Saison 3 1. CON EL TIEMPO EN LOS TALONES Date de diffusion : 01 juin 2017 Epoque visitée : 1958, Alfred Hitchcock au Festival de Saint-Sébastien Résumé : Julián est tué lors de la Bataille de Teruel. Amelia et Alonso refont équipe avec Pacino, à l’occasion d’une affaire d’espionnage les opposant à des agents du KGB, en 1958. Ceux-ci ont décidé de tirer parti de la venue d’Alfred Hitchcock au Festival de San Sébastien, pour le capturer afin qu’il se mette au service de la propagande soviétique. Un mystérieux groupe temporel les aide, car ils veulent que l’évènement perturbe la visite d’Eisenhower en 1959, vitale pour le maintien du Franquisme. Après un succès difficilement obtenu, Pacino réintègre la Patrouille du Temps. Critique : Annoncé durant une longue et mouvementée intersaison, le départ de Rodolfo Sancho, et par conséquent celui de Julián, restait une étape difficile à gérer pour le pilote de saison. En effet, souvent aimé, parfois détesté, le personnage demeurait le cœur émotionnel d’une série que nous avions découvert à travers ses yeux. L’exercice se voit réussi haut la main, les auteurs trouvant la parfaite conclusion pour le parcours tragique de Julián, son don de soi porté au paroxysme pour combler son vide existentiel face à l’absence de l’âtre aimé. Le drame trouve un écho amplifié par sa résonnance avec le désastre de Teruel, début de la fin des espoirs de l’Espagne républicaine. L’instant est terrible et les acteurs savent lui apporter une vraie émotion (à commencer par Aura Garrido) mais le récit évite pour autant de s’ensevelir sous le pathos, en rebondissant par l’action. Telle est la vie des agents secrets, temporels ou non. Le retour de Pacino nous y projette efficacement mais surtout constitue l’heureuse confirmation de l’épisode. Hugo Silva retrouve son rôle avec un naturel confondant, et renoue l’excellente complicité installée en saison 2 avec ses deux partenaires. Le trio fonctionne à merveille, tandis que comme, souvent, l’humour est de la partie dans le petit monde du Ministère. Salvador rongeant son frein en fauteuil roulant permet ainsi à Jaime Blanch de nous régaler d’excellents sketchs comiques. Mais le côté obscur, de Pacino répond également à l’appel, sa violence, son intelligence retorse et cynique, son goût pour les femmes fatales et les périlleuses amours. Le contrepoint avec Julián se ressent plus fortement que jamais et correspond idéalement à cette intrigue d’espionnage dans laquelle il entraîne ses compagnons. Celle-ci sait d’ailleurs s’élargir d’un cas privé à une authentique mission dont dépend le destin de l’Espagne. Certes les divers rebondissements relèvent du classique et ne surprennent pas tout à fait. Mais l’histoire sait recréer l’atmosphère paranoïaque de la Guerre froide, le plan soviétique autour d’Hitchcock ayant un côté délirant fort bienvenu de ce point de vue. Surtout, avec Marta (excellente Belén Fabra) et son séide, l’intrigue installe d’emblée une Opposition structurée, de manière plus structurée que précédemment. Les adversaires récurrents des saisons précédentes enjolivaient le récit mais demeuraient souvent secondaires, rien de tel ici. Cela peut permettre de doter la saison 3 d’une identité propre, davantage feuilletonnante. Cette évolution semble d’autant plus porteuse que la faction rivale au sein de Ministère semble a priori bien intentionnée (du moins s’opposant à Franco), ce qui place le spectateur devant un dilemme moral. Toutefois le clou du spectacle reste bien entendu le Maître du suspense comme invité du jour. Le vétéran José Ángel Egido soigne la ressemblance et le pittoresque d’un portrait très divertissant (même si son accent anglais sollicite la bienveillance du public !). Tout célébrant le génie d’Hitchcock, l’épisode sait gentiment ironiser sur les travers de l’homme, comme sa fascination pour ses actrices, que sait employer l’astucieuse Amelia. A cet égard on pourrait pointer qu’Alfred aimait surtout les blondes, mais ne chipotons pas. Le scénario emprunte astucieusement à Sueurs froides autour de la relation entre Pacino et Marta et manifeste une belle astuce en transformant Hitchcock en authentique MacGuffin du récit ! Tout le gag autour de Banderas est hilarant. Le meilleur reste sans doute la particulièrement ludique recréation de scènes des plus célébrées films d’Alfred Hitchcock, insérées comme ces caméos qu’il appréciait tant. L’amateur appréciera d’autant plus de les repérer qu’elles se caractérisent par un vrai sens de l’image et une véritable élégance de mise en scène. L’épisode peut d’ailleurs s’appuyer sur une reconstitution d’époque toujours aussi stylé, à l’image du sublime deux pièces vert arboré par Amelia, similaire à la tenue de Tippi Hedren dans Les Oiseaux. La reconstitution de la bataille de Teruel se montre également spectaculaire, la réalisation, tandis que la réalisation y insère habilement Julián, sans jamais le montrer directement. Décidément l’opus forme une parfaite entame pour cette saison 3 ! Anecdotes :
Date de diffusion : 08 juin 2017 Epoque visitée : 1943, l’Opération Mincemeat Résumé : En 1943 la jeune Lola n’a encore jamais entendu parler du Ministère. Membre de la résistance, elle doit faire passer en Espagne un officier anglais, le Major Martin, qui doit intervenir dans une mission clef devant se dérouler à Huelva, l’Opération Mincemeat. En lui prêtant assistance, elle est arrêtée par la Gestapo à Bagnères-de-Luchon, près de la frontière. La Patrouille et Ernesto vont intervenir pour sauver celle qui a été une amie et une agente d’élite, avant de trahir, mais aussi pour s’assurer que l’Opération Mincemeat soit bien couronnée de succès. Critique : Après l’épisode éminemment spécial, voire événementiel, que constitua un pilote de saison ayant à gérer la mort d’un personnage principal mais aussi l’hommage graphique à Hitchcock, Tiempo de espias signifie un certain retour à l’ordinaire des missions de la Patrouille du Temps. Cette inévitable impression d’atterrissage se voit malheureusement accentuée par quelques errances du scénario, Ainsi pour la première fois de la série, l’évènement historique du jour n’impacte pas directement l’Histoire de l’Espagne. L’Opération Mincemeat concerne avant tout les belligérants allemands et anglais, l’Espagne n’est qu’une simple courroie de transmission de la machination. Par ailleurs un échec de la manipulation aurait certainement alourdi le coût humain et matériel de la conquête de la Sicile. Et pourtant le Ministère du Temps intervient, quitte à prendre le risque de sacrifier Ernesto et Lola. Un flou s’installe quant à sa mission : s’agit-il de préserver l’Histoire espagnole, ou l’universelle, ce à quoi ne se prête ni son organisation simplement nationale, ni ce qui nous a révélé jusqu’ici ? En fait on ressent l’impression que l’impression a absolument voulu insérer une aventure contre les Nazis, se peut sous l’influence de l’investisseur Netflix, la période étant populaire auprès du public. Quitte à se débrouiller avec le fait que l’Espagne n’ait jamais été un Etat belligérant. Le sujet aura été bien mieux abordé lors de Cómo se reescribe el Tiempo, en saison 1. On regrettera également certaines maladresses, comme cette Opération Mincemeat, successivement abandonnée, puis relancée, puis finalement avortée, un vrai chantier simplement pour installer tout un émotionnel autour du sacrifice du Major Martin (personnage fictif dans la réalité, mais réel dans la fiction). On peut aussi estimer que le décès de la Lola contemporaine tombe vraiment à pic pour éviter une confrontation compliquée avec son moi passé. Les amateurs du Ministère évoquent souvent les indéniables convergences avec Doctor Who, mais ici on peut penser qu’un auteur comme Steven Moffat aurait au contraire privilégié la situation la plus prise de tête possible, en général il vient avec. Il est vrai que l’Histoire aura toujours davantage motivé Javier Olivares que les jeux temporels. Malgré toutes ses réserves, l’opus demeure un spectacle prenant. Si son volet historique convainc moins qu’à l’ordinaire, le relationnel prend néanmoins efficacement la relève, notamment lors des scènes dures mais émouvante au sein des geôles nazies, installant de manière convaincante l’amitié entre Ernesto et Lola. Si artificielle qu’aura été la mise en place du sacrifice du Major, l’instant émeut toutefois, grâce à la qualité d’interprétation lors de sa confrontation sur la plage fatidique avec Alonso. Sur ce point-là très belle Macarena García demeure le grand coup de cœur de Tiempo de espías. Les séries en costumes réussissent décidément parfaitement à cette jeune étoile montante de la télévision espagnole (Amor en tiempos revueltos, La otra mirada), elle sait ici incarner une Lola encore juvénile, mais déjà marquée par la dureté d’un conflit souterrain et impitoyable, disposant de toute une marge de progression pour les épisodes ultérieurs, mais manifestant déjà toutes ses potentialités à venir. Si la vraisemblance n’est pas toujours au rendez-vous (reconstituer un immense ouvrage de falsification en quelques heures), le rythme des péripéties résulte plus élevé encore que lors du pilote de saison, La mise en scène reste superbe, notamment pour les plages somptueusement filmées sous tous les angles possibles. On sourira une nouvelle fois avec des personnages anglais s’exprimant dans la langue de Shakespeare avec un accent espagnol (voire andalou) pour le moins prononcé. Cela fonctionne nettement mieux pour les Français, ce qui souligne judicieusement la sororité des langues latines. Les amateurs de Chapeau melon s’amuseront de voir le peloton d’exécution de Lola et Ernesto occis exactement de la même manière que celui de l’épisode le Mort vivant, Salvador se substituant à Emma Peel ! Anecdotes :
Date de diffusion : 15 juin 2017 Epoque visitée : 1864, les Sorcières de Trasmoz Résumé : Retiré au Monastère de Veruela durant l’été 1864, l’écrivain Gustavo Adolfo Bécquer envoie à Madrid neuf lettres, destinées à être publiées dans la presse. Mais l’un des Observateurs du Ministère signale que l’auteur en a également écrit une dixième, qui ne devrait pas exister. Interceptée, celle-ci évoque la présence d’une Sorcière dans la région, pourtant supposée morte depuis trois siècles. Suspectant qu’une renégate soit passée par l’une des Portes, Salvador envoie la Patrouille du Temps tirer les choses au clair. Amelia, Alonso et Pacino vont se retrouver immergés dans la ténébreuse affaire des Sorcières de Trasmoz. Critique : Après le retour à la formule classique lors du précédent opus, nous découvrons ici une nouvelle mission relativement classique pour la Patrouille du Temps, mais Tiempo de hechizos va illustrer avec brio toutes les qualités de la série, avec une grande richesse des thèmes abordés Le récit permet ainsi d’aborder la figure de Gustavo Adolfo Bécquer, auteur sans doute assez peu connu dans nos contrées, mais qui appartient aux grands classiques infailliblement enseignés dans les lycées espagnols. Comme toujours avec Le Ministère du Temps, l’installation du personnage s’effectue d’une manière en rien didactique. Bien au contraire, l’épisode s’attache à nous révéler l’homme derrière l’écrivain, tout en le connectant de manière astucieuse et instructive à une énigme temporelle. On apprécie par ailleurs de retrouver l’étincelle habituelle entre Amelia et chacun des grands écrivains rencontrés par la Patrouille du Temps. Le talentueux Tamar Novas délivre un portrait très sensible de l’écrivain d’autant que sa ressemblance physique avec le fameux tableau de Bécquer peint par son propre frère (sa représentation coutumière en Espagne) se montre réellement frappante. Surtout la judicieuse connexion étable avec les Sorcières de Trasmoz permet à l’épisode de se doter d’une tonalité à la Bécquer, entre romantisme et épouvante gothique. Le récit sait longtemps donner l’illusion d’un Fantastique effrayant, sans pour autant y sombrer, ce qui aurait été contraire à l’esprit de la série. La révélation du dessous des cartes se montre d’ailleurs suffisamment en soi avec une population entièrement fanatisée dans un phénomène sectaire globalisé, dans la tradition du film Le Dieu d’Osier, ou des Enfants du maïs, de Stephen King. L’emploi de la Mandragore comme stupéfiant permet de demeurer aux lisières de la sorcellerie traditionnelle. La mise en scène joue pleinement son rôle, avec une impressionnante maîtrise de la photographie et technique du tournage en pleine nuit (soit une grande partie de l’opus) et quelques bonnes idées (le corbeau de Poe, les apparitions en ombre-lumière de la maîtresse des lieux, très à la Nosferatu). Le romantisme se voit développé par la trajectoire tragique et émouvante de Mencía. D’abord très habilement présentée comme une menace, elle se révèle de fuir l’Inquisition et consorts d’époque en époque, avant, épuisée, de se suicider face à l’hostilité des locaux. A ce sujet, comme à propos de la jeune fille mère, l’épisode développe un féminisme assumé, avec toute une parabole du rejet social dont souffrent les femmes dès lors qu’elles sortent de la norme. Il traite en écho de la méfiance envers l’inconnu que représentent de nouveaux venus, comme la Patrouille pour les locaux, ou comme la Lola alternative face à Irène et Angustias. On regrettera simplement la mélancolie générée par les trop visibles travaux de préparation du départ prochain d’Amelia. Quitte à employer un moyen peu ragoutant, Pacino est une nouvelle fois institué en sauveur. Il est clairement le protagoniste le plus mis en avant depuis le but de la saison, revêtant déjà le rôle de leader. On adore le personnage, mais tout ceci va à marche forcée. Lola se profile de manière quasi miraculeuse comme une nouvelle Amelia, voire la surpassant dans l’action comme dans la recherche historique. Son étoile s’élève tandis que celle d’Amelia pâlit. Les amateurs de Chapeau Melon seront en terrain connu, puisque, de manière plus forcée encore car concentrée en un unique épisode, Emma était mise sur la touche pour laisser la scène libre à Tara. Amelia est toujours là, mais elle nous manque déjà. Anecdotes :
Date de diffusion : 22 juin 2017 Epoque visitée : 1799, Francisco de Goya et la Maja desnuda Résumé : Au Musée du Prado, la Maja desnuda est soudainement comme lacérée par une main invisible. En réalité, la toile est détruite par des inconnus ayant pénétré dans l’atelier de Goya, en 1799. Salvador envoie la Patrouille du temps convaincre Goya de reprendre le tableau. Cela plonge nos amis dans un tourbillon d’intrigues, où ils rencontreront également Manuel Godoy, les Duchesses d’Alba et d’Osuna, mais aussi un jeune Simon Bolivar. Salvador demande également à Velázquez de réaliser une parfaite copie de l’œuvre, mais le peintre préfère aller à la rencontre de Goya. La Patrouille va aussi devoir sauver un orphelinat et aider un jeune Bolivar à déclarer sa flamme à son aimée, María Teresa ! Critique : Les épisodes artistiques réussissent souvent particulièrement bien aux séries temporelles, du fait de l’aspect visuel relevé et fédérateur qu’autorisent leur découverte en leur époque des plus célèbres peintures ou sculptures. Doctor Who nous a ainsi régalés d’excellents épisodes autour, de Léonard de Vinci et de la Joconde (City of Death, 1979), ou de Vincent Van Gogh, avec le chef-d’œuvre que constitua Vincent et le Docteur (2010). Après Picasso et Guernica, Le Ministère du Temps réussit ici un opus se situant dans la meilleure veine de cette tradition graphique, la série nous rappelant à quel point l’Histoire de l’Art a toute sa place au sein de l’Histoire universelle, comme expression d’un peuple, d’une culture. Les différents tableaux de Francisco de Goya aperçus au cours de l’intrigue à commencer bien entendu par la fascinante Maja desnuda elle-même sont ainsi tous mis en valeur avec un goût exquis. Outre la découverte de l’homme tel qu’en lui-même, l’épisode présente également le mérite de faire revivre un Goya que les sombres périodes ultérieures de la Guerre d’Indépendance (Les Désastres de la guerre, El Dos de Mayo), puis de la maladie (les Peintures noires) ont quelque peu mis en retrait. En effet nous retrouvons ici le peintre à succès de l’aristocratie et d’une douceur de vivre du XVIIIe siècle espagnol. L’esthétique de la mise en scène va se mettre admirablement au diapason de cette période de l’artiste. En effet, les moyens supplémentaires obtenus grâce à Netflix se voient ici clairement mis à contribution, via la splendeur des costumes et les lumineux extérieurs, aussi idéalement choisis que somptueusement filmés, du domaine del Capricho. L’épisode s’avère décidément autant un plaisir pour les yeux que pour l’esprit. De fait les auteurs manifestent une diabolique astuce en optant pour l’hypothèse la plus porteuse à propos de l’énigme de l’identité de la Maja desnuda, celle du corps de la Duchesse d’Alba, amante de Goya, et du visage de Josefa Tudó, maîtresse de Godoy. Ceci entraîne la malheureuse Patrouille dans un tourbillon de vaudeville devant réconcilier l’impossible, les amants désunis et le propre projet du chef du gouvernement. On s’amuse beaucoup, d’autant que la distribution s’avère remarquable et joue à fond le jeu, à l’image de Pedro Casablanc, admirable en Goya. Si elles dressent un portrait brutal de Godoy (évidement représenté dans le costume de son portrait par Goya en 1801), les différentes péripéties de cette pièce aussi divertissante que mouvementée savent dépeindre en arrière-plan les mœurs de la Cour de Charles IV. La personnalité du Roi est ainsi transcrite dans sa vérité, non pas un tyran réactionnaire, comme le sera son fils Ferdinand VII, mais plutôt un monarque non dépourvu de bonnes intentions mais à la totale incurie, incapable de réformer un État déliquescent ou de redresser le cours de l’Histoire face à l’élévation de l’étoile napoléonienne. Par contre, si l’on apprécie que la série sache souvent entremêler différents sujets, l’épisode semble dangereusement avoisiner la surchauffe sur ce point. La multiplication des intrigues secondaires finit par donner une impression de dispersion préjudiciable, même si aucune n’est gratuite. L’orphelinat rappelle ainsi la misère du peuple, tandis que l’apparition de Bolivar évoque la chute prochaine de l’Empire espagnol (tout en ouvrant la série au public hispanique !). Le retour tant attendu de Velázquez, comme de son hilarant duo formé avec Salvador tient toutes ses promesses, d’autant que le Roi des peintres et peintre des Rois se montre aussi enthousiasmant dans son approche de Goya que dans celle de Picasso. En l’absence de Lola l’épisode marque également un agréable retour au premier plan d’Amelia, celle-ci résolvant l’affaire par un surprenant coup d’audace. Alonso et Pacino ne se voient pas négligés pour autant, ce dernier s’offrant même le luxe de percer le Quatrième mur, dans une claire banderille décochée à la série Timeless, alors accusée de plagiat. Anecdotes :
Date de diffusion : 29 juin 2017 Epoque visitée : 1605, le Traité de Londres, Felipe III à Valladolid Résumé : En juin 1605, le Roi Felipe III tient sa cour à Valladolid, où il reçoit une délégation anglaise venue parachever la signature du Traité de Londres. Convenue l’année précédente et immédiatement paraphée par le souverain anglais Jacques Ier, cette paix ne cesse d’être retardée par Felipe III, notamment sous l’influence de son favori, le Duc de Lerma. Venue s’assurer de bonne conclusion du traité, la Patrouille découvre que l’Ange exterminateur est à l’œuvre. Amelia retrouve avec plaisir Cervantes et son cher Lope de Vega, alors en pleine rivalité, tandis que Shakespeare accompagne incognito les ambassadeurs anglais. Critique : Tiempo de esplendor nous replonge dans le Siècle d’Or, décidément une époque privilégiée par El Ministerio del Tiempo. On comprend aisément l’attrait que suscite cette époque de prestige et puissance nationaux pour le public espagnol, d’autant que les Arts et Lettres y atteignirent également des cimes. Après tout, l’on ne se lasse pas non plus en France de Versailles et du Grand Siècle ! Toutefois une impression de déjà-vu s’installe, d’autant que l’épisode n’évite pas certaines maladresses, comme encore une fois une scène de taverne associée à cette époque, un vrai fil rouge. Nous retrouvons certes avec plaisir les deux compères Cervantes et Lope de Vega, même si là aussi on se situe dans l’attendu. Sans doute leur rivalité est-elle trop traite en mode de comédie légère, vis-à-vis de l’importance qu’elle a revêtue dans l’Histoire de la littérature espagnole, mais l’on éprouve de la difficulté à réellement s’en émouvoir, tant les deux comédiens, Pere Ponce et Victor Clavijo s’avèrent savoureux. Dans la même veine, le roman de Lope et d’Amelia, toujours plus similaire à celui de Madame de Pompadour et du Dixième Docteur (La Cheminée des temps, Doctor Who) se montre toujours aussi plaisant à suivre. On reste davantage circonspect à propos de la présence Shakespeare. En effet le Le Barde ne fait que passer à travers l’épisode, et ce au prix de quelques approximations historiques, comme sa propre présence à Valladolid ou l’inspiration qu’aurait été le Duc de Lerma pour Macbeth, alors même que la pèce trouve ses racines dans l’Histoire écossaise. En fait on ressent une tentative supplémentaire d’acclimater la série au public anglo-saxon, se peut sous l’influence des capitaux de Netflix, comme l’importance encre accrue ici accordée aux guerres d’agents secrets, ou aux armes à feu. Les personnages anglais égrènent également les poncifs culturels particulièrement identifiables. On peut également regretter que la partie du récit autour d’Irène et Ernesto ne développe pas assez de liens avec le segment principal, et l’on avouera une certaine frustration à voir nos deux agents temporels se rendre dans les années 80 que pour y demeurer essentiellement confinés dans l’enceinte du Ministère. Nonobstant, l’opus se suit avec un vrai plaisir, du fait de la qualité de la reconstitution d’époque et de la magnificence d’une mise en scène aux nombreux extérieurs en costumes et aux superbes décors. Le meilleur réside dans les portraits bien croqués du couple royal, Felipe III et Marguerite d’Autriche, mais aussi de l’avide et impérieux et avide Duc de Lerma. Les dialogues ne laissent d’ailleurs pas passer l’occasion d’un amusant clin d’œil à une certaine persistance de la corruption au seuil de l’Histoire du pays, même si l’Espagne n’en eut certes pas le monopole. A travers les diverses figures féminines rencontrées l’épisode fustige éloquemment le penchant qu’a eu la société à toutes époques de vouloir circonscrire les femmes à leurs tâches traditionnelles. On regrette par contre que son pendant, la critique de l’orgueil masculin, s’étende jusqu’à Alonso. L’un des nombreux intérêts du personnage aura été son évolution au fil des épisodes, or ici on le ramène d’un coup brutal à ses conceptions arriérées d’Espagnol du XVIe siècle, sans nuance aucune. Alonso n’a pas mérité cela. Anecdotes :
Date de diffusion : 06 juillet 2017 Epoque visitée : 1881, Alfonso XII à Comillas Résumé : En août 1881, Alfonso XII séjourne chez le Marquis de Comillas, dans cete ville de Cantabrie. Le Roi est grièvement blessé lors d’un attentat perpétré par un esclave noir du Marquis, ce qui menace toute la succession dynastique espagnole. Savador n’hésite à pour une fois demander la modification d’un évènement (à Cuba, en 1851), pour que les circonstances de l’attentat n’existent plus. La Patrouille met également à jour à jour un étonnant complot anti-monarchiste de la part des Enfants de Padilla, organisation temporelle aux buts opposés à eux de l’Ange exterminateur, mais employant les mêmes méthodes violentes. La famille d’Amelia est cruellement touchée, ce qui l’amène à quitter le Ministère du Temps, afin d’aider les siens. Critique : On reprochera à Tiempo de esclavos d’apparaître comme l’un des épisodes du Ministère du Temps ayant traité le plus superficiellement son sujet historique. En effet Alphonse XII ne ne voit guère évoqué au-delà de l’attentat, qui lui-même ne constitue qu’une sorte de MacGuffin pour l’intrigue du jour. On le regrette d’autant plus que le règne de ce souverain frme une intéressante parenthèse au sein d’un XIXe Siècle particulièrement troublé pour l’Espagne (failles sociales, guerres carlistes…). Il a également jeté les bases d’un bipartisme allant scander la vie politique du pays durant des décennies, avant de se retrouver au cœur d la démocratie post franquiste du moins jusqu’à ces dernières années), un thème réellement à peine survolé par l’opus. Toutefois l’intérêt historique de l’épisode n’en résulte pas nul pour autant car il sait évoquer l’importance prise par la bourgeoisie d’affaires, commerciale ou industrielle, au sein de la direction du pays. Surtout, il évoque avec sensibilité le drame de l’esclavage, notamment à travers une excursion très parlante dans le Cuba encore colonial, l’approche de la guerre hispano-américaine. Après le fanatisme religieux ou la corruption (entre autres), la série sait décidément pointer du doigt les zones d’ombre de l’Histoire d’Espagne, sans pour autant sombrer dans un pensum moralisateur permanent à la Timeless. Par ailleurs la moindre part accordée à la chronique du royaume se doit à des raisons d’intérêt inégal. L’introduction des enfants de Parilla comme nouvelle organisation temporelle antagoniste, autant d’extrême gauche que l’Ange exterminateur est d’extrême droite (pour parler en termes politiques) ne manque certes pas d’intérêt. Elle évoque astucieusement les attentats anarchistes ayant effectivement visé le Roi. Surtout, elle rend plus subtil le discours moraliste de l’épisode, au-delà de l’évidente et nécessaire dénonciation de l’esclavage, vec une condamnation de la violence, qu’elle qu’en soit la cause. Par contre la multiplication des organisations auxquelles se confrontent la minière, plus le cas toujours particulier de Marta, finit par donner réellement au programme des allures de série d’espionnage, un modèle cher au public américain, ce qui lui fait perdre une part de sa spécificité. Quelles qu’en soient les raisons, on regrette également que le Ministère s’autorise désormais à modifier l’Histoire, même légèrement. Décidément cette saison 3 entraîne la série sur de nouvelles voies, s’éloignent des aventures historiques auxquelles nous étions attachés. Le financement par Netflix continue par contre à autoriser de superbes extérieurs, le Palais de Sobrellano se voyant superbement mis en valeur. La meilleure justification de l’épisode reste toutefois le grand soin apporté aux protagonistes, avec un beau portrait de Salvador et de Lola, et particulièrement les adieux d’Amelia. L’évènement est trait avec émotion et astuce, laissant entrevoir que les manipulations opérées par le Ministère ne vont pas sans un prix à payer, dans la meilleure tradition d’Un coup de tonnerre, de Ray Bradbury. Pour son départ Aura Garrido nous délivre un magnifique récital d’émotions. Ce merveilleux et particulièrement riche personnage que représentait Amelia occupait une place centrale au sein de la série, au moins autant que Julián. Même si Lola se profile en talentueuse remplaçante, ce départ d’un deuxième membre de la Patrouille plonge la série dans une vraie incertitude ! Anecdotes :
Date de diffusion : 18 septembre 2017 Epoque visitée : 1961, Luis Buñuel et Viridiana Résumé : En 1961, l’Ange exterminateur corrompt Ambrosio Pitaluga, folklorique membre du comité de censure, pour que soit interdit le sulfureux Viridiana de Luis Buñuel, contrairement à la vérité historique. Irène, Pacino et Alonso sont envoyés lever l’interdiction, ce qui va les immerger à la fois dans la bureaucratie franquiste et dans le milieu du cinéma, une mission très ardue. A l’occasion de cette virée dans les années 60, Irène va également à la rencontre de problèmes familiaux laissés en suspens, et Pacino à la redécouverte de son enfance. Lola découvre le monde contemporain, mais aussi la vie de son soi alternatif. Critique : Tiempo de censura vient à point nommé nous rassurer sur les potentialités d’El Ministerio del Tiempo après départ d’Amelia, mais aussi le long hiatus estival. Le choix comme sujet de l’aventure que constitua la menée à bien de Viridiana va en effet s’avérer comme l’un des meilleurs de la saison. Les hilarants démêles du trio avec les univers aussi différents, mais pareillement éprouvants pour les nerfs, que constituent la bureaucratie franquiste et la production cinématographique nous vaut une atmosphère de comédie tranchant agréablement avec le drame de l’opus précédent. De même, le choix d’un thème plus léger renouvelle pareillement la série, après avoir avoisiné un cataclysme dynastique. L’humour autour des à-côtés de la vie de bureau rejoint un universel humoristique à la Courteline, d’autant plus appréciable qu’il caractérisait une originalité du Ministère à ses débuts, tandis que l’organisation résulte désormais bien davantage proche du canon des séries d’espionnage (très peu de scènes à la cafétéria cette saison !). On s’amuse beaucoup, d’autant que la direction d’acteurs a la bonne idée de laisser toute latitude à la verve satirique de Carlos Areres, acteur également dessinateur pour El Jueves (assez l’équivalent espagnol du Canard). Son picaresque et vénal Ambrosio s’impose comme la vedette comique de l’opus. Mais c’est aussi à travers lui que l’on saisit l’air du temps de cette décennie où le régime du Caudillo, certes toujours foncièrement dictatorial, s’ouvre à l’extérieur, dans les domaines aussi bien culturels, qu’économique que culturels. Une tendance forte symbolisée par l’entrée de l’Espagne dans le concours de l’Eurovision en 1961, avec le tube Estando contigo, que l’opus nous laisse judicieusement écouter lors de son agréable conclusion. La série utilise le rire à merveille pour se moquer du contraste entre le discours officiel, rigoriste et ronflant, et la réalité de la corruption comme de la médiocrité ambiante. Le récit se montre également particulièrement documenté à propos de l’épopée de Viridiana, ses différents protagonistes se voient ainsi mis en scène (Luis Buñuel, Domingo Dominguín, Juan Antonio Bardem, Francisco Rabal…), mais à la manière fluide caractéristique de la série. Des éléments clés du panorama cinématographique espagnol de l’époque sont également montrés comme l’implication de l’Eglise dans la censure, ou l’Uninci, fer de lance du Néoréalisme espagnol. Mais le Septième art imprègne tout l’épisode, à travers l’humour de nombreux clins d’œil bien dans la sensibilité geek de la série (Pacino vendant le scénaro de Star Wars) mais aussi visuellement, grâce à de superbes affiches enjolivant des décors plus renfermés qu’à l’ordinaire (avec notamment les stars Juanita Reina et Sara Montiel). Les différents parcours individuels d’Irène, Pacino, Lola et viennent encore irriguer le récit. La qualité d’interprétation fait volontiers pardonner certains clichés (notamment pour Pacino), tandis que le drame d’Irène émeut. Sans tomber dans l’angélisme, Lola nous permet de mettre en perspectives une époque contemporaine plus attractive que cette Espagne des années 60 se rêvant comme moderne, malgré la réalité profonde de sa société et de l’appareil franquiste. Humour, péripéties et Histoire, le Ministère est à son meilleur niveau ! Anecdotes :
Date de diffusion : 25 septembre 2017 Epoque visitée : 1518, les Conquistadors Résumé : Pacino et Alonso partent pour 1518, dans un Yucatán en passe d’être conquis par Hernán Cortés. Pour s’emparer du Mexique, ce dernier a historiquement reçu l’aide déterminante de Jerónimo de Aguilar, clerc ayant appris à parler la langue des Mayas quand il en était prisonnier. Or Aguilar a disparu avant de pouvoir intervenir et le Ministère rend responsable Gonzalo Guerrero, également prisonnier des Mayas, mais ayant décidé d’embrasser leur culture. Pendant ce temps les Enfants de Padilla menacent de s’en prendre aux familles des agents du Ministère, si l’oncle d’Amelia n’est pas libéré. Critique : Le XVIe siècle. Des quatre coins de l'Europe, de gigantesques voiliers partent à la conquête du Nouveau Monde. À bord de ces navires, des hommes, avides de rêve, d'aventure et d'espace, à la recherche de fortune. Il aura fallu attendre la troisième saison du Ministère du Temps pour enfin aborder ces figures éminemment identifiées et marquantes de l’Histoire de l’Espagne que composent les Conquistadors de l’Empire sur lequel le Soleil ne se couche jamais. Olivares s’y décide enfin, se peut à destination de ce public latino-américain ayant réservé un si bon accueil à son programme, se peut aussi du fait que Netflix se soucie toujours d’internationaliser les séries qu’il finance. Qu’importe, le succès va être au rendez-vous. La première réussite de l’opus est visuelle. Idéalement géré par la mise en scène, l’astucieux emploi des potentialités de sites andalous recrée avec une étonnante véracité la végétation luxuriante du Yucatán, ainsi que l’eau turquoise de la Mer Caraïbe. L’ensemble constitue un parfait écrin pour d’épiques aventures aux nombreux rebondissements, entre duels, découvertes exotiques, félonies et coups du sort. Tout ce segment de l’épisode demeure prenant de bout en bout, d’autant que le duo absolument, irrésistiblement antinomique entre Alonso et Pacino suscite bien des étincelles. Avec un bémol : on demeure néanmoins nostalgique de la dynamique de trio caractérisant la série, il devient urgent intégrer Lola à la Patrouille. S’ajoute également un volet plus sensible et intimiste autour de la rencontre entre Alonso et son grand père se révélant bien différent de la légende familiale. L’expressivité de Nacho Fresneda apporte de la valeur a ce récit en soi passablement prévisible. Par ailleurs se confronter à son propre passé devient décidément un rituel d’airain pour les divers protagonistes du Ministère (Salvador y a aussi droit ici), ce mouvement pourrait à terme donner à la série des allures de Formula Show, ce qu’elle n’a jamais été jusqu’ici. C’est en fait une nouvelle l’Histoire qui apporte son meilleur à l’opus du jour. L’épisode illustre à merveille la persistante faculté de la série a toujours choisir des cas historiques pertinents, parfois peu connus du public, mais toujours très évocateurs de leur époque. On avouera avoir découvert avec un vif intérêt la singulière aventure des deux survivants capturés par les Mayas. Mais si l’intrigue met en avant, à juste titre, la figure positive de Gonzalo Guerrero, les autres personnages, à commencer par le grand père d’Alonso, ouvrent une intéressante fenêtre sur les Conquistadors. Évidemment loin d’une hagiographie ou d’un lyrisme à la Heredia, l’épisode ne tombe pas non plus dans la critique totale. Au contraire il sait s’attacher à la réalité humaine des individus et de leur environnement historique en Espagne. Malheureusement ce passionnant versant de l’épisode se voit considérablement réduit par celui dédié à la guéguerre entre le Ministère et ses rivaux. Chacun abordera à sa manière la série. En ce qui nous concerne c’est son aspect d’album historique qui nous séduit avant tut davantage que son espionnite temporelle. Ici cette dimension nous paraît prendre trop d’espace au détriment de la première. Sans doute Olivares a-t-il été trop ambitieux en suscitant non pas une mais deux organisations rivales. Il aurait été plus cohérent de voit les Enfants de Padilla tenter de s’aborder l’entreprise des Conquistadors, plutôt que d’assister à ce jeu temporel sans guère de relief et parfois vaguement ridicule avec cette histoire d’allergie aux cacahouètes. Aux moins cette inflation permet-elle à Salvador, toujours incarné avec infiniment de talent par Jaime Blanch, de se placer davantage au centre de l’échiquier. Anecdotes :
Date de diffusion : 02 octobre 2017 Epoque visitée : 1417, l’Antipape Benoît XIII Résumé : L’Ange Exterminateur enlève Rabbi Levi, afin que celui-ci réalise un nouveau Livre des Portes. Mais Levi s’enfuit en 1417 avec l’artefact et gagne le château de l’Antipape Benoît XIII à Peñíscola. La Patrouille, qui comprend désormais Lola, vient à sa rescousse quand Benoît XIII voyage à son tour jusqu’en 2017, mais elle a la surprise de découvrir que le nouveau Livre peut désormais ouvrir des Portes donnant sur le Futur. L’Ange exterminateur attaque et la Patrouille se réfugie à l’époque où le château était une forteresse des templiers. Critique : L’épisode parachève malheureusement la mutation de El Ministerio del Tiempo, qui n’est décidément plus la série originale et ambitieuse que nous adorions. En effet elle, qui, naguère, se montrait volontiers sarcastique avec les Etats-Unis se coule toujours davantage dans le moule de leurs productions. La part consacrée à l’Histoire se voit ainsi singulièrement réduite à la portion congrue. Il s’avère particulièrement triste de découvrir Salvador renoncer à nous décrire un tant soit peu le Grand Schisme d’occident, en l’évacuant avec un « c’est très compliqué », là où Amélia aurait en tracer un portrait, évidemment résumé. Au lieu d’au moins se centrer sur l’Antipape, on ajoute, toujours à la va-vite, les templiers, uniquement là pour les péripéties. Afin de dramatiser l’action, on joue de manière particulièrement accentuée le pathos autour du crépuscule des Templiers, mais sans même citer l’Ordre valencien de Montesa, qui va prendre la relève à Peñíscola. Pour la première fois le volet historique résulte réellement bâclé, et ce n’est pas le ton volontiers hagiographique autour du Pontife « espagnol » (aragonais) qui va arranger les choses. Par ailleurs le format de série d’action qu’achève ici de revêtir le programme ne convainc guère. Certes la réalisation demeure efficace par sa mise en valeur réussie du château de Peñíscola, même si l’on regrettera l’insertion d’effets spéciaux uniquement là pour épater la galerie, un besoin guère ressenti jusqu’ici par El Ministerio del Tiempo. Toutefois la plupart des péripéties mises en scène relèvent du cliché, comme cette énième scène d’échange d’otages, mille fois vues ailleurs. Certaines maladresses viennent encore se rajouter, comme cette porte cruciale donnant sur 1307 et que la patrouille franchit complètement par hasard, elle est juste là à les attendre, ou ces pesants ralentis sur les corps mitraillés des templiers, digne des Western spaghettis de jadis. Certains éléments (le Livre ouvrant sur le Futur, Adolfo Suárez comme mentor de Salvador au sein du Ministère) semblent appelés à prendre ultérieurement de l’importance, pourquoi pas, mais ces promesses demeurent encore à tenir. Au moins l’épisode peut-il compter sur la sympathie inaltérée qu’insufflent les personnages et sur un relationnel maniant aussi bien l’humour que l’émotion. L’intégration de Lola dans une Patrouille enfin redevenue trio, ainsi que le petit jeu concomitant d’Alonso veillant soigneusement à laisser le commandement à Pacino sonnent très justes. L’ensemble fonctionne harmonieusement, tandis que la figure de Salvador gagne toujours en complexité comme en intérêt. Cet aspect-là de la série conserve son attrait, mais l’on retiendra avant tout la triste mise en retrait de l’Histoire au sien de la narration. Anecdotes :
Date de diffusion : 09 octobre 2017 Epoque visitée : 1609 et 1828, Felipe III et Bolívar Résumé : Tandis qu’Alonso et Pacino se rendent en 1828 à Bogota pour protéger Bolivar d’une conspiration, le Ministère doit faire face à l’arrivée surprise de tout un groupe de réfugiés morisques, en provenance du règne de Philippe III. Ce sont cette fois les Fils de Padilla qui s’en servent comme Cheval de Troie involontaire, afin de provoquer un attentat suicide détruisant le Ministère. L’Ange exterminateur tente de profiter de la crise, son chef se faisant passer pour le délégué du Gouvernement, à qui Salvador doit rendre des comptes. Critique : Refugiados por el Tiempo souffre des mêmes faiblesses que son prédécesseur. Les rivalités entre sociétés secrètes, Ministère, Anges Exterminateur et Enfants de Padilla, occupent beaucoup d’espace, de même que les jeux temporels, le tout au détriment de celui imparti à l’Histoire. Mais, contrairement au tristement parcellaire survol de l’Antipape et du Grand Schisme d’Occident, l’épisode nous semble gérer ces contraintes avec une efficacité retrouvée. Quoique sans doute trop ramassée, on décèle un authentique intérêt dans la partie consacrée à un Bolivar cette fois au soir de sa vie et déjà dévoré par la tuberculose. Le portrait du Libertador, interprété avec beaucoup de talent par l’acteur colombien Juan Pablo Shuk sonne juste, entre grandeur et affirmation de l’indépendance d’une nation, tout en évitant l’hagiographie. C’est ainsi qu’à juste titre Alonso pointe que, chez Bolivar, la soif de liberté s’arrête aux descendants d’Espagnols entre concerne aucunement les natifs. Comme toujours la série sait dénicher les évènements et personnalités dignes d’intérêt (la Conspiración Septembrina et Manuela Sáenz), tout en les intégrant habilement dans un récit riche en péripétie. Outre les clins d’œil réussis à Barry Lindon (cette saison est décidément très cinéphile), la mise en scène sait mettre en valeur les superbes costumes et sites de tournage, tout en évitant les effets spéciaux contreproductifs. Cependant on regrettera l’introduction de l’homme constituant un point fixe dans le Temps, hors sujet ici et très pompé sur le Jack Harkness de Doctor Who et Torchwood. L’énième retour au Siècle d’or, certes déclinant, suscite forcément moins de curiosité tant cette époque a déjà été parcourue en long et en large. L’absence de la pétillante relation entre Amelia et Lope de Vega se fait également ressentir, tandis que l’on note que décidément Lola n’est toujours pas devenue membre à part entière de la Patrouille. La mise en scène n’en demeure pas moins là aussi d’une rare élégance, tandis que l’on enregistre avec plaisir le retour du trop rare Velázquez (l’un des coups de génie de la série), aussi drôle qu’émouvant quand il évoque Juan de Pareja. Le tronçon contemporain suscite des sentiments davantage mitigés. Les tentatives d’attentat à la 24h Chrono nous laissent de marbre dans le cadre de la présente série et Elena n’est pas le personnage nous captivant le plus. L’infiltration de Bosco évoque beaucoup celle de Susana Torres en saison 1, nous serions très surpris si Salvador n’avait pas tout de suite compris de quoi il retournait. Le récit vaut néanmoins pour l’émouvant parallèle établi entre le triste sort des Morisques et les réfugiés faisant aujourd’hui l’actualité, mais aussi avec les drames humanitaires du passé. Tout juste pointera-t-on qu’il n’était pas nécessaire de le souligner aussi explicitement dans les dialogues entre Lola et Ernesto, nous avions compris. Malgré les quelques réserves qu’il suscite, l’opus de regarde avec un plaisir certain et semble indiquer que le Ministère du Temps sait conserver son intérêt en dépit de son nouveau paradigme. Anecdotes :
Date de diffusion : 16 octobre 2017 Epoque visitée : 1894, La Verbena de la Paloma Résumé : Pour ses vacances, Angustias décide de retourner dans son époque afin de réaliser un vieux rêve : assister à la première de La Verbena de la Paloma, à Madrid. Mais elle découvre que l’annulation du spectacle est annoncée ! En compagnie de Lola et de Pacino, elle n'a que quatre jours pour s'intégrer à la distribution et remettre sur de bons rails la production de cette œuvre majeure de la Zarzuela chica. Pendant ce temps, Alonso tente d’interroger Arteche, l'agent immortel de l'Ange Exterminateur. Critique : Avec cet épisode léger et chantant, largement humoristique pour son segment principal, El Ministerio del Tiempo s’offre ne appréciable respiration avant que ne survienne le prévisible affrontement final. On l’apprécie d’autant plus que le récit revêt une agréable saveur de madeleine, tant on y renoue avec la série des deux premières saisons, loin des évolutions par toujours convaincantes (à nos yeux) caractérisant l’actuelle. Ainsi le très divertissant argument principal se voit-il totalement exempt des interventions des sociétés secrètes concurrentes du Ministère, ce qui permet d’enfin dédier tout l’espace à l’Histoire et aux péripéties du jour, sans interférences. Par ailleurs au sein d’une saison très manifestement dédiée à internationaliser le programme (avec d’ailleurs des résultats souvent intéressants), on s’en tient ici à un double sujet purement espagnol. L’épisode autorise ainsi un joli panorama sur le fourmillement intellectuel et artistique madrilène de la fin du XIXe siècle. Soit un courant peu connu en France, où l’on a une vision souvent très crépusculaire de l’Histoire d’Espagne concernant cette époque effectivement troublée. L’opération s’effectue selon la meilleure tradition de la série, jamais de manière didactique, mais à travers de plaisantes rencontres et des dialogues pétillants. Avec un véritable plaisir, on y croise ainsi le compositeur Tomás Bretón, la cantatrice Luisa Campos ou les écrivains Benito Pérez Galdós et José Echegaray (Prix Nobel de littérature en 1904), entre autres. L’ensemble ne se contente d’ailleurs pas d’une simple galerie de portrait mais en profite aussi pour converser sur l’opposition entre art populaire ou élitiste, à travers l’opposition opéra / zarzuela. Car, si l’épisode ne comporte pas tout à fait assez de plages chantées pour être réellement qualifié de musical, il nous immerge dans la bulle stress que constituent les ultimes préparatifs et la première d’un spectacle. Entre problèmes financiers, matériels et ‘ego, notre trio va de voir se débattre comme jamais pour sauver la journée, au fil d’un vaudeville prenant lui-même astucieusement des allures de zarzuela chica (genre typiquement espagnol, à la tonalité dramatique plus marquée que chez l’opérette d’Offenbach). Le clou de spectacle demeure évidemment la performance scénique, avec des acteurs souvent choisis pour leur double carrière de chanteur, à commencer par la formidable Macarena García. Les autres font au moins preuve d’une énergie communicative ! Le choix du Real Coliseo permet de reproduire avec précision les conditions de représentation de l’époque. Si on apprécie qu’Angutias puisse enfin s’extraire cette saison de son rôle de fidèle secrétaire, on remarque que la nouvelle Patrouille Pacino/Alonso/Lola n’aura décidément guère eu l’occasion de se mettre en place. Malgré le talent de l’interprétation, la confrontation, puis le rapprochement entre Alonso et Arteche demeure davantage anecdotique. D’autant que la convergence avec le Jack Harkness de la BBC continue à parasiter l’ensemble. Mais ces évènements (idem pour Marta) présentent au moins l’intérêt de préparer efficacement le décor du probable affrontement final entre le Ministère, l’Ange Exterminateur et les Enfants de Padilla. Anecdotes :
Date de diffusion : 25 octobre 2017 Epoque visitée : 1976, Adolfo Suárez Résumé : Le Sous-secrétaire apprend qu’en 1976 Adolfo Suárez ne compte plus parmi les candidats à la Présidence du Gouvernement. Cet évènement met en péril le bon déroulement de la Transition postfranquiste. Salvador envoie la Patrouille sauver la démocratie espagnole, d’autant que Suárez a été son propre mentor au sein du Ministère. L’Ange Exterminateur tire les ficelles du complot, après s’être emparé d’Elena. Une confrontation décisive en découle entre le Ministère et ses deux rivaux. De son côté Lola se rend en 2010, afin de se confronter à sa version alternative. Critique : A l’occasion de son avant dernier épisode, El Ministerio del Tiempo retombee malheureusement dans les travers de cette saison 3. Fondamentalement, la partie historique se voit derechef sacrifiée aux histoires de sociétés secrètes, ou aux parcours individuels des agents du Ministère. Or l’intérêt de ces deux derniers éléments demeure inégal. La rencontre des deux Lola permet de finir de cerner le parcours du personnage, mais intervient bien trop tard dans la saison et nous permet de retrouver l’excellente Natalia Millán. Cette problématique aurait dû être réglée depuis longtemps et l’épatante Lola de Macarena Garcia être pleinement intégrée à la Patrouille, au lieu de n’en demeurer qu’un membre intermittent et périphérique. Même en cet vante dernier épisode, l’aventure principale se déroule sans elle. En plus la coexistence de lignes temporelles alternatives semble indiquer une certaine immuabilité du Temps, ce qui est contradictoire avec l’existence du Ministère. Le triomphe du Ministère a le mérite d’apporter une conclusion claire et définitive à cet arc narratif parfois envahissant vis-à-vis du volet historique de la série. La soudaine double résolution du conflit suscite un effet de choc et se montre astucieuse, se basant notamment sur le caractère orgueilleux du chef de l’Ange Exterminateur. Toutefois le plein succès de l’entreprise suppose que Pacino devienne un traitre et la victime de son camarade Alonso, ce que l’on ne croit pas un seul instant. Dès lors, la chute résulte pour le moins prévisible, même s’il faut reconnaître que la saison a intelligemment pavé le terrain en multipliant les crises de loyauté. On comprend qu’à travers l’Ange Exterminateur et les Enfants de Padilla, Olivares ait voulu stigmatiser deux approches de l’Histoire espagnole, l’une l’adorant sans réserve jusqu’à vouloir la figer, et l’autre au contraire la reniant sans mesure. Mais le paradoxe de cette saison reste que cette critique de deux approches extrémistes du Passé ait entrainé la série à consacrer moins d’espace à ce dernier. Ainsi, dans l’épisode du jour, on se réjouit qu’El Ministerio del Tiempo aborde le sujet fondamental pour l’Espagne contemporaine que constitue la Transition démocratique. Mais l’impression de survol perdure, Suárez apparaissant comme le prétexte de l’intrigue au lieu d’en former le sujet. Anecdotes :
Date de diffusion : 01 novembre 2017 Epoque visitée : 1966, El Ministerio del Tiempo sur TVE Résumé : Après avoir triomphé de ses ennemis, le Ministère est effaré quand il découvre qu’en 1966 TVE est en train de réaliser une série télévisée révélant les véritables aventures vécues par la Patrouille ! De plus ce projet compromet l’existence d’un grand succès de TVE, Historias para no dormir. Lola, Pacino et Alonso se rendent sur le tournage, afin de déterminer qui est à l’origine de la fuite. A leur retour, ils ont la surprise de découvrir que tout a changé au Ministère, subitement transformé en agence de voyages temporels ! Un même ennemi cupide se dissimule derrière ces deux complots. Critique : A l’instar toutes proportions gardées, de Cauchemar en fin de saison 4, Buffy contre les Vampires, Entre dos tiempos permet au Ministère du Temps de conclure sa trajectoire par un épisode décalé de fort bonne facture, après avoir conclu les différents arcs narratifs de la saison. Toutefois, au lieu d’opter pour l’onirisme psychanalytique, la série va ici opter pour un savoureux méta récit. En manière la plus immédiate, cela concerne le premier volet de cette aventure en deux participe sans la doute la plus divertissante, autour de la série alternative de la TVE franquiste. Plusieurs niveaux d’humour se croient avec bonheur comme les clins d’œil destinés aux fans, les fameux Ministéricos portant sur les riches heures de la série (recréation du pilote) ou sur le parcours des ses interprètes (jeune Jaime Blanch alors débutant, parents de Cayetana Guillén Cuervo…). Un vrai festival en effet miroir, sur un mode assez similaire aux X-Files alternatifs de l’épisode Hollywood. Le récit revêtira également une saveur nostalgique pour les amateurs de la TVE des Sixties, public espagnol ou visiteurs estivaux. Le regard porté sur cette télévision se montre aussi amusé que nostalgique, avec un bel hommage rendu à la très hitchcockienne anthologie Historias para no dormir et à son créateur Narciso Ibáñez Serrador, figure historique de TVE. Mais l’ambition de l’épisode ne s’arrête pas là, car il va se servir du prisme de TVE pour mettre en relief la mise sous tutelle de la création télévisuelle par un Etat franquiste y voyant avant tout un moyen de propagande. A cet égard il s’avère très pertinent découvrir nos héros devenus scénaristes provoquer la fin de la fausse série en y insérant uniquement les vrais opus les moins à la gloire de l’Espagne. Même en une décennie relativement plus douce que les précédentes, le régime laisse ainsi transparaître le maintien de sa véritable nature. El Ministerio del Tiempo retrouve ci sa meilleure tradition, l’évocation d’une époque à travers une plaisante aventure. Le second volet d’Entre dos tiempos, autour du Ministère transformé en une agence de voyage temporelle suscite un peu plus de réserve. L’aspect historique de la série s’y voit en effet réduit pour l’essentiel à une chasse à l’homme à la Comte Zaroff assez baroque et superfétatoire. L’évènement de la première ouverture d’une Porte donnant sur le Futur nous semble également aller à contre-courant de cette précieuse spécificité du programme. Le segment retrouve toutefois des couleurs grâce à Ureña, fort gouleyant antagoniste du jour. Interprété avec panache par Luis Larrodera (populaire figure de la télévision espagnole contemporaine), industrieux et cynique, il constitue astucieusement l’incarnation même de ce qu’a toujours combattu l’Histoire : la manipulation cupide et cynique de l’Histoire. Il aurait certainement mérité de devenir un adversaire récurrent et suscite ainsi des regrets quant aux tellement moins savoureux dirigeants de ces sociétés secrètes doctrinaires caractérisant la saison. Tel quel, cet épisode choral et original forme une belle conclusion pour cette série de haut vol. Anecdotes :
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Présentation
A Madrid, le Palais de la Duchesse de Sueca abrite l’institution la plus secrète de l’état espagnol : le Ministère du Temps, fondé en 1491 par Isabelle la Catholique. Connu seulement du Roi, du Président du Gouvernement (dont il dépend directement) et d’une poignée de collaborateurs triés sur le volet, le Ministère a la lourde charge de veiller à la préservation de l’Histoire de l’Espagne et donc du monde actuel. En effet, le public ignore qu’il existe des Portes ouvrant sur le Passé, franchissables dans les deux sens. Des individus mal intentionnés les utilisent régulièrement afin de détourner l’Histoire à leur profit. Le Ministère a formé plusieurs patrouilles chargées de contrer les comploteurs à travers le Temps. Ces équipes se composent d’agents contemporains, mais aussi d’individus recrutés lors d’expéditions dans le passé, en provenance d’époques très variées. La série va narrer les aventures mouvementées vécues par l’une d’entre elles, composée de trois agents récemment incorporés et ne tardant pas à s’illustrer. Chef du groupe, Amelia, issue de la haute bourgeoise barcelonaise et l’une des premières femmes universitaires espagnoles à la fin du XIXème siècle, est une surdouée dotée d’une mémoire photographique. En provenance de 1570, Alonso, membre des Tercios, l’élite de l’armée espagnole du Siècle d’Or, est un spécialiste en stratégie militaire et en recours à la manière forte. Infirmier contemporain, Julián brille par son courage intrépide et le peu d’importance qu’il accorde à sa propre vie, car traumatisé par la mort de sa femme lors d’un accident de la route. Tous trois doivent obéir à leurs supérieurs, Ernesto et l’énigmatique Irène les ayant recrutés, mais aussi rendre compte aux représentants du Gouvernement. Il faut dire que la menace s’est accrue depuis qu’une agente renégate, Lola, monnaye à prix d’or les secrets des Portes. Mais les agents doivent eux-mêmes veiller à résister à des tentations personnelles. Diffusée par la première chaîne publique espagnole (Televisión Española, TVE) de février à avril 2015 et initialement prévue pour une unique salve de six téléfilms de 70 minutes, El Ministerio del Tiempo connut un écho inattendu. Si l’audimat demeure simplement de bonne tenue (2,5 millions de spectateurs en moyenne), les passionnés surnommés les Ministericos, se montrent très actifs sur les réseaux sociaux et la critique salue unanimement le succès de la série. La TVE s’insère d’ailleurs dans le modernisme en relayant le mouvement par un site dynamique, La Puerta del Tiempo. Fin mars 2015, les Ministericos ont la satisfaction d’apprendre que la commande d’une deuxième saison, avec treize nouvelles aventures du trio vedette. De fait, El Ministerio del Tiempo se situe aux avant-postes d’un mouvement voyant une profusion d’excellentes séries être produites en Espagne, mais aussi dans les différents pays européens, notamment propulsées par le secteur public. TVE, aux productions souvent de qualité, mais traditionnellement assez patrimoniales, a ainsi récemment diffusé Amar en tiempos revueltos (2005-2012), élégant feuilleton sentimental prenant place durant la Guerre Civile et le Franquisme, Los Misterios de Laura (2009-2014), série policière adaptée dans plusieurs pays, y compris aux USA par NBC, ou encore Isabel (2012-2014), fastueuse chronique, en rien académique, du règne fondateur de la Reine Catholique. Isabel aura d’ailleurs le même showrunner que El Ministerio del Tiempo, Javier Olivares, et cet historien de formation organisera bien entendu un crossover entre les deux programmes. Mais, à partir d’un sujet propice à l’aventure (et présentant quelques similitudes avec une série comme Stargate SG-1), le Ministère va développer un intérêt propre. Installer une administration gestionnaire du voyage temporel et composer une équipe de personnes provenant d’époques différentes se montre ainsi original. Surtout, Olivares va introduire un virage à 180° vis-à-vis des séries historiques classiques de TVE, souvent de qualité, mais au ton très pédagogique, parfois déclamatoire, où le discours prédomine largement sur l’action. Le Ministère est ainsi pensé avant tout comme un divertissement, dans lequel les éléments d’analyses historiques ou sociales demeurent seulement en filagramme de péripéties dynamiques. L’auteur ne disserte pas sur le Siècle d’Or ou le Franquisme, mais les expose au travers de l’aventure vécue. Si la narration demeure irréprochable sur le plan historique, elle ne détaille pas cet aspect par le menu, se limitant à un survol permettant d’intégrer ke public ne disposant que de connaissances communes de l’histoire nationale. Parfois irrévérencieux, le récit n’hésite pas à jouer la carte de l’humour anachronique (notamment via les relations entre les héros) et à incorporer des éléments de Pop culture au sein de dialogues aux antipodes du ton sentencieux jadis privilégié. Ce ton volontiers léger et alerte se retrouve également dans le volet Science-fiction, où toutes les thématiques de paradoxes temporels complexes se voient promptement évacuées, au profit d’une fantaisie de chaque instant, à la fraicheur et à la bonne humeur communicative. Tout comme il délaisse un récit historique élitiste et envahissant, El Ministerio del Tiempo refuse le carcan d’une Science fiction trop technique et structurée, pour au contraire laisser la part belle à l’Aventure. De ce double point de vue, le britannique Doctor Who représente un évident modèle (le Ministère est d’ailleurs créé par Isabelle, tout comme l’Institut Torchwood l’est par Victoria). L’influence du célèbre roman Les Voies d’Anubis, de Tim Powers, se montre également perceptible, de même que celle de la Tour Sombre de Stephen King, avec des Portes spatio-temporelles assez similaires. Amateurs d’Histoire et/ou de voyages dans le Temps sont donc appelés à avant tout se divertir, au long des ces pérégrinations mettant en scènes des périodes, évènements ou figures suffisamment connus pour également s’adresser au public étranger. Olivares demeure par contre fidèle à la tradition de la TVE en ce qui concerne le soin scrupuleux apporté aux reconstitutions d’époque, pour les costumes comme pour les décors et les extérieurs. La série s’avère fort plaisante à l’œil : sans bénéficier d’un budget pharaonique, elle se situe amplement dans les standards des programmes européens. Les intrigues se montrent astucieuses et suffisamment variées d’un épisode à l’autre pour éviter toute routine, tandis que la connivence des trois comédiens principaux apporte une chaleur humaine supplémentaire, très espagnole, à un trio de protagonistes particulièrement attachant. Le portrait parfois décoiffant des personnalités historiques rencontrées s’accompagne d’une véritable écriture de chacun des membres du Ministère, tous finement caractérisés et interprétés avec saveur. Au cours de cette première saison, en compagnie d’Amelia, Alonso et Julián, nous allons contrer un complot de l’armée napoléonienne pour remporter la Guerre d’Indépendance, sauver Lope de Vega du désastre de l’Invincible Armada, empêcher les Nazis de s’emparer des Portes et que Franco se joigne à la guerre d’Hitler, extirper le découvreur des Portes des griffes de l’Inquisition ou rencontrer Lorca, Dalí et Buñuel encore étudiants, entre autres aventures ! |