Open menu

Le Pion (1978)Coup de tête (1979)

Comédies françaises Années 70

Le Cavaleur (1979)  par  Sébastien Raymond


LE CAVALEUR (1979)

Résumé :

Edouard virevolte aux bras des femmes comme ses doigts de pianiste sur le clavier. Sa vie est un déroulement continu de maîtresses, plein de mouvements mais aussi de mensonges qui se téléscopent, jusqu’au jour où son épouse décide de partir.

Critique :

Décidément, Philippe de Broca revient souvent sur le même personnage, une sorte de gamin qui découvre plus ou moins l'âge adulte vers les quarante balais. L'incorrigible reste espiègle, c'est sa respiration. Le magnifique découvre l'amour et retient enfin la réalité. Le marié de l'an II comprend enfin que Marlène Jobert est la femme de sa vie après moult aventures périlleuses.

Ici Jean Rochefort, dans un film volontiers comique mais aux grands coups de pinceaux dramatiques, se prend la quarantaine en pleine poire. Il vieillit et n'assume pas vraiment. Est-il temps d'arrêter de cavaler ? "Toujours enfant et jamais adulte" semble être sa devise. Peut-il changer et grandir ? Le film n'en donne pas la réponse. Il pose juste la question. Tout le film est cette question. Et cela suffit amplement. Le fait qu’il n’y ait pas de réponse, de tonalité péremptoire et définitive laisse au spectateur une grande liberté. Sans doute qu’il faut louer la générosité du scénario pour cela ?

Sur son scénario, Philippe de Broca demande à Michel Audiard de mettre des dialogues très chaleureux, moins exubérants qu'à l'habitude. C'est toujours bon de le rappeler : Michel Audiard n'est pas qu'un ajusteur de bons mots sur des personnages plein de gouaille et de grande gueule ; il sait aussi manier le verbe avec retenue et réalisme, taquinant les couleurs pastel de temps en temps. Il sait faire montre d’une délicatesse ici, de poésie, tendre, attentionnée pour un personnage un peu pitoyable, mais finalement tellement attendrissant. Il fait dire par Danielle Darrieux à un Jean Rochefort tourbillon : « tu es comme un coup de vent qui passe sur l’eau. Tu laisses des rides ».

Le lumineux Jean Rochefort incarne avec maestria son personnage d'enfant paumé et solitaire dans la foule des gens qui l'aime. En un clin d'oeil, en un froncement de sourcil, il développe toute une gamme de sentiments, d'émotions, à partir de rien. Un sourire, un oeil vague et c'est la nostalgie qui effleure. Deux yeux ronds et le bonhomme découvre l'effroi de songer que sa femme puisse le tromper. Rochefort est un acteur génial, un séducteur irrésistible. J’adore.

Pour entourer cet électron trop libre, Philippe de Broca nous a concocté un casting de premier ordre, en qualité comme en quantité, des petits rôles forts sympathiques. De la radieuse Danielle Darrieux à la beauté soixantenaire jusqu'à la voluptueuse Nicole Garcia, en passant par la grande Annie Girardot, c'est une troupe pleine de grâce et de finesse qui s'est satellisée autour de Jean Rochefort pour mieux lui permettre de briller comme il sait si bien faire.

Surtout cette petite mise en scène qui se met à transporter sur quelques secondes le film vers des sommets de poésie et de tendresse, un "truc" que Philippe de Broca nous sert presque à chaque fois, une surprise, un moment d'une chaleur particulière qui le place aisément parmi mes auteurs favoris.

Devant un si joli film, je ne peux m'empêcher de pester contre TF1 video qui se contente encore une fois du minimum. Un dvd à l'image correcte chez TF1, ce doit être juste une question de hasard. Donc ici c'est à la limite de l'offense : peu de netteté, une photographie un peu crachante. Ya pire, certes, mais tout de même, il y a tellement mieux.

Anecdotes :

  • Au départ, on songea au grand Vittorio Gassman pour jouer Edouard.

  • Ensuite, Philippe de Broca voulut faire un film encore plus physique et remuant autour d’un Yves Montand sûr de lui. Un peu comme L’incorrigible avec Jean-Paul Belmondo. Mais Montand déclina l’offre. Une fois qu’il fut finalement décidé de donner le rôle à Jean Rochefort, ce dernier influa sur la réécriture du scénario en enlevant à son personnage de son panache, en accentuant sur ses faiblesses, ses failles.

Séquences cultes :

Ils sont complètement à poil

Tu trouveras un petit vase

Vous permettez ?

Retour à l'index