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Le cirque des vampires (1972)
Les étrangleurs de Bombay (1960)

Saga Hammer

La légende des sept vampires d’or (1974)


LA LÉGENDE DES SEPT VAMPIRES D'OR
(THE LEGEND OF THE 7 GOLDEN VAMPIRES)

Résumé :

En 1804, Kha, grand-prêtre des sept vampires d’or, en Chine, vient demander l’aide du comte Dracula pour réveiller les vampires. Dracula va faire bien mieux. Chine, 1904 : le professeur Van Helsing, qui fait des recherches sur les vampires, est contacté par le jeune Hsi Ching qui lui dit venir du village maudit de Ping Kwei qu’avec ses frères, et si Van Helsing veut bien les aider, il veut délivrer de l’emprise des vampires.

Critique :

Un film étrange mêlant pour la seule et unique fois vraisemblablement dans l’histoire du cinéma kung-fu et vampires ! Ce n’est pas absurde et le scénario possède quelques bons éléments. Le souci tient à l’absence de liant entre le domaine proprement fantastique et la partie arts martiaux. Les moyens sont étriqués et le manque d’originalité de bien des aspects saute aux yeux.

En février 1973, le nouveau président de la Hammer, Michael Carreras (fils de James), envoya à Hong Kong (à l’époque colonie britannique) le scénariste Don Houghton pour travailler à une coproduction avec la firme Shaw Brothers. Un accord fut conclu pour deux films (le second étant Shatter en 1974). Pour Houghton, la Hammer avait besoin de la réussite de ces films : « Si les films venaient à échouer, écrivait-il à Carreras le 18 septembre 1973, ce serait désastreux ». Malheureusement, ce fut un échec et la production, épuisante et coûteuse (la Hammer avait dû souscrire un prêt pour financer les deux films, faute du soutien d’un distributeur), greva lourdement les finances de la firme anglaise dont les jours étaient désormais comptés.

Si la scène pré-générique est censée se dérouler en 1804, c’est en 1904 que se passe l’essentiel du film. En ce sens, La légende des sept vampires d’or, est dans la lignée des Dracula « modernisés »…même si ceux-ci se déroulent chronologiquement dans les années 1970. On a donc l’impression que Michael Carreras tente « d’enjamber » les derniers films pour se raccorder quelque peu artificiellement au tout premier Dracula.  Dépayser le film en Chine, pays arriéré à cette époque, permet de rester dans le contemporain tout en évitant une confrontation toujours risquée avec ledit monde contemporain. Cela permet aussi de flatter le complexe de supériorité colonial britannique. Un Chinois vient demander de l’aide à un Occidental car il ne saurait vaincre seul.

Ceci étant, la Hammer se montre plutôt respectueuse des Chinois qu’elle met en scène, du moins ceux qui aident Van Helsing. Les autres se limitent à des commerçants lors d’une scène de marché et à une bande de truands. Schématique certes mais le film ne fait que 85 minutes. On remarque d’ailleurs un manque de maîtrise de la part de la Hammer car, contrairement au Cauchemar de Dracula, qui, en 78 minutes, filait bon train avec une grande efficacité ; ici, il y a de flagrantes ruptures de rythme. L’expédition vers Ping Kwei est interminable même si les décors naturels sont plutôt beaux et que c’est rarissime de voir un tournage en extérieur pour la Hammer.

Question réalisation, Roy Ward Baker parvient à s’en tirer quand même assez bien. C’est un réalisateur de métier qui va réussir à tirer sinon le meilleur au moins le moins mauvais. Quelques scènes fortes rehaussent le film. Ainsi, lorsque Van Helsing raconte la légende des sept vampires d’or, celle-ci nous est présentée de visu. On découvre la pagode où se réunissent les monstres et, de nuit, elle a fort belle allure. Utilisant des éclairages rouges/verts, Baker filme avec intensité le supplice de sept jeunes Chinoises, plus ou moins dénudées, dont les cris résonnent douloureusement aux oreilles du spectateur. La levée des serviteurs maudits est également assez effrayante. Filmer la poursuite au ralenti avec les cris de douleur comme bande-son en l’entrecoupant de très brefs instants de sérénité prêt d’un autel de Bouddha est une excellente idée. Notons tout de même cette curiosité « locale » : les vampires chinois se déplacent à cheval ! C’est sans doute pour éviter le ridicule de l’attaque de la chauve-souris en plastique qu’on redécouvre avec gourmandise !!

Malgré ses efforts, Roy Ward Baker ne peut masquer de nombreuses faiblesses du film. Le scénario est ainsi truffé de grossières erreurs reprises des films antérieurs. Le vampire craint l’argent. Pour le tuer, il faut le viser en plein cœur ; une idée fabuleuse puisqu’étant mort, le cœur du vampire ne bat plus ! Il craint le sacré (très problématique cette idée) mais, comme nous sommes en Chine, ce n’est plus Jésus mais Bouddha qui fonctionne comme repoussoir ! Erreur ! Car, si le bouddhisme a effectivement prospéré en Chine, il n’a jamais été considéré comme un culte national à la différence du confucianisme. Un Occidental comme Robert Van Gulick l’avait très bien compris dès les années 50 lorsqu’il écrivit les enquêtes du Juge Ti. Visiblement, la Hammer ne l’avait pas lu. La plus formidable des énormités concerne le feu dont on nous dit qu’il ne détruit pas les vampires. Un peu plus loin dans le film, le feu détruira un vampire. La cohérence ? Quelle idée surannée ! Quant au kung-fu, il apporte certes une indéniable originalité au film mais les différents – et très bien filmés – combats tombent souvent comme des cheveux dans la soupe et donnent l’impression de devoir être là, pas de servir réellement à quelque chose. Et depuis quand, les vampires combattent à l’épée ?

Le casting achève de plomber le film avec ces clichés et ses insuffisances. Mettons de côté Peter Cushing qui a retrouvé de l’allant et tient son rang avec l’efficacité et la prestance qui ont toujours été les siennes et voyons les autres. David Chiang apporte la « couleur locale » (sans mauvais jeu de mots) et renouvelle la figure de l’exécutant ; un classique du film de vampire. On peut remercier la Hammer de n’avoir pas sacrifié à ce penchant de vouloir grimer en Asiatique des acteurs tout ce qu’il y a de plus Européen. L’année suivante, Chapeau melon et bottes de cuir se ridiculisera avec Le Piège. David Chiang, pour revenir à lui, est une authentique satisfaction. C’est également la dernière. Les frères de Hsi n’ont aucune réalité tangible et ne sont que les porteurs des armes traditionnelles du kung-fu. Shih Szu, qui interprète Maï, est certes un cas rare de femme qui se bat mais son véritable rôle est de tomber amoureuse du jeune premier incarné avec fadeur par Robin Stewart. En voyant ce dernier, on pense à une version mineure de Mike Gambit dans The New Avengers. Peter Cushing étant trop âgé pour être crédible dans les scènes d’action, on embauche un Blanc-bec qui y pourvoira. John Forbes-Robertson mérite notre compassion car il reprend le rôle de Dracula pourtant trop grand pour lui. Au moins joue-t-il avec sobriété. La palme du rôle qu’on a vu venir de loin est celui de Vanessa Buren jouée par Julie Ege. C’est bien simple ; elle ne sert à rien (sinon à faire jolie, ce qui, chez la Hammer, peut suffire) et on sait comment ça va se terminer très en amont. Malgré un final de qualité, ce film est davantage à ranger dans la catégorie des déceptions que des réussites de la Hammer.

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Anecdotes :

  • Scénario :  Don Houghton
  • Réalisation : Roy Ward Baker et Chang Cheh.

  • Une seule autre coproduction naîtra de la rencontre des studios Hammer et Shaw Brothers : Un dénommé Mister Shatter (1974), plutôt versée dans le polar, et signée par le producteur Michael Carreras (bien que commencée par Monte Hellman).

  • Aux États-Unis, c’est une version remontée de 75 minutes et sortie sous le titre The Seven Brothers Meet Dracula qui sera exploitée. Cette version, dans laquelle plusieurs scènes de violence ou de nudité figurent à plusieurs reprises afin de maximiser l’intérêt d’un public considéré comme amateur de sang et de seins nus, apparaîtra en bonus du DVD américain édité par Anchor Bay au début des années 2000.

  • Une suite des 7 Vampires d’or baptisée Kali, the Devil Bride of Dracula fut évoquée : écrite par Anthony Hinds et mettant en scène Dracula et la déesse Kâlî, elle devait être tournée en Inde afin d’utiliser des fonds de la Warner bloqués dans le pays en raison de sa politique fiscale ; cette dernière ayant évolué, la Warner perdit tout intérêt pour le projet qui fut donc abandonné.

  • Une dernière rumeur se propagea que Dracula serait bientôt confronté à Sherlock Holmes et le prêtre sataniste Mocata du film Les Vierges de Satan, dans un projet non abouti réunissant Christopher Lee, Peter Cushing, Vincent Price et Jack Palance. Toujours selon cette rumeur, la direction devait en être confiée à Terence Fisher. Mais la véracité de cette annonce, fantaisiste ou non, ne fut jamais clairement établie.

  • C’est le dernier film de vampires produit par la Hammer.

  • John Forbes-Robertson/Dracula : acteur britannique (1928-2008), vu au cinéma dans Bunny Lake a disparu (1965), The vampire lovers (1970), Le caveau de la terreur (1973) mais plus souvent à la télévision : Starr and Company (1958), Emergency Ward-10 (1960), Le Saint (1962, 1965, 1966), Jason King (1971), Angoisses (1975), Chapeau melon et bottes de cuir (1976), Les deux font la paire (1984)

  • Julie Ege/Vanessa Buren : « mannequin, actrice et sex-symbol » (selon Marcus Hearn) norvégienne (1943-2008) fut Miss Norvège en 1960. Elle apparaît dans Au service secret de Sa Majesté (1968), Les créatures d’un monde oublié (1970). Elle se retire en 1978 avant de succomber à un cancer.

  • David Chiang/Hsi Ching : acteur hongkongais, on l’a vu a cinéma dans Le sabreur solitaire (1969), La rage du tigre (1971), Les cinq maîtres de Shaolin (1974), La mante religieuse (1978), Shanghai 13 (1984), Il était une fois en Chine 2 : la secte du lotus blanc (1992).

  • Shih Szu/Hsi Mai Kwei : actrice taïwanaise née Lei Qiu-si. Sa carrière internationale est relativement brève : Les griffes de jade (1971), Le guerrier du Kublai Khan (1975), Le temple de Shaolin (1976), Le tigre de jade (1977).

  • Robin Stewart/Leyland Van Helsing : acteur anglais né à Calcutta (1946-2015), il a joué dans La maison de l’épouvante (1969), Cromwell (1970), Le vent d’Australie (TV, 1980).

  • Chan Shen/Kha : acteur taïwanais (1940-1984), parmi une riche filmographie surtout locale, on a pu le voir dans La main de fer (1972), La guerre des clans (1976), Le sabre infernal (1976).

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