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Comédies françaises Années 70

Attention les yeux ! (1976) par Sébastien Raymond


ATTENTION LES YEUX ! (1976)

Résumé :

Un jeune réalisateur sans le sou doit tourner une version pornographique de La chartreuse de Parme, en jonglant avec le manque de moyens mis à sa disposition, l’ego des comédiens et les petits ennuis qui ne manquent pas de s’accumuler au quotidien lors du tournage.

Critique :

Curiosité quasi introuvable pendant longtemps (un DVD a été publié), diffusé rarement et jamais cité parmi les comédies françaises de l'époque, cette petite bouse (terme affectueux) vaut tout de même le coup d’œil pour son casting et son sujet.

Car il s'agit bien d'un très mauvais film, braillard, mal filmé, qu'on sent brinquebalant, mal fichu, tourné à la va-vite, à là va comme-je-te-pousse. Finalement, il ressemble à ces productions "cheap" qu'il entend dénoncer, ou du moins tourner en dérision.

L'histoire tient sur une feuille de papier toilette : un réalisateur se voit contraint par deux producteurs un poil véreux de tourner un film érotique sans le sou. Et si le film n'est pas très drôle en raison de ses gags lourdingues, il met en scène un monde qui a bel et bien existé, celui des petites productions nanarisantes qui ont pullulé avant le classement X et l'explosion de la vidéo. Sujet à la mode à cette époque : la sexualisation ou la pornographisation de la société. On pense à Sex-shop de Claude Berri ou On aura tout vu de Georges Lautner qui reprend le même canevas du réalisateur obligé de se tourner vers le porno pour travailler et gagner quelque peu sa croûte.

Toujours est-il qu’Attention les yeux brille uniquement pour sa distribution pléthorique. On peut véritablement s'amuser à voir tout ce petit monde essayer d'aller au bout de cette production brouillonne.

Mais, c'est trop long. Le film laisse l'impression d'être finalement une suite plus ou moins fine de sketchs, de gags entrecoupés de nichons dans un cadre carton-pâte. Le prétexte humoristique et de la dérision cachent-ils des ambitions plus terre à terre et une certaine complaisance vis-à-vis de la sexualité filmée ? On pourrait le penser de prime abord. Néanmoins, le scénario est signé Nicole de Buron à qui on doit peut-être faire grâce d'un tel reproche. Reste cette ambiguïté que je ne peux m'empêcher de ressentir.

Ce qui m'avait fait sourire lorsque je vis le film pour la première fois n'a pas donné à la revoyure les mêmes effets. Si l'on peut trouver matière à sourire au début, on finit par s'en lasser, une caractéristique répétitive prenant le dessus sur la fin. Ou alors question d’humeur, moins propice à ce genre d’humour ? Possible.

M'enfin, cela permet de voir tout un tas de jeunes comédiens prometteurs (Daniel Auteuil, Thierry Lhermitte, Anémone, Christian clavier, Michel blanc) et d'y voir associer de plus aguerris, tout aussi sympathiques (Claude brasseur, Guy Marchand, Jean-Pierre Darras).

Ça ne va pas bien loin, ce qui peut expliquer la rareté de l'objet qui a beau constitué un document à peu près historique, n’en demeure pas moins assez pauvre quant au résultat.

Anecdotes :

  • Grace Jones a déjà tourné dans un film américain avant celui-là, son deuxième. Elle en garde un bon souvenir : “J’ai toujours voulu être actrice, et je suis allée à une audition. Je n’ai pas joué, je suis restée moi-même et l’équipe du film a dû m’estimer parfaite pour l’emploi. C’était un rôle de fille déjantée. Je me souviens que je tapais sur une batterie et que je portais des lunettes… A un moment, je devais sauter sur une table et mener une sorte de rébellion ou quelque chose comme ça, je ne me rappelle pas exactement. Mais je sais que c’était une comédie. Décrocher ce petit rôle m’a encouragée à persévérer.”

  • Dans son autobiographie, Nicole de Buron estime que le film est une pochade fauchée, pour laquelle les noms de Gérard Pirès, celui de Claude Brasseur et le sien étaient le gage que l’entreprise resterait honorable.

  • Ce sont surtout par amitié que de nombreux comédiens enthousiastes sont venus faire quelques panouilles.

  • Même si le film paraît fauché, il n’en reste pas moins que Gérard Pirès pouvait se reveler très exigeant. Par exemple, la scène où Claude Brasseur doit manger des oeufs au plat sur les fesses de la mannequin Marie-Christine, on dut refaire la scène plusieurs fois parce que Pires voulait un oeuf parfaitement blanc, avec un blanc parfaitement rond et le jaune parfaitement au milieu.

  • Nicole de Buron s’en donne à coeur joie lors de l’élaboration du scénario pour dénoncer le monde de la production ciné, totalement cynique et de ce type de producteurs véreux qui pullulaient dans ces productions de bas étage. Pour un certain nombre de répliques, elle s’est inspirée du producteur Pierre Braunberger (La chienne, On purge Bébé, Tirez sur le pianiste, Comment réussir quand on est con et pleurnichard, Les héroïnes du mal, etc.). Il fit preuve à cet égard de beaucoup d’humour et prêta même son propre bureau pour tourner la séquence du début du film chez les producteurs incarnés par André Pousse et Jean-Pierre Darras.

  • Le film réussit à rentrer dans ses frais et à gagner un peu d’argent. La censure envoya une lettre de félicitation à Nicole de Buron pour avoir réussi à évoquer ce monde pour le moins scabreux avec délicatesse.

Séquences cultes :

Interrogatoire

On va sonoriser la scène d'orgie

Je veux que la scène soit tournée dans un esprit antiraciste

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