échéance fatale, la saison aura le temps d’exploiter cette veine. Même si l’on aurait pu espérer un traitement plus approfondi des Sept Péchés (ils auraient mérité un double épisode), l’essentiel est là : tous ont droit à leur scène, souvent pétillante d’humour noir et tendant un miroir obscur à l’humanité. Mention spéciale pour l’Orgueil et évidemment pour la Luxure s’accaparant Dean ! The Magnificent Seven apparaît également comme une étourdissante démonstration du talent de Kim Manners, excellant dans l’atmosphère horrifique, les scènes chocs (brutes de décoffrage !), la direction d’acteurs ; le sens de l’image…. Quel atout pour la série ! Coup de cœur pour Tamara, avec son look afro et son pieu elle m’a fait penser à l’une des Tueuses tombées au champ d’honneur face à Spike. J’ai adoré que, quand elle se précipité hors de la maison, ce ne se soit pas pour tomber dans le piège mais bien pour planter l’ordure. Brave cœur ! On en dira pas autant pour Ruby première version, introduite dans la série avec un certain manque d’originalité. On a déjà fait ici le tour de l’essentiel du personnage au cours de cette saison (trucider les démons avec le couteau magique, disparaître dans la nuit noire et obscure). Katie Cassidy est superbe mais ne dégage pas de véritable aura, elle sera bien mieux à son affaire dans Melrose Place ou Gossip Girls. Supernatural aura été un sacré tremplin pour sa carrière comportant de nombreuses productions d’horreur. On l’a déjà dit, on va le redire, on le redira sans cesse : Bobby est fabuleux. Ce prétendu second rôle achève ici de se placer au cœur de la série. Au total un pilote de saison, proche de la perfection. Anecdotes :
2. LES ENFANTS PERDUS Épisode semi-mythologique Scénario : Sera Gamble - So let me get this straight. You want to drive all the way to Cicero just to hook up with some random chick? Résumé : A Cicero, en Illinois, plusieurs « accidents » mortels touchant des pères de famille se sont produits. De plus, leurs enfants commencent à se comporter de manière très inquiétante envers leurs mères. Dean revoit une ancienne conquête de neuf ans, Lisa Braeden, dont Ben, le fils de 8 ans, a de troublantes similitudes de caractère et de goûts avec lui. La jeune femme blonde ayant tué trois des sept péchés capitaux (cf. épisode précédent) fait son retour : elle a bien des choses à dire à Sam… Quand on vous dit que les enfants pompent toute notre énergie… La critique de Clément Diaz :
Supernatural recourt de nouveau au thème des enfants maléfiques via l’intéressant mythe des Changelings, tout en exposant certains thèmes troublants comme l’enfant-roi - un concept très américain - ou le mystère du lien entre l’enfant et la mère qui l’a porté dans son ventre. Tandis que Sam et la blonde font avancer la Mythologie, Dean se voit confronté à une possibilité d’évasion de son sombre présent de chasseur. L’épisode développe de grands moments d’horreur développés davantage par la torture purement psychologique des enfants sur leurs mères que par des effets spéciaux néanmoins très flippants. Cependant, l’implication seulement périphérique des frères à l’affaire ne joue pas en faveur de l’épisode ; de fait, ils apparaissent presque au second plan sans qu’il y ait eu un changement de narration. Il y a quelque chose d’inquiétant dans l’étonnante facilité qu’ont les enfants acteurs de l’épisode à jouer avec autant de naturel les démoniaques Changelings. L’effroi suscité par ses créatures est rendu violent par le contraste tranchant entre leurs actions infernales d’un coté, et de l’autre leurs dialogues d’enfants adorant leur mère. Sera Gamble se montre adroite en axant son intrigue moins sur les petits monstres que sur les mères infortunées. Cela est particulièrement vrai pour la mère de Katie s’effondrant sous nos yeux jusqu’à commettre l’irréparable… avant de voir sa porte de sortie se refermer brusquement sur elle dans un pur moment d’épouvante. Joindre l’émotion à la terreur, on retrouve bien la marque de fabrique de cette talentueuse scénariste. Le final renoue avec les explications aux poings… et au lance-flammes car Supernatural ne serait pas Supernatural sans ses louches d’excès comme on les aime ! De fait, l’épisode fait beaucoup penser au grand classique de La Quatrième Dimension qu’est C’est une belle vie où un enfant-roi sème la terreur sans espoir de l’arrêter. Le lien si intime entre un enfant et une mère se voit magistralement distordu avec l’enfant tuant son père puis se « nourrissant » de sa mère… littéralement, jusqu’à la destruction. L’épisode semble ainsi poser un regard suspicieux sur le fâcheux concept d’enfant-roi, à qui on exauce tous ces caprices, et qui finalement vous vampirise. L’épisode trouve humour et encore de l’émotion avec le duo Dean-Ben. Il faut voir la réaction de Dean lorsqu’il percute la coïncidence des dates, et les similitudes entre lui et Ben, de plus en plus hilarantes : fan de gros son qui tâche, déjà amateur de chair fraîche, employant la manière forte quand on lui bave sur les rouleaux… mais aussi son côté désintéressé lors du final. Tout comme Dean, on se demande furieusement ce qui l’en est, d’autant que Jensen Ackles et Nicholas Elia affichent une bonne complicité bien virile. L’aventure fait réfléchir un Dean bien tenté par l’offre sous-entendue de Lisa : et s’il passait quelque temps avec elle et Ben ? Trouver un coin de repos où il aurait affection et responsabilités paternelles, n’est-ce pas tentant pour cet homme qui au fond de lui n’a jamais souhaité qu’une vie tranquille comme l’avait naguère montré What if and what should never be ? Son départ final, évidemment obligé, n’en distille pas moins une certaine mélancolie. Quant à la mystérieuse blonde, celle-ci montre une aisance dans la tchatche en balançant des répliques qui fusent non stop à un Sam un peu largué. Si le coup des révélations successives n’est guère original, elles gardent leur effet jusqu’au pétaradant cliffhanger. Si Katie Cassidy a tendance à surjouer son personnage, elle parvient à transcrire sa malice et son mystère. L’arc narratif de cette saison s’ébauche sous nos yeux, et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on a une furieuse envie d’être déjà sur l’épisode suivant ! La critique d'Estuaire44 :
The Kids are Alright souffre d’un manque de cohérence de ses Monstres de la Semaine. Que des monstres se substituent aux enfants afin de pouvoir vampiriser la mère, tout en apparaissant selon leur vraie apparence dans la moindre surface réfléchissante ne tient pas la route, même à moyen terme. Toutefois si l’intensité demeure moindre qu’avec les Sept Péchés, la performance des jeunes acteurs parvient à insuffler un malaise allant croissant. A l’instar du film Le Village des Damnés, auquel il fait souvent songer, l’épisode joue joliment du contraste entre enfance et menace diffuse, de même qu’entre l’abomination et sa dissimulation au sein d’une souriante et ensoleillée banlieue. De fait on a davantage l’impression que les Bros ont débarqué moins à Sunnydale qu’à Westeria Lane, d’ailleurs Dean se voit confronté à deux redoutables Desperate Housewives lors de la scène la plus drôle de l’opus. L’épisode vaut également par l’entrée en scène de Ben et Lisa, impeccablement interprétée par Cindy Sampson. La caricature de Dean chez Ben résulte sans doute un peu trop appuyée, mais reste pleine d’humour, là aussi le casting est parfait. L’instinct paternel de Dean évoque avec émotion sa conscience du temps qui passe, de même que son départ, il sait qu’il n’a rien d’autre à offrir à Lisa qu’un prompt veuvage. La blonde démonique continue à développer classiquement un fil rouge, mais a le mérite mettre en valeur Sam dans cet épisode où il demeure en marge. Anecdotes :
3. BARAKA Scénario : Ben Edlund - I procure unique items for a select clientele. Résumé : Pendant que Kubrick, un chasseur fanatique, traque Sam pour le compte de Gordon - toujours en prison - les Winchester apprennent qu’un hangar de leur père où il avait entreposé des objets de toutes sortes a été « visité ». Les voleurs ont pris une boîte contenant un objet maudit : une patte de lapin donnant à son possesseur une chance insolente, mais à l’effet secondaire pervers. Sam et Dean tentent de récupérer l’objet, mais ils ne sont pas les seuls à vouloir y mettre la main… Où Sam s’en prend plein le carafon… RAS quoi. La critique de Clément Diaz : La martingale de Supernatural consistant à reprendre des épisodes du Buffyerse et des X-Files et à les passer à sa sauce continue de fonctionner. Bad day at Black Rock apparaît en effet comme une reprise de The Goldberg variation, épisode des X-Files où la chance la plus insolente cohabite avec la poisse la plus horrifiante. Là où les X-Files viraient dans un pathos hospitalier hors sujet, Supernatural reste fidèle à son idée et maintient un mélange d’humour et de suspense. La réussite n’apparaît cependant pas complète, le scénario restant très linéaire. Cela est toutefois compensé par une vraie dinguerie des auteurs lors des scènes de chance et de poisse, et l’entrée en scène de la rouée Bela, qui dès cet épisode en fait avaler des vertes et des pas mûres à nos héros. Le ressort comique de l’épisode est les effets absolument sidérants de la patte de lapin dès lors que son (mal)heureux possesseur déclenche sa magie. A ce titre, le gros n’importe quoi survenant lorsque Sam et Dean déboulent chez les voleurs est du 4 étoiles entre chutes improbables, maladresses impossibles, et balle magique que n’aurait pas reniée le rapport Warren… la chance aveugle de Dean lorsqu’il neutralise les deux affreux est aussi hilarante. Mais avouons-le, si on se fend la pêche devant cet épisode, c’est surtout lorsque Sam devient le punching-ball ultime (normal, c’est Sam), s’enfonçant toujours davantage dans une poisse de plus en plus catastrophique. Même si Sam en reçoit plein la gueule, le crescendo de plus en plus grinçant (mention au gag de la chaussure) finit par devenir franchement loufoque, jusqu’à évoquer les grandes slapstick comedies chères aux américains. Le spectateur jubile alors même que son héros est en danger de se faire tuer par sa mauvaise étoile. L’autre grand atout de l’opus consiste en ses personnages secondaires. Si Gordon reste sagement derrière les barreaux, on applaudit le guesting de Michael Massee, spécialiste des rôles déviants (24 heures chrono, X-Files…), qui transcrit parfaitement le délire fanatique de Kubrick. Il rayonne à la fois de drôlerie par ses poses caricaturales mais aussi d’effroi par le dévoiement de sa mission de chasseur, à force d’orgueil et de soif de sang. Supernatural frappe encore un bon coup avec l’arrivée de Miss Bela Talbot, interprétée par une Lauren Cohan bien décidée à tirer le maximum de fun de ce réjouissant personnage. Cette voleuse de charme, impitoyable en affaires, et à la vision très large du mot « scrupule », occasionne de mémorables scènes avec nos bros, toujours à deux doigts de perdre la face contre un adversaire aussi malin qu’eux. Pour terminer, mentionnons le décor magnifique du hangar de Winchester Sr. à la fois intime et inquiétant. Il ne manque à cet épisode qu’une histoire plus fournie que cette course au trésor sans rebondissement notable - scènes de chance/poisse mis à part. On peut aussi regretter que l’épisode hésite trop entre sérieux et comédie, ne tirant franchement aucune de ses cartes et restant dans un entre-deux. Mais cet épisode léger n’en remplit pas moins son rôle d’amusante distraction. La critique d'Estuaire44 :
Bad Day at Black Rock se montre souvent hilarant à la lisière de l’épisode décalé. L’idée géniale d’une chance et malchance alternativement maximales créent une succession d‘excellents gags, particulièrement propice au langage visuel. L’épisode fait très cartoon : comme Tex Avery l’avait bien compris, on rit davantage des malheurs que des heureuses fortunes, d’où un rôle de vedette pour Sam. Sa succession de catastrophes et de jérémiades le transforment en loser vraiment irrésistible. Les deux acteurs jouent totalement le jeu ! On n’oubliera cependant pas la mort horrifique du voyou, pour le coup très proche d’un Destination Finale. Les divers pieds nickelés peuplant l’écran sont pittoresques à souhait (mention spéciale à Kubrick, comme jailli d’un film des Frères Coen, impeccablement interprété par Michael Massee), tandis que Gordon prépare le retour de la vengeance qui tue. L’opus soigne décidément ses personnages secondaires (l’un des secrets d’une narration réussie) nous apporte aussi la bonne surprise de la révélation de la très entreprenante Miss Bela Talbot, bien mieux menée que celle de Ruby. Bela se voit d’emblée définie (Bobby représentant ici un efficace catalyseur du récit) et immergée directement dans l’action, avec des actions et des dialogues qui crépitent. Le potentiel du personnage est immédiatement exploité, au contraire de la damoiselle au couteau qui coupe. La performance de Lauren Cohan semble également davantage convaincante que celle de Katie Cassidy, avec l’accent anglais qui va bien dans les séries américaines pour les félons snobs et classieux. Derrière le glamour du jeu de chat et la souris avec Dean, on apprécie que l’opposition demeure réelle, voire féroce. Dans une série comme Supernatural, Bela n’aurait pu composer une antagoniste crédible sans faire couler le sang. Pas de fleuret moucheté dans l’armurerie, plutôt du gros calibre. On aime aussi beaucoup son appartement, raffiné et de bon goût, c'est-à-dire divergeant quelque peu de la casse de Bobby ou des motels usuels des Bros. L’extension de l’univers des Chasseurs à celui des traqueurs d’objets magiques produit d’intéressantes étincelles et une concurrence porteuse. Cela aurait pu ouvrir sur une divertissante série dérivée, avec d’autres artefacts aux effets imaginatifs, Bela a assez de potentiel pour tenir les rênes. Le seul regret laissé par l’épisode reste que l’on voit trop la ficelle selon laquelle après avoir associé Ruby à Sam, on associe maintenant Bela à Dean, d’où du grain à moudre pour chacun des héros. Un procédé efficace mais un rien mécanique. Anecdotes :
Épisode semi-Mythologique Scénario : Robert Singer & Jeremy Carver - Why don't you relax ? Résumé : Les habitants d’une petite ville ont délaissé toute morale et cèdent à toutes les tentations proposées récemment par le puissant Trotter qui a transformé la ville en « cité du pêché ». Sam et Dean sont persuadés que des démons ont pris possession des habitants, mais leur rencontre avec une jolie barmaid va révéler une vérité plus glaçante encore. Alors que Bobby tente de réparer le Colt, il reçoit la visite de Ruby… En vérité je vous le dis, ce serait un pêché que de manquer cet épisode… La critique de Clément Diaz : Ce formidable huis clos incisif s’inspire autant de La Quatrième Dimension par son utilisation du Fantastique à des fins anthropologiques qu’à Buffy contre les vampires pour son mix détonnant d’humour et d’effroi. Cependant, Supernatural passe ces influences à sa propre sauce, plus sombre (et saignante), et nous offre outre une enquête à rebondissements serrés une mémorable rencontre dissertant avec maestria sur la condition humaine… et des démons via un dialogue certes très long, mais jamais lassant par sa force thématique et son tranchant formel. La Mythologie de la série en profite pour avancer. Assisté de Robert Singer, le scénariste Jeremy Carver entre à grands pas dans une série à laquelle il sera l’une des futures têtes pensantes. L’épisode est axé sur la joute verbale entre Dean et la séduisante Casey, campée par une magnétique Sasha Barrese, jouant certes très avant la carte sexy (poses suggestives en tous genres), mais manifestant surtout un aveuglant talent d’actrice dans la puissance tranquille de son personnage. L’horreur la plus efficace demeurera toujours celle se nichant dans les sombres replis de l’âme humaine, et voir ici les démons ne jouer qu’un rôle de catalyseur, laissant les hommes se perdre de leur plein gré dans les bras trompeurs de la tentation, est bien plus fort que n’importe quel monstre. De fait, l’épisode apparaît comme une version des Monstres de Maple Street, iconique épisode de la Twilight Zone rappelant que le mal ne naît pas de démons ou autres monstres, mais bien des hommes. Pourquoi tourmenter les humains puisqu’ils sont si doués pour se détruire eux-mêmes ? dit en substance cet épisode très pessimiste sur l’humanité. L’épisode n’hésite pas à enfoncer le curseur et à pointer les troublantes similitudes entre l’humanité et les démons, dépeignant ses derniers comme ayant une foi en miroir inversé envers un « Dieu » à eux (Lucifer), détestant pourtant son royaume qu’ils sont avides de quitter… mais aussi capables d’amour fou ou de moments de faiblesse. De fait, l’épisode n’hésite pas à déranger la conscience du spectateur. La confiance naturelle de Dean se lézarde subtilement devant cet insaisissable adversaire qui casse son jem’enfoutisme quant à sa terrible échéance (remarquable finesse de jeu de Jensen Ackles). Autour de ce duo gagnant, l’épisode brode des situations bidonnantes rappelant les plus grandes créations de Joss Whedon : Dean appréciant beaucoup cette atmosphère de stupre et de corruption, barman proportionnellement bavard au nombre de billets dans sa main, Ruby défiant Bobby de lui tirer dessus… et qui en effet lui tire dessus ! (On t’aime Bobby), Sam pataugeant comme une andouille en jetant de l’eau bénite à tort et à travers, numéros décalés du prêtre regardant avec désabusement ses fidèles sombrer dans le pêché, et dialogues crépitants à la Buffy à tempo enlevé. Mais des frissons passent lorsque Sam se met en mode Terminator devant un Dean stupéfié, comme un rappel du lancinant avertissement de « Yeux jaunes » (Azazel désormais) sur le retour de Sam. La coda électrique avec une mutine Ruby (Katie Cassidy semble avoir trouvé toutes ses marques) ne dissipe pas cette fêlure inquiétante, accentuée par la rigidité soudaine du jeu de Jared Padalecki. Une pleine réussite. La critique d'Estuaire44 : Épisode hors des sentiers battus que Sin City, apportant de plus d’importants compléments à la mythologie de la série. Il est bien trouvé d’inverser la perspective entre des humains péchant et se damnant sans l’intervention de personne et des démons plus romantiques et – relativement - plus apaisés qu’à l’ordinaire. L’effet obtenu est plaisamment étrange, le summum se voyant atteint lors de cet impromptu entre Dean et la sublimissime Casey (irrésistible Sasha Barrese, que l’on aurait bien vu en Démon des Carrefours). Ce passage entre duel et connivence, impeccablement dialogué et tenant le spectateur en haleine, constitue le cœur de l’épisode, autour duquel il faut sans doute bâti. Au passage on apprend ici une quantité assez stupéfiante de faits devenus depuis des éléments de base de l’univers Supernatural, comme le nom Azazel (il était temps !) ou Lucifer pointant le bout de son nez comme Créateur et Dieu des Démons, mais aussi que Sam était bien censé devenir une espèce d’Antéchrist. D’où des interrogations sur les continuelles apparitions de Ruby, ici nettement plus intéressante que d’habitude, en réparatrice de Colt et en cible de Bobby, que l’on ne défi jamais impunément. L’Humanité a-t-elle vraiment besoin de deux Winchester quand elle dispose d’un Bobby Singer ? La distribution est impeccable avec, bien entendu, un grand coup de cœur pour Don S. Davis, pour l’un de ses tous derniers rôles. De manière amusante, on aperçoit brièvement au bar Julia Benson, qui tiendra le rôle récurrent de Vanessa James dans Stargate Universe. Un épisode Stargate dans Supernatural, Sin City est vraiment à part ! L’humeur répond également présent, notamment avec un Dean en goguette. Le seul regret provient de la dérive supposée de Sam, que l’on trouve artificiellement souligné par l’intrigue (il faut visiblement une autre intrigue que le rendez-vous prochain de Dean). Après tout il paraît simplement normal que Sam passe prestement à l’action face à Dean confronté à deux démons. Si les Bros devaient attendre à chaque démon rencontré d’être bien certain de ceci ou cela, il est fort à parier que la série n’aurait pas atteint onze saisons, et plus si affinités. Eux, leur affaire, c’est le plomb. Bon, on sait bien que le mauvais Chasseur c’est le gars qui a un fusil, il voit quelque chose qui bouge, il tire. Et le bon Chasseur, c’est le gars qui a un fusil, il voit quelque chose qui bouge, il tire, mais ce n’est pas la même chose, quoi. Anecdotes :
5. IL ÉTAIT UNE FOIS… Épisode semi-mythologique Scénario : Cathryn Humphris - Remember Cinderella? The pumpkin that turns into a coach and the mice that become horses? Résumé : Dans un chantier de construction, trois frères sont attaqués par « quelque chose » qui les mutile sauvagement. L’unique survivant raconte à Sam et Dean qu’il s’agissait d’un être humain. D’autres meurtres bizarres ont lieu ; à chaque fois, une petite fille est sur les lieux, contemplant le spectacle avant de disparaître. Sam comprend que les meurtres sont liés à des contes de fées du folklore. Mais qui est la petite fille ?… À la fin de l’enquête, Sam va tenter de briser le marché infernal qui condamne son frère… Des contes pour faire dodo… éternellement. La critique de Clément Diaz : L’originalité de cet épisode se voit grevé en ce qu’Eric Kripke avoue ici trop sa dette envers Buffy, puisqu’il ne fait rien moins qu’en mixer deux épisodes : Nightmares (pour l’enfant malade aux pouvoirs psychiques), et Gingerbread (pour les personnages de contes pas gentils). Si le tout fait penser à une amusante version comico-saignante de la future Once upon a time, le traitement particulier de la série ne compense pas suffisamment. De plus, le scénario s’épuise rapidement, laissant place à une litanie de meurtres répétitive que nos bros n’arrêtent qu’à la fin, une situation familière aux amateurs des Avengers, mais qui pour une série contemporaine, passe comme une paresse scénaristique. Bedtime stories souffre de plus d’être mal architecturé, l’enquête s’arrêtant au bout de 30 minutes pour ensuite opérer un virage mythologique totalement déconnecté. D’où l’impression de regarder deux épisodes raccordés à coup de ficelles aussi grosses que des câbles. Malgré ce choix, Cathryn Humphris parvient à tirer d’excellentes mises en scène de meurtres, injecte une sincère émotion autour du personnage du docteur, et rafle finalement la mise lors du duo final, retrouvant une partie de l’éclat du mémorable affrontement entre Dean et la démone dans Crossroads blues. Les auteurs ont des difficultés à mettre en place l’exposition, il faut plusieurs allers-retours consécutifs entre meurtres et interrogatoires pendant tout le 1er acte pour enfin parvenir à poser tous les enjeux, tandis que l’enquête des Weuh est réduite à la portion congrue, usant de raccourcis faciles (comment Dean trouve-t-il la maison du monstre ?). Cependant, l’épisode percute fort en rappelant explicitement toute la cruauté et le macabre afférents aux contes originaux, bien avant d’être édulcorés et dépouillés de toute dimension psychanalytique pour devenir des bluettes sucrées. C’est dans cette version « light » que Disney vendit et vend toujours ses adaptations filmées. A ce titre, l’épisode de Supernatural s’impose comme l’anti-Disney en rendant aux contes leur tranchant originel, mâtiné de son humour gore comme on l’aime toujours ; un choix bien plus tonique (mention à Hänsel et Gretel passant au hachoir, au sens propre bien entendu). Le thème de l’esprit vengeur est ici traité sous un angle plus émotionnel grâce au bouleversant mais chimérique espoir du médecin (excellent Christopher Cousins). Montrer un esprit ne pouvant trouver le repos à cause de quelqu’un en plein déni de réalité le « retenant » est une merveilleuse idée (on songe au glaçant Death ship de la Twilight Zone), permettant aux adieux finaux de vibrer d’émotion. On apprécie qu’après avoir dominé tant d’épisodes que Dean laisse toute sa place à Sam, clairement le leader de l’enquête, se contentant de quelques vannes et de lever la paluche contre le « grand méchant loup ». Le virage mythologique retrouve les scènes de pactes diaboliques qui ont toujours réussi à la série. Sandra McCoy campe un démon aussi stoïque que perfide, connaissant très bien un Sam souffrant de la présence de Dean qu’il porte comme un fardeau. Ses dialogues sont sur le fil du rasoir. La tension grimpe à des hauteurs fulgurantes alors que Sam voit progressivement son espoir s’écrouler devant l’évidence. Son coup de sang final exprime simultanément sa défaite et que décidément, il y a quelque chose de pas clair en lui depuis qu’il est revenu. La mission « saving private Dean » semble bien sans espoir La critique d'Estuaire44 :
Dans un premier temps Bedtime Stories (encore un titre en or massif) se présente comme un épisode décalé, drôle et imaginatif. Cette relecture des classiques des contes de fée à la sauce Supernatural sonne tout à fait juste. De fait, ces récits contiennent de nombreux éléments horrifiques et que les différents sketchs suscités trouvent toujours le parfait équilibre entre audace iconoclaste, respect des idées maîtresses de l’œuvre et rigolade féroce. Mention spéciale pour la maison en pain d’épice et sa charmante hôtesse. On se situe plus près de Grimm que cette relecture astucieuse de Disney que constitue Once Upon A Time. Christopher Cousins incarne avec sensibilité le médecin et poursuit l’amusante présence de figures de Stargate SG-1 après l’opus précédent (il y incarna le mari de Samantha Carter dans la trame temporelle des Aschen). On regrettera cependant que la situation se résolve trop rapidement et aisément : malgré l’émotion insufflée par cette évocation de la légende de Blanche Neige (qui dut effectivement son salut au Chasseur !), on revient en fait à un scénario classique. L’impression d’un atterrissage prédomine, d’autant qu’ultérieurement la série saura aller beaucoup plus loin en matière de fantaisie concernant fées et farfadets. Ici la rupture avec le danger de Formula Show que comporte le concept de Monstre de la semaine ne s’avère que partiel. L’exécution à froid du Démon des Carrefours permet à ce savoureux et sulfureux personnage de sortir par la grande porte (en attendant la relève), tout en crédibilisant quelque peu la thèse d’un Sam évoluant vers l’Obscur, guère convaincante jusqu’ici. En contraste Ruby s’affirme comme l’unique chance de Dean, cela lui confère un intérêt supplémentaire. Il est toutefois à regretter que l’aspect mythologique de l’épisode résulte à ce point disjoint du corps du récit, comme un sketch à part, on préfère qu’un loner abordant le fil rouge de la série sache plus finement entremêler ses thèmes. Anecdotes :
6. LE VAISSEAU FANTÔME Scénario : Laurence Andries - You know, Dean, when this is over, we should really have angry sex. Résumé : Plusieurs morts par noyade particulièrement improbables viennent de se produire au port de New York… mais sur la terre ! Chacune des victimes avait auparavant vu un vaisseau fantôme sur la baie. Sam et Dean doivent trouver le lien entre les victimes, mais pour se débarrasser de l’esprit assassin, ils vont devoir composer avec une vieille femme très « cougar », et avec Bela, venue ici « pour affaires »… Quand Bela Talbot passe, les Win’ sont dans la mélasse. La critique de Clément Diaz :
Supernatural reprend un autre thème bien connu du Fantastique, et d’ailleurs déjà exploité par sa devancière X-Files (Død Kalm), mais choisit de le réduire à l’état de McGuffin pour construire une hilarante screwball comedy dans les règles de l’art : joutes verbales à 300 à l’heure, guerre des sexes avec domination féminine, pluie de sous-entendus sexuels, ambiance de boulevard... L’indomptable Bela fait un véritable one-woman-show, renvoyant dans le décor notre viril duo ici rapidement largué. Les amateurs d’horreur auront droit à leurs meurtres bien horribles, malgré un dénouement anticlimatique, heureusement adouci par une hilarante coda. Les premières scènes horrifiques s’effacent vite devant une irruption retentissante de la comédie, amenée par l’explosive Bela. La dame a la rancune tenace et le challenge dans le sang. Sa prise de pouvoir sur nos deux frérots devenant vite de pauvres pantins, distancés par son efficacité et son culot, déchaîne une furia comique absolument trépidante, débutant par le coup déjà énorme de l’Impala à la fourrière (Dean passe à deux doigts de la crise cardiaque). Par suite, Bela, dans une robe noire à baver, entraîne Dean - engoncé dans un smoking qui doit bien lui mettre la honte - dans un vrai carnaval vaudevillesque, l’humiliant dix fois par minute à coup de répliques assassines (les répliques claquent à vitesse hallucinante), tout en enchaînant gags, quiproquos, et sous-entendus sexy à hurler de rire. La dame joue également de son avantageux physique pour arriver à ses fins : répartie, sensualité, absence de remords, efficacité, détermination… l’arsenal de Bela est immense. L’ultradynamique Lauren Cohan se montre d’un charme et d’un entrain irrésistible, moteur parfait de cette échevelée comédie. Dean se montre tout aussi drôle en échouant systématiquement à reprendre l’avantage. Sam est très bien accompagné, pris dans les filets d’une cougar de plus en plus entreprenante, enchaînant propositions indécentes et mains baladeuses à vitesse grand V. Grand bravo à Ellen Geer de nous tuer plusieurs fois de suite de la sorte. Leurs personnages faisant figure d’abrutis dévirilisés à côté de cette paire de dames en or, on est ravis que Jared et Jensen jouent le jeu avec un festival de mimiques exaspérées. Par suite le virage dramatique se montre moins convaincant, le final dans le cimetière est très hâtif, se limitant à une invocation simplement perturbée par un peu de vent, le baddie n’étant même pas éliminé par notre trio. On est toutefois content que Bela ravale son ego quand l’ironie du sort lui tombe dessus, et lâchant un « I need help » du bout des lèvres, parce que bon, il faut bien que les bros sauvent un peu la face quand même ! Cela dit, Bela reste une forte tête et non, elle ne rampera pas à leurs pieds, et se paye même le luxe de s’en sortir sans la moindre excuse ; bien sûr, on devine qu’elle ne tirera aucune leçon, et continuera d’emprunter sa voie sinueuse bien parallèle au droit chemin. Ce happy end cynique conclut avec éclat cet épisode très drôle, révélateur de la place désormais plus importante de l’humour au sein de la série. La critique d'Estuaire44 :
Red Sky at Morning représente sans doute le meilleur épisode Bela (hormis la bouleversante conclusion arrivant bien trop vite du fait de la grande grève des scénaristes). Elle apparaît ici au meilleur de sa forme, sublime en robe de soirée et Englishness à fond les manettes, se délectant à titiller Dean, qui d’ailleurs manifeste à l’occasion du répondant. La relation passablement tordue s’instaurant entre eux deux nous vaut quantité d’hilarants échanges, avec des réparties en or massif. On apprécie que Bela n’en ressorte pas édulcorée pour autant. Son aspect Dark Side n’est jamais mis sous le boisseau, bien au contraire avec la révélation encore partielle de son passé. Le gag sacrilège de l’Impala se montre transgressif à souhait, agrémenté de l’irrésistible mine agacée des Bros face au retour de Bela. On peut estimer qu’ils auraient encore préféré retrouver Gordon, au moins avec lui ils peuvent y aller franco. Miss Talbot demeure décidément la grande rencontre de cette saison parfois minorée. On continue de penser qu’elle aurait pu idéalement lancer une série dérivée autour des traqueurs de reliques, en Arsène Lupin du surnaturel (crossovers électriques garantis). L’opus se voit décidément marqué par des couples dysfonctionnels et hilarants, les tribulations de Sam avec le cougar mature valant le coup d’œil. Ellen Geer et Lauren Cohan sont épatantes, chacune dans son registre. L’aspect horrifique n’est pas négligé pour autant, avec des exécutions bien sordides et de très suggestives apparitions du simili Hollandais Volant. Ténébreuses ou ensoleillées, les scènes d’inspiration maritimes sont magnifiques. Elles apportent une spécificité à l’épisode, les Bros s’attachant de coutume à l’Amérique profonde, loin des côtes et de leurs mégapoles. Malgré la présence de l’eau, des effets variés empêchent tout doublon avec Dead in the Water, en saison 1. Anecdotes :
Scénario : Sera Gamble - Sam Winchester is the Antichrist. Résumé : Gordon Walker s’évade de prison grâce à son complice Kubrick. Il est plus que jamais décidé à tuer Sam qu’il pense être le futur Antéchrist. Alors que Sam et Dean sont sur les traces d’un vampire qui enlève des jeunes femmes pour les transformer, ils tombent sur Walker… Dans Supernatural, on fait le don du sang, mais celui des autres. La critique de Clément Diaz : Dans le bonus du finale de la saison 2, Sera Gamble avait déclaré qu’elle voulait toujours plus de gore dans Supernatural. On ne peut pas lui reprocher de ne pas tenir ses promesses, car c’est un vrai festival qu’elle concocte à l’occasion de Fresh blood. La scénariste y va toutefois au culot et décide de centrer l’épisode sur Gordon, soit un personnage foncièrement antipathique ; ne reculant devant rien, elle force le spectateur à éprouver une certaine compassion envers cet opposant taré et assoiffé de sang (à tous les sens du terme) lorsqu’elle le précipite plus bas que les enfers. Les petits coucous d’une Bela toujours aussi peu altruiste - bon, allez, en léger léger progrès - épicent cet épisode goulu. La visite de l’aussi pulpeuse que sympathique Mercedes McNab dans Supernatural donne une idée de la différence existant entre la série et le Buffyverse : chez Whedon, la sympathique Lucy aurait sans doute bénéficié de la compassion de la Tueuse. Par contre, chez les bros, on ne fait pas vraiment dans le sentiment, alors ils regrettent ce qui va se passer, mais ça se terminera quand même par une décapitation en bonne et due forme. Dans un rôle opposé à la loufoque Harmony, Mercedes McNab rend palpable tout le désespoir de son personnage, posant aux W2 un de ces dilemmes éthiques qui fait bien mal. Si l’épisode doit composer avec un tempo trop retenu et un certain éclatement de l’intrigue, Gordon fascine par sa volonté sincère mais dévoyée de se battre contre le Mal, sa détermination atteignant les rivages de la folie, et sa haine flamboyante envers les frérots, ferment du développement de son esprit névrotique (la face-à-face avec le vampire est une perle de dialogues au fer rouge). Le cataclysmique rebondissement central achève de le déshumaniser en lui faisant perdre ce qui restait d’humain en lui, tout en rendant son affrontement avec les Weuh plus intense et violent. Faire voir l’épisode de son point de vue permet de s’immerger pleinement dans une folie décuplée par sa transformation, jusqu’à briser sa règle de ne pas tuer d’innocents ; signe que le monstre en lui a désormais pris le pouvoir sur ce qui pouvait rester d’humain (byebye Kubrick). Le final du hangar se montre paroxystique à souhait, la démence de Gordon transpirant à chaque mot qu’il décoche comme autant de flèches à Sam, jusqu’à une bagarre d’une saisissante violence et une exécution rentrant dans le top 10 des morts les plus sanguinolentes de la série. Sterling K. Brown exprime comme personne cette chute sans retour dans les ténèbres, il quitte la série avec tous les honneurs après cette interprétation particulièrement ravageuse. Les quelques pointes de respiration sont données par la toujours pêchue Bela. Il est visible que Lauren Cohan s’éclate comme une gamine dans ce rôle réjouissant : la scène pré-générique est un modèle du genre, la dame ne se laissant pas impressionner par le révolver de Gordon, et lui extorquant même un sacré paquet d’oseille. Le rétropédalage la voyant regretter son erreur initiale et se débattre pour la réparer est assez gros, on sent un peu trop que les auteurs veulent orienter le personnage vers plus de sympathie, mais Cohan le fait sans perdre de son mordant à Bela. On est aussi très sensible lorsque Dean tombe enfin le masque de l’insouciance lorsque Sam le force à avouer sa terreur de son échéance fatale au cours d’une des scènes les plus remarquables entre les deux frères. Kim Manners multiplie les scènes gore à base de corps étêtés sauvagement, atteignant un taux d’hémoglobine inhabituellement élevé, y compris pour les standards de la série ; le reste du temps, sa dynamique mise en scène enferme chaque scène au sein d’ombres aussi opaques que glaçantes. La critique d'Estuaire44 :
Fresh Blood apporte un nouveau succès à cette troisième saison, même si décidément les Vampires de Supernatural sont plus glauques et pitoyables qu'effrayants et charismatiques. Le chef de clan résulte assez pathétique, en plus de mauvais stratège. La facilité avec laquelle Gordon sort de prison apparaît également trop expéditive. Quand c'est Faith qui fracasse sa geôle, on l’admet, mais les Chasseurs n'étant pas des entités légendaires, on apprécierait ici un peu d'explication. Idem pour l’embuscade tendue à Bela, même si on apprécie que celle-ci apporte son grain de sel, toujours aussi cynique et fine mouche. Tout ceci confirme que la thématique police/prison est globalement inopérante dans Supernatural. Mais l'effarante prestation du toujours excellent Sterling Brown en Gordon vampirisé sauve l'affaire concernant les Fils de la Nuit. L'impact est total, d'autant qu'il s'accompagne de vue subjective et de scènes bien Gore qui tache au plafond. Le voir tuer son meilleur (seul) ami, le plus bête que méchant Kubrick, rajoute encore à l'horreur. Il est agréablement troublant et pervers que l'ultime étincelle d’humanité à laquelle il se raccroche soit sa pulsion de meurtre envers Sam. De son côté ce dernier commence enfin à devenir réellement inquiétant. Un épisode abyssal, où même l’émouvante scène autour scène de l'Impala s’inscrit dans un panorama funèbre. L’association gagnante Sera Gamble / Kim Manners fonctionne à plein et donne lieu à un opus pleinement intense. Bien entendu l’épisode achève d’emporter l’adhésion par le revival Buffy qu’il met en place avec le guesting enthousiasmant de Mercedes McNab, qui campe une Vampire à la fois semblable et différente d’Harmony, avec une étonnante conviction pour un registre plus tragique qu’à l’ordinaire. Une nouvelle superbe prestation après celle d’Amber Benson dans Bloodlust. Le fil rouge se poursuit tout au long du récit, avec les Bros en chasse au Spider, soit le Bronze local, avant d’intervenir dans la proverbiale ruelle où le Vampire a entraîné sa victime, ou encore Sam tranchant la tête de Gordon au fil de fer, tout comme Buffy pour le Turok-Han dans Showtime. Anecdotes :
8. LE FESTIN DU PÈRE NOËL Scénario : Jeremy Carver - Well, for Bobby, we're not dealing with the anti-Claus. Résumé : Il y a un an, un homme déguisé en Père Noël est « aspiré » par sa cheminée sous les yeux de son fils. A l’approche de Noël, ce genre d’événements recommence. Sam et Dean émettent l’hypothèse qu’un « anti-Père Noël » est à l’origine de ses enlèvements, mais la vérité va être plus spectaculaire… Douce nuit, sanglante nuit,Sur le toit, Santa cuit. Le carnage annoncé s'accomplit. Des cadavres sur le sol s’ensuivent C’est un Noël pourri. C’est un Noël pourri. La critique de Clément Diaz : Tradition incontournable de toute série américaine qui se respecte, on est ravis que Supernatural se plie à l’exercice de l’épisode de Noël, évidemment dans son ton bien à lui (méchants cramés, meurtres gore…). Mais si le ton particulier de la série irrigue tout l’épisode, le scénario ne suit pas, son intrigue rapiécée et ses investigations vaines ne se voyant pas aidés par de longs flashbacks sur la jeunesse des bros très fastidieux. L’épisode se voit heureusement sauvé par son très décalé couple de vilains inaugurant un type d’adversaires assez allumés de Supernatural : les dieux païens cherchant à retrouver leur gloire passée depuis que le Dieu des religions monothéistes les a prié de faire place nette. L’affrontement avec les bros se révèle aussi hilarant que saignant. Malgré les scènes d’enlèvement filmées avec une sophistication fluide par J.Miller Tubin, Le rythme poussif de l’enquête ne provoque guère d’étincelles - à l’exception d’un massacre dans les règles de l’art de Silent Night perpétré par nos bros toujours aussi poilants quand ils improvisent avec une absence complète de brio. Notre duo assure en temps normal le spectacle, mais ici il ne pétille pas le moins du monde, l’on croit voir les avatars les plus classiques des enquêteurs policiers, aux dialogues purement fonctionnels. Le scénario de Carver tournant court, on ne peut s’empêcher de penser que le scénariste Ben Edlund, d’habitude si foisonnant de bonnes idées, s’est ici fourvoyé en lui proposant de le rallonger par des flashbacks ternes sur l’enfance des Winchester, n’apportant aucune valeur ajoutée à ce que proposait Something wicked en saison 1. La corde mélodramatique se voit tirée bien trop fort autour de Sam découvrant ses traumatismes le soir de Noël, tandis que le jeune Dean ne sort pas du cadre du « frère imbuvable », là où Something wicked se montrait plus nuancé, sans que la prestation des jeunes comédiens (très bien choisis) ne soit à mettre en cause. Ces flashbacks s’étirent sur l’équivalent d’un acte entier de l’épisode, cette excroissance prend ici bien trop de place sur l’enquête, il est vraie écrite à minima. Heureusement, la série sait s’y prendre avec ses monstres de la semaine, et avec cet aimable couple de dieux païens complètement frappés de la caboche, on trouve enfin l’étincelle que l’on cherchait désespérément depuis le début de l’enquête. Ce charmant couple fait un joyeux festival de décalages : sourires light/atelier de puzzle humain à la cave, table de Noël/invités ligotés et passés au scalpel, titre de dieux/déguisement d’habitants d’Amérique profonde intégrés sagement dans la communauté, et surtout de grosses tranches de délires pseudo-religieux, notamment sur ce « Jésus » qui a fait fondre leur business. Une fois de plus, l’on peut distinguer une influence de Buffy, car ils n’évoquent rien moins qu’Anyanka (davantage que la pince-sans-rire Illyria), démon sanguinaire rappelant souvent combien elle s’emmerde dans ce corps humain où elle est condamnée à demeurer, et ses pointes comiques sur les monstruosités qu’elle commettait jadis. Mais l’effet fonctionne parfaitement dans une série fonctionnant pas mal sur la mégalomanie des gromonstres. À l’opposé de la lourdeur des flashbacks, la coda rayonne d’une joie tranquille avec ce réveillon passé par les deux frères ensemble, dans une vibrante complicité, sans doute l’un de leurs rares moments de bonheur, et où enfin l’on sent l’esprit de Noël planer sur cet épisode. La critique d'Estuaire44 :
Passage incontournable que l'épisode spécial Noël, mais souvent casse-gueule, particulièrement pour les séries fantastiques. Sans atteindre le niveau d’un chef-d'œuvre comme le Amends de Buffy, le Christmas Carol du Docteur ou How the Ghosts stole Christmas des X-Files, A Very Supernatural Christmas remporte néanmoins la gageure, grâce à une introduction à la mise en scène d'une remarquable qualité mais aussi et surtout grâce au recours à l'un des meilleurs filons de Supernatural : les dieux païens. Tout en impliquant de réjouissantes références au folklore (notamment autour des sacrifices humains...), nos amis mégalomanes permettent également de laisser totalement le champ libre à l’imagination. C'est le cas ici avec ce couple de serial killers divins totalement barrés, se complaisant dans une mordante satire de l'American Way of Life des années 50. Les acteurs jouent le jeu à fond, tandis que l'on verse franchement dans un Gore des plus hilarants, façon Grand Guignol rigolard. Joyeux Noël ! Leur mise à mort s’avère nettement plus Rock’n Roll que celle de l’arbre du Scarecrow, en saison 1 On regrettera le mélo quelque peu à gros bouillons induit par les flash-backs, même si les jeunes comédiens se montrent performants. La scène finale, voyant les Bros se construire un (dernier) Noël de bric et de broc dans un de leurs sempiternels motels, se montre par contre très émouvante. Anecdotes :
9. LES REINES DU SABBAT Épisode Mythologique Scénario : Ben Edlund Yes, the same thing will happen to you. It might take centuries, but sooner or later, Hell will burn away your humanity. Every hell bound soul, every one, turns into something else. Turns you into us, so, yeah, you can count on it. […] That's what happens when you go to Hell, Dean. That's what Hell is. Forgetting what you are. Résumé : Janet Dutton meurt dans sa salle de bains en crachant abondamment sang et dents. Les Winchester comprennent rapidement que des sorcières sont à l’œuvre, mais ne réalisent pas encore qu’ils vont devoir affronter un adversaire beaucoup plus redoutable qu’ils le pensaient. Ruby intervient pour les aider, mais n’aurait-elle pas en réalité d’autres plans ?… Ma sorcière pas-du-tout-bien-aimée… La critique de Clément Diaz :
Ben Edlund confirme son sens du rythme avec ce brillant épisode démarrant comme une décapante relecture de Charmed version darkside, avant de tout chambouler par un époustouflant duel des esprits dont la folle intensité compense quelques erreurs de jugement de l’auteur. Sans temps mort, l’épisode court d’un rebondissement à l’autre tout en délivrant une nouvelle avancée de la mythologie, jusqu’à un terrible twist final où un gouffre sans fond semble s’ouvrir sous les pieds de Dean... Livre des ombres, pouvoir des trois, sorcières agissant (relativement) discrètement mais ne mesurant pas toutes les conséquences de leur pouvoir, formules poétiques, symboles cabalistiques… le mimétisme avec l’univers des sœurs Halliwell est frappant, d’autant que le trio de dames a chacune son caractère (la forte tête Tammi évoque Prue). Mais dès l’introduction où une pauv’nana casse sa pipe après avoir préalablement craché ses dents à la pelle, on comprend vite qu’on sera très loin de la vision sucrée d’Aaron Spelling. Effectivement, Singer réalise de fort juteux plans dont le côté sanglant et macabre se couple à une esthétique fort réussie (la contre-plongée via la table de verre sur le cadavre d’Amanda…), alors que l’enquête, ponctuée par la découverte de ces inquiétants « sacs de malédiction », fait montre d’une belle variété dans les différentes mises à mort, tout en maintenant un suspense constant quant à savoir si nos bros arriveront à temps à chaque tentative. Les théâtrales apparitions de Ruby menaceraient de tourner au procédé si elles n’étaient heureusement pas impeccablement minutées, tombant toujours à un moment critique, et à chaque fois fort différentes de la précédente ; on retient notamment une grosse engueulade entre elle et Dean, où elle ne trouve rien de mieux que de rembarrer un Dean hystérique la visant avec le colt, quelle badass ! L’on sait que le succès de Supernatural doit beaucoup à ses antagonistes déments, surtout féminins. Sur ce point, la démone du jour, campée avec fer et feu par la royale Marisa Ramirez, constitue une représentante de catégorie 1 tant ses pouvoirs phénoménaux et sa suintante perfidie assurent un show sans pareil (le trépas des sorcières est plaisamment ignoble). Ruby peut pour la première fois intervenir directement dans l’action (mis à part son entrée en scène dans le pilote de saison), avec une mémorable joute dialoguée puis une baston réellement sauvage, où Katie Cassidy imprime une présence plus forte qu’à son habitude. Cette fenêtre ouverte sur le monde des démons est d’autant plus captivante qu’elle s’insère très naturellement à l’action. On relève toutefois plusieurs incohérences: ainsi la démone aurait le temps de trucider 50 fois les frères, et préfère à cela dévoiler de long en large son masterplan, laissant tout le temps à Ruby de leur sauver la mise. On ne croyait pas que cet énorme cliché des années 60 était encore possible, il semble que si. On peut se demander aussi pourquoi après avoir tué les 2 premières sorcières, elle se désintéresse de la 3e, permettant à cette dernière de l’affaiblir décisivement. Enfin, même si le coup final est porté par Dean, nos frères restent finalement très périphériques à ce duel féminin. La tonnante réalisation de Singer, les dialogues d’Edlund, et l’interprétation permettent cependant de passer outre. Le meilleur est pour la fin, où Dean le fanfaron ne peut plus cacher sa panique lorsque Ruby, dans une étourdissante révélation, lui dévoile toute sa mystification, tout en donnant une vision de l’Enfer à la fois originale et abominablement effrayante. Simultanément, Ruby bénéficie d'une belle progression psychologique, avec cette émouvante révélation de son humanité qu'elle a de justesse sauvée, bouleversante alors même qu'elle crucifie Dean. Un épisode chargé à bloc. La critique d'Estuaire44 :
Le titre Malleus Maleficarum sonne tellement à la In Nomine Satanis ou Stella Inquisitorus, que cela suscite un coup de chapeau de la part de l’amateur de jeux de rôles à l’ancienne, à l’époque d’avant les ordinateurs, quand on jouait ensemble autour d’une table, en s’éclatant avec 2 crayons trois bouts de papier et des dés bizarroïdes. Avec des chips et du soda, aussi, beaucoup de chips, beaucoup de soda. Sinon l’épisode constitue avant tout un joyeux pastiche de Charmed (mélangée à Desperate Housewives) et autres convents wiccas, le tout à la sauce Supernatural : gorissime et joyeusement défoulatoire. Même Les Sorcières d'Eastwick sont laissées loin derrière, on rigole bien, popcorn pour tout le monde. Les portraits de ces dames résultent réellement cinglants. La démone du jour (épatante Marisa Ramirez) confirme que la disparition de sa collègue des carrefours ne signifie pas la in des piquantes adversaires féminines des frères Winchester, c’est la bonne nouvelle de l’épisode. On avouera par ailleurs un vrai coup de cœur pour le kitch ultra hispanique du Conquistador Motel, l’équipe artistique soigne décidément toujours ce rituel des décors de la série, la saison fait très fort dans ce domaine. On s’amuse également beaucoup de l’ingéniosité de l’auteur Ben Edlund et du metteur en scène Bob Singer concernant l’incontournable chapitre des morts répugnantes et abjectes, de la vive imagination et du sens de l’image. Le subtext lesbien pimente encore les débats, notamment entre Tammy et la sorcière qu’elle laisse un temps survivre, mais surtout entre elle et Ruby. Cette dernière fait encore son numéro, un rien lassant même si elle met ici davantage la main à la pâte. On éprouve toujours du mal à s’y intéresser, même si l’on glane au passage des informations intéressantes sur les liens existant entre humains et démons. Katie Cassidy se montre convaincante lors de la séance de baston (de fait l’épisode annonce de manière amusante les combats de la Black Canary d’Arrow), mais son jeu se montre toujours aussi peu subtil. Lauren Cohan brille décidément bien davantage et l’opus ne sera pas le Red Sky at Morning de Miss Cassidy, malgré Ben Edlund. Pour Dean le salut ne viendra pas de Ruby : en même temps ce n’est pas comme si l’on n’y avait jamais cru mais cela accroît malgré tout l’intensité du drame en cours. Anecdotes :
10. FAITES DE BEAUX RÊVES
Scénario : Cathryn Humphris, d’après une histoire de Sera Gamble & Cathryn Humphris You can't escape me, Dean. You're gonna die. And this. This is what you are going to become! Résumé : Bobby Singer a sombré dans le coma : il y fait des cauchemars horribles qui à terme pourraient le tuer ! Sam & Dean apprennent qu’il enquêtait sur la mort d’un docteur qui prétendait soigner des gens qui sont incapables de rêver pendant leur sommeil grâce au Silene undulata, une plante africaine. Ils comprennent qu’un « maître des rêves » a décidé de le tuer dans son sommeil pour couvrir ses traces ! Grâce à Bela, les Winchester rejoignent Bobby dans son cauchemar, mais leur adversaire compte également les tuer dans leur sommeil… … ou les griffes de la nuit La critique de Clément Diaz : Le monde des rêves est un thème-roi du Fantastique, l’esprit humain et ses secrets y voguent dans ce territoire entre la réalité et l’imaginaire ; il est difficile d’en exploiter pleinement la richesse, et Dream a little dream of me souffre d’en offrir qu’un traitement assez simplet alla Freddy Krueger. Il est visible que Kripke a voulu explorer plus avant ses personnages via ce moyen, sur le même mode que le Cauchemar de Buffy, mais on est loin du vertigineux voyage Lynchien de Joss Whedon. Mais si toute la partie consacrée à Bobby déçoit, l’épisode revient en force dans une seconde partie d’une furieuse intensité, culminant dans un soufflant duel psychologique entre Dean et lui-même. De fait, par ses codes narratifs et le thème d’un humain aux pouvoirs effrayants, le récit fait beaucoup penser à X-Files qui allait huit ans plus tard effleurer le sujet (Babylon, 10-05). Et puis, on se régale d’une Bela toujours aussi… Bela, toujours un coup d’avance sur nos bros. Le récit est malheureusement scindé en deux parties quasi indépendantes (cauchemar de Bobby/cauchemar de Dean), donnant l’impression de deux épisodes distincts raccordés par le fil onirique. Malgré la performance aussi brillante qu’inhabituelle de Jim Beaver en Bobby effrayé et réduit à l’impuissance, la première moitié de l’épisode se traîne dans une enquête routinière, sans étincelles, même si on apprécie les aussi discrètes que vibrantes déclarations d’affection de nos héros à celui qu’ils considèrent comme leur second père, tout comme le gratuit mais hilarant rêve érotique de Sam à propos de Bela. Lauren Cohan frappe fort côté sex-appeal, mais nous rappelle en même temps que le rêve érotique de Xander dans Buffy était considérablement plus riche et lourd de sens. Steve Boyum ne peut égaler le brio de Whedon - le budget est il est vrai pas le même - mais sa mise en scène n’en demeure pas moins d’une étincelante beauté et très efficace (superbe travail sur la photographie radieuse des extérieurs de la maison de Bobby), et donne un cachet d’étrangeté. L’immersion dans le cauchemar de Bobby ne sert de prétexte que d’exhumer un trauma du passé bien cliché et un esprit contentant de rabâcher les mêmes phrases. Le voyage dans la psyché de Dean demeure cependant bien plus relevé, alors que le serial killer du jour, 100% humain (une rareté dans Supernatural) étend son pouvoir avec un sadisme raffiné - glaçant G. Michael Gray. Face à un adversaire aux pouvoirs quasi divins qu’ils sont obligés d’affronter dans son monde, les Winchester doivent sous nos yeux inquiets tenir difficilement une telle cadence. Là où Sam s’en sort grâce à une jolie ruse, Dean doit d’abord affronter la vision de ce doux rêve d’une vie heureuse et normale avec une famille - sa dénégation à Sam ne trompe personne, soulignant au contraire son obsession condamnée à n’être jamais assouvie. Le tout culmine dans ce terrible affrontement entre les « deux Dean », un passage classique du Fantastique, mais ici porté à incandescence par des dialogues chauffés à blanc où Dean fait face à tout l’héritage maudit de son père qui a brisé sa vie et l’a transformé en soldat exterminateur fuyant humanité et émotions. Face à son démon intérieur, Dean craque enfin l’armure, et plonge dans une explosion de violence où il hurle sa peur et sa révolte contre un destin qui l’a injustement martyrisé, de son père castrateur à son actuelle échéance infernale. Jensen Ackles livre une double performance d’une puissance expressioniste à couper le souffle, l’une des plus grandioses de sa carrière d’acteur. Malgré cette victoire, la coda est une des plus noires de la série : Dean, après 10 épisodes à faire le fanfaron, a certes cessé de se fuir, mais semble plus bas que terre, tandis que le sinistre plan final, un des plus effrayants de toute la série, semble sceller la pierre de son tombeau. La critique d'Estuaire44 : Plus proche de l’inventivité narquoise d’un Freddy Krueger que de l’architecture un brin prétentieuse d’Inception, Dream a Little Dream of Me constitue un magnifique épisode onirique (encore bravo, pour le titre original et son amusante référence). On apprécie vivement l’efficacité du scénario, qui évite tout ralentissement, mais davantage la mise en scène, absolument magistrale. Le mouvement des caméras, les angles biscornus et l’impressionnant travail de photographie (ces couleurs !) propulsent littéralement le spectateur dans le Monde du Rêve. La première partie se montre très ludique, avec une Bela toujours aussi divertissante (et redoutable !), y compris dans les songeries de Sam. On en apprend davantage sur le passé de Bobby, la série continue de développer son univers, y compris pour le background des personnages. Bobby mériterait toutefois déjà un épisode lui étant entièrement consacré. On en arrive ensuite au véritable sujet du récit, la confrontation entre Dean et son futur démoniaque. Grâce au talent de Jensen, qui confirme une nouvelle fois qu’il n’est pas qu’un beau gosse, aux dialogues et à la mise en scène cette fois devenue glaciale, on assiste à l’une des scènes les plus effrayantes et troublantes de la saison. Elle accroît encore les enjeux de la fin de parcours qui se dessine, alors que les mâchoires du piège commencent à se refermer sur Dean. Seul le manque de charisme de l’adversaire du jour, une fois l’illusion dissipée, est à regretter, mais il n’était de toute façon là que comme prétexte. L’un des sommets de cette saison, qui indique de plus clairement à quel point Bobby est devenu indispensable à Supernatural. Les amateurs de X-Files s’amuseront également des convergences existant avec l'épisode de la saison 10 Babylon. Anecdotes :
11. UN JOUR SANS FIN Scénario : Jeremy Carver, d’après une histoire de Jeremy Carver & Emily McLaughlin Whoever said Dean was the dysfunctional one has never seen you with a sharp object in your hands. Résumé : Alors qu’ils enquêtent sur la disparition d’un homme qui enquêtait sur le « Mystery spot », un lieu où les lois naturelles seraient abolies, Sam voit Dean se faire assassiner par le propriétaire des lieux ! Mais l’instant d’après, Sam se réveille le matin du même jour, Dean bien vivant à ses côtés, ce dernier n’ayant aucun souvenir de ce qui vient de se passer... Sam ne tarde pas à comprendre qu’il est tombé dans un verrou temporel qui se déclenche à chaque fois que Dean meurt. Sam tente de changer le cours des événements, mais ne parvient pas à sortir du verrou… Supernatural, Tex Avery, même combat. La critique de Clément Diaz : L’on tient là un des plus grands chefs-d’œuvre de la série entière. Le piège du verrou temporel consistant à revivre sans fin une même période a souvent donné des chefs-d’œuvre grâce à la diabolique machinerie de sa narration, côté comique comme le génial et désormais culte Groundhog day ou le Window of opportunity de Stargate SG-1, ou côté tragique comme le Shadow play de Twilight Zone ou le Monday des X-Files. Jeremy Carver et Emily McNaughlin vont carrément mêler comique et tragique en exploitant avec une subjuguante maestria toutes les possibilités du sujet : le burlesque (les très variées morts de Dean), le suspense (Sam vs. Le verrou, la fausse piste initiale), le tragique (Sam basculant dans ses propres ténèbres), l’humour noir (le tireur de ficelles)… jusqu’à un happy end trop dissonant pour être honnête, achevant l’épisode sur une note sombre. Après un début ensoleillé où l’on se dit qu’on va assister à un épisode normal, la mort brutale de Dean, filmée sans filtre, provoque un véritable choc. Dès lors, on mesure tous les détails a priori anodins de la scène pré-générique - qui pour cette raison dure plus longtemps qu’à l’accoutumée : petit-déjeuner british, femme bousculée, déménageurs ronchons… qui ne cessent de changer à chaque itération du verrou temporel. Les auteurs se débarrassent rapidement de leur enquête qui ne pourrait que parasiter leur idée, et avec une habileté de maître, la première moitié de l’épisode suit une double pente simultanément comique et dramatique : les nombreuses morts de Dean (111 !!) sont aussi joliment variées que d’un absurde loufoque (même si dans le domaine des morts débiles, personne ne pourra faire mieux que l’hallucinée Dead like me), excitant des rires incontrôlables en plus de quelques gags ajoutés comme la conversation simultanée entre les bros. Les multiples hommages au Groundhog day (un tube d’Asia comme réveil-matin au lieu de Cher, Sam énumérant la vie de tous les clients du bar à force d’habitude, morts variées…) contribuent à l’amusement général. Mais de l’autre côté, Sam, brisé de voir son frère mourir encore et encore, a bientôt les nerfs à vif, sombre dans la paranoïa, et est en surtension permanente. Chaque itération du verrou l’entraîne près du point de rupture, alors même qu’il s’approche de la vérité. Une situation aussi absurde que mortelle ? Pour peu qu’on ait manqué le nom de son interprète au générique, on ne peut que se donner des claques pour ne pas avoir deviné l’évidence : seul ce diabolique farceur de Trickster pouvait avoir fait une chose pareille ! La scène où il tombe le masque permet de retrouver ce personnage aussi chaotique que son sens de l’humour si gratiné. Kim Manners est en terrain connu car il avait dirigé l’épisode de verrou temporel des X-Files, et sait donc insérer de subtiles modifications de mises en scène pour exprimer toute l’épuisante épreuve de Sam. Mais si le Trickster est un sale gosse qui adore s’amuser à distordre la réalité avec un humour aussi meurtrier qu’absurde, il se révèle aussi un fin moraliste, mettant Sam face à lui-même. Son positionnement ne lasse pas d’étonner : ni opposant ni adjuvant de nos héros, il veut simplement interpeller Sam à accepter la dernière phase de son état quasi traumatique dû à l’échéance de son frère : la résignation, où l’on accepte pleinement qu’il n’y a plus rien à faire devant l’inévitable ; là où Sam restait coincé à la case marchandage/déni depuis le début de la saison. Une thérapie de choc, mais qui va encore plus loin : le twist voyant le verrou se briser au plus mauvais moment donne lieu à une dernière partie versant cette fois dans l’épouvante psychologique. Sous nos yeux, Sam devient un néo-Dean, impitoyable machine à tuer, assoiffé de sang, perdant toute notion de bien et de mal. Alors que la série a souvent dépeint Sam comme dernier rempart à l’humanité de Dean, Kripke nous fait savoir que cela marche dans l’autre sens, et que sans son frère, Sam n’est plus que ténèbres. Le climax de la scène si désespérée face à Bobby est un ultime coup brillant du Trickster, mettant en évidence Sam en dépendance totale vis-à-vis de son frère, et donnant corps aux paroles de Ruby qui souhaitait « préparer » Sam à la vie sans Dean. Il n’est manifestement pas prêt, et c’est bien là le génie des auteurs que de conférer au Trickster un rôle de thérapeute-révélateur (à sa manière…), ce qui lui donne une toute nouvelle aura. L’intensité fiévreuse du jeu de Jared Padalecki est d’une puissance quasi sauvage, tandis que Richard Speight Jr. injecte plus de sarcasme dans son rôle décalé avec un contrôle parfait. Rien à espérer d’une coda où tout rentre dans l’ordre, mais où Sam semble au bout du rouleau. Un chef-d’œuvre de noirceur mâtiné d’humour, et une exploitation brillantissime du thème du verrou temporel. La critique d'Estuaire44 : Avec Mystery Spot, Supernatural sacrifie au thème incontournable pour les séries fantastiques qu'est devenu le verrou temporel. Cette figure devenue rituelle s’apprécie aussi par la finesse de son intégration à la série concernée. Il résulte astucieux qu’une programme aussi référencé que Supernatural soit celui retenant l’option la plus similaire à l’emblématique Un jour sans fin. Par ailleurs, une fois de plus on apprécie le côté Amérique profonde de l'attraction locale bizarroïde, un rituel observé aux quatre coins des USA version Country (l'excellent roman American Gods s'en fait le joyeux écho). Le mécanisme du verrou s'installe avec une rare efficacité, avec une première mort choc de Dean, absolument inattendue. Un vrai coup de poing, paradoxalement pour sa survenue commune mais aussi du fait du fil rouge de la saison en forme d’épée de Damoclès Dans un second temps, on comprend enfin où l'épisode nous emmène, d'où un certain atterrissage dans une zone plus balisée, mais le soulagement prédomine ! On apprécie le côté psychologique particulièrement crucial, (le sombre désespoir de Sam), ainsi que le grand atout de Mystery Spot que représente le côté cartoonesque mâtiné d'humour noir déferlant sur les multiples morts de Dean, c'est à mourir de rire. Évidemment le Trickster est à la manœuvre, avec un immanquablement génial Richard Speight. L'entité apparaît toujours aussi jouissive et ambivalente envers les Winchester, un vrai régal. Cet exercice de style particulièrement abouti et hilarant qu'est Mystery Spot constitue un nouvel éloquent exemple du vent de folie que cet être totalement singulier au sein de la série est capable de faire souffler, jusqu’à emporter tout un épisode. Anecdotes :
12. JUS IN BELLO Épisode Mythologique Scénario : Sera Gamble - So, turns out demons are real. Résumé : Les Winchester à ses trousses pour récupérer le colt, Bela les fait tomber dans un traquenard : Sam et Dean sont arrêtés par l’agent Henriksen, qui les traque depuis 2 ans. Alors qu’il s’apprête à les transférer dans une prison de haute sécurité, le commissariat où ils sont détenus est attaqué par une armée de démons… Loi de Winchester : voir à « loi de l’emmerdement maximal. » La critique de Clément Diaz :
Pure orfèvrerie de suspense haletant, et bien relayé par une mise en scène à la flamboyante énergie, Jus in bello est un véritable « page-turner » : dès la première minute, scènes d’action trépidantes, rebondissements du tonnerre, surprises, s’enchaînent à une vitesse supersonique, tout en dressant de superbes portraits de chacun des personnages, principaux ou secondaires, et en faisant entrer en scène un new player in town. La cruauté du twist final et de la terrible leçon qui en découle couronnent le travail de Sera Gamble, ici au sommet de son talent de scénariste. La suprématie éclatante de Bela sur nos bros atteint un nouveau palier avec le piège initial, franchement jouissif. L’accumulation d’épic fails de nos héros face à cette tornade devient un sacré running gag de la saison, d’autant que Lauren Cohan continue à déchaîner l’enthousiasme par sa tchatche pétulante. Par suite, l’épisode ne cesse de gagner en virtuosité par sa manière de jouer sur tous les claviers du suspense et son enchaînement d’idées chocs et ingénieuses dignes d’un final de saison : interrogation sur comment notre fin duo va s’en sortir cette fois, paranoïa maniaque d’Henriksen (toujours aussi diplomate avec ses subordonnés…) absolument impayable en fier-à-bras expansif, attaque brutale du premier démon, et l’idée absolument géniale d’un siège de toilettes transformé en expulseur de démons - brillants réflexes d’un Sam décidément de plus en plus rusé. Ce ne sont pourtant « que » de brillants préludes à un crescendo massif pendant laquelle la résistance s’organise alors que l’armée démoniaque se presse aux portes du poste, ponctuée par l’arrivée en fanfare de Ruby qui chauffe encore les débats. Chaque rebondissement survient a tempo pour électriser encore plus une situation déjà intenable. Le climax de la bagarre finale est à perdre haleine, où Phil Sgriccia maîtrise à la perfection chaque mano a mano, atteignant son apothéose par une résolution aussi intelligente qu’inattendue. Et comme si cela ne suffisait pas, Lilith frappe les trois coups par une tonitruante entrée en scène, qui ne rougit pas de la comparaison avec son collègue aux yeux jaunes. L’épisode ne se contente pas d’aligner les scènes spectaculaires ou mâtinées d’humour (surtout autour de la touchante Nancy…), mais dessine une belle réhabilitation d’Henriksen. Nous avons toujours vu ce personnage comme un enquiquineur désagréable, car filmé du point de vue de nos héros, mais la malicieuse scénariste, nous le présente dans sa vérité propre : policier intègre et déterminé, leader solide, animé d’une réelle flamme dans son combat contre le mal, mais se jugeant inutile dans un monde semblant foncer tête baissée dans des ténèbres de plus en plus épaisses. Par là, il apparaît comme une version de la trop souvent mésestimée Kate d’Angel (la dette de Supernatural envers Whedon n’est plus à prouver), un représentant de l’ordre sensible, émouvant, fort, mais là où Kate ne parviendra jamais à accepter le surnaturel, le vaillant policier va y arriver et se montrer aussi décisif que nos frères. Charles Malik Whitfield est redoutablement convaincant. La jeune et naïve secrétaire incarne une idée très américaine mais optimiste de la citoyenne lambda qui dépasse sa peur pour contribuer à repousser le danger, jusqu’au don de soi. Ruby, derrière son volontarisme tapageur, dévoile une autre facette de sa personnalité : sa propension au sacrifice pour le plus grand bien, mais également son peu de morale quand elle envisage rien moins que de tuer un innocent pour le même but. Si Katie Cassidy comprend que le tempérament guerrier de Ruby limite ses émotions, on avoue toutefois qu’un jeu plus souple aurait rendu plus émouvant ces révélations de sa personnalité. La virtuosité permanente de Sera Gamble semble sans limite car elle touche également les deux frères, dans une formidable inversion de leurs personnalités : ainsi le Dean adepte des solutions franches et directes repousse sous nos yeux ébahis l’offre sanguinaire de Bela, là où Sam l’humaniste nous stupéfie par son accord implicite mais flagrant. Certes le « 100% pur Sam » doit y être pour quelque chose, mais on peut voir aussi une conséquence de la machiavélique machination du Trickster dans l’épisode précédent où Sam marchait vers des ombres encore plus opaques que celles de Dean. La révolte émotionnelle de Dean pour sauver Nancy frappe au cœur par sa force et sa sincérité, refusant d’appliquer des lois de guerre posant bien souvent des problèmes éthiques. Si dans le fond de son cœur, le spectateur lui donne raison, Gamble fait tomber un sanglant couperet final, d’une cruauté horrible, donnant ironiquement raison à Bela : à partir du moment où votre adversaire ne se pose aucune limite, vous devez vous montrer aussi impitoyable que lui. Une terrible épiphanie pour nos héros, décidément moins durs à cuire qu’on l’aurait cru, et un choc pour le spectateur contemplant impuissants les merveilleux efforts de Dean réduits à néant. Un épisode tachycardiaque, aussi intense, émouvant, que cruel. La critique d'Estuaire44 :
À l’occasion de Jus in Bello, la surdouée Sera Gamble (actuellement l’une des très bonnes raisons de découvrir Aquarius), trousse un remake audacieux et parfaitement abouti d’Assault on Precinct 13, le chef d’œuvre de John Carpenter (1976) voyant un commissariat pareillement assiégé par une alliance de gangs urbains. De fait l’épisode rivalise par moments avec ce film devenu culte, par l’intensité du suspense et ses péripéties menées à train d’enfer (au sens propre), mais aussi par on approche psychologique des caractères se révélant dans l’épreuve. Sera Gamble sait merveilleusement dépeindre et rendre attachant chacun des personnages du drame, soutenant ainsi l’action et conférant une force terrible à l’épouvantable dénouement. L’introduction réussie du Fantastique insuffle une dynamique supplémentaire. La série gère toujours aussi efficacement les arcs narratifs de ses personnages secondaires, l’un de ses moteurs perpétuellement renouvelés, et l’Agent Henriksen a sans doute droit à sa meilleure prestation pour son ultime épisode. On regrettera simplement le cliché voyant la jeune femme vierge et religieuse être incarnée par une actrice aussi clairement identifiée comme hispanique qu’Aimée Garcia. Si l’on peut regretter une énième intervention miraculeuse de Ruby, avec une Katie Cassidy malheureusement toujours plus terne que Lauren Cohan, le débat moral qu’elle suscite entre les deux frères rehausse encore les enjeux de l’opus. Bela (toujours en grande forme) et Ruby ne se croiseront décidément pas. On peut le regretter (tout comme pour Vénus et Cathy en saison 2 de Chapeau Melon), mais insérer l’événement aurait trop mobilisé un scénario déjà fort rempli, Sara Gamble a raison de renoncer à une fausse bonne idée. Alors que la fin de saison avance déjà à grands pas du fait de la grande grève des guildes de scénaristes, Jus in Bello présente également l’intérêt d’introduire la suivante, avec l’arrivée d’une première figure biblique, Lilith, et un Sam toujours plus enténébré, préfigurant sa tragique dérive à venir. On avouera aussi que c’est lors de la découverte de cet épisode que notre méfiance s’est éveillée vis-à-vis de Ruby, dont les motivations évasives (détester les démons) ne cadrent pas avec la prise de risque qu’implique l’intervention dans un tel traquenard. Cela aurait pu constituer une faiblesse de l’intrigue, si la suite n’avait pas révélé une toute autre motivation. Anecdotes :
13. LES GHOSTFACERS Scénario : Ben Edlund Ghost! Ghostfacers! Résumé : Ed et Harry, les geeks crétins amateurs de paranormal (cf. épisode « Hell House ») sont de retour ! Avec Maggie, la sœur d’Ed, Kenny, un caméraman, et Alan, un cuisinier, ils ont fondé les Ghostfacers dans le but de poursuivre leurs rêves de gloire : à savoir, se filmer en direct en train de résoudre une affaire non classée, et vendre la vidéo à une chaîne dans l’espoir qu’elle produise une téléréalité centrée sur eux et leurs enquêtes paranormales. Mais alors qu’ils enquêtent sur une maison hantée tous les 29 février, ils tombent sur Sam et Dean qui ont entendu parler de cette maison. Le septuor s’y retrouve bientôt enfermé, en compagnie d’un esprit totalement dérangé… Ils arrivent pour sauver le monde et pour en prendre plein la gueule. Mission réussie à 50%. La critique de Clément Diaz :
Et voici l’épisode décalé de la saison ! Cette fois, Supernatural s’inspire d’un des épisodes les plus OVNI des X-Files (et certainement de l’histoire des séries TV) : X-Cops où des policiers de la réelle émission de téléréalité Cops collaborent avec Mulder et Scully le temps d’une enquête mémorable. S’il ne se montre pas aussi percutant que son modèle, Ghostfacers partage les mêmes caractéristiques : centralisation sur le groupe héros de la téléréalité, héros de la série originale intervenant comme des intrus, caméra à l’épaule sur le mode du Blair Witch Project, générique de la téléréalité remplaçant celui de la série, mots vulgaires bipés, gestes obscènes floutés, absence de musique… le mimétisme avec les émissions de téléréalité est poussé jusqu’à son paroxysme. La spécificité de cet épisode réside néanmoins dans un brillant équilibre entre burlesque crétin et horreur (là où Gilligan jouait sur le suspense pur), et développe en sous-main une véritable charge à l’acide contre la téléréalité et la vanité humaine dans son ensemble, rendant cet épisode très fun et divertissant moins gratuit comme on pourrait le croire. Le choix de Kripke de déléguer l’écriture à Ben Edlund, maître dans la comédie, était tout désigné. Passée une introduction pompeuse donnant immédiatement le ton (on songe à Jonathan au début du Storyteller de Buffy), nous faisons connaissance avec ce quintette de débiles qui vont enchaîner les foirades épiques avec une détermination jusqu’auboutiste. Ed et Harry en leaders bouffons et mal préparés ont su trouver des partenaires à la hauteur avec une soeurette ronchonne, un cuisinier raté secrètement amoureux d’Ed, et un cameraman racoleur : le prélude dans leur QG miteux les présente tel qu’en eux-mêmes : orgueilleux, gesticulateurs, paniquant au moindre bruit, stratèges de niveau zéro, QI d’une quiche, cancer de la geekerie métastasé… le festival est lancé et ne s’arrête jamais. On a peine à croire que ces bras cassés vont se mesurer à des esprits sanguinaires, mais ils le font, et évidemment ils vont bien morfler pour notre plus grand plaisir sadique. Heureusement, les bros sont là pour veiller sur eux, avec l’enthousiasme délirant attendu. Que les Weuh eux-mêmes peinent davantage que d’habitude avec le monstre du jour donne une idée du carnage qui se serait ensuivi s’ils n’avaient pas été là ! Pendant toute l’enquête, l’épisode parvient à alterner scènes d’horreur et éclats de rire dans un équilibre parfait : décor lugubre, esprit en folie dure de dure, apparitions à geler le sang, suspense infernal quant à la survie de chacun, fausses alertes suivies aussitôt de vraies alertes, généreuses giclées de gore… sont contrebalancés par des Ghostfacers exacerbant leurs réactions de terreur ou accumulant les gaffes qui eux par contre nous font bien rigoler (les acteurs jouent à qui cabotinera le mieux, c’est jouissif en diable). On reste pantois devant les efforts de Phil Sgriccia, dont la réalisation subjective extrêmement agitée et frénétique ne fatigue pourtant jamais l’œil, tout en impulsant un dynamisme trépidant à l’ensemble. L’horrible trépas d’un des Facers vient nous rappeler que personne n’est à l’abri de la mort dans Supernatural, si sympathiques soyez-vous. Mais cette grosse comédie horrifique aborde aussi des thématiques plus fines. Ainsi, en ridiculisant les Ghostfacers, l’on voit que les auteurs se moquent des stars de la téléréalité, poussées par la vanité, la soif de gloriole, l’argent facile, et prêt à toutes les vulgarités ou les pires folies pour y arriver (un point absent d’X-Cops, dont les thématiques sont ailleurs). Si cela irrigue tout l’épisode, la coda se montre particulièrement éloquente : les quatre Facers survivants exploitent sans vergogne la mort de leur compagnon dans un but promotionnel - et l’on est ravi du twist final, une exaltante perfidie de Dean mettant une fin définitive à leurs espoirs. Misogynie et homophobie sont également pointés du doigt, Maggie n’étant finalement présente qu’en temps que pomme de discorde entre Ed et Harry, leur dispute infantile à son sujet rappelant les vulgaires coups de gueule des stars de téléréalité ; tandis que le touchant Alan, sans cesse rabaissé par ses camarades, quittera ce monde sur une dernière hypocrisie d’Ed lui disant ce qu’il a envie d’entendre pour s’en sortir. Chacun des Facers se montre d’un individualisme et d’un manque total de solidarité envers les autres. Pourtant, l’on ne parvient pas à détester ce groupe, en réalité pris au piège non de la méchanceté mais de leur bêtise, et par les trompeuses sirènes d’un rêve américain réalisé en deux temps trois mouvements. En apparence simple galéjade déphasée, Ghostfacers est finalement un des épisodes les plus grinçants de la série. La critique d'Estuaire44 :
Cette chronique est dédiée à la mémoire d'Allan J. Corbett, 1985-2008, le Roi de l’Impossible restera à jamais dans nos cœurs. Ghostfacers compose une cinglante parodie d’une téléréalité alors en plein essor, constitue un vrai cas d'école de l'art toujours malaisé de la contre programmation. Alors que l'on le martyre de Dean approche toujours inexorablement et que la tonalité de la saison s'assombrit sans cesse, nous proposer un épisode aussi décalé et humoristique est aussi audacieux que terriblement casse gueule. Le pari résulte à l'évidence gagné tant l'épisode regorge de prouesses et d'excellentes idées. Encore davantage qu'en saison 1, Les Facers eux mêmes sont absolument hilarants, en caricatures de Geeks adulescents, passionnés mais totalement inopérants sur le terrain, mais aussi imbus d’eux-mêmes et avides de célébrités (le profil typique des candidats à ce genre d’émission). Les crispations avec les Bros (évidemment en particulier avec Dean) se montrent vraiment électriques. La photographie et le montage caméra sur l'épaule se montrent époustouflants d'adresse. Quel rythme et quel sens de l'image ! Les auteurs y vont vraiment à fond, tant mieux, ils ont tout compris. Le réalisateur a visiblement parfaitement intégré le meilleur de Blair Witch Project. Ben Edlund a également l'excellente idée de jouer du contraste confronter les Nullos à ce qui reste sans doute l'une des affaires les plus glauques et sinistres de SPN, s'aventurant très loin dans la démence. Du coup on s'éclate toujours plus au fur et à mesure que l'on descend le grand escalier de l'horreur et qu'ils en prennent plein le carafon. Irrésistible. On apprécie également l'ultime pirouette nous faisant revenir au format classique de la série, dans l'Impala. Une élégante façon de refermer la parenthèse et d'en revenir aux affaires. Un génialissime épisode décalé. Anecdotes :
14. REJOINS-MOI Scénario : Jeremy Carver I just talked to an 84-year-old grandmother who's having phone sex with her husband. Who died in Korea. […] Completely rocked my understanding of the word necrophilia. Résumé : Harcelé au téléphone depuis deux semaines par une ex-compagne décédée, Ben Waters accède à sa demande, « la rejoindre », et se suicide. Plusieurs habitants dans le voisinage ont reçu des appels de parents décédés qui leur ont tous demandé de se tuer pour les rejoindre ; chose étrange, le numéro utilisé est toujours le même, mais n’est plus en service depuis 100 ans ! Sam et Dean enquêtent, mais la situation se complique quand Dean reçoit un coup de téléphone de… son père. Un monstre qui gonfle la facture téléphonique ? Ça, c’est diabolique ! La critique de Clément Diaz : L’épisode évoque celui du même nom de la Twilight Zone, dont il reprend l’argument (un parent décédé demandant à un vivant de se tuer pour le rejoindre). Mais il faut avouer que l’excellent Jeremy Carver semble bien moins à son aise sur ce sujet que sur le piège temporel précédent, ne parvenant pas à dépasser une intrigue convenue de départ : prévisibilité intégrale des situations, monstre sans personnalité, effets faciles et répétitifs, action comme cache-misère… le sujet de l’épisode se prêtait à l’émotion (comme chez Charles Beaumont), ou la terreur psychologique, mais ne marche clairement pas dans le suspense visuel, in fine la « ligne éditoriale » de Kripke, ce qui condamne d’entrée la tentative de Carver. Malgré une introduction fort effrayante, l’épisode rabâche sans cesse son unique ressort surnaturel : les coups de téléphone de « l’au-delà », variée seulement lors de la séquence de l’ordinateur (manifestement pompée sur Ghost, mais bon…). On ne croit pas un seul instant à un appel de John, ce qui ruine le suspense général de l’épisode. La fausse piste du téléphone d’Edison eut pu fonctionner si elle avait été maintenue plus longtemps au lieu d’être rapidement expédiée en une scène. De fait, l’on assiste à une scission de l’intrigue en deux où chacun des bros part de son côté ; or l’expérience nous apprend souvent que séparer un duo d’héros dans une enquête la prive de sa dynamique, tout en rendant difficile la cohabitation des deux segments. Long distance call n’y échappe pas, le rythme s’effondrant dès que Sam rend visite à la fille harcelée. De fait, Carver se voit obligé de dénouer ses récits par de l’action pure, sans résolution agencée. L’absence de personnalisation des rôles secondaires est un autre problème, chez des victimes transparentes ou un monstre-du-jour certes bien ignoble, mais qui à part ouvrir les crocs et se friter avec Sammy ne dégage absolument rien. Ce serait un moindre mal si son action parlait pour lui (comme le Djinn de What is and what should never be), mais la répétition à satiété de son plan ne joue pas en sa faveur. On apprécie quelques traits épars : alors même leur père a été crématisé il y a 2 ans, les Weuh parviennent encore à se disputer à son propos (niveau famille dysfonctionnelle, ils sont clairement en haut du panier), l’employé du téléphone accro au X et nos bros en durs de durs à cuire suscitent quelques rires, tandis que la critique d’une société hyperconnectée et ne pouvant se passer des outils de communication affleure sous le discours du monstre. L’épisode reste cependant le trou d’air de la saison. La critique d'Estuaire44 :
Long Distance Call traite d'un des grands classiques du Fantastique, l'appel en provenance d'outre tombe, de l’épisode de La Quatrième Dimension du même nom à Poltergeist II (1986) en passant par Making Contact (1985). On apprécie que Supernatural s’empare pleinement du sujet, en y apportant sa touche particulière. Foin de quête spirituelle ou d'émoi psychologique (hormis la relation filiale entre John et Dean, déjà examinée sous toutes les coutures), mais place à un Monstre de la Semaine résolument efficace. En effet, entre le cynisme de son procédé, son sourire si aiguisé et son humour à froid, le roi du téléphone constitue un bel adversaire. Derrière ces péripéties, le récit brosse l’amer portrait toujours d’une Humanité toujours enfermée dans la solitude, malgré le développement des moyens de communication. Par ailleurs la présence de plus en plus tangible de la date fatale se voit également bien rendue, il est poignant de voir avec quel empressement Dean s’accroche à n’importe quel espoir, de ce point de vue l’épisode met déjà en orbite l’arc final. Encore que Dean pourrait encore résulter davantage désespéré : après tout que son âme soi dévorée pourrait constituer un moyen d’échapper à l’Enfer (oui, être un tantinet psychopathe ne fait jamais de mal). On aime toujours quand une série télé nous entraîne dans des endroits originaux ou insolites et ce central téléphonique reste une belle trouvaille, de même que son opérateur totalement fondu. Un épisode solide, souffrant d'un certain classicisme de sa chasse au monstre le rendant parfois prévisible. Anecdotes :
15. LE SECRET DE L’IMMORTALITÉ Épisode Mythologique Scénario : Sera Gamble I’ll see you in Hell… Résumé : Un docteur sadique et immortel enlève plusieurs personnes pour leur prélever des organes plus ou moins vitaux. Alors que Sam et Dean le pourchassent, Bobby contacte ce dernier : Rufus Turner, un chasseur parano, a retrouvé la trace de Bela. Sam continue d’enquêter sur le docteur dans l’espoir de lui soutirer le secret de l’immortalité qui rendrait inopérant le pacte de Dean, tandis que ce dernier va voir Turner, qui va lui révéler le secret de Bela… Supernatural accueille aujourd’hui Frank Einstein… La critique de Clément Diaz : Time is on my side (c’est moi ou un prix est décerné pour le scénariste qui trouvera le titrequitue ?) est le type même de l’épisode commençant modéremment pour ensuite monter dans un crescendo fulgurant jusqu’à un final d’anthologie, ici un des plus glaçants de toute la série. Les deux histoires de l’épisode doivent cohabiter, mais contrairement à l’épisode précédent, une cohérence est assurée par le sablier du destin de Dean dont le sable a bientôt fini de s’écouler, atténuant la sensation. Si l’horreur physique de l’enquête du jour est bien fignolée, c’est bien pour la conclusion-choc de l’arc Bela que l’épisode réussit son coup, avec une double confrontation finale d’une intensité dantesque. L’intrigue du docteur attire l’attention par ses meurtres bien sanguinolents. Mention à l’ablation chirurgicale du cœur (idée géniale du cardiomètre), un des plus gros moments de gore total de toute la série, joyeusement immonde (il se confirme que l’auteure est encore plus sanguinaire que son patron, l’élève dépasse le maître). Si l’enquête sur le mad doctor reste schématique - l’intérêt de l’histoire s’axe davantage sur Bela - la personnalité totalement perverse du docteur y pallie amplement, avec un Billy Drago halluciné. Cette variation sur le thème de Frankenstein n’est pas sans évoquer le Some assembly required de Buffy mais en plus horrifique et malsain. On éprouve un vrai plaisir quand un Dean très inspiré se débarrasse de lui avec des raffinements de cruauté (on songe au châtiment d’Arvin Sloane à la fin d’Alias). Mais le docteur agit aussi comme révélateur des ténèbres de Sam, qui à son tour ne veut rien moins que violer les lois de la nature pour sauver son frangin. À ce titre, la dispute entre Dean et Sam, habituellement le « raisonnable », se montre d’une grande intensité, le premier préférant les flammes éternelles que de devenir un de ces monstres qu’il ne cesse de combattre (l’affaire Gordon est encore fraîche). Sam, toujours plus fuyant et adepte des solutions extrêmes, est plus inquiétant que jamais, tandis que Dean touche par son abnégation à rester fidèle à soi-même, fut-ce son éternité soit en jeu. C’est cependant pour la clôture de The Bela Talbot affair que l’épisode culmine à ses cimes. Supernatural, assumant toujours ses influences, fait hurler de rire tous les X-Philes de la Terre (et au-delà) en donnant un rôle d’informateur pas commode à Steven Williams, qui incarnait le misanthrope Mr.X, l’informateur le moins… souriant on va dire, de Fox Mulder ! Sa longue scène avec Dean se montre passionnante par la présentation de ce chasseur paranoïaque misanthrope, demandant à Dean une sacrée dose de patience pour le voir cracher la vérité morceau par morceau. La confrontation Dean/Bela se montre électrique, leur tension, pour aussi antagoniste qu’elle soit, n’est curieusement pas dénuée de tension sexuelle : dialogues bruts, interprétation tendue, gros plans continuels, haine transpirant du visage de Jensen Ackles… la scène atteint une concentration de suspense inouïe, tandis qu’est dévoilé le secret de Bela. C’est cependant pour sa coda, chef-d’œuvre absolu de terreur glacée, que Time is on my side demeure incontournable (ah, le fatal décompte des minutes), lorsqu’explose la tragédie de Bela, qui par son individualisme, son orgueil, et surtout sa fierté à ne pas demander de l’aide, cloue son propre cercueil, et s’effondrant doucement devant l’inéluctable (magnétique Lauren Cohan), une vraie justice poétique. Jamais plan final n’aura exprimé un couperet de guillotine plus tranchant que ce bruit de porte fracassée… Tout semble aussi perdu pour Dean, et les chiens de l’enfer arrivent maintenant pour réclamer leur proie… La critique d'Estuaire44 :
C'est avec un impact total que Time is on my side (un titre très Doctor Who) frappe les trois coups d’un grand final idéalement mis en orbite (le rôle par excellence d’un avant dernier épisode). La théorie folle retenue par Sam souligne éloquemment l'étendue de son désespoir et nous vaut une de ces intenses confrontations fraternelles ayant émaillé la saison. Le Dr Zombie est vraiment un méchant de haut vol, d'autant que les auteurs ne mégotent pas sur leurs effets et qu'il se voit interprété par le toujours génial Billy Drago. La scène de l'enterrement du frigo demeure sans doute l'un des plus horrifiques de Supernatural, tendance Contes de la Crypte. Les Winchester ne rigolent pas, nous oui. Les guests apparaissent d'ailleurs remarquables, puisque Steven Williams réussit une magistrale entrée en matière pour Rufus. Une histoire à la Buffy (Some Assembly Required, 2-02) avec une figure emblématique des X-Files, rarement la série aura aussi clairement affiché son double héritage. On retiendra cependant avant tout les bouleversants et au combien dramatiques adieux de Bela, après que la séquence du Colt eut porté à son paroxysme cette captivante relation d'attraction/répulsion l'unissant à Dean. Tout le flashback et la conversation téléphonique entre elle et Dean (et sa conclusion) résulte absolument magistrale d'interprétation et de mise en scène. Jusqu’au bout Lauren Cohan aura défendu son personnage avec éclat, Le spectateur en a réellement le souffle coupé. On note d'ailleurs que Bela reste également la grande victime de la grève des scénaristes, son passionnait parcours se voyant abrégé (trop d'informations et de péripéties concentrées sur un unique épisode), alors que, contrairement à Ruby et Dean, elle ne reviendra plus par la suite. Avec le Colt, c'est le dernier espoir envisageable pour Dean qui s'évanouit, tandis qu'il vient d'avoir un aperçu pour le moins éloquent de son futur (très) immédiat. Tout est en place pour un éprouvant final, jusqu'au bout du suspense. Anecdotes :
16. LES CHIENS DE L’ENFER Épisode Mythologique Scénario : Eric Kripke HELP! NO! SOMEBODY HELP ME! SAM!! SAAAAAAAM!!!!! Résumé : Il ne reste plus que 30 heures de vie pour Dean. Sam convoque Ruby pour lui demander son aide, mais Dean n’a pas confiance en elle et l’emprisonne dans un piège à démons pour lui voler son couteau, seule arme pouvant vaincre Lilith. Dean, Sam, et Bobby lancent une attaque désespérée contre Lilith et ses sbires, mais les chiens de l’enfer sont maintenant tout proches… The road so far... La critique de Clément Diaz : Impitoyable course à la mort alimentée par l’énergie du désespoir, No rest for the wicked (encore un titre massif) est parcouru de bout en bout par un souffle tragique, pierre de touche d’une saison toujours plus inéluctable. Cet ultime sursaut condense action, émotion, horreur avec un rare impact, tout en exprimant un sombre fatalisme chez un Dean ne cessant de passer de la révolte à la résignation. Lilith dirige les débats par sa perversité foisonnante, donnant au duel final et sa coda d’apocalypse toute l’intensité nécessaire pour rendre KO le spectateur littéralement assommé par la violence envahissant l’écran. Kripke reste fidèle à la bonne vieille recette Anasazi X-Filesienne : le finale s’articule autour d’une kyrielle de scènes toutes plus haletantes les unes que les autres. À partir de la prémonitoire introduction, un sentiment d’urgence sans espoir déverse toute sa frénésie, jusqu’à diviser les deux frères : Sam est prêt à faire un pacte ambigu avec Ruby, même si cela doit le transformer en serviteur de ténèbres, là où Dean refuse de prendre une porte de sortie qui le condamnerait. L’amour fraternel, soubassement de la série, s’exprime d’une manière particulièrement forte et déchirante alors que les frères sont prêts à tout pour l’autre (leur duo chanté dans l’Impala), mais cela s’étend aussi à l’amour paternel lorsque Bobby ne veut pas laisser ceux qu’il considère comme ses fils s’amuser sans lui avec Lilith ; c’est simple et beau. Le retour de Ruby s’effectue avec un grand impact, consommant ouvertement la terreur de Dean, qui ne va cesser de descendre un escalier sans fin vers l’horreur alors que les démons forment un cercle de plus en plus rapproché autour de lui. Chaque poussée du crescendo parvenant à rendre la situation plus terrible pour lui, mais aussi pour Sam, dont la passivité volontaire ne se montre pas moins douloureuse, sa peur l’empêchant de prendre un ascendant qui pourtant serait décisif, comme il le réalisera hélas trop tard. Supernatural raffole des enfants démoniaques, une des figures les plus dérangeantes qui soit par cette incarnation de l’innocence devenue outil du démon. Elle nous offre à cette occasion un des plus splendides représentants de cette espèce avec Lilith, dans un remake avoué de It’s a good life, un des épisodes les plus effrayants de La Quatrième Dimension. On retrouve la figure de cet enfant-roi semant la terreur dans une respectable petite famille, jouet de ses caprices abominables et mortels. La pure petite fille s’y montre aussi gratuitement sadique qu’Anthony Fremont ; l’épisode ne rougit en rien de la comparaison avec son modèle, surtout grâce à Sierra McCormick, incarnation vivante de ce cauchemar éveillé, et au juste focus sur sa famille se délabrant toujours davantage. Mais c’est dans ses cinq dernières minutes que le finale déchaîne un furieux pandémonium, lors d’un tonitruant twist final achevant de crucifier les derniers grammes d’espoir des frères - Katie Cassidy signe sa meilleure performance, on aura rarement vu autant de folie dans le jeu d’une actrice - La mutilation sauvage de Dean (quelle mise en scène !) se montre si gorissime qu’elle traumatisera même les mordus du genre, surtout qu’elle est couplée à la démence de la démone et à l’impuissance révulsée de Sam. Le plan final achève de couler dans le marbre ces pures 42 minutes de cauchemar. L'anxiogène réalisation de Kim Manners, au sommet de son talent de conteur horrifique, termine de faire de No rest for the wicked un des finales les plus ouvertement choquants de la télévision. La critique d'Estuaire44 : No rest for the wicked constitue bien le final épique et sur le fil du rasoir que l’on espérait ; outre le coup de génie de renoncer au happy end trop facile, les auteurs se montrent remarquablement sadiques, cette fois non pas envers les Winchester, mais bien envers le spectateur. Parce ce que le prodige de l’épisode, par sa narration et son timing, consiste à ce que jusque bout, avec une totale véracité, on peut (et on veut) y croire. Un remarquable travail, nous faisant demeurer en haleine jusqu’à l’effroyable dénouement. Alors oui, la situation est objectivement désespérée, mais après tout ce sont les Winchester, ils marquent des points et le vieux Bobby, toujours si rusé, entre dans la danse. Les diaboliques scénaristes ont l’habileté de concentrer sur sa conclusion toute l’essence de ce final vers lequel converge toute la saison, afin d’encore en optimiser l’impact, au bout du suspense. Plusieurs excellentes scènes viennent encore rehausser le succès de cet ébouriffant final, comme les scènes d’adieux dignes mais bouleversantes entre les deux frères, ou le cri du cœur de Bobby (la famille ne s’arrête pas au sang). Même la Ruby de Katie Cassidy, enfin réellement expressive, tient là son meilleur épisode. On aime comment, après une tirade absolument magnifique, Dean décide tout de même de balancer par dessus bord la dignité chevaleresque, pour se battre jusqu’au bout. C’est ça, un Chasseur, pas un Perceval en armure et oriflamme. Sous nos yeux éberlués, Lilith nous gratifie également d’un savoureux pastiche de l’un des meilleurs épisodes de The Twilight Zone, It’s A Good Life, poussant jusqu’à son terme le concept d’enfant démoniaque ! On s‘y croirait, même si l’on n’y retrouve pas les fantasmagories horrifiques issues de l’imagination de ce qui demeure un enfant. Lilith se contente de terminer ses victimes, ce qui concorde d’ailleurs avec l’univers Supernatural. La saison n’allait évidemment pas prendre congé sans le petit moment Gore au coin du feu et l’atroce mort de Dean se pose un peu là dans ce domaine, un vrai coup de poing pour le spectateur. Ils l’ont fait ! Petite pensée pour Bela. Bon, on se doute bien que le Dean sera bien de retour sur nos écrans, mais tout de même. Le pouvoir ressuscité bien tardivement de Sam introduit également la période à venir. Seul (léger) regret, la vision de l’Enfer ne s’imposait pas, dans ce domaine l’imagination vaut toujours mieux que la démonstration (comme avec Bela). Anecdotes :
|