6- Au service secret de Sa Majesté / On Her Majesty’s Secret Service 1969

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Denis
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6- Au service secret de Sa Majesté / On Her Majesty’s Secret Service 1969

Messagepar Denis » jeu. déc. 29, 2016 9:14 pm

°°
Je dois dire que j’ai révisé mon jugement. Ce film m’a profondément ennuyé la plupart du temps. Et je comprends qu’à l’époque, juste après le somptueux On ne vit que deux fois, il est suscité une désaffection. Ce n’est pas George Lazenby qui est en cause (bien qu'il n'arrive pas à la cheville de Sean Connery), mais le script en lui-même. Une bonne scène d’ouverture, mais elle est bizarrement filmée (c’est le cas de nombreux scènes d’action ou les inserts studio sont choquantes).

OHMSS dure 2h20 et personne, même pas mon fils grand amateur de la série, n’a tenu jusqu’au bout ! C’est lent, bavard, ennuyeux et sans relief.
Côté positif : Telly Savalas – quatre ans avant Kojak - qui efface complètement George Lazenby. On reconnaît parfaitement ses intonations (France 4 permettait de suivre le film en VO) et le meilleur passage est la scène Blofeld/Tracy avant l’attaque où on assiste à un imaginaire échange entre Kojak et Mrs Peel. Diana Rigg est malheureusement absente d’une grosse partie du film.
Chapeau melon et bottes de cuir est un témoignage historique et un refuge de valeurs dans une Grande-Bretagne devenue excessivement multiculturelle dont les traditions tendent à se liquéfier en magma insipide (critique de Bright Horizon).

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séribibi
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Re: 6- Au service secret de Sa Majesté / On Her Majesty’s Secret Service 1969

Messagepar séribibi » jeu. déc. 29, 2016 10:51 pm

Une vieille critique que j'avais faite en août 2012 :

Image

Dans l'historique des adaptations cinématographiques de James Bond, OHMSS fait un peu office de "vilain petit canard".

Reçu à l'époque trés tièdement, loin de remporter le succés des précédents opus avec Sean Connery - pour beaucoup le meilleur interprète de James Bond - , cette réorientation de la franchise (au sens cinématographique s'entend) fut à sa sortie vivement critiquée par les puristes (mais aussi par le spectateur lambda)... A tel point que le film restera toujours le grand oublié des rediffusions en salles (et télévisées) et n'évitera de sombrer dans l'oubli le plus total que par l'avènement de la VHS, au début des 80s (époque bénie des vidéoclubs). Il faut néanmoins préciser que les VHS locatives d'OHMSS étaient, à l'époque, plus rares que celles des autres JB.
Cela en dit long sur le désamour du public et de la presse pour ce film, qui semble avoir retrouvé avec les decennies ses lettres de noblesse...

En principales critiques de cette 6ème aventure, il fut reproché et d'une la prestation fadasse et approximative de George Lazenby - plus encore en comparaison avec son prédécesseur - , et de deux la structure et le rythme-même du film, jugés déconcertants et peu entraînants, et ne ressemblant aucunement à ceux des "VRAIS" Bond.
Des réflexions à double-tranchant et parfois assez peu cohérentes, voire injustes, puisque le jeu de Lazenby, plutôt subtil il faut bien le dire, n'est en aucun cas "honteux" ni comparable à ce que l'on pouvait entendre ici et là (souvent avec peu de justifications), et les vives critiques dont il fit l'attaque à l'époque -et encore de nos jours- semblent plus souvent relever du "rentre-dedans" gratuit et d'un parti-pris assez réducteur face à son prédécésseur, que d'une réelle appréciation sur son jeu d'acteur.

C'est un peu dommage car l'adoration, on le sait bien, conduit à l'aveuglement et, si certains spectateurs avaient pu davantage accepter - en l'absence totale de toute influence "Seanienne" - le côté humain et le jeu tout en retenue de ce Bond, ils auraient sans doute mieux remarqué la finesse d'interprétation de Lazenby, notamment lors de plusieurs séquences.

Quant au rythme étrange (ce qui est vrai -mais ce qui en fait aussi sa grandeur et son originalité), qui se permet jusqu'à 50 minutes sans la moindre "action", et la structure si atypique du film, jugés comme inadéquates pour un Bond, là aussi cela reste trés paradoxal, OHMSS étant -de source- l'une des adaptations cinématographiques Bondiennes les plus fidèles au roman de Fleming (paru 6 ans auparavant).

Atypique, le film l'est sans doute ne serait-ce que par le tempo assez inhabituel qu'Hunt lui octroie (4 parties distinctes, dont un "ventre mou" d'une cinquantaine de minutes), et l'absence de gadgets, ce qui aura déconcerté le public.
C'est qu'ici, Peter Hunt ne se gène pas : afin sans doute de mieux retranscrire le roman, et l'écriture du roman "en général" - avec ce que cela comporte/suppose de passages descriptifs et d'à-côtés -, il prend tout son temps pour nous présenter les décors, les personnages ( Les Alpes Suisses qui n'auront jamais été aussi bien filmées ; Le père de Tracy ; les jeunes filles pensionnaires de la clinique -ce qui nous donne droit à une pittoresque -mais un peu trop longue- scène de repas où Bond se fait passer pour un généalogiste, sous le regard autoritaire d'Irma Bunt, impayable bras-droit de Blofeld...).
Et puis, il faut laisser au public le temps de se familiariser avec ce nouveau personnage...
Dans le film, la présentation de cet "inconnu" est tout d'abord judicieusement amenée par une découverte progressive (mais rapide) de son physique (un peu comme Sean Connery dans Dr No, lors de la scène du Casino) : de gros plans sur ses lèvres, une clope au bec, puis sa silhouette en plan éloigné
Néanmoins, trés vite, nous découvrons son visage, dés lors qu'il aura sauvé Teresa/Tracy de la noyade... C'est à cette même occasion que celui-ci sort sa célèbre tirade ("My name is..."), réplique qui sera d'ailleurs malicieusement contredite dans la foulée par le fameux clin d'oeil aux spectateurs : "Ca ne serait jamais arrivé à l'autre/"This never happened to the other fellow"...
Deux répliques quasi-consécutives et, surtout, s'opposant, et semblant n'être là que pour mieux nous dire : "Oui, vous êtes bien dans un James Bond, mais ce que vous allez voir va être un peu différent de ce que vous connaissiez et avez vu jusque-là".

Différent, oui. Le Bond-Lazenby est plus terre-à-terre, plus fragile que celui du grand Sean.
Le réalisateur semble mettre "à hauteur d'homme" tous les éléments de son film : Bond a une sensibilité ; Q intervient un peu différemment qu'à l'accoutumée ; Tracy n'est pas une Bond-girl au sens strict, dans la mesure où elle apparaît relativement peu et où elle ne participe pas vraiment aux péripéties de Bond, ni même ne l'aide dans sa mission (sauf à la fin) ; le repaire du méchant n'est pas une structure spaciale ou sous la mer, ni un complexe démesuré high tech. Non : il s'agit d'une simple plate-forme (Le Piz Gloria in real) située dans les Alpes Suisses (magnifiquement filmées).
De "grande méchante", il n'y en a guère dans le film, si l'on excepte l'excellente Irma Bunt... Quant aux futures complices de Blofeld, il ne s'agit-là que de victimes "malgré elles" et qui serviront Blofeld à leur insu.
D'ailleurs, Blofeld lui-même apparaît comme un vilain "normalisé", beaucoup plus réaliste que d'accoutumée (nous sommes loin du côté volontairement archétypal d'un Blofeld/ Pleasence).
A ce titre, je pense que Telly Savalas reste son meilleur interprète : il s'agit-là d'un Blofeld "à visage humain", suave mais manipulateur, qui a perdu de sa grandeur, souvent obligé d'intervenir lui-même car pas assez "puissant", mégalomane mais humain et faillible, et dont les désirs habituels de domination du monde ne sont ici réduits qu'à un simple chantage à l'amnistie. Car, en fin de compte, c'est ce que souhaite Blofeld : qu'on lui foute la paix ( (! ce qui sous entend qu'il décide de se retirer de la criminalité) et, accessoirement, qu'on lui reconnaisse un titre de noblesse.

A ce sujet, une séquence reste trés éloquente : au réveil de Bond (qui s'est fait assommer suite à un piège tendu), Blofeld, déambulant le plus naturellement du monde, se présente à lui, d'un ton amusé et décontracté : "Bonjour double zéro 7 !", alors qu'en temps habituel nous aurions eu droit à une réplique revancharde et condescendante, à la Pleasence ou à la Lonsdale.
Un autre échange est également révélateur ; à un moment du film, Bond dit à Blofeld "Oui, ..un virus ayant pour effet de rendre stérile toute vie végétale...et puis aprés, ce sera au tour les humains"... auquel cas Blofeld lui répond : "Nous n'en sommes pas là, et avant de penser à cela, je crois que votre gouvernement aura eu le bon sens et la sagesse de réagir de la façon intelligente et la plus adaptée".
Réaction et remarque en définitive pleines de bon sens et ramenant à un méchant censé, réfléchi, faillible, ce qui, paradoxalement, le rend plus inquiétant dans ses moments de démesure (lorsqu'il fait assassiner le plus froidement du monde le complice de l'agent, ou qu'il tue la femme de Bond par simple vengeance).

Telly Savalas est excellent dans ce rôle, et, selon moi, le meilleur Blofeld à l'écran.

L'intrigue en elle-même est relativement simple, mais le scénario -plein de ramifications et d'idées- qui s'inspire du livre, est bien mené, et assez peu éliptique contrairement à d'autres films de la saga : en gros, Bond, destitué de sa mission par M, part incognito à la recherche de Blofeld, aidé par Draco, père d'une étrange inconnue dont il tombe amoureux, et patron de la pègre Corse (néanmoins trés sympathique). Contre protection de sa fille, d'un équilibre psycho-affectif précaire, il donne à 007 les infos qu'il voulait savoir : Blofeld officie sous couverture dans une plate-forme qui soigne les allergies des jeunes filles ; ce repaire cache en fait tout un complot de plus grande envergure où celui-ci pourra exercer son chantage : obtenir l'amnistie et l'arrêt des poursuites contre lui sans quoi il lance sa menace de virus à exécution.
Bond trouvera un superfuge pour se rendre à ce centre et contrecarrer Blofeld.

Le film se divise en 4 parties assez distinctes :

Aprés une première partie où Bond enquète sur Tracy- càd jusqu'à la confrontation avec son père- (partie courte mais trés tendue, où l'on remarquera par ailleurs les qualités de combattant de l'acteur), le réalisateur opte pour un tempo délibérément plus lent (et qui pourra surprendre), où les scènes romantiques (néanmoins obligatoires pour l'identification et l'effet 'unhappy-end') précèderont l'arrivée/l'investigation de Bond dans la plate-forme/laboratoire de Blofeld, alors qu'il se fait passer pour un généalogiste (parties 2 et 3).
A ce passage, un peu long (une cinquantaine de minutes, il ne faut pas chercher de véritable action : séquences romantiques, Bond officiant sous couverture en tant que généalogiste une fois dans la plate-forme, ce qui donne droit à une rencontre avec un Blofeld pas encore "démasqué" et son impressionnant bras droit Irma, ainsi qu'à une pléïade de jolies patientes venues d'horizon différentes...), mais trés bien écrit, suivra la découverte du pot-aux-roses par Blofeld (l'imposture de Bond) puis, jusqu'au triste final, une traque quasiment ininterrompue d'environ 45 minutes.
Le réalisateur nous offrira au passage une séquence de poursuite en ski qui, malgré quelques faux-raccords ou transparences visibles (et apparemment tournée à plusieurs moments de la journée, alors que tout est censé se passer la nuit), s'avère, par son surdécoupage, une des plus vibrantes, tendue et énergique jamais réalisée, soutenue par le sublime score de John Barry.

Quant au final, fait unique de la série, le personnage se mariera mais sera contraint à un "divorce forcé" des plus tragiques.
D'ailleurs, la qualité du dernier plan fait, selon moi, écho à la justesse d'interprétation du comédien car, contrairement à nombre de personnes, je ne trouve pas que le point faible du film réside dans l'interprétation de Lazenby, mais plutôt dans le personnage de Tracy.
Diana Rigg joue trés bien, la question n'est pas là : je trouve simplement que son temps de présence à l'écran, trop réduit, et, de ce fait, la caractérisation de son personnage, un rien superficielle (on ne saura finalement pas grand chose d'elle), restera un peu en décalage avec les sentiments que Bond lui porte, amenant un peu trop rapidement celui-ci à ce désir de mariage.
Malgré tout cela, ce plan final reste bouleversant et des plus crédibles, pas tant à cause du sort réservé à Tracy que de la manière confondante dont Lazenby le joue, ici à fleur de peau pour exprimer sa tristesse, tout en émotion contenue.
La dernière réplique que Bond lancera au policier est superbe.

Cette scène résonne d'ailleurs comme un symbole : Il ne nous est pas simplement montré que Bond ne pourra pas profiter de son bonheur, il nous est aussi dit en filigrane que celui-ci n'a pas droit au bonheur ni à une vie "normale" et que, si mariage il y a, ça reste ad vitam aeternam avec le MI6 et la Grande-Bretagne.
Une fin qui a donc des résonnances tragiques beaucoup plus larges.

Aprés cela, on comprend mieux que, comparer Sean Connery à George Lazenby est un peu fortuit. Sean n'aurait pas pu apparaître dans cette aventure, tout au moins telle qu'elle est présentée.
S'il avait dû la faire, l'orientation aurait été sans doute trés différente.
Le Bond-Connery est un personnage trop "animal", trop machiste, si bien qu'une séquence comme la séquence finale n'aurait pas pu résonner de la même façon.

En conclusion, un excellent Bond, trés noir, au rythme particulier, revenant aux sources du personnage de Fleming, atypique dans la franchise cinématographique et donc forcément passionnant, qui divisera le public, mais trés bien écrit et interprété (Lazenby, Telly Savalas, Ilse Steppat, Gabriele Ferzetti), atmosphérique, bien filmé, et magnifié par le score de John Barry, ici à son sommet.
On regrettera simplement la semi-parodie qui suivra ("Les diamants sont éternels"), réalisée par Guy Hamilton, et qui fera fi de l'aventure mise en scène par Peter Hunt en en prenant le contrepied total, reléguant le personnage de Blofeld à un simple rôle de "bouffon", et ne faisant plus état de la tragédie du film précédent, ici complètement oubliée/ignorée.
Dommage.


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