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Serenity : l'ultime rébellionGuide des épisodes

Firefly

Présentation 


Le XXVe siècle. A bord d’immenses vaisseaux générationnels, une fraction de l’Humanité a quitté une Terre à bout de ressources et surpeuplée. Au bout d’un voyage long de plusieurs décennies, l’exode a atteint un système solaire d’une taille colossale, comportant de nombreuses planètes habitables. Durant cette odyssée, les deux supers puissances américaine et chinoise ont fusionné au sein de l’Alliance. Elles développent également un syncrétisme culturel et politique auquel s’agrègent les autres nations. Arrivée sur place, l’Alliance s’arroge les mondes les plus riches et accueillants, tandis que ceux refusent de s’y incorporer sont relégués dans les franges davantage hostiles du système.

Une société plus rude et d’un niveau technologique moindre s’y développe, aux allures d’un Farwest farouchement attaché à son indépendance. Après plusieurs années de statuquo, l’Alliance estime insupportable que sa domination ne s’étende pas à l’ensemble du système et attaque les planètes indépendantes. Malgré une héroïque résistance, la guerre s’achève par le triomphe des envahisseurs, lors de la grande bataille de Serenity Valley. Leur domination demeure toutefois encore partielle sur les mondes de la périphérie. 

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Ancien sous-officier de l’armée indépendantiste, Malcom Reynolds (Mal pour ses proches) est un vétéran de Serenity Valley (en 2511), tout comme son bras droit Zoe Alleyne. Homme profondément blessé par la guerre et la chute de son idéal de liberté, Mal n’est pas un rebelle pour autant. Il refuse néanmoins obstinément de rallier l’ordre nouveau. Avec Zoe comme second, il devient le propriétaire et capitaine du Serenity, un cargo léger et véloce de classe Firelfy (Luciole). Au sein de la périphérie, Mal mène ainsi une activité en marge de l’Alliance, se livrant à diverses contrebandes ou transportant des personnes douteuses, désireuses d’éviter les autorités. S’il ne commet lui-même aucun crime de sang, Mal est amené à occasionnellement travailler pour les barons du crime, solidement installés dans les territoires administrés de loin par l’Alliance. Il se montre par contre impitoyable dès lors que son équipage se voit menacé.

Outre Zoé, devenue le second du Serenity, celui-ci se compose du souriant Hoban Washburne, pilote du vaisseau et mari de cette dernière, d’Inara Serra, membre d’une guilde de prostituées de haut vol accompagnant le Serenity et son capitaine, de la tonique Kaywinner Lee Frye (dite Kaylee), mécanicienne du vaisseau, qu’elle connaît comme personne, et de Jayne Cobb, mercenaire plus madré qu’il n’y paraît de premier abord. Un beau jour (en 2517),  cette famille va intégrer trois nouveaux membres, Derrial Book, prêtre tourmenté par un ténébreux secret, le docteur Simon Tam et sa sœur River.

Or Simon et River sont secrètement des fugitifs, après que l’Alliance se soit livrée à de terribles expériences sur River, dotée de capacités surhumaines, aussi bien martiales que psychiques. Quelque part dans son esprit traumatisé, elle détient les plus sombres secrets de l’Alliance. Cette rencontre va progressivement inciter Mal à regagner la lutte, jusqu’à se confronter aux Ravageurs, pirates de l’Espace ayant sombré dans une abominable sauvagerie. Ils exécutent leurs raids dévastateurs depuis les franges les plus reculées et obscures du système. Le Serenity remporte la victoire et découvre alors une terrible vérité pouvant ébranler jusqu’à l’Alliance elle-même. 

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A l’issue de la saison 2001-2002, la Fox doit renouveler en profondeur son offre en séries, car plusieurs de ses programmes emblématiques s’achèvent alors. La délicieuse Ally Mc Beal prend congé et les X-Files achèvent leur parcours. Le besoin en séries de Science-fiction va particulièrement s’accroître par la suite, avec l’annulation surprise de la troisième saison de Dark Angel. Dès lors la chaine recherche une série SF, à la fois porteuse et rapidement disponible. Contacté par la directrice des divertissements de la Fox, Gail Berman (qui avait jadis collaboré aux tous débuts de Buffy), Joss Whedon va s’avérer l’homme de la situation.

En effet, alors même qu’il est auréolé du succès des séries Angel et Buffy contre les Vampires (la Tueuse de Sunnydale reçoit alors un excellent accueil en Europe), Joss Whedon a depuis longtemps en tête l’idée très précise d’une série de Science-fiction telle que l’on n’en en a encore jamais vu à la télévision. A travers Firefly il va en effet entremêler deux genres qu’il adore depuis toujours, la Science-fiction et le Western, avec une claire inspiration de La Chevauchée sauvage (1975). Outre cet alliage inédit, il a comme ambition de développer une tonalité réaliste, par-delà des épisodes individuellement très divers, tragiques ou comiques. 

Ainsi, si, à l’instar de Star Wars, la série renoue avec le thème cher au public américain que représente la Frontière. Elle va renoncer à l’hyper technologie propre au Space Opera. On y trouve n’y vitesse superluminique, ni d’Aliens ou de Droïdes, ni, bien entendu, la terrible splendeur de la Force. L’espace est ici toujours montré comme silencieux. Dans les planètes périphériques du système, la vie demeure rude et prosaïque et les héros n’y connaissent pas toujours d’éclatantes victoires. De son côté l’Alliance ne forme pas non plus l’Empire du Mal, et sa dimension orwellienne, certes effective, demeure suffisamment feutrée pour ne pas sombrer dans la caricature.

Comme à l’accoutumée, Whedon va accorder une place essentielle à l’écriture de personnages, avec une série de nouveau chorale (même si Mal restera toujours plus égal que les autres). Les différents membres de l’équipage se montrent souvent davantage complexes et originaux que les archétypes de la Science-fiction. La série ne se centre pas sur le capitaine et ses officiers, rompant avec le modèle gravé dans le marbre par Star Trek. Elle embrasse le point de vue de tous, tandis que Whedon se sert des discussions entre les protagonistes pout aborder des thèmes volontiers politiques ou moraux. 

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La série explore en creux les conséquences de l’effondrement de leur monde chez des gens désormais se cherchant une raison de vivre. En rupture avec leur époque du fait des évènements politiques, Mal et les siens ne sont pas dans l’espace pour une glorieuse exploration ou pour sauver une lointaine galaxie. Ils y demeurent parce qu’ils ne sentent plus chez eux nulle part et qu’ils n’ont pas (encore) l’énergie de passer outre leurs failles intimes. Il ne leur reste plus rien, hormis le ciel infini et leurs frères et sœurs du Serenity.

Si l’on n’y trouve pas de batailles spatiales à la Star Wars / Star Trek, les scènes d’action demeureront présentes au cours de Firefly, mais elles ne sont pas le sujet du programme. Whedon s’intéresse davantage aux intervalles entre elles, quand l’équipage vit, s’exprime et s’efforce de trouver une voie morale au sein d’une époque troublée. A côté du design élégant de sa coque, la structure intérieure du Serenity, dessinée avec soin par Whedon, est conçue pour faciliter ces échanges (on a pu à bon droit analyser Firefly comme une sitcom dans l’Espace). Le soin extrême apporté au travail de production et aux effets spéciaux se retrouve également dans les différents décors et costumes, reconstituant aussi bien le monde du Western (les fans de la série se nommeront les Browncoats, en références aux manteaux de cowboy des rebelles), que le syncrétisme sino-occidental de l’Alliance. 

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Pour incarner l’équipage du Serenity, le cœur vivant de Firefly, Whedon va opter, non pour des vedettes, mais pour des comédiens alors très peu connus, donc plus aisément identifiables à leur personnage pour le public (à l’exception de Ron Glass). Ainsi la carrière de Nathan Fillion s’est ainsi essentiellement limitée jusque-là à deux seconds rôles des sitcoms, tandis que Summer Glau a été découverte lors d’un mémorable épisode d’Angel (Les Coulisses de l’Eternité). Les choix opérés par Whedon vont s’avérer excellents et d’ailleurs ses acteurs vont connaître de très belles carrières après le tremplin représenté par Firefly : Morena Baccarin, Jewel Staite, Adam Baldwin, Alan Tudyk, Gina Torres, Summer Glau, Sean Maher et Nathan Fillion, Ron Glass étant le seul a avoir déjà connu un beau parcours. Il en ira de même pour les vilains semi récurrents (Mark Sheppard, Christina Hendricks).

Surtout, une parfaite entente va s’instaurer au sein de la distribution, des liens très forts s’instaurant entre les comédiens et Whedon. Celui-ci indiquera d’ailleurs que Firefly aura sans conteste connu la meilleure ambiance de tournage parmi toutes ses séries. Nathan Fillion va s’imposer avec naturel comme chef de bande des comédiens et servir de précieux relai à Whedon, une compréhension mutuelle de la série et une solide amitié les ayant rapidement rapprochés. Cet esprit de troupe se révèlera précieux face au rythme effréné de la production mais aussi pour entretenir la flamme après l’annulation prématurée de Firefly, jusqu’à grandement faciliter le lancement du film Serenity. Whadon recrutera d’ailleurs plusieurs d’entre eux lors des ultimes segments de Buffy et Angel, de manière amusante dans des rôles de méchants. 

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A-côté de cet atout, l’idée déjà très précise de la série qu’a développé Whedon et les sommes mises en jeu par la Fox vont permettre à la production d’avancer rapidement. Mais le laps de temps imparti demeure très court, et Whedon ne parvient pas à trouver suffisamment vite un bras droit sur cette série, comme peuvent l’être Marti Noxon sur Buffy et David Greenwalt sur Angel. Contrairement à ce qu’il a avait promis, le showrunner se voit contraint de débaucher l’un des meilleurs scénaristes d’Angel, Tim Minear, pour le seconder sur Firefly. Greenwalt le prend très mal et claque la porte, ce qui ne sera pas sans conséquences sur le devenir d’Angel. De son côté, Marti Noxon part en congés maternité et Whedon doit davantage s’impliquer sur ses trois séries que prévu initialement, même s’il s’est éloigné de la gestion de sa société Mutant Enemy. Il achèvera d’ailleurs la saison dans un état physique proche de l’épuisement (il ira jusqu’à composer lui-même la chanson de Firefly).

Mais les véritables difficultés sont à venir. Elles vont provenir de l’accueil très négatif réservé à la série par la Fox. Celle-ci avait en têt un Space-opéra léger et divertissant (l’équivalent dans l’espace de ce qu’elle perçoit de Buffy). D’emblée s’installe une défiance envers ce programme bien plus aride et exigeant qu’anticipé. Quoique renâclant, Whedon doit récrire le pilote, avec plus d’action et d’humour, et c’est un autre épisode qui sera diffusé lors du lancement de la série, le 20 septembre 2002. La Fox continuera à les programmer sans se soucier de l’ordre souhaité par Whedon, qui aura à s’efforcer de minimiser les constantes exigences de réécriture vers un programme davantage formaté. La série se voit programmée dans la case horaire de la mort, le vendredi soir (quand la jeunesse préfère sortir), où se verra souvent remplacée ponctuellement par d’autres émissions. 

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Au final, la série connaît néanmoins un succès critique et une audience moyenne de 4,7 millions de spectateurs. C’est davantage que Buffy et Angel à la même époque, mais dramatiquement inférieur aux espérances initiales de la chaîne, qui visait au moins le double. Malgré la mobilisation des Browncoats sur Internet, qui monte alors en puissance comme support des diverses communautés de fans, la série s’achève dès le 20 décembre 2002, après que onze épisodes aient été diffusés (quatorze sont en tout produits). Joss Whedon, ulcéré, va se battre en vain pour trouver un repreneur (son projet comportait cinq saisons). Alors qu’il disposait de trois séries diffusées sur trois réseaux différents, un record, un an et demi plus tard toutes sont achevées.

Fatigué, Whedon s’éloigne de la télévision. En 2004, il se consacre à l’écriture de Comics X-Men (Astonishing X-Men), ce qui constitue un premier contact avec la galaxie Marvel. Mais la communauté des Browncoats ne s’est entretemps pas étiolée, bien au contraire et la sortie du coffret DVD de Firefly connaît un grand succès en décembre 2003. Outre l’intérêt qu’elle porte à la série, cette situation conduit Mary Parent, dirigeante d’Universal Pictures, à proposer à Joss Whedon décrire et de réaliser une suite au cinéma, qui deviendra Serenity (2005). Le budget de 39 millions de dollars (plus un important effort de communication il est vrai) paraît relativement modeste pour un film de Space-opera, le budget moyen de production en la matière s’élevant à cent millions à Hollywood. Serenity va permettre à Firefly de connaître une fin digne de ce nom, au moins pour sa première grande époque.

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Pour une fois Whedon dispose d’une liberté de création totale, ce qu’il apprécie par-dessus tout. Il fait également avec délices ses classes comme réalisateur au cinéma, l’expérience achèvera d’ailleurs de le convaincre que son avenir se trouve désormais au Septième Art, et non plus dans la Lucarne magique. La troupe de comédiens répond immédiatement à l’appel et sans demander la Lune en matière de cachet, ce qui facilitera la production. Whedon a cependant à gérer la grande difficulté traditionnelle des adaptations de séries au cinéma : concilier les fans et les nouveaux venus. Malgré l’organisation de séances de test et des critiques globalement positives, ce pari là sera perdu. Le film ne parvient pas toucher réellement au-delà des Browncoats et du public geek adulant Joss Whedon. Les recettes de Serenity (38,9 millions de dollars) couvriront à peine son seul budget de production,

Cela met un terme très probable à la franchise au cinéma, d’autant que Whedon s’est depuis consacré à élever le niveau des films Marvel, avant d’enfin rallier les productions DC Comics. Malgré tout, la désormais cultissime Firefly continue encore aujourd’hui son parcours, à travers Comics, produits dérivés et réunions toujours très suivies en conventions, entre l’équipe et son public. Un mémorable panel surviendra d’ailleurs pour les dix ans de la série, à la Comic Con de San Diego de 2012. Firefly est également référencée dans de nombreuses autres séries, comme un élément clef de la culture geek américaine. Nous allons embarquer à bord du Serenity, pour un voyage qui se déroulera selon la vision de Joss Whedon et non l’ordre de diffusion des épisodes. 

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