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NE VOUS RETOURNEZ PAS

( DON’T LOOK BEHIND YOU)

Tournage : juillet 1963

Diffusion : ITV, 14 décembre 1963 – 13ème Rue, 7 mai 1998

Scénario : Brian Clemens

Réalisation : Peter Hammond

Maurice Good (Man), Kenneth Colley (Young man), Janine Gray (Girl) .

Résumé

Cathy Gale est invitée par Sir Cavalier Resagne, éminent médiéviste, à séjourner un week-end dans sa propriété retirée du Devon. Il a en effet beaucoup apprécié un article de Cathy. Steed l’accompagne pour le trajet, désirant lui montrer sa nouvelle voiture. Ils sont reçus par Ola, la nièce pour le moins lunatique de Sir Cavalier, qui leur explique que l’historien sera en retard au rendez-vous. Une fois Steed reparti, Ola doit brusquement s’absenter, laissant Cathy seule. Survient alors une succession de faits étranges, dont l’apparition nocturne d’un inquiétant jeune homme, qui vont progressivement plonger Cathy dans la plus terrible angoisse. Soudain le responsable se dévoile, il s’agit de Martin Gundmann, un criminel jadis amoureux de Cathy que celle-ci avait séduit pour permettre son arrestation. Devenu fou et évadé de prison il a conçu cette terrible vengeance. Steed apparaît et neutralise Gundmann au moment où ce dernier allait s’en prendre physiquement à Cathy. Steed avait lu dans la presse que Sir Cavalier était à l’étranger, et fait immédiatement le rapprochement avec l’évasion de Gundmann…


CRITIQUES


Estuaire44 17 mars 2008

Ne vous retournez pas permet de vérifier, une fois de plus, que Clemens est toujours particulièrement inspiré lorsqu’il s’agit de plonger ses héroïnes dans les pires situations.

De ce point de vue, l’original fait largement jeu égal avec sa célèbre copie, Le joker. Dès l’instant où Ola quitte Cathy, cette dernière se trouve plongée dans un authentique cauchemar. Elle n’en sortira plus un seul instant, de même que le spectateur. La trame du récit paraît simple mais également parfaitement maîtrisée par un auteur sachant admirablement doser ses effets et la progression dramatique. On apprécie que Steed demeure totalement absent depuis son départ jusqu’à la scène finale. L’immersion dans cet authentique récit d’épouvante se ressent ainsi plus intensément que dans Le joker, où les apparitions de Steed hachent inutilement l’histoire. Si les deux scènes d’introduction paraissent également saisissantes, une autre excellente idée réside dans une fin abrupte et percutante, non lestée d’un tag humoristique hors de propos ici, venant dénaturer l’arrière-goût laissé au spectateur. Clemens s’impose bien dans cet épisode comme un superbe conteur, connaissant à la perfection l’art difficile de susciter la frayeur.

Mais toute cette maîtrise du récit resterait inopérante sans une mise en scène adéquate et là c’est peu dire que nous sommes au spectacle. La caméra très inspirée d’un Peter Hammond à son meilleur niveau sublime réellement les magnifiques décors de Terry Green. Écrasants ou troublants, ceux-ci constituent l’écrin parfait où s’installe l’angoisse, d’autant que les jeux d’ombre et de lumière sont parfaitement évocateurs, malgré une qualité d’image toujours médiocre. La musique de Dankworth renforce elle aussi l’atmosphère étonnamment stressante de l’épisode.

La mise en scène recourt à des méthodes traditionnelles et éprouvées, avec une inspiration proche des films d’épouvante de la Hammer, dont Hammond sait retrancher les effets les plus démonstratifs pour conserver l’essence même de la terreur. Dans cet oppressant huis clos, on retrouve également, avec une quasi perfection, la triple unité du théâtre classique (temps, lieu et action), chose très rare dans la série. On a ainsi réellement l’impression d’assister à une pièce de théâtre, dense et parfaitement construite, dont le point focal serait Cathy Gale. La terreur de celle-ci est dès lors ressentie avec l’intensité propre à ce type de scénographie.

La réalisation, âpre et épurée, ne se contente pas d’utiliser de manière optimale les méthodes sûres, mais n’hésite pas également à innover. C’est ainsi que la séquence illustrant les obsessions de Gundmann reste un incroyable déferlement de violence visuelle, d’une inventivité inouïe. Elle permet de mieux appréhender l’effarante folie du personnage et de mieux saisir les visions traduites par les fameux coups de ciseaux. Ce passage survolté, proche d’un surréalisme à la Dali, reste unique dans la série. La mise en scène demeure imaginative durant tout l’épisode, multipliant les angles de vue saisissants ou les excellentes idées (l’inscription sur le mur, la pendule stoppée, la pomme longuement pelée…) Un feu d’artifice vraiment inoubliable !

On apprécie également vivement la scène de la balade en voiture de Steed et Cathy, à la joie communicative. Les paysages extérieurs (une rareté à l’époque), la pimpante automobile et la musique cette fois entraînante de Dankworth concourent à en faire un moment particulièrement enjoué.

Les personnages secondaires, peu nombreux, sont également composés avec talent et acuité par Clemens.

C’est ainsi que Ola réalise un joli numéro, quoique moins éthéré que celui de son équivalent du Joker. Son pas de deux avec Steed est très plaisant à suivre, surtout quand elle s’amuse avec son parapluie et son chapeau melon ! Malheureusement son départ demeure définitif, on ne sait trop ce qu’elle devient. L’autre Ola semble plus marquante dans le récit.

Il en va tout autrement pour le Jeune Homme, qui bénéficie de l’excellente prestation de Kenneth Colley. Ses scènes semblent plus convaincantes et mieux écrites que celles de son homologue de la saison 5. Son idée du message sur le mur, outre qu’il donne son titre à l’épisode, se révèle particulièrement effrayante ! L’épisode nous évite ses tractations avec Ola, éliminant ainsi une péripétie secondaire pour mieux se consacrer à l’essentiel, les émotions de Cathy Gale.

Gundmann apparaît aussi perdu dans sa folie que Prendergast, mais Maurice Good rend son personnage plus immédiatement menaçant encore. Son histoire débitée en pelant si minutieusement une pomme glace encore plus le sang que le brillant numéro de Jeffrey. L’épisode évite également ici de nous révéler le pot aux roses, ce qui amplifie l’impact de la révélation du personnage.

Le centre de l’épisode demeure cependant bien évidemment Cathy Gale, portée par une Honor Blackman réellement impressionnante. L’atmosphère plus réaliste de la période fait que Cathy Gale semble encore plus effrayée que ne le sera Mrs Peel, aux limites de la pure panique. Le talent de l’actrice et cette violence du sentiment font que le spectateur se sent vraiment en empathie avec Cathy tout au long de l’histoire. Steed apparaît lui très plaisant, bénéficiant de dialogues souvent amusants. On apprécie son apparition soudaine, vécue comme un brusque réveil au moment où le cauchemar devient insoutenable. Néanmoins le personnage demeure périphérique, pour la première fois de la saison.

Mais la suprême habilité de cet épisode consiste à distiller le malaise jusque dans la relation entre Steed et Cathy Gale. On avait observé jusqu’ici un certain renforcement de leur amitié, avec moins de crispation, et plus de sympathie exprimée notamment lors des scènes d’appartement faisant leur apparition. Ce processus était habilement parachevé par la scène de la balade en voiture pouvant faire croire à une amitié sans nuages.

La chute est d’autant plus dure de voir Cathy s’en prendre à Steed avec véhémence, l’accusant d’avoir laissé tramer tout cela. Steed est en effet coutumier de ce genre de manipulation, et ses dénégations, que l’on devine sincères, ne semblent dès lors pas convaincre totalement sa partenaire. De son côté il ne lui offre guère de paroles de réconfort, s’en tenant à un strict professionnalisme et à un humour détaché que l’absence de tag final ne viendra pas démentir. Bien loin des retrouvailles comme toujours fusionnelles entre Mrs Peel et Steed, l’épisode prend fin en laissant nos héros confrontés aux failles retrouvées de leur amitié, Cathy n’est d’ailleurs guère rassérénée ! On est en droit d’estimer ce dénouement plus fort dramatiquement que l’émotion partagée la main dans la main du Joker.

EN BREF : L’épisode n’a pas à rougir de la comparaison avec son célèbre successeur, tant s’en faut. À l’image de Cathy Gale, le spectateur ne sort pas indemne de ce terrifiant voyage dans le domaine de l’épouvante. Ne vous retournez pas demeure le chef-d’œuvre incontestable de cette saison 3 !


VIDÉO


Une rencontre particulièrement inquiétante !


INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES

Tournage


Continuité

o La lumière des spots du studio se reflète dans la vitre de la Roll-Royce (30’40’’) :

 


Détails

o Steed vient d’acquérir une magnifique Lagonda des années 30. Ce n’est toutefois pas la première acquisition de cet amateur de vieilles voitures, car c’est déjà au volant d’une autre Lagonda qu’il arrive à la base militaire de Un traître à Zebra (saison 2).

o Sir Cavalier Resagne s’est prétendument rendu à une réunion de l’AHA, Association des Historiens et des Académiciens. Cette organisation est purement fictive !

o La résidence de Sir Cavalier Resagne se situe dans le Devon, près d’Exmoor. Exmoor constitue l’un des plus beaux fleurons de cette ravissante campagne anglaise dont la série nous offrira souvent de superbes aperçus. Situé sur le Devon et le Somerset, Il s’agit d’un des plus anciens et fameux parcs nationaux de Grande-Bretagne. Il s’étend sur près de 700 km² de landes, collines et rivières, ainsi que sur 55 km² de côtes et falaises. La grande variété de ses paysages et de sa flore est très réputée. On comprend pourquoi Cathy et Steed apprécient tant leur balade !

o Le Jeune Homme déclare « On est au pays du Chien des Baskerville » (26’56’’). C’est tout à fait exact, le classique de Conan Doyle (1901) se situant effectivement dans le Devon, à Dartmoor, aujourd’hui autre parc national de la région. Une fameuse adaptation au cinéma de cette grande aventure de Sherlock Holmes et du Dr Watson (1959) réunira deux prestigieux invités des Avengers : Peter Cushing et Christopher Lee.

o Schillingstrasse, évoquée par Gundmann, est une importante artère donnant sur la célèbre Alexanderplatz, au cœur de l’ex-Berlin Est.

o Steed et Cathy Gale se connaissent depuis au moins 1953 !

o Le magazine contenant l’article de Cathy Gale, concernant l’influence médiévale sur la mode et la décoration, s’intitule Hers, for the fashion wise.

o Même si on entend fonctionner son mécanisme, la pendule demeure bloquée à 15h.

o Le Jeune Homme prétend être Darryl F. Zanuck (22’25’’). Cet important personnage de l’histoire du cinéma (1902-1979) a produit plus de 200 films tout au long d’une carrière à la longévité exceptionnelle, débutée à l’époque du muet. Il fut également scénariste et réalisateur. Figure majeure des studios hollywoodiens, il participa à la création de la 20th Century Fox (1935) dont il fut longtemps la figure de proue. D’autres grands noms du cinéma sont cités par le Jeune Homme : Alfred Hitchcock, Sofia Loren, Gregory Peck et Brigitte Bardot, déjà pastichée dans Tueurs à gage (saison 2).

o Polo : Steed déclare à Cathy Gale s'en aller participer à une partie de polo (12’02’’). Ce sport collectif se joue à cheval, par équipe de quatre. Les cavaliers orientent la balle avec un maillet, en tentant de marquer un but contre l’adversaire. L’origine du Polo remonte à l’Asie antique (Perse, Inde…), les Britanniques créant le premier club dans l’Himalaya en 1859. Le terme « Polo » provient de son équivalent tibétain spo-lo. Introduit en Angleterre à partir de 1860, il remporte un vif succès auprès de la haute société, avant de se répandre en Europe et en Amérique. Le sport professionnel est aujourd’hui dominé par l’Argentine. Steed, par ailleurs joueur émérite de cricket (Méfiez-vous des morts, saison 8, TNA), aura l’occasion de montrer ses dons pour le Polo lors de l’affrontement final de La poussière qui tue (saison 4) !

Acteurs – Actrices

o Maurice Good aura réalisé le grand écart, apparaissant dans la première saison de la série (Hunt the man down), comme dans la dernière (Bastion pirate, saison 8, TNA). Entre temps, il joue également dans Ne vous retournez pas mais aussi dans Double personnalité (saison 6). Avant tout comédien de théâtre, il est aperçu dans de nombreuses séries britanniques : Z cars, Dixon of Dock Green, Le Saint, L’Homme à la Valise

o Kenneth Colley (1937) a connu une longue carrière, ininterrompue depuis le début de années 60. Il accède à la célébrité en tant qu’Amiral Plett, promu suite à l’exécution de son prédécesseur par Darth Vader (L’Empire contre-attaque, 1980, Le Retour du Jedi, 1983). Il participe également à l’aventure de Monty Pythons dans La Vie de Brian (1979) et Jabberwocky (1977). Au théâtre il est un acteur shakespearien réputé, tandis qu’il participe à un grand nombre de séries télé : A for Andromeda, Z Cars, Wycliffe, Inspector Morse

o Janine Grey (1942) n’a pas connu de carrière au-delà des années 60. Elle participe néanmoins à diverses séries des deux côtés de l’Atlantique : Destination Danger, Des Agents Très Spéciaux, Ma Sorcière Bien Aimée

À noter que…

o La période Cathy Gale reste décidemment plus ancrée dans le réel : là où Mrs Peel écoute un disque très romantique, Cathy capte à la radio le bulletin d’information !

o Après la tueuse professionnelle Hilda Stern (Inter-crime, saison 2) et avant le diabolique Docteur Storm (Dans sept jours, le déluge, saison 4) ou le Baron Von Orlak (Le legs, saison 6), Martin Gundmann perpétue la tradition peu germanophile de la série.

o L’épisode Le joker (saison 5) sera un remake presque identique de Ne vous retournez pas.

o Les armures médiévales reviennent fréquemment dans la série, jusqu’à constituer un élément majeur du générique de la saison 6. La ceinture de chasteté évoquée par Steed sera employée sur Mrs Peel dans Le village de la Mort (saison 5), épisode où les deux Avengers se retrouveront coiffés d’un heaume particulièrement rétif !

o Peter Hammond (1923-2011) est une figure importante de la série car il a réalisé pas moins de 19 épisodes, durant les saisons 1 (neuf épisodes, dont Passage à tabac), 2 (Warlock, Le point de mire, Mort d’un grand danois, Les œufs d’or, La loi du silence) et 3 (Plaidoirie pour un meurtre, La toison d’or, Ne vous retournez pas, Le piège à rats idéal, Seconde vue). Il a participé à de nombreuses autres séries (Rumpole of The Bailey, Shades of greene…). Plus récemment il a tourné neuf épisodes du Sherlock Holmes de Jeremy Brett.

o Terry Green, concepteur de décors, interviendra dans sept épisodes de la saison 2 (Mission à Montréal, La trahison, Warlock, le décapode, Mr Teddy Bear , Un traître à Zébra, La naine blanche) et deux de la saison 3 (Ne vous retournez pas, Seconde vue). Ses créations seront toujours de bonne facture, voire excellente. Elles apporteront un attrait supplémentaire à ces épisodes, particulièrement crucial pour la série au moment où celle-ci est tournée quasi exclusivement en décors intérieurs, aux studios de Teddington.

Fiche de Ne vous retournez pas des sites étrangers :

En anglais
http://theavengers.tv/forever/gale2-12.htm
http://www.dissolute.com.au/avweb/ gale/307.html
http://deadline.theavengers.tv/GaleS2-12-DontLook.htm

En espagnol
http://losvengadores.theavengers.tv/cathy_behind.htm

En flamand
http://home.scarlet.be/~pvandew1/avengers/gale30.htm

 

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