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X Files : RégénérationX Files Saison 1

X Files

Saison 10 


1. LA VÉRITÉ EST AILLEURS (1/2)
(MY STRUGGLE)

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Épisode Mythologique

Scénario : Chris Carter
Réalisation :
Chris Carter

Résumé :

Désormais séparés, Mulder et Scully sont contactés via Skinner par Tad O'Malley. Cette vedette médiatique indique être persuadée que les autorités dissimulent la présence des extra-sur Terre. Il leur présente la jeune Sveta, enlevée à plusieurs reprises par les Aliens et ayant fait l’objet d’une hybridation génétique. Mulder rencontre ensuite le Pr. Garner, ayant reconstitue un vaisseau extra-terrestre aux mirifiques propriétés, puis un vieil homme temoin du crash de Roswell et de l’exécution du pilote alien par un Homme en noir. Un test réalisé par Scully indique que l’ADN de Sveta ne comporte aucun élément alien. O’Malley dévoile alors que la jeune femme a été trompée. Les autorités exploitent la technologie issue de Roswcll, mais la présence supposée des Aliens n’est qu’un mythe destiné à dissimuler un complot gouvernemental plus vaste, visant à asservir l’humanité. Il décide de révéler tout cela dans sa prochaine émission, mais Sveta déclare alors à la presse qu’O’Malley l’a soudoyée pour obtenir un faux témoignage. Ce dernier disparait inexplicablement, tandis que Garner et Sveta sont exécutés, cette dernière par un vaisseau alien. Un message anonyme incite Mulder et Scully à ne pas renoncer et l’Homme à la cigarette apprend alors la réouverture des X-Files.

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Critique :

Ce pilote d’une nouvelle saison (sinon de toute une nouvelle aventure) séduit d’emblée grâce à sa séquence rétrospective inaugurale. Les superbes photographies s’avèrent particulièrement bien choisies, titillant la curiosité des nouveaux venus et valant tout un feu d’artifice de souvenirs aux X-Philes de toujours. Évidemment le procédé conduit à se limiter aux monstres de la semaine les plus visuellement spectaculaires, excluant quelques mémorables adversaires tels Modell le Pousseur ou le John Lee Roche de Paper Hearts. La narration s’effectue efficacement, synthétisant le fil rouge complexe de la série, même si elle demeure floue sur le fait que le destin de Samantha est désormais connu. Consacrer une photographie aux Bandits Solitaires ne relevait pas de l’impossible. Surtout en dynamisant et esthétisant le procédé bien connu de l’album photo, ce flash-back présente le mérite de déjà annoncer le grand mérite de l’épisode : nous faire pleinement retrouver l’univers paranoïaque des X-Files, tout en l’adaptant intelligemment aux temps nouveaux.

En effet le scénario de Chris Carter nous fait replonger d’emblée dans la meilleure tradition de la série : complot gouvernemental, référence centrale à Roswell, enlèvements et technologie extraterrestre, importance de sources elles-mêmes énigmatiques, duo vedette au relationnel fusionnel mais aux conceptions antagonistes, retour de l’Adversaire emblématique... Rien ne manque à la Mythologie des X-Files telle qu’on l’apprécie depuis 1993 et pourtant tout change pour que rien ne change. Carter sait pleinement intégrer l’époque contemporaine à son univers, d’une manière encore plus qu’aboutie que la déjà très réussie saison 9 de 24h Chrono.

D’objet encore exotique et hautement fantasmé (notamment certains opus des années 90 relevant encore clairement des Cyberpunks 80’s), l’Internet se révèle ici comme devenu le média central de notre société, le scénario exploitant parfaitement toutes ses dimensions modernes (même si évoquant soigneusement d’évoquer Google et YouTube), désormais pleinement intégrées dans notre quotidien. Mais, au-delà de la dimension technique, la modernité s’étend jusqu’à la Conspiration elle-même, passant de secrète à multi-médiatique et s’étendant à tous les domaines possibles, mais aussi d’un modus operandi encore inspiré de la l’espionite de la Guerre Froide à une stratégie multi-facettes embrassant toutes les failles de notre monde contemporain devenu si complexe et enchevêtré. Alpha et Oméga du Syndicat de jadis (aux fameuses rencontres sises dans des pièces obscures), les secrets technologiques et la présence même des Petits Gris ne constituent plus désormais qu’un domaine de la lutte parmi bien d’autres.

Tout nier en bloc n’est certainement plus la seule stratégie et l’introduction du nouveau personnage représenté par O’Malley (l’une des meilleures surprises de l’opus) participe pleinement à ce mouvement, croisé des temps nouveaux luttant avec la même diversité d’armes que ses adversaires et ne dédaignant pas de s’enrichir au passage, là aussi nous nous situons dans le Nouveau Monde. Introduire un jeune idéaliste (une pensée pour Max), à qui Mulder aurait transmis la flamme aurait constitué un poncif absolu, ici Carter opte pour un stimulant contrepied scénaristique en faisant de Mulder le Padawan et de O’Malley le maître en modernité. La violence de la réaction des Conspirateurs s’avère à la hauteur de la menace et que cela soit sur O’Malley et non sur Mulder que tombe la foudre s’avère très parlant. L’un des enjeux du développement prochain de la Mythologie sera d’exposer comment Mulder va savoir s’approprier cet enseignement tout en y agglomérant sa propre expérience. On applaudit au passage la performance de Joel McHale, aussi bluffant de naturel que dans Community, une excellente recrue que l’on espère retrouver bientôt.

Mais cet ambitieux virage mythologique, permettant de justifier le retour de la série au-delà du simple plaisir des retrouvailles, butte sur le format court de ce qui demeure une mini série de six épisodes dont plusieurs loners. Chris Carter a toujours excellé dans le temps long, développant savamment les passionnants méandres de sa Conspiration. Ici il doit faire vite, puisque dans les faits la nouvelle Mythologie devrait essentiellement reposer sur ses propres épisodes, et devoir travailler sur ce tempo le conduit à se montrer parfois abrupt. Les retournements de croyance de Mulder donnent le tournis, il faut parfois recourir à certains clichés (la recherche sur ce qui, donc, n’est pas Google, promis, juré, après le film I Want To Believe) ou autres accélérations (la réouverture bien soudaine des X-Files). Carter corse encore la difficulté en ne se contentant pas de créer du nouveau mais aussi en remettant en cause le passé, via la disparition (à vérifier) de l’implication extraterrestre au sein du complot. Cela ajoute une problématique à l’utilité douteuse et contestée par d’innombrables scènes des saisons passées, à commencer par l’histoire de la Colonisation ici passée prestement aux pertes et profits, à travers une obscure référence de Mulder à 2012, c’est assez vertigineux. On ne saisit pas l’intérêt de ce mouvement, d’autant que Mulder était déjà devenu passagèrement sceptique par le passé, donc cette option avait déjà été explorée. Si l’intrigue est moins chargée que traitée au galop du fait du faible temps imparti (parfois jusqu’à l’ellipse), ici elle se disperse inutilement.

Si Carter maîtrise moins efficacement le tempo rapide que, par exemple, lors de l’arc Anasazi, la nécessité de maintenir le rythme présente néanmoins comme heureuse conséquence que le récit n’en fasse pas des tonnes sur la la séparation entre Mulder et Scully. On nous aura au moins épargné le mélodrame, le Conspirationnisme était un sujet autrement intéressant à traiter. De plus, tel quel, leur lien demeure fusionnel et représente toujours l’un des grands atouts de la série. La caractérisation des personnages ne résulte toutefois pas sans défaut. S’il manifeste fort heureusement toujours le même humour, le fait que Mulder épouse toutes les révélations (ou prétendues telles) véhiculées par le récit risque fort de le présenter aux nouveaux spectateurs comme un esprit bien crédule. La disparition d’O’Malley doit absolument lui permettre de devenir plus actif et décisionnaire à l’avenir. Il en va pareillement pour Scully, confinée tout au long du récit à un registre larmoyant et impulsant encore moins le récit que son partenaire.

Hormis la réunion avec Mulder, notre amie plus si rousse se cantonne à quelques clichés scénaristiques (discussions entre femmes autour des enfants, tests médicaux à refaire, flirt express de couguar…), My Stuggle n’est que marginalement celui de Scully. Il est aussi maladroit de la décrire comme si impliquée dans l’aide à l’enfance malheureuse, pour ensuite prestement tout laisser tomber pour chasser le Dahu avec Mulder, là encore le rythme s’avère terrible. De plus David Duchovny se montre légèrement figé et Gillian Anderson pas tout à fait à son aise dans le lacrymal dépressif, accentuant souvent ses effets. L’actrice avait d’ailleurs indiqué que les retrouvailles avec Scully n’aient pas été immédiates, cela se confirme. Mitch Pileggi et William B. Davis (certes plus fugaces à l’écran) semblent par contre d’emblée à leur affaire.

A près les émouvantes retrouvailles avec le générique emblématique qu’il a eu la clairvoyance de conserver, Chris Carter nous convainc également entant que metteur en scène en scène. Là aussi il conjugue habilement la modernité (notamment avec d’impressionnantes images de synthèses lors de la reconstitution réussie de Roswell) avec l’atmosphère identifiant la série, qu’il reconstitue parfaitement. De même que lors du film I Want To Believe, Vancouver et son clair obscur permettent un retour aux sources particulièrement bienvenu pour affirmer la pérennité de l’univers de la série, y compris avec l’intégration d’inflexions positives apportées à la Mythologie. Tout comme lors de l’explosion du building dans Fight the Future, Carter cède parfois à la tentation d’un spectaculaire superfétatoire, dès lors qu’il en a les moyens, comme lors de l’exécution de Sveta, mais il s’agit d’un inconvénient très secondaire. Les inoubliables forêts de la Colombie britannique nous manquent encore, mais le voyage ne fait que recommencer.

Au total, My Struggle représente un recours réussi pour une série sachant renouveler son univers et l’adapter aux années 2010, tout en conservant ses fondamentaux et son atmosphère si particulière. Les contraintes inhérentes au format court de la mini saison conduisent toutefois Carter à certaines accélérations dommageables et à laisser Mulder et Scully trop passifs. Priorité est accordée à la mise en place du décor, mais les prochaines enquêtes doivent permettre au duo vedette de retrouver toute sa dynamique.

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Anecdotes :

  • Diffusé le 24 janvier sur la Fox, ce pilote connut un très grand succès d’audience, totalisant  16,19 millions de téléspectateurs (soit un taux impressionnant de 6.1 points sur les 18-49 ans), un résultat bénéficiant certes de la locomotive d’un important match de football américain diffusé auparavant. Treize ans plutôt, celui qui était alors le dernier épisode de la série (The Truth) était suivi par 13 millions de personnes. En 2008, le film I Want To Believe ne rassemblait que trois millions de spectateurs aux Etats-Unis. En France, la série battut son record d'audiences historiques avec plus de 4,6 millions de téléspectateurs lors de la diffusion sur M6 le 25 Février 2016. Le record était jusque là détenu par Le Seigneur du Magma (saison 3, épisode 20). Diffusé le 26 octobre 1996, il avait alors réuni 4,5 millions de téléspectateurs. 

  • Scully apparaît clairement moins rousse que par le passé. Gillian Anderson porte en fait une perruque, conservant la coupe de cheveux requise par le tournage de la série The Fall.

  • Le titre original de l’épisode correspond à celui de l’ouvrage d’Adolf Hitler (Mein Kampf, 1925) décrivant son parcours et son projet, par la suite devenu le bréviaire de l’Allemagne nazie. 

  • Le Pr. Garner est interprété par Hiro Kanagawa, qui avait participé auparavant deux fois aux X-Files. Il poursuit ici la tradition voulant que ses personnages connaissent à chaque fois une mort violente. Dans Firewalker (2-09) une spore tue Tanaka en développant un tentacule dans son organisme et dans Synchrony (4-19), le Dr. Yonechi meurt gelé par un composant cryogénique. Ici garnr meut ans l’exloion détruisant le véhicule gravitationnel. 

  • Quand elle utilise le moteur de recherche, Scully reçoit le message Error 404 - Site temporarily unavailable. Or le code 404 n’es pas utilisé pour un site temporairement indisponible (ce serait alors le 503), mais pour une signaler une page non trouvée. 

  • Comme exemple des mensonges gouvernementaux, Mulder évoque "the Tuskegee experiments on black men in the '30s". De 1932 à 1972 s’est déroulée une expérience médicale dirigée  par les ales autorités sanitaires, visant à connaître l’évolution de la syphilis quand elle n’est pas traite. A Tuskegee (Alabama), des métayers noirs souffrant de cette maladie ne furent pas traités à la pénicilline, pourtant disponible dès 1943, sans que la situation leur soit exposée. Un médecin dévoila le scandale à la presse au début des années 70, ce qui fit cesser l’expérimentation. Bill Clinton présenta des excuses officielles en 1997. 

  • Mulder cite également Henrietta Lacks, femme afro-américaine pauvre décédée en 1951 d’un cancer foudroyant. Des cellules cancéreuses furent prélevées à son insu, afin d’étudier l’évolution de la maladie en culture. Cet important apport ne fut reconnu qu’en 1996.

  • Mulder a un avis très critique sur The O'Reilly factor. Il s'agit d'un talk show produit sur Fox News depuis 1996 et présenté par Bill O'Reilly, célèbre pour mettre en scène des débats politiques très controversés à la mesure de son présentateur, connu pour ses prises de position très conservatrices, orientés souvent sur la ligne républicaine, quoiqu'il soit affilié au parti Indépendant. L'on reconnaît discrètement une certaine tendance de gauche à la série qui a cependant toujours refusé d'être militante.

  • Mulder demande à O'Malley s'il a des vitres blindés parce qu'il a peur qu'un agent du gouvernement se comporte comme Mike Hinckley. Hinckley est un réputé lanceur de baseball, à l'impressionnante force de frappe. On sait le grand amour que voue Mulder (et son interprète) à ce sport, comme l'avait montré The Unnatural (6-19).

  • Quand il pénètre dans son ancien bureau, Mulder marche sur le fameux poster I Want To Believe, posé à plat sur le sol. Dans The Truth, le dernier épisode de la saison 9, on voyait pourtant Dogget rouler et emporter le poster, déjà posé sur le sol. 

  • Joel McHale (Ted O'Malley) est un artiste de stand-up et un animateur de télévision réputé. En tant qu’acteur il est surtout connu pour avoir joué Jeff Winger, l’ex-avocat héros de la très imaginative série Community (2009-2015). Il a indiqué avoir toujours été un grand fan des X-Files

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2. LES ENFANTS DU CHAOS
(FOUNDER'S MUTATION)

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Scénario : James Wong
Réalisation : James Wong

Résumé :

Le Pr. Sanjay, généticien, s’est planté un coupe papier dans le cerveau à travers une oreille. Ce suicide autant étrange que spectaculaire incite les Affaires non classées à s’intéresser aux activités de son employeur, Augustus Goldman. Après une enquête complexe, Mulder et Scully découvrent que, pour le compte des militaires, Goldman a développé des tentatives d’hybridation extra-terrestre d’embryons. A cette fin il emploie de jeunes femmes enceintes en difficulté, recueillies par une institution religieuse qu’il finance. Mais ses propres enfants furent ses premières expériences et s’il garde sous clef sa fille, son fils s’est enfui. Ce dernier utilise son pouvoir de télépathie agressive afin de retrouver sa sœur. Grâce à Mulder et Scully, les deux jeunes gens se retrouvent mais assassinent Goldman avant de s’échapper. Cette affaire d’enfants hybrides pousse également Mulder et Scully à s’interroger sur le destin de William.

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Critique :

Après la mise en place globalement réussie de la nouvelle Mythologie assurée par My Struggle, mais ayant nécessité de  trop placer Mulder et Scully en simples spectateurs des évènements, Founder’s Mutation devait relever un double défi : nous faire cette fois renouer avec l’autre grande famille d’épisodes des X-Files que constituent les loners, et leurs emblématiques Monstres de la semaine, mais aussi plonger le duo vedette au cœur de l’action, afin qu’ils puisse enfin produire toutes ses étincelles, exprimer tout son potentiel.

Malgré quelques turbulences appartenant désormais à un lointain passé, Chris Carter aura su associer le duo Morgan & Wong à la résurrection d’un programme dont ils comptèrent parmi les principaux artisans. Un pari gagnant, tant l’expertise sans pareille de James Wong va concourir à accomplir ce qu’espérait l’ensemble des X-Philes de toutes obédiences depuis l’annonce de la réouverture des Affaires non classées : leur faire pleinement retrouver leur série préférée. Si le scénario développe son intérêt propre, il demeure ainsi l’occasion d’un véritable retour aux sources, avec des retrouvailles que Wong sait multiplier tout en les insérant avec naturel au récit, sans jamais laisser l’impression d’une mécanique. 

Ce voyage débute avec une formidable scène d’ouverture se traduisant évidemment par l’un de ces meurtres à la fois épouvantables et énigmatiques dont la série a forgé le moule (une tradition reprise depuis par Supernatural). D’autres rituels sont bientôt au rendez-vous, comme la FBI touch des costumes, les lampes torches de Mulder et Scully perçant l’obscurité, le rapport aux frontières du réel dans le bureau de Skinner (Mitch Pileggi toujours souverain), ou bien entendu, la conférence dans le service des Affaires non classées, où, intelligente concession à la modernité, le multimédia remplace les diapositives de jadis. Si le poster mythique est évidemment de retour, les esprits taquins noteront qu’en définitive Scully n’a toujours pas de bureau, les traditions ont la vie dure. 

L’enquête suit également le même modus operandi qu’autrefois, tâchant de relier tout un faisceau complexe d’éléments disparates et intrigants. Le summum du revival se fait jour quand l’on retrouve l’une de ces autopsies aux frontières du réel dont le Dr. Dana Scully  a toujours eu le secret. Là encore la séquence n’est pas introduite mécaniquement mais au contraire tombe à point nommé dans une intrigue où elle s’insère avec fluidité mais aussi humour, grâce à un Mulder blasé et totalement impavide devant ce panorama. La grande réussite de l’opus réside d’ailleurs dans le fait que l’on cesse imperceptiblement d’opérer le décompte des coups d’œil dans le rétroviseur, pour franchir le seuil et pleinement rejoindre les X-Files de toujours. 

Wong sait pertinemment que ce mouvement ne saurait se parachever sans s’articuler autour d’un duo vedette au meilleur de sa forme, ce qui n’était pas encore tout à fait le cas lors du pilote de saison. Le succès résulte une nouvelle fois au rendez-vous. Les héros impulsent pleinement l’action, avec la complicité de Skinner. Mulder impressionne par sa passion impacte pour la vérité, son mépris du formalisme, sa brillante intelligence lui permettant de relier les fils épars de l’intrigue. Enfin, badass comme on l’aime, Scully récupère ses galons de femme d’action. Epatante quand elle vole à la rescousse de son partenaire, elle lui apporte le précieux soutien coutumier de son esprit scientifique et analytique. Cette fois David Duchovny et Gillian Anderson ont bien quitté l’effervescence hallucinée du Venice de Californication (malgré le gag du bar gay légèrement hors sujet) ou la blême sinistrose de Belfast de The Fall, pour pleinement rallier les X-Files. Tous deux nous régalent, contribuant pleinement à édifier le pont enjambant le gouffre des années. Derechef leur complicité s’affirme comme totale, établissant un lien toujours aussi fort entre les personnages. Les dialogues de Mulder et Scully s’avèrent incisifs et percutants, l’absence de toute référence à leur rupture aidant également à la résurgence du duo de naguère. Evidemment l’intrigue se conclut abruptement, mais c’était souvent aussi le cas durant la série classique.

On notera toutefois une différenciation, l’opposition entre croyant et sceptique, l’un des axes forts de la série classique, n’étant plus au programme. Mais cela paraît somme toute logique, compte tenu des péripéties survenues durant le pilote. Tout en en revenant au passé, l’épisde intègre le chemin parcouru (idem concernant William). Plus gênant, ce stand alone n’en est pas vraiment un, puisqu’en définitive relié à la Mythologie mise en place lors de My Struggle. Quoique relativement rare, ce procédé visant à entremêler loner et épisode mythologique s’est déjà pratiqué durant la série classique, mais à l’occasion de ce revival, on aurait préféré retrouver un stand alone pur et dur. Cela aurait peut-être permis de doter Goldman d’une personnalité plus haute en couleurs et davantage en rapport avec son titre ronflant de Fondateur. Doug Savant le joue de manière passablement effacée, mais assez cohérente pour celui qui ne constitue qu’un rouage d’une conspiration dirigée par autrui. On pourra aussi reprocher au scénario  d’évoquer quelque peu celui d’Eve, mais les différences perdurant semblent trop importantes pour que l’on puisse parler de réécriture (au passage cela nous fait aussi nous demander ce que sont devenues les jumelles). En tant que metteur en scène Wong reconstitue avec finesse l’univers de la série, mais, tout comme Chris Carter, il se laisse griser par les moyens disponibles, notamment lors de la galerie grotesque des enfants difformes. 

Toutefois ces quelques réserves relèvent du détail et ne sauraient réellement entacher l’enthousiasmant succès de cet authentique regain des X-Files. C’est d’autant plus vrai que Founder’s Mutation ne prend pas congé sans nous offrir un cadeau aussi sensationnel que (totalement) inattendu. On a réussi de bonnes scènes avec William, nous exclamons-nous avec la même intonation que jadis certains s’écrièrent « on a marché sur la Lune ». Les deux séquences oniriques, réalisées avec un grand sens de l’image, exprime une authentique émotion, sans jamais sombrer dans le pathos. Elles dévoilent également avec les angoisses secrètes des deux parents, la conscience du temps qui passe sans retour, et la culpabilité ressentie. On dispose ainsi du meilleur de ce que William peut proposer, sans mobiliser tout un épisode pour y parvenir (peut-être une conséquence heureuse du format court de la mini série). Le moment le plus bouleversant reste le retour de Mulder à l’enlèvement de Samantha, tant il vrai que les traumas autour desquels se structurent nos existences nous poursuivent envers et contre tout.  

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Anecdotes : 

  • L’épisode devait initialement être diffusé en cinquième position, mais Chris Carter procéda à un changement d’ordre, accompagné d’une légère réécriture, estimant que cela améliorait la continuité de l’action. 

  • L’épisode fut suivi par 9.67 millions de spectateurs, soit un résultat en nette baisse par rapport au pilote mais demeurant néanmoins très satisfaisant. La série reste leader sur les 18-49 ans.

  • James Wong a indiqué que l’épisode était le plus onéreux des six de la mini série. 

  • Le film regardé par Mulder et William durant la séquence onirique est 2001, l'odyssée de l'espace (1968). Le film passant à la télévision quand Agnès s’adresse à Mulder et Scully est Les évadés de la planète des singes (1971).

  • Augustus Goldman est interprété par Doug Savant, notamment connu pour les rôles de Tom Scavo (Desperate Housewives) et de Matt Fielding (Melrose Place).

  • Kacey Rohl (Agnès) a joué le rôle récurrent d’Abigail Hobbs dans la série Hannibal (2013-2015), à laquelle participa également Gillian Anderson. 

  • Christine Willes (Sister Mary) incarna l’Agent Karen E. Kosseff, psychothérapeute du FBI consultée par Scully dans les épisodes Irresistible (2-13), The Calusari (2-21) et Elegy (4-22). Elle reste principalement connue pour les rôles de la perpétuellement de bonne humeur patronne de George dans Dead Like Me et du démon Gladys dans Le Diable et moi

  • Durant la séquence onirique, alors qu’ils préparent une fusée miniature, Mulder déclare à William : "we choose to go to the Moon in this decade and do the other things, not because they are easy, but because they are hard". Il s’agit d’une citation d’un célèbre discours prononcé par le Président Kennedy à Houston, le 12 septembre 1962. Il y abjurait la nation américaine de fournir l’effort nécessaire à ce qui allait devenir le Programme Apollo. Mulder conservait un médaillon commémoratif d’Apollo 11, la mission qui finit par accomplir le rêve de Kennedy, le 20 juillet 1969. Il l’offrit à Scully comme cadeau d’anniversaire (Tempus Fugit, 4-17), avant que celle-ci ne l’offre à son tour à Doggett et qu’il n’échoie finalement à l’Agent Leyla Harrison (Alone, 8-10).

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3. RENCONTRE D'UN DRÔLE DE TYPE
(MULDER AND SCULLY MEET THE WERE-MONSTER)

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Scénario : Darin Morgan
Réalisation : Darin Morgan

Résumé :

Alors que Mulder déprime devant les Affaires non classées s’étant dégonflées d’elles-mêmes en son absence, de mystérieux meurtres se déroulent dans une petite bourgade où un monstre ressemblant à un homme lézard a également été repéré. Une étrange enquête attend Mulder, entre personnalités locales hors normes et un monstre sympathique qu’une morsure transforme  périodiquement en être humain. Toutefois il peut compter sur les applications de son téléphone tout neuf pour découvrir le véritable coupable. Mais Scully y arrive avant lui, tout en se trouvant un nouveau chien.

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Critique :

Après le pilote mythologique et le loner, Mulder and Scully Meet The Were-Monster tombe à pic pour compléter le panorama des X-Files, en renouant avec les souvent hilarants épisodes décalés. Grand spécialiste du genre et l’un des meilleurs scénaristes de la série, Darin Morgan crée de nouveau la sensation avec cet opus irrésistible d’humour, d’intelligence et d’audace narrative. Morgan joue ainsi à plein sur la connivence existant avec le public de la série, la seule réserve suscitée par l’opus étant que, contrairement aux deux précédents, il s’adresse avant tout aux amateurs de longue date, les nouveaux venus ne pouvant que malaisément comprendre nombre de clins d’oeil.

L’auteur nous régale d’un véritable jeu de pistes, multipliant private jokes et références à ses épisodes précédents, autant de gags éveillant de grands souvenirs de la série  (Jose Chung's 'From Outer Space', War of the Coprophages, Clyde Bruckman's Final Repose, Humbug). Ce regard dans le rétroviseur s’effectue en symbiose parfaite avec la mise en scène, entre action nocturne, retrouvailles enfin opérées avec les forêts de Vancouver, hommages à Jack Hardy et Kim Manners, etc.

En plus des références à X-Files, Darin Morgan élargit le focus à la série MillenniuM, pour laquelle il n’écrivit que deux épisodes ultra décalés, chacun dans une rupture de ton massive avec une série dont il n’appréciait ni le thème, ni l’ambiance. Les commentaires insérés sur le manque d’intérêt des tueurs en série et sur le fait que « quand on en a vu un, on les a tous vus » s’avèrent très explicites sur le sujet.

Cet album de souvenirs, brillant d’un humour geek ultra référencé, mais où l’on ressent une passion commune à celle vécue par les fans, n’empêche toutefois pas le développement d’un authentique scénario d’enquête. L'histoire est plus classiquement ordonnancée que lors de Jose Chung's 'From Outer Space', auquel on songe parfois. On retrouve là aussi pleinement la griffe de Darin Morgan sur le registre de la comédie, avec nombre de gags frisant ouvertement une parodie encore soulignée par la musique délibérément caricaturale de Mark Snow. 

La singularité bien connue de Darin Morgan se retrouve également dans le thème du jour, grâce à une magistrale réécriture inversée du thème rebattu du Lycanthrope, avec cette fois le monstre devenant humain suite à la morsure fatidique. Outre son originalité d’un absurde aux confins de la poésie d’un Boris Vian, cette inversion des rôles donne lieu à une fable plaisante sur l’incongruité de la vie des Hommes, dès lors qu’elle se considère du point de vue de Sirius. On apprécie que l’auteur prenne le temps de développer cette dimension, au lieu  d’empiler du sensationnalisme facile. Le jeu de Rhys Darby, au premier abord emprunté, se révèle du coup parfaitement conforme à cet humain improvisé.

Mulder and Scully Meet The Were-Monster permet également de retrouver ces irrésistibles seconds rôles dont Darin Morgan peupla ses récits, autant d’irrésistibles excentriques envers lesquels il éprouva toujours une tendresse pleinement retrouvée ici. Que cela soient les junkies, le transsexuel, l’hôtelier ou Guy Mann lui-même, on rit toujours avec eux, bien davantage qu’à leurs dépens. L’épisode bat sans doute le record de personnages défoncés découverts jusqu’ici dans les X-Files. De ce côté Duchovny est en terrain connu après Californication, mais cela permet surtout à Darin Mogan d’instaurer toute une étrangeté ambiguë autour du monstre, s’ajoutant aux anges biscornus ou aux endroits insolites : chacune des personnes l’ayant vu est soit droguée, soit ivre, soit démente (le serial killer), un effet très réussi.

Si Darin Morgan chérit toujours ses perdants magnifiques, il maintient également son ton volontiers caustique envers Mulder. L’espèce de semi-dépression due au dégonflement d’affaires non classée en son absence, mais aussi face au temps qui passe, le conduit à des attitudes puériles hilarantes (le téléphone, l’alcool) loin des interrogations existentielles de Scully dans Never Again. Même s’il résout en définitive l’affaire plus rapidement qu’un Dale Cooper, il reste très amusant, voire iconoclaste d’ainsi égratigner le Héros, tout  en jouant habilement d’une inversion du binôme sceptique/croyant, que la nouvelle Mythologie avait relativement marginalisé.

La complicité avec Scully demeure touchante, et elle bénéficie elle aussi de scènes fortes, dont l’inoubliable fantasme de Guy Mann, déjà l’un des moments cultes de cette saison 10. L’amusement de Mulder et Scully retrouvant leurs enquêtes aux frontières du réel s’avère particulièrement communicatif et constitue en soi une éloquente évocation de la magie des X-Files. Duchovny et Andeson ont désormais pleinement réintégré leur personnage et jouent le jeu avec gourmandise. Un épisode définitivement hors gabarit, mêlant avec génie l’autodérision et une ode la série et faisant bien plus que tenir ses promesses.

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Anecdotes :

  • L’épisode comptabilisa 8.4 millions de spectateurs. Malgré une nouvelle baisse, la série demeure leader sur sa case horaire.

  • Le maillot de bain rouge qu’arbore un Mulder endormi à l’hôtel est le même que celui découvert lors de la fameuse scène de la piscine de Duane Barry (2.05), en compagnie d’Alex Krycek.

  • Le psychiatre montre son estomac, en indiquant que le mal peut parfois y résider. Il s’agit d’un clin d’œil au monstre d’Humbug (2.20), épisode également écrit par Darin Morgan.

  • Les deux pierres tombales aperçues dans le cimetière portent les noms de Jack Jardy et de Kim Manners. Elles rendent hommage à ces deux disparus, dont elles indiquent les dates exactes de naissance et de décès.

  • Jack Hardy fut un assistant metteur en scène très présent sur les deux séries dérivées des X-Files, MillenniuM et Au cœur du Complot, ainsi que sur le film I Want To believe et Destination finale (2000), du duo Morgan & Wong.

  • Kim Manners (1951-2009) fut un producteur marquant des X-Files, dont il demeure également le metteur en scène le plus prolifique, avec 52 épisodes à son actif et un style reconnaissable entre tous. Il fut également producteur et metteur en scène sur les quatre premières saisons de Supernatural, série qu’il contribua puissamment à façonner en héritière des X-Files. L’épitaphe Let’s kick it in the ass apparaissant sur la tombe était une expression qu’il affectionnait sur les tournages.

  • Une tombe au nom de Jerry Hardin est également aperçue, il s’agit de l’interprète de Gorge profonde, le premier des informateurs de Mulder, en saison 1.

  • La tête d’animal à travers laquelle Mulder voit Scully est celle d’un renard, il s’agit d’un clin d’œil à son pronom, Fox, le renard en anglais.

  • La costume de Guy Mann ressemble trait pour trait à celui de Carl Kolchak, le journaliste passionné de surnaturel et héros de Kolchak : The Night Stalker (Dossiers brûlants, 1972-1975). Chris Carter a indiqué s’être inspiré de cette série pour créer les X-Files

  • Lors de la scène pré générique, Tyler Labine et Nicole Parker Smith recréent le duo de drogués qu’ils jouaient déjà lors des épisodes War of the Coprophages (3.12) et Quagmire (3.22). Le premier fut écrit par Darin Morgan, qui réécrivit également largement le second (non crédité).

  • Daggoo est nommé d’après Moby Dick, roman fétiche de Scully, tout comme jadis l’infortuné Queequeg. Ils sont tous les deux des harponneurs.

  • La sonnerie du téléphone de Mulder est l’indicatif bien connu de la série.

  • Mulder retrouve son usuel lancer de stylos (déjà apparu s lors de My Struggle, Cette fois ils sont plantés dans le poster I Want To Believe et non au plafond. Cette pratique était apparue pour la première fois lors de l’épisode Chinga (5.10). Scully indique au passage que le poster est le sien, ce qui expliquerait son remplacement après la destruction d’un premier, également lors du pilote de saison.

  • Scully plaisante sur le fait qu’elle est immortelle. Dans l’épisode Clyde Bruckman's Final Repose (3.04), écrit par Darin Morgan, le voyant ayant le pouvoir de prédire le décès des gens déclare à Scully qu’elle ne va pas mourir. L’immortalité supposée de Sculty est également indiquée dans Tithonus (6.10), où l’on voit la Mort se détourner d’elle, tout comme auparavant pour Alfred Fellig.

  • Kumail Nanjiani (Pasha) est un fan des X-Files très présent sur Internet grâce aux podcats  The X-Files Files. Il y effectue des critiques détaillées d’épisodes de la série (en anglais), en compagnie de divers membres de l’équipe des X-Files. Cet acteur et artiste de stand-up américain d’origine pakistanaise a participé à Portlandia, Veep, Community

  • Rhys Darby (Guy Mann) est un artiste  nouveau-zélandais réputé pour ses spectacles entremêlant mimes, machineries et imitations. Il incarna également l’agent du duo de musiciens ratés de la série musicale  humoristique Flight of the Conchords (2007-2009).

  • Le tenancier de l’hôtel est joué par Alex Diakun, qui avait déjà participé à trois épisodes des X-Files écrits par Darin Morgan : Humbug, Clyde Bruckman's Final Repose et Jose Chung's 'From Outer Space'. Il est également le chirurgien diabolique du film I Want to Believe (2008).

  • Mulder indique connaître par cœur les livres de Charles Fort. Cet auteur américain (1874-1922) étudia de nombreux phénomènes paranormaux et en proposa des explications souvent baroques. Il fut parmi le premier à s’intéresser aux OVNI et ses ouvrages demeurent très populaires aux USA, notamment pour leur humour caustique. Il admit effectivement qu’il n’y avait pas d’explication définitive au surnaturel.

  • Évoqués à plusieurs reprises en cours d’épisode, les Jackalopes appartiennent au bestiaire du folklore traditionnel américain. Ces chimères (mélange de lièvre et d’antilope) sont réputées avoir une voix similaire à celle des humains. Le Lapin Cornu demeure très présent dans la culture populaire contemporaine.

  • Parmi les mystères désormais résolus, Mulder évoque celui de Racetrack Playa. Ce lac asséché situé dans la Vallée de la Mort est réputé pour les rochers s’y déplaçant sans raison visible. L’énigme fut résolue par une expérience menée en 2014, le phénomène est lié à l’évaporation ultrarapide de l’eau.

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4. ESPRIT VENGEUR
(HOME AGAIN)

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Scénario : Glen Morgan
Réalisation : Glen Morgan

Résumé :

A Philadelphie, plusieurs agents publics s’en prenant aux sans abris sont tués et démembrés de manière atroce, dans des circonstances inexplicables. Les Affaires non classées débutent leur enquête, quand Scully apprend que sa mère Margaret est mourante, après avoir subi une crise cardiaque. Elle veille sa mère et s’efforce de joindre ses frères, avant d’être rejointe par Mulder venu la soutenir. Le décès de Margaret lui fait également ressentir douloureusement l’absence de William. Scully tente de se changer les idées en rejoignant l’enquête. Elle et Mulder vont découvrir qu’un peintre des rues a involontairement créé une entité vengeresse et mortifère.

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Critique :

L’épisode débute par une séquence pré générique d’anthologie, déjà ultra violente mais dont le ton sinistre s’accompagne d’un authentique mystère avec l’entité s’envelissant lui-même dans la benne, une image forte titillant diaboliquement l'imagination du spectateur. L’enquête embraye sans perdre de temps, posant le décor avec une efficacité très américaine, tout en incorporant déjà cet humour à la fois pétillant et nostalgique qui irriguera régulièrement les dialogues. On trépigne d’enthousiasme devant un duo vedette très en forme, quand survient la sortie de route dont l’épisode va éprouver le plus grand mal à s’en remettre.

Toute la séquence hospitalière apparaît comme à part, totalement indépendante de celle de l’enquête en dehors du parallèle guère convaincant établi entre les abandon d'enfant et dépôt d'ordure. Tout se passe comme si, peut-être pour compenser le faible nombre d’épisodes de la mini saison, on tentait d’entasser deux dans le même espace. Il advient dès lors ce qui s’observe souvent dans ce cas de figure : aucun des deux tronçons ne dispose d’assez ampleur pour se développer correctement. Ainsi le temps perdu fera que l’enquête sera bâclée après le retour de Scully, une vertigineuse accélération nous faisant passer en une minute de l’hôpital au repaire du peintre. Les deux histoires n’auront cessé de s’interrompre l’une l’autre.

Encore la séquence hospitalière aurait-elle pu dégager un intérêt propre. Mais elle se voit plombée d’entrée par un sentiment de saturation. Dans I Want To Believe, nous avions Scully bouleversée dans un hôpital à propos de l’enfance malheureuse, bis repetitas dans My Struggle avec les gamins naissant sans oreilles, et encore ici, le passage de médecin à celui de parente ne changeant rien à l’affaire. On se croirait presque devant le Jour de la Marmotte. A la différence des épisodes One Breath ou Audrey Pauley, aucune intrigue n’a le temps de se mettre véritablement en place. On se contente d’accumuler du pathos à l’état pur, avec quelques moments forts comme l’affaire outrancière du chariot (Grey’s Anatomy est dans les cordes) ou le poncif absolu de la comateuse reprenant ses esprits juste avant de mourir.

On aurait préféré pleinement retrouver Margaret plutôt que de la voir réduite au prétexte du tsunami lacrymal. Tant qu’à faire revenir des personnages aimés, autant qu’ils soient vivants (et cela ne concerne pas que Margaret). L’évocation apparaît également plus mélodramatique et moins créative que lors de Founder’s Mutation, de ce point de vue l'ordre initial des épisodes était sans doute meilleur. Les flashbacks s’enchaînent également sans trop de finesse. Fort heureusement Gillian Anderson, particulièrement à son affaire, déploie tout son formidable talent et finit par réellement nous émouvoir. Elle achève de nous emporter quand Scully est rejointe par Mulder, la relation toujours aussi transcendantale entre les personnages jouant à plein, de même que la dynamique complémentaire des interprètes. Il en va pareillement pour la scène finale, très réussie, mais on espère malgré tout retrouver dès l’opus prochain la Scully femme d’action tonique et à l’esprit acéré, loin du mélo.

Si, du fait du temps consacré aux sanglots, le scénario ne peut dissimuler la maigreur de l’enquête, la satire sociale s’avère éloquente. Surtout Morgan se montre formidablement à la hauteur en tant que metteur en scène, établissant une convergence avec Home, tant il a retenu les leçons de Kim Manners. Chacun des meurtres s’avère un parfait alliage de Gore et de suspense, mais aussi d’humour noir (mention spéciale au Downtown de Pétula Clark et au non-dit très parlant de la séquence). On trouve là du X-Files à son meilleur niveau, d’autant que le Monstre de la semaine s’avère particulièrement gratiné en semi Tulpa veillant cette fois sur les Damnés de la Terre et non sur des bourgeois réacs (on songe aussi au Golem de Kaddish).

Morgan manifeste un vrai sens de l’image et une vive imagination, comme la caméra comme collée au visage de Scully se rendant à l’hôpital ou les faisceaux des lampes torche se croisant pour former un X ("Scully, back in the day is now"). La confrontation finale se montre aussi très X-Files avec le monstre s’évanouissant de lui-même et sans laisser de trace probante après avoir perpétré son dernier meurtre. Si le public de toujours se trouvera en terrain plaisamment connu, les nouveaux venus des années 2010 se sentiront par contre peut-être frustrés.

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Anecdotes :

  • L’épisode fut suivi par 8,25 millions de spectateurs lors de sa diffusion initiale, en quasi stabilité par rapport à l’épisode précédent.

  • Home again aurait du être diffusé en seconde position, à la place de Founder’s Mutaton. Cette inversion fut décidée par Chris Carter estimant que les fils rouges de la saison étaient mieux développés de la sorte.

  • Sheila Larken reprend ici le rôle de Margaret Scully, qu’elle aura en tout interprétée dans 17 épisodes des X-Files.

  • Contrairement à la rumeur qui s’était propagée su Internet. Home Again n’est pas la suite d’Home, épisode très apprécié de la quatrième saison (1996). Toutefois les deux récits partagent des points communs tels une narration par Glen Morgan, une tonalité très sombre, des scènes gore et même la présence ironique d’une charmante ancienne chanson en contrepoint d’un abominable meurtre, le Downtown (1964) de Pétula Clark succédant au Wonderful! Wonderful ! de Kenny James (1957).

  • Mulder décrit le Tulpa comme une créature on violente, incapable de blesser quelqu’un et encore moins de tuer. Il a cependant affronté l’un d’entre eux dans l’épisode Arcadia (6.15) et celui-ci y commet plusieurs meurtres.

  • "You two have experience with these, um, spooky cases" déclare le shérif à Mulder et Scully, un clin d’oeil au surnom Spooky par lequel Mulder est souvent désigné au FBI.

  • We made this decision déclare Scully à Mulder, à propos de l’abandon et de l’adoption de William. Or, quand cela est survenu (William, 9.16), Mulder était en fuite. Il ne découvre la situation, via Skinner, que dans ce qui était alors ultime épisode de la série, The Truth.

  • Lors de l’ultime scène finale, Mulder est appelé Fox par Scully. Cela n’était pas arrivé depuis Tooms (1.21), en 1994, durant leur conversation dans la voiture.

  • Nous entendons pour la première fois Charles Scully, frère de Dana seulement évoqué jusqu’ici au cours de la série. Son apparence physique demeure un mystère. La voix de Charlie au téléphone (rien à voir avec Drôles de Dames) est assurée par Andrew Morgado, l’un des techniciens du son de l’équipe de tournage.

  • Plusieurs références à l’épisode One Breath sont effectuées au cours du récit, Scully s’y trouvait dans le coma, tout comme ici sa mère.

  • Avec son complice James Wong, Glen Morgan avait déjà fait mourir le père de Scully lors de l’épisode Beyond the Sea (1.13). La sœur de Scully, Melissa, meurt dans l’épisode Paper Clip (3.02), mais sous la plume de Chris Carter.

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5. BABYLON 
(BABYLON)

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Scénario : Chris Carter
Réalisation : Chris Carter

Résumé :

Après qu’un attentat suicide ait dévasté une galerie d’art du Texas, Mulder et Scully sont approchés par les Agents Einstein et Miller. Ces derniers, qui évoquent fortement le duo vedette en plus jeune, sont à la recherche d’un moyen de communiquer avec l’un des terroristes ayant survécu, mais plongé dans un coma irréversible. Le but est d’obtenir des informations permettant de prévenir une autre attaque. Scully et Miller œuvrent paisiblement sur un dispositif scientifique, mais Mulder agace prodigieusement Einstein, une cartésienne au caractère bien trempé, en évoquant doucettement un champignon hallucinogène aux vertus miraculeuses. D’une manière inexplicable Mulder remporte cependant son pari, malgré qu’Einstein ne lui ait secrètement fourni qu’un placébo. 

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Critique :

Avec sa succession échevelée de scènes fortes ou renversantes, mais aussi la multiplicité et la profondeur des sujets abordés, Babylon prend le risque  de laisser une impression de trop plein au spectateur peinant à s’adapter au rythme trépidant de l’ensemble. Il s’agit d’ailleurs d’une (relative) faiblesse de cette mini-saison, tendant à remplir à ras-bord chacun de ses opus, hormis celui de Darin Morgan, au parfait équilibre. On peut y voir la conjonction du long hiatus précédent sa survenue, de son faible nombre d’épisodes et de la double casquette systématique entre réalisateur et auteur. Chaque œuvre manifeste l’ambition de composer comme un manifeste de la série, jusqu’au risque de démesure.

Et pourtant, au sein de ce qui ressemble de prime abord à un récit épars, Chris Carter impulse avec soin un thème central, celui de l’incommunicabilité, fléau de notre monde contemporain si éclaté. Toujours désireux, après My Struggle, d’y insérer les X-Files, il prend comme thème la Tour de Babel, symbole de l’incompréhension installée entre les peuples, et sise au sein de ce Moyen-Orient plus que jamais déchiré par des conflits enchevêtrés, épicentre de notre chaos. L’évocation du terrorisme islamique y fait pleinement écho, avec un propos plus pessimiste que ne le montre le happy end du récit. On est ainsi sidéré de voir Mulder aborder l’esprit d’un Musulman via une image aussi catholique que celle d’une Pietà : la difficulté à communiquer provient de nos différences culturelles profondes, même si la volonté peut in fine passer outre. Carter évite de pointer du doigt un seul camp, montrant avec force comment on peut s’enfermer dans la confrontation et le ressentiment, à travers l’infirmière et les agents de la sécurité.  

Privilège du showrunner, Chris Carter personnalise également à l’extrême le récit, en élargissant son thème de l’incommunicabilité à celle installée entre différents plans d’existence. Il en va ainsi du cœur céleste, incompréhensible mais transcendantal, de l’évocation d’un espace spirituel on l’on se tient avant de passer totalement dans l’au-delà et du mystère même de ce qui  est réellement advenu à l’Agent Fox Mulder ce jour-là, à l’hôpital de Dallas ou dans la Quatrième Dimension. Le plan final recoupant celui d’Improbable souligne encore cette idée d’une force supérieure œuvrant au-delà de notre perception, que certains appelleront Dieu. 

Le choix d’une bande son très riche, composée de chansons reconnaissables, distinctes des mélodies de Snow, souligne également un parallèle subtil entre les deux épisodes, à l’instar de Home et Home Again. Ce procédé contribue également à arrimer les X-Files à la modernité, ce type de bande sonore étant plus fréquent parmi les séries contemporaines (Supernatural, Sons of Anarchy…) que durant les 90’s. Le parti-pris spiritualiste de Carter pourra lui aussi dépister une partie du public, il apparaît néanmoins fascinant par son pouvoir d’évocation et inscrit l’opus parmi une tradition féconde des X-Files, exprimée entre autres par Le Message, Les Chemins de la bénédiction / Opération presse-papiers, Le pré où je suis mort, Cœurs de tissu, Amour fou, Délivrance, Audrey Pauley

Sur un ton davantage léger et humoristique, cette difficulté à communiquer se prolonge au sein du relationnel entre les personnages. L’irruption du duo dynamique Einstein / Miller suscite ainsi une résurrection de la farouche opposition entre croyants et sceptiques, et des dialogues de sourds désormais devenus impossibles entre Mulder et Scully. L’effet miroir pourrait résulter artificiel, mais Carter pare fort judicieusement à ce  danger en scindant les couples, permettant aussi à Mulder et Scully de retrouver pleinement leur registre de naguère, afin de participer à la fête. Si une communicabilité féconde s’établit au sein du duo Scully / Miller, celui-ci paraît relativement atone vis-à-vis de l’explication de l’hilarante explication de gravures se déroulant à-côté, cotillons et serpentins. Miller a finalement avant tout besoin de quelque chose en croire face à l’horreur, et Scully lui apporte cette présence rassurante. Elle-même est animée par des sentiments quasi maternels, dans le contexte que l’on sait et développé tout au long de la saison autour de William. De plus, face à la mère éplorée, elle est évidement émue  de se trouver derechef confrontée au malheur au sein d’un hôpital, décidément un autre fil rouge, pas le meilleur, de la période. On prend les paris pour le season finale, quel suspense. 

Si l’excellent Robbie Amell apporte une belle sensibilité à Miller, on doit avouer que sa prestation se voit quelque peu éclipsée par l’énorme sensation Lauren Ambrose que véhicule le deuxième duo. Les prises de bec entre Mulder et Einstein à bord du Crazy train se montrent ébouriffantes de drôlerie, tant les répliques vachardes de l’une et ironiquement mielleuses de l’autre tournent au tir de barrage. On rit aux larmes, il s’agit probablement d’une des scènes les plus drôles d’une série en comptant pourtant un nombre plus que conséquent. L’abattage et le chien d’une sublime Lauren Ambrose tout feu tout flammes font merveille (quelle vitalité et quel tempérament !), tandis que Duchovny retrouve avec gourmandise un registre goguenard joyeusement proche des vannes d’Hank Moody. Après Mulder et Scully, Reyes et Doggett, mais aussi Frank et Catherine Black, on s’émerveille de la faculté de Chris Carter à réinventer des couples passionnants. On apprécie également que Lauren Ambrose vienne couronner cette succession de comédiens ayant tenu des rôles réguliers au sein de séries notables, et acceptant d’intervenir en simples guests  durant cette saison, parce que ce sont les X-Files.

Le relationnel sert aussi judicieusement de caisse de résonnance à l’épiphanie apportée par le voyage spirituel (ou le trip à l’acide, au choix) de Fox Mulder. La sagesse apportée par ce dépassement de l’incommunicabilité permet à Einstein et Miller de franchir une étape. Outre de fort heureusement montrer que Miller n’est pas une carpette face à sa partenaire bulldozer (le duo ne doit pas être déséquilibré non plus), leur ultime scène montre le progrès accompli dans leur complicité. Il reste du chemin à accomplir (le casque remis, le silence) mais qu’importe, ils ne sont qu’au début de leur voyage. De leur côté Mulder et Scully atteignent une plénitude sereine dans leur relation fusionnelle : au-delà de l’amour ils deviennent  désormais les âmes sœurs qu’ils n’étaient pas encore dans Le pré où je suis mort, tout en s’insérant dans la musique céleste. Par cette magnifique scène de fin, Chris Carter réaffirme qu’au cœur des X-Files et de leur succès impérissable, on trouve bien la relation entre leurs deux protagonistes. 

Certes, tout n’est pas parfait dans Babylon. Carter joint les différents fils d’une intrigue, parfois écartelée entre loner et épisode décalé, avec moins de subtilité et de grâce que Darin Morgan dans la merveilleuse fable que représente Mulder et Scully meet the Were-Monster. Efficace derrière la caméra, il cède néanmoins à son péché mignon de placer dès qu’il le peut une spectaculaire explosion dans ses récits. Cela s’avère régulièrement contre-productif, comme lors de l’intervention extraterrestre inutile et pompière de My Struggle, ou encore ici. Outre le souvenir du 11 septembre parmi le public américain, passer de personnes explicitement montrées en train de brûler vives à des scènes humoristiques relève quelque peu du grand écart, à moins d’être devant Supernatural. L’odyssée fongique (un champignon cousin du fongus de Spores ?) s’avère tellement énorme, tellement irrésistible, tellement hors normes au sein de la série, qu’elle menace d’éclipser tout le reste, y compris l’entrée en scène du nouveau duo. On ne boudera toutefois pas son plaisir d’enfin retrouver les Lone Gunmen, ne serait-ce que pour un bien fugace instant. Mention spéciale à Melvin, comme souvent, il reste tellement dommage qu’il ne puisse rencontrer l’Agent Einstein.

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Anecdotes : 

  • Lauren Ambrose (Agent Einstein) se fit connaître pour le rôle de la rebelle, azimutée et talentueuse photographe Claire Fisher, dans la série Six Feet Under (2001-2005). Elle mène depuis une belle carrière au cinéma et à la télévision (Torchwood : Miracle Day), mais aussi à Broadway en tant qu’actrice shakespearienne. Elle est également la chanteuse des Leisure Glass, formation de Jazz et de Ragtime fondée en 2009 et se produisant régulièrement dans les nightclubs de Manhattan.

  • Ancien mannequin, Robbie Amell (Agent Miller) a déjà tenu des rôles récurrents dans plusieurs séries, dont ceux de Stephen Jameson dans The Tomorrow People et de  Firestorm dans The Flash. Il est un cousin de Stephen Amell, la vedette d’Arrow

  • Durant la première partie de l'hallucination (ou épiphanie) de Mulder, on entend Somethin' Bad, de Miranda Lambert et Carrie Underwood. Cette chanson fut l'un des plus grands succès country de 2014.

  • Quand Mulder arrive au bal  on entend un remix d’Achy Breaky Heart, un tube country de Billy Ray Cyrus (père de Miley). Le titre fut sélectionné aux Grammy Awards comme meilleure chanson de l’année, mais le trophée revint à Eric Clapton pour Tears in Heaven. Toujours très populaire, la chanson connaît de nombreuses reprises ou parodies, et sert régulièrement de support à des chorégraphies country. 

  • Quand Mulder est attablé avec Skinner et les Bandits solitaires, on entend la chanson country Honky Tonk Badonkadonk, de Trace Adkins (2005). La chanson évoque la danse de jeunes femmes callipyges, comme vu dans l’épisode et a été ponctuellement employée par Craig Ferguson dans son Late Late Show. 

  • Lors de la séquence entre Mulder et l’Homme à la Cigarette, on entend la chanson Misery is the River of the World, de Tom Waits, parue dans son album Blood Money, en 2002.

  • Lors de leur dernière scène, quand Miller écoute une chanson avant l’arrivée d’Einstein, il s’agit de Secret Heart, de Ron Sexsmith (1995).

  • Lors du dialogue final entre Mulder et Scully, on entend la chanson folk-rock Ho Hey, des Lumineers (2012). Ce disque de platine a été repris par  plusieurs séries télévisées (Vampire Diaries, Bones, Nashville, Hart of Dixies) ainsi que dans l’adaptation au cinéma de L'Écume des jours (2013).

  • Durant la conversation avec Scully, Mulder cite le Psaume 8.2 du Livre des Révélations : Et je vis les sept Anges qui se tiennent devant Dieu, et sept trompettes leur furent données. Situé après l’ouverture du Septième Sceau, l’événement indique l’imminence de l’Apocalypse. Chacun des Anges va successivement sonner de la trompette et à chaque fois un nouveau fléau s’abattra sur la Terre.

  • Mulder évoque Madame Blavatsky (1831-1891) devant Miller et Einstein (qui n’en demande pas tant). Cette Russe de bonne naissance accomplit plusieurs voyages en Orient et au Tibet, durant lesquels elle rencontra de nombreux mystiques. Elle en tira la conclusion que toutes les religions dissimulaient un même soubassement ésotérique, commun à toute l’humanité. Elle s’impliqua dans la diffusion de cette vérité secrète en fondant la Société théosophique, qui connut un certain écho en Occident, parallèlement à la vogue du spiritisme. Elle réalisa plusieurs fois la démonstration de ses supposés pouvoirs psychiques et médiumniques, contactant notamment les esprits des morts.

  • L’Église Baptiste de Wesboro est évoquée durant le débat télévisé. Fondée durant les années 50, cette église de dimension modeste se fit connaître par sa haine véhémente des homosexuels, exprimée à travers ses prêches et divers événements médiatisés. Elle estime que l’homosexualité constitue le péché le plus grave perpétré contre Dieu et qu’elle devrait être sanctionnée par la peine de mort. 

  • Il y est également fait mention de la fusillade de Chattanooga, ville du Tennessee où cinq Marines furent abattus par Mohammod Youssuf Abdulazeez, Américain d’origine koweïtienne, le 16 juillet 2015

  • L’épisode comporte deux acteurs ayant joué des personnages récurrents dans la série canadienne Continuum, également tournée à Vancouver (2012-2015). L’infirmière désireuse d’achever le terroriste est jouée par Janet Kidder (nièce de Margot), qui y incarnait la mère d’Alec Sadler, interprété âgé par William B. Davis. L’agent secret venu dans le même but est joué par Stephen Lobo, qui y interprétait l’un des terroristes.

  • Les noms d’Einstein et de Miller contiennent des clins d’œil. La thèse universitaire de Scully à eu comme sujet le Paradoxe des Jumeaux d’Einstein et Miller est le nom par lequel Jeffrey Spender, méconnaissable, s’était initialement présenté lors de l’épisode William (9.16).

  • Initialement prévu en quatrième position, l’épisode est finalement le cinquième de la saison. 

  • Le trip de Mulder comporte un (très) bref caméo des Bandits solitaires, qui n’étaient pas apparus depuis l’épisode The Truth, alors le dernier de la série. La saison 10 télévisuelle achève ici de diverger de celle en Comics, puisque cette dernière les a mis en scène bien vivants. 

  • "No one down here but the FBI's most unwanted.", déclare Scully quand Einstein et Miller frappent à la porte, ajoutant qu’elle avait envie de dire cela depuis 23 ans. Il s’agit de la première réplique que lui décocha Mulder quand elle-même se présenta aux Affaires non classes, lors du pilote de la série. 

  • Une banderole montre que l’exposition visée par les terroristes se nomme Ziggourat. Les ziggourats furent d’imposants édifices bâtis dans la Mésopotamie antique et couronnés par un temple. Le récit biblique de la Tour de Babel a été inspiré par la plus célèbres d’entre-elles, la grande ziggourat de Babylone.

  • Le phénomène des « trompettes célestes » évoquées par Mulder a réellement été signalé par de nombreux témoins à travers le monde. Il se traduit par un son ressemblant à celui de l’instrument, entendu comme provenant du ciel, sans aucune source visible. Souvent désigné comme The Taos Hum (du nom de la ville du Nouveau-Mexique où il fut répertorié pour la première fois), il fait l’objet de nombreux canulars vidéo diffusés sur le Net, comme celui montré par Mulder. Parmi les explications avancées, on trouve une multiplication des acouphènes due au style de vie, des infrasons industriels, la désagrégation d’un météore, une oscillation harmonique de l’atmosphère terrestre réverbérée par Titan, une lune de Saturne, ou de faibles secousses telluriques à peine audibles, par exemple provoquées par le mouvement de l’eau sur le fond des océans (à moins que les Etres du Magma ne soient dans le coup). Les radiofréquences extrêmement basses, générées par exemple par les lignes à haute tension, sont également citées, comme elles le furent par Mulder dans l’épisode Drive (6.02), où il abordait déjà le phénomène.

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6. LA VÉRITÉ EST AILLEURS (2/2)
(MY STRUGGLE II)

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Épisode Mythologique

Scénario : Chris Carter, d'après une histoire d'Anne Simon, Margaret Fearon & Chris Carter
Réalisation : Chris Carter

Résumé :

Alors que Mulder a disparu, Tad O'Malley révèle que la phase finale de la Grande Conspiration est sur le point d’advenir. Une pandémie va annihiler l’humanité, hormis une poignée d’élus choisis par les comploteurs dirigés par l’Homme à la Cigarette. Le fléau débute et prend rapidement de l’ampleur, sans que rien ne semble pouvoir l’arrêter. Mais Monica Reyes, passée depuis des années au service de l'Homme à la Cigarette, communique une information cruciale à Scully : la composante alien de l’ADN de cette dernière n’est pas un facteur déclenchant, mais au contraire empêche la destruction programmée du système immunitaire ! Dès lors Scully, aidée par l’Agent Einstein, met au point un remède. Mulder est parvenu à remonter jusqu’à l’Homme à la Cigarette mais est terrassé par la maladie durant leur confrontation. L’Agent Miller parvient à l’exfiltrer et Mulder et Scully se retrouvent enfin, au sein d’une foule en panique. Tous font silence quand un vaisseau extraterrestre survole la scène. 

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Critique  :

A l’occasion de ce final de saison, Chris Carter continue à édifier son décalogue des grandes peurs occidentales contemporaines, un moyen toujours efficace et percutant d’ancrer les X-Files dans la modernité. Après le grand complot devenu global et médiatisé, puis le terrorisme islamique, il aborde ici le réchauffement climatique et la théorie conspirationniste en vogue des Chemtrails, mais davantage encore l’épouvante des pandémies. Sans cesse exacerbé par l’accumulation du SIDA, du H1NI en passant par l’Ebola et autre Zika, ce phénomène éveille une peur profonde. L’écho de la Grande peste noire retentit toujours comme une fin du Monde pour nos sociétés. 

On peut d’ailleurs regretter que Carter ne saisisse pas l’occasion d’établir une référence à MillenniuM, alors que la conclusion de la saison 2 voyait des éléments du Groupe répandre également une épidémie. Il s’avère toujours porteur de développer des liens entre les différents segments d’un univers narratif, et l’événement aurait pu s’insérer comme une répétition à plus petite échelle du drame ici en cours. C’était la séquence « MillenniuM mérite aussi de revenir».

Après une nouvelle ouverture réussie en forme d’album photos, la narration de la pandémie suscite un indéniable impact auprès du spectateur, car le scénario joue pleinement la carte de la sidération, à l’instar de la longue et effroyablement fascinante première partie du Fléau, chef d’œuvre de Stephen King. Cet aspect crucial de l’épisode se révèle particulièrement réussi, entremêlant avec un parfait sens du tempo différentes sources d’informations, afin de brosser un panorama particulièrement évocateur du déroulement de la tragédie. Les événements se succèdent à un rythme le plus souvent soutenu, de quoi faire oublier la passivité de personnages centraux longtemps simples commentateurs horrifiés des événements. 

De fait, le scénario constitue une variation efficace d’un grand classique, le premier mouvement d’un drame voyant les antagonistes triompher lors de l 'accomplissement de leur maître plan, tandis que les héros sont dans les cordes. De ce point de vue, le récit accorde judicieusement une place importante à l’Homme à la Cigarette, avec la clef de diaboliques dialogues et un grand récital de William B. Davis, dont les années n’ont en rien altéré l’aura. La confrontation avec Mulder demeure sans dote le moment paroxystique de l’opus, d’autant que découvrir Mulder l’arme au poing face à C.G.B. apporte un savoureux clin d’œil de plus au passé au sein de cette saison, ici à One Breath (2.08) et à Talitha Cumi (3.24). Contempler le Génie du Mal exposer sa machination au Héros avec une délectation perverse et narcissique demeure décidément un insubmersible classique, et l’on ne s’en plaint certes pas. 

L’événement se voit d’ailleurs joliment annoncé par la séquence de Monica Reyes. On apprécie que Monica dispose de véritables dialogues et d’une authentique participation aux événements, contrairement aux infortunés Lone Gunmen et Margaret Scully, voire Skinner lui-même. La positionner en nouvelle source d’informations de Mulder et Scully reste un moyen astucieux et rapide de la faire revenir aux affaires, d’autant que l’endroit de la rencontre entre elle et Scully sonne très juste, on croirait y voir Mulder et Deep Throat y palabrer jadis. Annabeth Gish apporte avec naturel sa coutumière présence, elle réalise une prestation marquante en à peine une poignée de minutes, rendant Monica d’une lumineuse dignité face aux accusations un rien puériles de lâcheté proférées par Scully, brûlante de colère rentrée face au Grand Fumeur. On espère la revoir en saison 11, tout en craignant le destin habituellement connu par les sources du service des Affaires non-classées ! 

La gestion des autres personnages convainc moins. L’intrigue souffre malgré tout de se voir quasiment privé du moteur formé par le duo Mulder / Scully, mais aussi Miller/Einstein. Dans ce récit aux personnages sans doute trop nombreux, ces derniers avancent en ordre dispersé. Le seul tandem réellement constitué, entre Scully et Einstein, ne produit guère d’étincelles. Il demeure en effet enserré dans des postures finalement assez convenues de crise sanitaire, au-delà du twist astucieux de l’ADN alien protecteur (assez envisageable après l’intervention salvatrice du Bounty Hunter auprès de Teena Mulder, à la fin d’Herrenvolk). Les situations conventionnelles ne siéent guère à la personnalité haute en couleurs de Lauren Ambrose et on a déjà beaucoup vu et revu Scully dans un hôpital ces derniers temps, d’où un sentiment d’enfermement du personnage. Miller joue principalement les utilités, même si cela permet de confirmer la finesse du jeu de Robbie Amell. My Struggle II s’affirme également comme l’un des épisodes où la participation concrète de Mulder à l’action principale résulte la plus ténue, tandis que Tad O'Malley demeure également en marge. 

Ce final de saison présente également la particularité de porter à son paroxysme ce qui restera sans doute la faiblesse transversale de cette 10ème saison, pourtant si convaincante par tant d’aspects : des épisodes dont le trop plein impulse une schématisation des scénarios, relative mais malgré tout dommageable, afin de pouvoir tenir dans le format. Ici l’intrigue aurait clairement nécessité un double épisode, afin d’éviter ellipses et raccourcis. Les six semaines de disparition d’O'Malley et sa connaissance quasi absolue des rouages de la conspiration ne se voient en rien explicités, de même que l’identité du personnage ayant écrit le message sur la voiture de Scully dans My Struggle. Carter ne va pas nous faire son Moffat non plus, à apporter des réponses à des questions posées trois saisons plus tôt. On ne comprend pas très bien non plus pourquoi Mulder se refuse à communiquer avec Scully ou Skinner. La volte-face accomplie par Monica se justifie de manière expéditive (la situation aurait plus naturellement convenu à Marita), car ce qu’en attendait concrètement C.G.B. reste flou, au-delà des cigarettes ! Bien entendu le silence autour de John Doggett est assourdissant. 

On nous refait le coup de la première analyse médicale défectueuse, exactement comme dans My Struggle I. La bagarre entre Mulder et l’homme de main résulte aussi inutile à l’intrigue que hors sujet au sein de la série, elle ne fait que souligner à quel point une confrontation avec Alex Krycek aurait été électrique, voire abyssale. La recherche d’un effet visuel autour du faux nez du C.S.M. semble ridicule quand on se souvient que l’homme s’est pris un missile dans la figure. On veut bien fermer les yeux sur l’invraisemblance de sa survie, mais il faut nous aider un minimum en n’en rajoutant pas vainement. Quand le récit se relance en passant de la peinture du fléau à la contre-attaque menée par Scully et Einstein grâce à Monica (ce sont les femmes qui sauvent le monde, dans les X-Files également), on n’évite pas un problème de timing : compte tenu des incontournables délais de production et de diffusion, jamais le remède n’arrivera à temps pour éviter une catastrophe majeure, le suspense en prend un coup. Le thème de William surgit un peu de nulle part en toute fin d’histoire, comme une référence obligée au fil rouge de la saison (des cellules souches à administrer en urgence, sérieusement ?).

Autant d’éléments qui auraient été abordés avec davantage de réussite avec une moindre nécessité de presser le pas. Mais ces réserves n’empêchent pas ce final de saison d’apparaître très prenant, parfois enthousiasmant, validant ainsi la richesse de la nouvelle mythologie développée (sans Super Soldats) par Chris Carter. Cette trop brève saison, même si parfois menée à un train d’enfer, aura confirmé le potentiel inaltéré de ces X-Files dont elle constitue une synthèse convaincante des diverses facettes, tout en incorporant de performants nouveaux personnages. On attend déjà la suivante de pied ferme. Le cliffhanger apporte d’ailleurs un joli coup d’audace, pleinement dans la tradition de la série.

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Anecdotes :

  • La diffusion du final de la saison 10 a réuni 7,6 millions de téléspectateurs aux USA. 

  • Les évènements de la saison 10 ont pris place sur une période de six semaines.

  • "Musings of a Mad Man" commente Mulder quand l’Homme à la Cigarette lui expose son maître plan à la Moonraker. L’épisode Musings of a Cigarette Smoking Man (4.07) relatait la vie du grand adversaire de Fox Mulder, du moins telle que narrée par les Bandits Solitaires !

  • Allongé sur son lit de grand brûlé, le Fumeur demande une cigarette à Monica. La scène évoque la conclusion de Fire (1.12), où l’Incendiaire agissait de même. 

  • Le devenir de l’Agent Doggett n’est pas évoqué lors de la narration des événements par Monica. Son interprète, Robert Patrick avait décliné la proposition de participer à la nouvelle saison. 

  • Tad O'Malley évoque des diffusions d’aluminium dans le ciel comme propagateur  de la pandémie. L’épisode reprend ici la légende urbaine de la conspiration dite des Chemtrails, apparue durant les années 2000, selon laquelle les traînées de condensation laissées par le passage des avions à réaction contiennent secrètement des produits chimiques. Ceux-ci sont répandus par les autorités, dans des buts inavouables. Cela servirait notamment à tester des arme chimiques ou biologiques, voire climatiques. L’obscurcissement du ciel, le contrôle de la natalité ou la manipulation des esprits par des substances hallucinogènes sont également évoqués.

  • Un des docteurs se nomme Oscar Griffiths. Il s'agit en fait du nom du fils de Gillian Anderson.

  • Pour la dix-neuvième fois de la série, l'indicatif de la série « The Truth is out there » est remplacé par « This is the end ».

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Esprit vengeur (Home Again25)