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En 2005, le festival de Dinard consacrait une large partie de son programme à Chapeau Melon et Bottes de Cuir. Le fan club français Steed&Co était présent. À cette occasion, la présidente du fan club, Laure Sermini, a rédigé un article pour le magazine du festival du film britannique de Dinard. Un article intitulé : Chapeau Melon et Bottes de Cuir ou l'histoire d'une passion.

Ma rencontre avec la série

Les débuts de la série

L'âge d'or

Le retour des Avengers

Conclusion


Ma rencontre avec la série

Le mardi 4 avril 1967 à 20h50 sur la 2e chaîne, dans un épisode appelé Meurtre par téléphone surgissait sur les écrans français un bien étrange couple : John Steed et Emma Peel.

Lui gentleman british typique jusqu’au bout du parapluie, elle complètement atypique, moderne et indépendante. Tous deux chargés de résoudre des enquêtes très particulières pour le compte des services secrets britanniques, bref un couple bien différent de ceux qui nous entourent.

C’est ainsi que j’ai fait connaissance à 12 ans d’une série qui, malgré le temps, n’a pas pris une ride et est toujours rediffusée régulièrement sur les TV du monde entier : The Avengers, présentée en France sous le nom de Chapeau Melon et Bottes de Cuir.

À une époque de sa vie où l’on se cherche, cette série m’a profondément marquée à travers le personnage d’Emma, si différent de toutes les femmes qui m’entouraient – mères de familles au foyer – ou que l’on pouvait voir sur l’écran de la boîte magique qu’était alors la télévision encore à ses débuts : des secrétaires passives et tremblantes.

Mais si cet impact psychologique explique le souvenir indélibile d’une première rencontre il ne suffit pas à expliquer mon intérêt constant depuis, ni surtout cet impact mondial qui fait de Chapeau Melon et Bottes de Cuir l’une des séries TV les plus connues au monde, et qui a fait de John Steed le symbole de la Grande-Bretagne au même titre que Big Ben et, excusez du peu, que sa majesté la reine Elisabeth elle-même (il suffit de voir les couvertures de manuel d’anglais ou d’ouvrages et magazines consacrés à la GB illustrées des photos ou silhouettes des trois).

Alors, qu’y a t-il donc de particulier dans cette œuvre qui est devenue au fils du temps un des chefs-d’œuvre de l’art télévisuel, ce 8e art depuis peu officiellement reconnu ?

Ce qui me plait avant tout dans la série c’est son ton : de l’humour, toujours de l’humour, même dans les situations les plus dramatiques, son côté imtemporel lié au personnage du « passé » qu’est John Steed au volant de ses vieilles voitures de collection et celui du « futur » qu’est toujours Emma Peel, symbole de l’émancipation féminine, sa part d’anticipation au travers de nombreux sujets abordés à l’époque et qui sont aux premiers plans maintenant de nos préoccupations de tous les jours dont principalement la robotisation et le remplacement de l’homme par la machine ainsi que les risques de dérive pour la moindre invention lorsqu’elle tombe entre de mauvaises mains et également son côté romantique grâce à la relation sentimentale esquissée entre Steed et Emma, présente à tout instant mais toujours légère, même lorsqu’elle est à la limite du grivois.

Steed et Emma... Steed et Emma ce sont donc les héros de la meilleure série au monde ?

Oui et non. Oui car ce couple est le symbole de la série dans le monde entier et c’est lui que l’on évoque le plus souvent. Non car ce serait réduire l’œuvre à 51 épisodes alors qu’elle en comporte 187, ce serait ignorer toute l’évolution d’une histoire étonnante et complexe, d’autres héroïnes tout aussi intéressantes, des histoires toujours palpitantes, qu’elles soient policières, d’espionnage, drôles ou de science-fiction.

Et ce serait oublier que Steed, le héros fil rouge de toute l’œuvre puisqu’il participe à 185 des 187 épisodes, n’était à l’origine qu’un faire-valoir.

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Les débuts de la série

En effet pendant 25 ans les téléspectateurs français ont vu sur leurs écrans ce gentleman résoudre les histoires les plus compliquées et dangereuses, accompagné de partenaires successives bien différentes dans l’apparence et le style mais toujours aussi efficaces, sans savoir qu’il existait un « avant Emma » car c’est le 7 janvier 1961 que la série The Avengers débuta sur les écrans britanniques.

The Avengers, un titre qui resta pour les français un mystère durant bien longtemps. Si Chapeau Melon et Bottes de Cuir s’expliquait parfaitement par l’image visuelle du couple vedette découvert chez nous, pourquoi diable ce nom Les Vengeurs que rien n’expliquait.

Pour le grand public français il fallut attendre la sortie du très beau livre de Jean-Luc Putheaud et Alain Carrazé au début des années 90 pour apprendre que ce titre est justifié par la première histoire, Hot Snow ou Neige brûlante, de ce qui à l’origine ne devait être qu’une simple série policière de plus. En effet le véritable héros de la série est un médecin dont la fiancée est assassinée par des trafiquants de drogue pour avoir reçu par erreur une livraison de « neige ». Ce dernier, le docteur Keel, décide de retrouver les assassins et de venger sa compagne défunte, aidé par un mystérieux agent secret venu d'on ne sait où, un certain John Steed. Tout s’explique.

Par la suite, durant 26 épisodes Keel et Steed s’épauleront dans des enquêtes policières assez banales, mais déjà perce un petit quelque chose de spécial dans cette série.

C’est pourquoi lorsque l’acteur principal Ian Hendry décide d’abandonner son rôle pour tenter sa chance au grand écran, les producteurs décident malgré tout de continuer la série en faisant de Steed le personnage principal. Toutefois le système – basé sur des personnages que tout oppose (Keel est un amateur humaniste, Steed un professionnel cynique) mais qui travaillent malgré tout ensemble en formant un tandem victorieux – ayant très bien fonctionné, ils décident de lui trouver un nouveau partenaire. Deux tentatives sont sans suite : une avec un autre docteur, le Dr King (trois épisodes seulement, le personnage n’ayant aucune motivation et l’acteur aucun charisme), une autre avec une jeune chanteuse, Vénus Smith (six épisodes seulement, le numéro musical lié à la profession de cette nouvelle partenaire, par ailleurs trop jeune, limitant beaucoup le cadre des enquêtes). Le troisième essai sera le bon grâce à un concept révolutionnaire à l’époque : adjoindre au héros masculin une femme « femme », Mme Cathy Gale, qui ne sera pas un faire-valoir potiche et tremblant mais une partenaire à part entière, tant dans l’enquête que dans l’action et dans l’humour. Grâce également à la personnalité et au talent de l’actrice retenue : Honor Blackman.

C’est pendant ces 43 épisodes que la série passera de la catégorie « série policière classique » à la catégorie Chapeau Melon et Bottes de Cuir. En effet peu à peu elle se démarque de toutes les autres par son ton très original, son côté féministe d’avant-garde, ses histoires aux thèmes différents (policier simple, contre-espionnage, vengeance contre les héros et apparition du fantastique en particulier avec l’excellent Warlock qui aurait dû être le premier épisode « Cathy Gale » et présenter la rencontre des deux partenaires). Ayant malgré tout peu de moyens, les réalisateurs font des prouesses techniques pour qu’un simple comptoir et quelques billets donnent l’illusion d’une banque. C’est un véritable triomphe. Pour preuve les pubs se vident à l’heure de diffusion.

Et puis coup de tonnerre : Honor Blackman décide de se consacrer au cinéma qui l’appelle avec le rôle de Pussy Galore dans Goldfinger.

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L'âge d'or

Comment poursuivre l’aventure… Est-il possible de trouver une remplaçante aussi charismatique ? Après un essai décevant avec Elisabeth Shepherd, blonde copie un peu plus moderne de Cathy Gale pour le rôle d’Emma Peel (un seul épisode tourné, jamais diffusé), une nouvelle actrice s’impose par son talent et son charisme extraordinaire : Diana Rigg, en osmose immédiate avec son partenaire.

Ici commence ce que l’on appelle « l’Age d’Or » de The Avengers. La série, après une nouvelle saison de 26 épisodes en Noir & Blanc, passe à la couleur (grâce à des fonds américains, la série faisant un tabac là-bas). La nouvelle saison de 24 épisodes brille par ses couleurs, ses costumes (les EmmaPeelers) qui lancèrent une mode toujours actuelle, ses scénarios inventifs et fous, la finesse de sa réalisation… Bref, comme on dit maintenant : « Que du bonheur ».

Et puis catastrophe… Diana Rigg tire sa révérence. Un certain Bond l’appelle à son secours (elle sera la seule Mme James Bond qu’il épousera) dans Au service secret de sa Majesté et elle brûle de retrouver les planches, le théâtre étant sa vraie passion.

On n’arrête pas une série au top de son succès. Il faut donc lancer une nouvelle chasse à la partenaire idéale.

C’est une jeune canadienne de 19 ans qui décroche le rôle de Tara King. Son jeune âge et son inexpérience ne lui permettent pas de s’intégrer immédiatement dans ce monument déjà bien rodé qu’est Chapeau Melon et Bottes de Cuir. C’est alors que Brian Clemens, principal scénariste depuis longtemps et qui est devenu le maître d’œuvre de la série, a une idée de génie : en un week end il écrit un scénario expliquant le départ d’Emma Peel et l’arrivée de Tara, jeune élève agent secret faisant encore ses classes lorsqu’elle est amenée à aider Steed. Ceci permet d’expliquer la faiblesse et les incertitudes du personnage dans les premiers épisodes et d’apprécier son évolution au fur et à mesure des histoires.

C'est sans doute au cours de cette période de 33 épisodes que seront réalisées les histoires les plus délirantes et Tara s’avèrera une remplaçante très valable. Ce n’est donc nullement à cause d’elle que la série s’achève mais du fait des coûts de productions nécessaires pour chaque épisode. Hélas ! nos amis nous quittent à bord d’une fusée spatiale, sous les yeux ébahis de leur chef Mère-Grand.

Fin de l’histoire… Que non…

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Le retour des Avengers

Quelques années plus tard une grande marque de champagne décide de reformer le couple le temps d’un spot publicitaire. L’un des responsables, amateur de la série et conscient de sa popularité en France où elle est toujours rediffusée avec grand succès, propose aux deux acteurs de retenter l’aventure et de relancer la série. Banco. Hélas ! le temps de réunir les fonds (une co-production française, anglaise et canadienne sera nécessaire) Linda est retenue par d’autres contrats. Va-t-on abandonner ? Que non. Nouvelle chasse à la remplaçante.

C’est de nouveau une blonde qui sera l’ultime partenaire de Steed, Purdey (sans nom de famille) qui l’épaulera. Grande nouveauté : le duo devient trio avec l’arrivée d’un partenaire masculin, Mike Gambit. Pourquoi transformer le tandem qui fonctionnait si bien ? Et bien John Steed n’a plus trente ans. Il y aura désormais un autre homme pour courrir après les méchants et surtout pour courtiser l’héroïne, assez jeune pour être la fille de John, ce qui exclut le si apprécié marivaudage entre les deux.

Cette période baptisée The New Avengers – mais toujours appelée chez nous Chapeau Melon et Bottes de Cuir, continuité oblige, même si la nouvelle héroïne préfère les escarpins –, n’a, hélas ! plus l’intemporalité car les histoires et les costumes sont beaucoup plus ancrés dans le réel. On a l’impression qu’on pourrait croiser les personnages dans la rue (à part Steed bien sûr). Il n’y a pas plus de magie, pas même dans les sentiments des personnages. Et si un bon nombre d’épisodes sont tout à fait dignes de la « grande époque » (Le monstre des égoûts, Le baiser de Midas, Le dernier des cybernautes…), certains imposés par la co-production sont bien faibles et ne « fonctionnent »pas malgré de bonnes idées au départ. Cependant la série reste au-dessus de bien des productions de la même époque.

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Conclusion

En conclusion, ce qui fait et fera à tout jamais de Chapeau Melon et Bottes de Cuir une œuvre à part c’est cette touche britannique inimitable.

J’en remercie donc tous ceux qui ont travaillé à sa conception : acteurs, scénaristes, réalisateurs, costumiers, cascadeurs, accessoiristes… Et c’est à celui qui représente à tout jamais l’image de The Avengers, et donc eux tous, que j’adresse mon admiration la plus profonde : MERCI MONSIEUR PATRICK MACNEE !

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©Laure Sermini