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Saison 1Saison 3

Wycliffe

Saison 2 


1. COUPABLE PAR AMOUR
(ALL FOR LOVE)

Scénario : Steve Trafford. Réalisation : Martyn Friend.

Résumé :

Un trafiquant de drogue, John Bonetti, s’évade de prison avec la complicité d’une visiteuse bénévole, Jane Hardy, tombée amoureuse. Il s’empresse de tuer l’indicateur qui l’a donné. Wycliffe pense que Jane Hardy joue un rôle bien important dans cette affaire qu’elle veut bien le dire.

 

Critique :

On trouve notre superintendant bien naïf envers la suspecte Jane Hardy qui au fur et à mesure que l’intrigue avance se révèle une véritable criminelle.

Le téléspectateur a toujours une longueur d’avance sur le policier. Il nous est montré que Jane est machiavélique, œuvrant pour récupérer le magot de Bonetti qu’elle tue. Puis elle va doubler son associé George Warder.

Le sergent Potter ayant brillé dans l’enquête et reçu les félicitations de son chef, un Kersey jaloux va lui donner les tâches les plus rébarbatives. On ne soupçonnait pas tant de mesquinerie voire de méchanceté de la part du fidèle adjoint de Wycliffe.

Devant ce dernier, Jane pleurniche et joue les énamourées inconscientes. Si l’épisode est excellent, on ne peut pas dire que notre héros est au mieux de sa forme et de sa perspicacité.

On découvre comment la surveillance vidéo d’un magasin permet à notre équipe de policiers de se remettre sur la bonne piste. Jamais désarçonnée pour mentir, Jane Hardy, acculée, trouvera de nouveaux mensonges. Avant de mettre cartes sur table avec Wycliffe pour lui proposer un étrange marché.

L’épisode se regarde d’une traite sans ennui, sans réserver cependant de surprises au spectateur toujours mis dans la confidence avant la police.

Parallèlement à l’enquête, on découvre les coulisses du pouvoir de la police britannique, les rivalités, et bien peu certainement ont la vocation de Charles Wycliffe qui ne montre aucun goût pour la politique intérieure de sa profession.

Ce début de saison 2 augure du meilleur, même si pour le personnage de Jane, une actrice davantage « femme fatale » aurait mieux convenu.

Anecdotes :

  • Lucy a un boy-friend que l’on ne voit pas : Simon.

  • Cathryn Harrison (1959-) qui incarne Jane Hardy a arrêté de tourner en 2001. On l’a vue dans « Le retour du Saint », « Bergerac », « Hercule Poirot », « Les cadavres exquis de Patricia Highsmith ».

  • Nous apprenons que le chef de Wycliffe – qui vient de prendre sa retraite – était le superintendant chef Ted Turner. La place est vacante, Wycliffe n’en veut pas.

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2. LE CHEVAL DE TROIE
(THE TROJAN HORSE)

Scénario : Steve Trafford. Réalisation : Patrick Lau.

Dans le coffret Elephant Films, l’épisode se trouve par erreur sur le 2e DVD, donc en quatrième. C’est une série/feuilleton où il est fait parfois allusion à des évènements passés.

Résumé :

Alison Keir est enlevée dans un haras. Wycliffe soupçonne dès le début le mari, Alex. Il aurait une liaison avec l’épouse du major Tregelles, d’un haras rival.

Critique :

Premier épisode de la série avec des scènes cruelles. Ce ne sera pas le dernier, mais on ne s’y attend pas dans ce genre de séries. La malheureuse Alison est enchaînée dans un endroit inconnu, un cellier. Puis tuée.

Cet épisode au départ est une affaire criminelle classique, mais elle dissimule en fait une terrible histoire de vengeance qui remonte à des années dans le passé, huit ans. L’assassin est « le cheval de Troie » qui s’est introduit chez son ennemi.

La violence de cet opus étonne car « Wycliffe » ne nous y avait pas habitués. Notre superintendant s’acharne contre le mari, qui a un bon mobile, mais le téléspectateur sait que la victime a été torturée avant d’être tuée puis a fait l’objet d’une mise en scène macabre.

Jack Shepherd ne semble pas vraiment s’impliquer dans ce scénario. Il reste assez insensible (alors que ses partenaires montrent leurs personnages véritablement émus).

J’ai trouvé John McArdle, qui incarne le mari Alex Keir, plutôt mauvais dans son jeu. L’épisode nous met mal à l’aise, pas à cause de l’horreur du crime, nous en verrons d’autres similaires et pourtant excellents. Pas vraiment possible de parler du jeu du meurtrier à moins de dévoiler le spoiler. Sans être un ratage, c’est le moins depuis le début de la série, raison pour laquelle je n’ai attribué que deux étoiles. Les acteurs ne se sentent pas impliqués par le drame faute à une mise en scène mollassonne.

Jimmy Yuill dont le personnage évoque la guerre des Malouines se montre le plus talentueux et émouvant. Son Kersey nous surprend beaucoup. A partir de cet épisode, on garde en mémoire que c’est un vieux soldat reconverti dans la police. On aurait aimé que Shepherd soit aussi talentueux dans la scène finale. Peut-être a-t-il choisi de jouer tout en retenue pour ne pas tomber dans la sensiblerie ? Le criminel, qui a agi par vengeance, nous glace d’effroi. En ce sens, l’épisode est terriblement réaliste. On préfère l’univers plus feutré habituel.

Anecdotes :

  • Wycliffe est né dans les environs de Leeds (Yorkshire).

  • Lucy a fait beaucoup d’équitation. Elle n’est donc pas dépaysée dans cet épisode.

  • Disposant d’un budget serré, Wycliffe refuse de payer une balade à cheval à Lucy pour les besoins de l’enquête.

  • Doug Kersey était dans les parachutistes durant la guerre des Malouines. Il évoque en pleurant un de ses copains mort mutilé par les argentins.

  • Nous faisons la connaissance de Simon Granger (Dominic Wallis), le petit ami de Lucy. Il est journaliste.

  • Nous apprenons que le prénom du sergent Dickson est « Andy » (Andrew). Lucy l’appelle ainsi.

  • Franks, le légiste, appartient au « Royal Cornwall Hospitals Trust ».

  • Kersey conduit une Ford Escort MKV rouge.

  • Anachronisme dans cet épisode, il y a huit ans (Nous sommes en 1995), un homme a risqué la peine de mort (1987). Or, la dernière exécution dans ce pays a eu lieu en 1964 et la peine capitale a été abolie en 1969.

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3. CHARADES
(CHARADES)

Scénario : Jonathan Rich. Réalisation : Martyn Friend.

Résumé :

Un couple fortuné, les Miller, arrive dans sa résidence secondaire en Cornouailles et trouve un malheureux cloué à leur porte. Pourtant, dès le début, Wycliffe ne peut s’empêcher de trouver que quelque chose cloche chez le mari, David Miller.

Critique :

Pas de whodunit possible dans cette enquête en raison de l’attitude de Wycliffe qui dès le début soupçonne David Miller, le touriste, d’être l’instigateur de tout. Et cela sur sa seule intuition ! Alors que d’autres semblent des coupables bien plus évidents, comme ce vieil homme qui hait les touristes au point d’être presque un indépendantiste !

Lucy se fait draguer par le beau Colin Drake, dont les moyens d’existence sont bien obscurs. Il se révèle vite un personnage peu recommandable.

Cet épisode de « Wycliffe » laisse de côté l’aspect policier pour se concentrer sur la psychologie des personnages, la femme riche et stérile de David Miller que ce dernier aimerait bien voir partir les pieds devants. Il est vrai qu’elle est fortunée et lui non, en cas de divorce il perd tout. Wycliffe, qui a deux enfants, ne l’aime pas car il manifeste trop un désir de paternité et couvre de cadeaux les enfants des autres, comme s’il était le père Noël.

Lucy plaît beaucoup, il en faut pour tous les goûts, du patron de restaurant qui n’est pas étonné qu’elle ne puisse se joindre à une soirée conviviale à Colin Drake qui lui fait les yeux doux. Mais elle est fidèle, dès le début, à son arrivée à l’hôtel, elle appelle son boy-friend Simon. Tandis que Wycliffe, lui, s’entretient avec sa fille, lui demandant de ne pas déranger sa mère.

En raison de la forte intuition de notre héros, il n’y a pas de suspense sur le nom de l’assassin, tout du moins du commanditaire, le mari David Miller. Mais lucy ne haussera pas un sourcil alors qu’elle a – amicalement – longuement conversé avec l’assassin, Drake.

Pour apprécier cet excellent opus, il faut se sortir du canevas du roman policier pour apprécier toute la finesse de l’intuition de Wycliffe. La réalisation est soignée au possible, favorisant les extérieurs, en dehors de quelques scènes de pub. On nous propose deux coupables de remplacement :  Gary Penhale, surpris en train de jeter une pierre sur la villa des Miller (c’est là que l’on s’aperçoit, à la mine déconfite de Charles Wycliffe, qu’il a son idée bien arrêtée sur l’affaire et que cet incident le gêne plus qu’autre chose) et le fanatique Donald Thorne, un vieil homme distingué qui est aussi indépendantiste qu’un irlandais. On est un peu gêné par l’obsession du superintendant contre Miller, même lorsque ce dernier offre des cadeaux aux enfants, il le soupçonne, ne l’aime pas. Wycliffe ne fonctionne pas avec des preuves dans le cas présent mais en fonction de son intime conviction qui parfois ressemble à un délit de faciès pour un homme ordinaire et qui n’a pas l’air de pouvoir faire du mal à une mouche.

Anecdotes :

  • Nous apprenons dans cet épisode que le prénom de Potter est Ian.

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4. PERDU DE VUE
(LOST CONTACT)

Scénario : Isabelle Grey. Réalisation : Patrick Lau.

Résumé :

Un cadavre non identifiable est rejeté par la mer à Mullion Cove. Deux femmes pensent qu’il pourrait s’agir de leur mari.

Critique :

Premier ratage de la série, je me suis vraiment ennuyé durant cet épisode. Il ne se passe pas grand-chose, et en dehors de quelques confidences de Wycliffe sur la mort de son père, « Perdu de vue » tourne au ralenti. On se croirait dans le plus mauvais des « Maigret ».

Des deux « veuves » potentielles, l’une ment, et l’on comprend rapidement laquelle. L’enquête s’éternise et tourne en rond. Le script d’Isabelle Grey n’a pas été assez travaillé. On le comprend lors d’une des scènes finales, lorsque Wycliffe dit à Doug Kersey d’annoncer la mort aux enfants de la victime « Quoi que vous disiez Doug, il se le rappelleront toute leur vie ». Une bonne scène dans un océan d’ennui.

Mullion Cove est très beau et bien filmé, mais cela ne suffit pas à faire un film. Avec ce scénario gruyère, les protagonistes sont contraints de palabrer sur des considérations générales sur l’existence, la famille, la vie, ce qui nous donne un épisode très verbeux, sans aucune action.

Au quatrième épisode de la saison 2, nous n’avons toujours pas vu Wycliffe en famille, avec femme et enfants. Cela reste évoqué. Le début de l’épisode est peu ragoûtant pour les âmes sensibles, avec le cadavre dont le visage est mangé par les crabes. L’ambiance est au réalisme et au sordide de deux existences ratées, celles de deux couples et de deux familles.

On ne voit pas Simon, même s’il en est beaucoup question. Que l’on se rassure, « Perdu de vue » est un faux pas, et la série compte plus d’opus à quatre étoiles que d’échecs. Patrick Lau n’a pas de chance, il avait déjà signé un épisode très moyen, « Le cheval de Troie », mais tout de même nettement meilleur que celui-ci.

Profitant de cet opus mineur, Jack Shepherd prend son temps pour peaufiner son interprétation du superintendant. On découvre que sous sa réserve et ses attitudes parfois en retrait, il impulse au personnage un côté assez dur, bien plus que Barnaby. La scène finale, où il dit « Un peu de décence, Madame » à celle qui a voulu faire croire son mari mort pour toucher l’assurance, est à ce titre édifiante. Wycliffe est un faux gentil qui cache en fait une personnalité bouillonnante et explosive.

Anecdotes :

  • Franks, le médecin légiste, évoque la visite de la mère de Wycliffe chez ce dernier et le fait qu’elle ne s’entende pas avec l’épouse du policier, dont le prénom est Helen. Wycliffe répond qu’à cause de l’enquête il n’aura pas le temps de rentrer chez lui.

  • Lors d’une discussion sur la famille en général, Lucy dit qu’elle ne dépendra jamais de Simon financièrement. Wycliffe lui est plus « vieux jeu » sur la question du mariage.

  • Wycliffe évoque à nouveau le suicide de son père quand  il avait neuf ans : il s’est tiré une balle en pleine tête.

  • Kersey est célibataire et n’a personne dans sa vie.

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5. BRACONNAGE MORTEL
(FOUR AND TWENTY BLACKBIRDS)

Scénario : Julian Jones. Réalisation : Steve Goldie.

Résumé :

Un automobiliste ivre renverse un homme sur une petite route de campagne. Il rencontre un jeune homme et le presse d’avertir la police, mais ce dernier lui fait remarquer qu’un incendie vient d’éclater dans une ferme avoisinante. Derrière cette affaire se cache un homme qui fuit pour avoir découvert une terrible épidémie porcine chez une voisine fermière.

Critique :

Cette histoire de contamination animale porcine est certes intéressante, mais le scénario a tendance à vouloir partir dans tous les sens. Wycliffe comprend rapidement que l’homme qui a été renversé est un certain George Totts et qu’il est séquestré quelque part. Totts n’a pas été conduit dans un hôpital, et une course contre la montre s’engage. Hélas, « Wycliffe » est une série réaliste et pessimiste où les miracles n’arrivent pas.

Il est dommage que Julian Jones ait compliqué à ce point son script, car l’idée de départ était très bonne, et d’ailleurs, on ne s’ennuie pas. Au contraire, il y a tellement de rebondissements que nous ne parvenons pas à tout retenir. Trop de personnages aussi : le chauffeur ivre Patrick Rowland un temps soupçonné d’avoir tout inventé, Stephen le fils du vétérinaire, l’employé de Totts Rob Mills, enfin l’éleveur de porcs, Mrs Prentice (et sa petite fille Jenny). Le tout est compliqué par des problèmes de budget qui sont opposés à Wycliffe dont on estime que la présence avec son équipe est trop coûteuse, et que la police locale ferait très bien l’affaire.

Ce n’est pas un grand épisode mais on est loin du ratage. J’ai hésité entre deux et trois étoiles. Les personnages, s’ils sont trop nombreux, sont hauts en couleurs.

« Vous n’y connaissez pas grand-chose au travail de la ferme, n’est-ce pas Monsieur Wycliffe ? »

« En effet »

« J’ai des bovins et des porcs, cela n’a rien à voir avec des moutons ».

Le malheureux Totts est victime d’un concours de circonstances, de paysans acculés à la pauvreté, mais pas foncièrement méchants, voulant taire un cas de grave contamination qui les ruinerait. Le meurtre relève plus de l’accident que du crime prémédité. Nous avons ici un portrait de la Grande-Bretagne miséreuse. En ce sens, ce n’était peut être pas une enquête pour Wycliffe comme l’estime la police locale.

L’épisode date du 16 juillet 1995, soit un an avant que l’affaire de la vache folle éclate. Le scénariste a rédigé un script prémonitoire.

Mrs Prentice et sa petite-fille Jenny sont des personnes dépassées par la situation. Wycliffe semble presque les comprendre. Ce qui est rarement le cas avec les suspects dans la série.

Parallèlement à l’histoire déjà complexe se développe un fil rouge, les tensions entre le vétérinaire et le fils de sa première femme, ce qui alourdit le sujet inutilement. Le spectateur (en dehors des principaux rôles) a parfois du mal à comprendre qui est qui.

En tout cas, face à ce qui l’attend dans l’affaire suivante, Wycliffe n’a affaire ici qu’à des agneaux, même s’il y a mort d’homme et non assistance à personne en danger.

Anecdotes :

  • Lucy a rompu avec Simon, Wycliffe y fait allusion.

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6. LES JOIES DE LA FAMILLE
(HAPPY FAMILIES)

Scénario : Siân Orrells. Réalisation : Steve Goldie.

Cet épisode est sans conteste le meilleur de la série, toutes saisons confondues.

Résumé :

Une jeune fille de seize ans, Ruth Penrose, est retrouvée morte dans des conditions atroces, un sac sur la tête, enfermée à clef dans le placard d’un laboratoire de chimie, avec un tuyau de gaz ouvert. Wycliffe se retrouve devant l’affaire la plus épouvantable de sa carrière entre un professeur aux tendances pédophiles, et des adolescentes diaboliques derrière leur apparence d’ange.

Critique :

Il est véritablement étonnant qu’après cet épisode, la jeune comédienne Jo Stafford, qui est prodigieuse, n’ait pas fait carrière. Elle donne corps et chair à un personnage qui hantera longtemps la mémoire du téléspectateur après la vision de cet épisode.

Jo incarne deux jumelles, Ruth et surtout Sheena Penrose. Nous voyons très peu la première,  déjà absente lors d’une surprise party, puisqu’elle trouve une mort abominable durant celle-ci. Ce sont les scènes avec son cadavre où Jo interprète Ruth.

Le téléspectateur n’est pas épargné par les détails les plus sordides. Ruth est morte étouffée par un sac de plastique et dans un placard, au milieu de ses excréments. Ecartant la thèse du suicide suite aux examens du médecin légiste Franks, Wycliffe n’a que l’embarras du choix pour les suspects entre un professeur de physique aux tendances pédophiles, un petit ami de la victime beaucoup plus jeune qu’elle et qui disparaît vite se sachant menacé, et des adolescentes, Beth et Cathy, sous le contrôle d’une autre,  infiniment plus effrayantes que les enfants extra-terrestres du film « Le village des damnés » voire même que Norman Bates, le tueur de « Psychose ».

Quoi de plus glaçant que l’horreur surgie du quotidien, de ce qui est à côté de nous et semble en tout point conforme aux règles de la « normalité ». De tous les meurtriers de la série, celui de cet épisode est le plus réaliste, loin du grand guignol et des effets parfois fantasques du cinéma et de la télévision. Nous l’avons sous nos yeux dès le début, et lorsque l’horreur petit à petit se fait jour, nous comprenons ce qu’éprouvent les parents de la victime, mais aussi les policiers qui ne sont pas insensibles.

Dans cet épisode, Wycliffe a besoin de se réconforter en téléphonant sans cesse à son fils qui a fait une fugue chez un ami, Matthew, laissant sa mère dans l’angoisse en découchant. Chacun des policiers a besoin ici de se rattacher à quelque chose, à la vie, tant ce que révèle l’enquête leur donne la nausée. Lucy téléphone à un homme (on ignore si c’est avec Simon réconcilié), Doug Kersey a besoin « d’un bol d’air frais » alors qu’il a vu des horreurs à la guerre des Malouines, mais rien de tel que dans cette enquête. Même Franks, le légiste, dont le métier doit le rendre aguerri, est bouleversé.

Jo Stafford est à la fois le cadavre anorexique de Ruth, que nous voyons, et sa sœur Sheena assez bien portante, trop à son goût, bien en chair. Sheena n’hésitera pas du haut de ses seize ans à se moquer de Kersey et de son poids, de sa gourmandise, en l’interrogeant avec une impertinence inouïe sur sa vie privée, ricanant en disant « vous savez pourquoi vous n’avez pas de petite amie ».

Bien sûr le prof de physique, Mick Brandon, est abject, mais le rôle est assez facile à jouer pour l’acteur Dominic Guard. Il est même un peu caricatural car trop prévisible. On ne croit pas une seconde que le coupable puisse être le trop jeune petit ami de la victime, Danny Whear. D’ailleurs, le comédien, vraiment juvénible, est assez maladroit, sa carrière ne dépassera pas cet unique apparition. L’assassin, nous l’avons sous nos yeux durant tout l’épisode, et dans toutes les scènes, lorsque les parents sont effondrés. Ces derniers, incarnés par Lesley Clare O’Neill et David Schofield, sont parfaits. Mais également prévisibles.

Depuis l’affaire James Bulger en 1993 (deux enfants de dix ans kidnappant et tuant un autre de deux ans), les britanniques ont découvert que les enfants peuvent être des monstres. Celui de cet épisode est un plus âgé, c’est même déjà, à sa façon, une femme (aux yeux du pédophile Brandon qui danse un slow langoureux avec elle).

Bien sûr, Wycliffe affrontera des individus très dangereux : dans « La danse du Scorpion », un tueur professionnel l’enverra aux portes de la mort et durant sa convalescence, que l’on verra, Lucy et Kersey devront faire sans lui. Son Nemesis le plus redoutable, dans le dernier épisode, « Le piège machiavélique », le mettra dans une situation impossible, le discréditant auprès de sa hiérarchie. L’assassin n’est pas en soi dangereux pour Wycliffe, mais l’on peut vraiment dire que c’est le plus effroyable de la série.

La notion de « monstre » est ici subjective : au premier abord, il n’est pas repoussant, et on peut le taxer de banal. Mais petit à petit, à l’effrontement, l’insolence, aux regards qui en disent long, on comprend et la vérité toute crue est là devant nos yeux.

« Vous êtes marié Doug ? »

« Non »

« Une petite amie ? »

« Non, non »

« Maintenant vous savez pourquoi ».

Cette Lolita, profondément perverse, bien qu’un peu enveloppée par rapport au schéma de l’héroïne de Nabokov, s’adresse au policier par son prénom. Pour elle, il n’y a pas de notions d’adultes et d’enfants. Aucun respect.

L’affrontement Sheena/Wycliffe est le sommet de l’opus. C’est un grand moment de télévision. On a même l’impression que le superintendant, qui en a vu d’autres, voit toutes ses certitudes s’ébranler. Meneuse de bande, avec à sa solde deux camarades de son âge Cathy et Beth, maître chanteuse (envers le petit Danny), arrogante envers les adultes et l’autorité, orientant l’enquête vers un faux coupable (Danny), Sheena Penrose est un monstre cent fois plus effrayant qu’un Norman Bates. Vers le dernier quart de l’épisode, Wycliffe n’a plus de doutes. Et pourtant, la vérité qui l’attend sans fards au bout de son enquête est purement incroyable. Notre héros semble presque avoir trouvé son maître. Jack Shepherd joue à merveille, et son personnage semble comme terrassé lorsqu’il dit à Jimmy Yuill : « Je vais informer les parents que je dois l’arrêter ».

Sheena est la synthèse de deux personnages, l’un réel, l’autre de fiction : Charles Manson pour la manipulation (ici avec Cathy et Beth), et Michael Myers enfant de la saga « Halloween » qui est le mal incarné. Le diable désormais a un visage : le moins que l’on puisse dire est que toute l’équipe de Wycliffe n’est pas prête de s’en remettre. Nous non plus. L’absence de remords dans la scène des aveux, la délectation avec laquelle Sheena décrit son crime abominable, rendent Wycliffe totalement hébété.

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Anecdotes :

  • On sait peu de choses sur la formidable Jo Stafford. Son seul autre rôle est dans le film « Golden burn », de Mark Jenkin, en 2002. Plus de nouvelles depuis.

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7. L’ENFANT DE L’AMOUR
(WILD OATS)

Scénario : Patrick Harkins. Réalisation : Michael Owen Morris.

Résumé :

Lors de fouilles archéologiques concernant les celtes, on découvre le squelette d’un corps vieux de seulement trente ans, sans doute assassiné. Deux hommes ont tenté de déterrer le corps et ont volé le crâne. Agnes Currow, propriétaire de l’endroit,  les a chassés à coups de fusil.

Critique :

Début en fanfare avec Wycliffe transporté en hélicoptère par un pilote le long des falaises, sur fond de musique déjà entendue au générique, histoire de bien enfoncer le clou et de nous marteler ce thème très entraînant. ITV a mis les petits plats dans les grands pour épater le téléspectateur.

Ensuite, c’est l’enquête policière classique qui commence et aboutit à une vérité certes sombre mais une conclusion plus heureuse que dans l’opus précédent. On va faire une étonnante incursion dans le passé et une enquête sur des évènements survenus en 1970. Tilly Rawle, fille de noblesse devenue folle, a fauté avec un soldat noir américain assassiné (c’est lui le squelette) mais ils ont eu un enfant, confié à une famille d’accueil. Il est à présent lui-même père de famille.

La haine de Wycliffe pour les  aristocrates ressurgit très fort dans cet opus, et il va s’acharner à rétablir un héritier dans ses prérogatives et à mettre des nobles sous les verrous pour de longues années. L’intrigue est palpitante, alternant passé et présent, écornant les grandes familles nobles de Cornouailles qui se croient tout permis. Lucy, même en l’absence de son chéri Simon à peine évoqué, brille dans toutes les scènes. Lorsque l’un des complices, le tavernier Jack Choak, l’appelle « ma toute belle », elle lui réplique froidement « Dites plutôt Inspecteur Lane ! ».

C’est encore une fois une immense réussite, le script sans failles permettant à la façon plus tard de « Cold Case », de faire justice sur un crime datant de plusieurs décennies. Le trio Jack Shepherd- Jimmy Yuill- Helen Masters est au sommet de sa forme. Il naviguera parmi les arcanes de la haute aristocratie qui est présentée ici comme totalement décadente, prête à recourir au meurtre, mais trente et quelques années plus tard également à l’incendie et l’intimidation de témoins.

« L’enfant de l’amour » nous laisse une note d’espoir, là où « Les joies de la famille » nous plongeait dans les abîmes de la désespérance du genre humain. Non seulement, c’est bien joué, mais les moyens mis en œuvre sont inhabituels et colossaux pour une série britannique.

On retrouve, très âgée, et pour l’un de ses derniers tournages, l’une des partenaires de Patrick Mc Goohan du « Prisonnier ». Aucune erreur dans la distribution, même si les comédiens ne sont pas très connus, ce qui n’est pas un handicap, Jo Stafford du précédent épisode ne l’est pas et compose une interprétation inoubliable. On reste dans le quatre étoiles, sans égaler le chef d’œuvre.

Dans cet avant-dernier épisode de la saison 2, nous n’avons toujours pas fait la connaissance de la famille de Wycliffe, de sa maison, de l’endroit où il vit, mais l’on comprend que cette série/feuilleton va bientôt nous présenter tout cela.

Une réussite superbe, dotée d’une photographie magnifique.

Anecdotes :

  • Lucy Lane s’est réconciliée avec Simon.

  • Rosalie Crutchley (1920-1997) était la reine dans l’épisode du « Prisonnier » : « Echec et mat ». Elle tient ici le rôle de la fermière Agnes Currow.

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8. POINT DE RUPTURE
(BREAKING POINT)

Scénario : Steve Trafford. Réalisation : Michael Owen Morris.

Résumé :

Une surfeuse, Anne Carter, est retrouvée à moitié morte, dans le coma. On lui a volé sa voiture et ses papiers. Wycliffe comprend qu’elle a été victime de trafiquants d’héroïne.

Critique :

Superbe épisode où il y a tout : de la romance, de l’action, une poursuite en bateau (sur fond de thème musical de Nigel Hess), des trahisons, un sergent macho et ripoux : Rinnick. Quand la production ne sort pas les hélicoptères, ce sont les navires des garde-côtes. On ne lésine pas sur les moyens pour épater le téléspectateur. Le budget semble vraiment confortable, et permet de ne jamais avoir recours à des décors factices et des scènes de studio.

L’intrigue alterne les moments forts comme l’attente devant la comateuse de son éventuel réveil, et les aléas de l’enquête. Pour terminer cette saison 2, Wycliffe pour une fois ne fait aucune allusion à sa famille en leur téléphonant ou les contactant.

Du côté des suspects, l’ex-petit ami s’accuse, victime de troubles de mémoire, mais notre superintendant le pense innocent, penchant davantage pour la piste des trafiquants de drogue qui ont fait chanter la victime, longtemps membre de leur bande. La solution sera donnée par Anne sortant du coma. Après le terrible opus « Les joies de la famille », la production a sans doute voulu nous donner une image plus optimiste de la série.

Les colères de Wycliffe sont mémorables : il ne se fâche pas souvent, mais Shepherd entre vraiment dans la peau du personnage dans ces scènes -là et devient plus vrai que nature comme policier. Il sait aussi se montrer juste et compréhensif quand Lucy vient lui parler, alors que tout l’accuse d’avoir été la source de la fuite à la presse via son amant Simon.

Interprétation irréprochable, avec toutefois un petit côté eau de rose pour la romance d’Avril et Potter que leurs formes rapprochent.

L’atout de l’épisode, ce sont les décors, même si l’on n’a pas envie de connaître la température de la mer qui ne gêne pas les surfeurs en l’occurrence. Wycliffe garde son calme et mène son enquête de main de maître malgré les différentes embûches qui lui sont mises en travers de la route, notamment l’informateur de Simon, mais aussi les faux témoins qui veulent protéger leur trafic.

On évitera d’en dire plus sur l’intrigue pour ne pas dévoiler de spoiler. Avec des épisodes de cette qualité, la série était certaine d’être renouvelée pour une troisième saison.

Anecdotes :

  • Violente dispute entre Lucy et Simon qui publie un article confidentiel sur l’affaire qui nuit à l’enquête de Wycliffe. C’est la deuxième et dernière apparition de l’acteur Dominic Wallis dans le rôle après « Le cheval de Troie ». Simon et Lucy rompent définitivement.

  • Potter flirte avec une infirmière un peu enveloppée comme lui, Avril.

  • Nous apprenons que le prénom du médecin légiste Franks est Cyril.

  • Nous voyons la date de l’épisode (28 juin 1995) qui figure sur l’invitation à l’anniversaire qu’Avril remet à Potter.

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